Il fuffit que mon cœur me condamne tout bas; Et Un autre vous diroit que, Je vous reçus en reine; &, jusques à ce jour, de la renvoyer, il vient lui-même lui annoncer la rupture fes ferments. Il y auroit un peu d'inhumanité dans ce procédé, s'il venoit pour la brayer; mais il vient avouer ses torts avec la candeur & la franchise d'une belle ame. M. de Voltaire prétend que c'eft de la Pertharite de Corneille que Racine a pris l'idée des fcenes de Pyrrhus & d'Andromaque, d'Orefte & d'Hermione. Nouveaux mêlanges philofophiques, III. partie; lettre de M. de Voltaire à M. l'abbé d'Olivet. Mais cet amour l'emporte, &, par un coup funefte, Seigneur, dans cet aveu dépouillé d'artifice, 1) Et mon cœur, foulevant mille fecrets témoins, M'en dira d'autant plus, que vous m'en direz moins.] Ces deux vers, où paroît la prétention au bel-efprit, gâtent un peu cette belle tirade. 2) Eft-il jufte, après tout, qu'un conquérant s'abaiffe, &c.] Racine eft le feul tragique, après Corneille dans Nicomede, qui fe foit fervi de l'ironie; mais il nous femble Non, Non, non, la perfidie a de quoi vous tenter; Et vous ne me cherchez que pour vous en vanter. Quoi! fans que ni ferment ni devoir vous retienne Rechercher une Grecque, amant d'une Troyenne? Me quitter, me reprendre, & retourner encor De la fille d'Hélene à la veuve d'Hector? Couronner tour à tour l'efclave & la princeffe, Immoler Troye aux Grecs, au fils d'Hector la Grece? Tout cela part d'un cœur toujours maître de foi, D'un héros qui n'est point efclave de fa foi. Pour plaire à votre époufe, il vous faudroit peut-être Prodiguer les doux noms de parjure & de traître. Vous veniez de mon front obferver la pâleur, 1) Pour aller, dans fes bras, rire de ma douleur. Pleurante après fon char vous voulez qu'on me voie ; Mais, Seigneur, en un jour, ce feroit trop de joie. qu'on pourroit en tirer un grand parti. Peut-être cette figure n'a-t-elle pas affez de nobleffe, mais c'est au poëte à lui donner de la dignité. Celle-ci eft, felon nous, fanglante, & on ne peut pas plus tragique. 1) Vous veniez de mon front obferver la pâleur, Pour aller, dans fes bras, rire de ma douleur. Pleurante après fon char vous voulez qu'on me voie ; &c.] On lifoit d'abord : » Votre grand cœur, fans doute, attend après mes pleurs, I Et, fans chercher ailleurs des titres empruntés, Aux yeux 1) Du vieux pere d'Hector la valeur abattue, &c.] A ce morceau fublime de poéfie, fi l'on veut encore comparer quelques vers de Pradon qui paroiffent imités de Racine, on croira en voir la parodie: Mais, Seigneur, vous devez en fçavoir davantage : Je parle à qui pourroit m'en donner des leçons. Troade, a&e II. Scene III. 2) Dans des ruiffeaux de fang, Troye ardente plongée'; De votre propre main Polyxene égorgée. ] Quand Hermione a cru que Pyrrhus revenoit à elle, elle ne l'a peint que du côté le plus beau. Elle a dit plus haut: » Sçais-tu quel eft Pyrrhus ? T'es-tu fait raconter » Le nombre des exploits ?... Mais qui les peut compter! » Intrépide, & par-tout fuivi de la victoire, » Charmant, fidelle: enfin rien ne manque à fa gloire ». A préfent ce n'eft plus cela; Hermione vient à bout de réduire tous les exploits de Pyrrhus à deux ou trois lâchetés. PYRRH U S. Madame, je fçais trop à quels excès de rage Je rends graces au ciel, que votre indifférence Je fuivois mon devoir, & vous cédiez au vôtre. HERMION É. Je ne t'ai point aimé, cruel? Qu'ai-je donc fait ? |