Il respecte, en Pyrrhus, l'honneur du diadême; HERMIONE. Non, non, il les verra triompher fans obftacle; 1) Il craint les Grecs, il craint l'univers en courroux.] Il y avoit d'abord : » Il craint la Grece, il craint l'univers en courroux ». 2) Mais il fe craint, dit-il, foi-même plus que tous.] Quoique plufieurs bons auteurs emploient fouvent indifféremment foi ou lui, nous penfons, avec M. l'abbé d'Olivet, que c'est une faute, & que l'on dit très-bien foi, quand le fens présente un fens vague & indéfini, comme dans le danger chacun ne craint que pour foi, & que lui eft mieux employé quand le fens eft déterminé. Un cœur noble eft content de ce qu'il trouve en lui. 3) Quoi! fans qu'elle employât une feule priere.] Ce tour eft imité du difcours de Junon dans le premier livre de l'Énéide: Ma mere en fa faveur arma la Grece entiere: Faudra-t-il que j'abandonne mon entreprife? & le chef des Troyens abordera-t-il, malgré moi, en Italie ?... Pallas aura pu embrafer la flotte des Grecs, ou la difperfer, pour punir le feul Ajax qui l'avoit irritée. Et moi, &c. SCENE III. 1) ORESTE, HERMIONE, CLÉONE. OREST E. MADAME, c'en eft fait, & vous êtes servie. Pyrrhus rend à l'autel fon infidelle vie. 1) Racine a fupprimé dans cette fcene les rôles de Céphife & d'Andromaque, qu'Oreste présentoit enchaînée à Hermione; il a bien fenti qu'en faifant commettre à ce prince une cruauté déplacée, la présence d'Andromaque ne pouvoit manquer auffi de diminuer l'intérêt qui résulte du récit qu'il fait, & de l'accueil étrange qu'il reçoit d'Hermione. Cette scene commençoit ainfi dans la premiere édition : » Madame, c'en eft fait. Partons en diligence; » Venez, dans mes vaiffeaux, goûter votre vengeance. » Voyez cette captive; elle peut, mieux que moi, » Vous apprendre qu'Orefte a dégagé fa foi. HERMIONE. » O dieux! c'eft Andromaque ! " ANDRO MAQUE. Oui, c'est cette princeffe, » Deux fois veuve, & deux fois l'esclave de la Grece, » Mais qui, jufques dans Sparte, ira vous braver tous, » Puisqu'elle voit fon fils à couvert de vos coups. » Du crime de Pyrrhus complice manifeste, ກ » J'attends fon châtiment : car je vois bien qu'Orefte, HERMIONE. Il est mort! 1) HERMION E. OREST E. Il expire. Et nos Grecs irrités Ont lavé, dans fon fang, fes infidélités. » Engagé par votre ordre à cet affaffinat, » Vient de ce trifte exploit vous céder tout l'éclat. » Je ne m'attendois pas que le ciel en colere » Pût, fans perdre mon fils, accroître ma mifere, » Et gardât à mes yeux quelque fpectacle encor, » Qui fit couler mes pleurs pour un autre qu'Hector. » Vous avez trouvé feule une fanglante voie, » De suspendre en mon cœur le souvenir de Troye. » Plus barbare aujourd'hui qu'Achille & que fon fils, » Vous me faites pleurer mes plus grands ennemis; » Et ce que n'avoient pu priere ni menace, » Pyrrhus de mon Hector femble avoir pris la place. »Je n'ai que trop, Madame, éprouvé fon courroux; » J'aurois plus de fujet de m'en plaindre que vous. >> Pour derniere rigueur, ton amitié cruelle, » Pyrrhus, à mon époux me rendoit infidelle; » Je t'en allois punir: mais le ciel m'eft témoin » Que je ne pouffois pas ma vengeance fi loin; » Et, fans verser ton fang, ni causer tant d'allarmés, » Il ne t'en eût coûté peut-être que des larmes, &c. » 1) Il est mort!] Cette exclamation fombre & ténébreuse rappelle l'endroit fublime de Boffuet, qui s'écrie, dans fon oraison funebre d'Henriette d'Angleterre : Madame eft morte..... & peint de Tome II. K Je vous l'avois promis; &, quoique mon courage J'ai couru vers le temple, où nos Grecs difperfés Je voue à votre fils une amitié de pere ; A ces mots, qui du peuple attiroient le fuffrage, même une confternation profonde. Dans la premiere édition, Hermione disoit : » Quoi! Pyrrhus eft donc mort? ORESTE. Oui, nos Grecs irrités, &c. » 1) Pyrrhus m'a reconnu: mais, fans changer de face.] Face ne fe dit plus dans le genre noble ; nous ne fçavons pas trop pourquoi. Notre langue n'eft déjà pas affez riche, fans chercher encore à l'appauvrir. |