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Faits les plus Memorables de la mort de Mgr Anne,
Mézéray, Histoire de
duc de Joyeuse; 1588, in-12. -
France. D'Aubigné, Mém., p. 54. - Sismondi, Histoire
des Français, t. XIX, p. 474-521; t. XX, p. 6.278.

JOYEUSE (François DE), prélat français,
frère puîné du précédent, né le 24 juin 1562,
mort le 27 août 1615. Il fut pourvu à l'âge de
vingt ans de l'évêché de Narbonne, et quelques
mois après il obtint le chapeau de cardinal.
Nommé protecteur de France à la cour de Rome,
il y soutint avec fermeté la dignité de la cou-
ronne contre l'ambassadeur d'Espagne. A son
retour, il passa du siége de Narbonne à celui de
Toulouse, s'entremit pour la réconciliation de
Henri IV avec le pape, et fut un des trois com-
missaires ecclésiastiques qui prononcèrent la
dissolution du premier mariage de ce prince.
Transféré à l'archevêché de Rouen, il présida,
en 1605, l'assemblée générale du clergé ; l'année
suivante il fut chargé par le pape Paul V de
le représenter comme parrain au baptême du
Dauphin. Renvoyé en Italie, il y travailla à ré-
tablir la paix entre la cour de Rome et la répu-
blique de Venise; puis il fut nommé membre du
conseil de régence établi par Henri IV peu de
jours avant sa mort. Le cardinal de Joyeuse
sacra la reine Marie de Médicis à Saint-Denis et
le roi Louis XIII à Reims; il présida les états
généraux de 1614, et mourut doyen des car-
dinaux, à Avignon. [TH. DELBARE, dans l'Enc.
des G. du M.]

Aubery, Histoire du cardinal de Joyeuse, avec plusieurs mémoires, lettres, dépêches, ambassades, relations et autres pièces; París, 1654, in-fol.

JOYEUSE (Henri, duc DE), maréchal de France, frère des deux précédents, né en 1567, mort en 1608. Connu dans sa jeunesse sous le nom de comte du Bouchage, puis sous celui de P. Ange. Il embrassa la profession des armes, et se trouva à plusieurs combats, en Languedoc et en Guienne. Il épousa Catherine de La Valette, sœur du duc d'Épernon; mais, étant devenu venf au bout de quelques années, la douleur qu'il ressentit de cette perte le fit entrer dans un couvent de capucins, où il prononça ses vœux, le 4 décembre 1587. Après la journée des Barricades, les Parisiens, pour engager Henri III à revenir dans la capitale, lui députèrent, à Chartres, une procession, la tête de laquelle marchait le frère Ange de Joyeuse, couronné d'épines, chargé d'une grosse croix et fustigé par deux autres frères : il représentait ainsi la passion de Notre-Seigneur. Mais la mort de Scipion de Joyeuse, qui était devenu le seul héritier de la famille, força le père Ange à quitter le cloître. Par le crédit du cardinal, son frère, il obtint les dispenses nécessaires, et reparut, en 1592, à la tête de l'armée qui ravageait le Languedoc. Il fut l'un des derniers partisans de la Ligue, et traita enfin avec Henri IV, à des conditions avantageuses. Il fut fait maréchal de France, grand-maître de la « Mon garde-robe et gouverneur du Languedoc.

à

cousin, lui dit un jour Henri IV placé à côté de lui à un balcon, ces gens-là qui nous regardent disent de moi que je suis un huguenot converti, et de vous que vous êtes un capucin renié. » Cette plaisanterie et les remontrances de sa mère, femme très-pieuse, le décidèrent à renoncer une seconde fois au monde. On le vit, en 1600, prêcher à Paris. La singularité de ses aventures attirait à ses sermons une foule d'auditeurs, plus touchés de son extérieur mortifié que de son éloquence. Quelques mois après, il alla en Italie, et, ayant voulu faire le voyage de Rome, pieds nus, pendant l'hiver, il fut saisi de la fièvre, et mourut à Rivoli, dans la maison de son ordre, à l'âge de quarante et un ans. C'est de lui que Voltaire a dit:

Vicieux, pénitent, courtisan, solitaire,

Il prit, quitta, reprit la cuirasse et la haire. JOYEUSE (Ant.-Scipion DE), frère des trois précédents, et le plus jeune de tous, se trouva en 1587, par la retraite de Henri dans un couvent, le chef de la famille. Il commanda dans le Languedoc pour la Ligue; mais ayant été battu devant Villemur, il prit la fuite, et se noya dans le Tarn, cn 1592. [Th. D., dans l'Enc. des G. du M., avec additions. ]

Brousse, Vie de Henri, duc de Joyeuse; Paris, 1621, in-8°. Callières, Le Courtisan prédestiné, ou le duc de Joyeuse capucin; Paris, 1661, in-8°.

JOYEUSE-GRANDPRÉ (Jean-Armand, marquis DE), maréchal de France, d'une autre branche de la famille des précédents, né en 1631, mort le 1er juillet 1710. Il fut d'abord connu sous le nom de chevalier de Grandpré. En 1648, il entra comme capitaine dans le régiment de Grandpré, dont son frère était colonel. Il fut mis à la tête de ce régiment en 1650, et fit sous Turenne les campagnes de Flandre de 1654 à 1658. Malgré sa haute naissance, Grandpré, qui portait, depuis 1658, le nom de marquis de Joyeuse, n'eut pas un avancement rapide, et attendit jusqu'en 1674 le grade de lieutenant général. Il servit, en 1678, à l'armée d'Allemagne, sous le maréchal de Créquy, et en 1684, en l'absence du même maréchal, il commanda l'armée qui occupait le Luxembourg. Créé maréchal de France en 1693, il conduisit l'aile gauche de l'armée française à la bataille de Neerwinde. Il commanda en 1694 l'armée d'Allemagne, puis, en 1696 et 1697, l'armée des côtes de Normandie. Il quitta ensuite le service actif, et fut nommé, en 1703, gouverneur général du pays Messin et du Verdunois, et gouverneur particulier de la ville et de la citadelle de Metz. Il conserva ces deux charges Z. jusqu'à sa mort.

Courcelles, Dictionnaire historique des Généraux français.

JOYEUSE (Jean-Baptiste-Xavier), agronome et naturaliste français du dix-huitième siècle, Commissaire de la marine, il fut attaché au détail des vivres de la marine à Toulon, pen. dant les cinq ou six années qui précédèrent sa réforme, en 1762. Dans cette position il s'occupa

des améliorations à apporter à ce service, et obtint du succès sur plusieurs points; par exemple pour garantir le blé des charançons, pour préserver le biscuit des vers, pour conserver l'eau douce et l'empêcher de se corrompre; pour perfectionner la fabrication des salaisons et en assurer la conservation. On a de lui: Histoire des Charençons, avec des moyens pour les détruire et empêcher leurs dégâts dans le bled, qui a remporté le prix proposé par la Société d'Agriculture de Limoges en 1766; Avignon, 1768, in-12; Exposition de la nouvelle Agriculture; 1772, in-8°; — Histoire des vers qui s'engendrent dans le biscuit qu'on embarque sur les vaisseaux, avec les moyens de l'en garantir; 1778, in-8°. J. V.

Barbler, Examen critique et Complément des Dict. Histor. Quérard, La France Littéraire.

JOYEUX de Toulouse, troubadour qui vivait au treizième siècle. Il ne reste de ses écrits qu'une seule pièce; on y trouve quelque naïveté et de la fraicheur, mais elle ne fait que reproduire des idées bien souvent exprimées. G. B. Raynouard, Choix de Poesies des Troubadours, t. V, p. 241. Millot, Histoire des Troubadours, t. III, p. 416. Histoire Litteraire de la France, t. XX, p. 599.

* JOYNER (Guillaume), littérateur anglais, né en avril 1622, à Oxford, mort le 14 septembre 1706, à Ickford. Élevé à l'université d'Oxford, il y fit partie du corps enseignant; mais, en 1644, il donna sa démission, entra au service du comte de Glamorgan, et l'accompagna en Irlande, puis sur le continent. Au milieu des troubles politiques, il embrassa le catholicisme par attachement à la cause royale. Étant revenu en France, il remplit pendant plusieurs années l'emploi de secrétaire auprès de Walter Montague, abbé du couvent de Saint-Martin, près Pontoise. Lors de la découverte de la conspiration des poudres, il fut traduit devant la cour criminelle d'Oxford comme complice des papistes; son innocence ayant été reconnue, il se retira dans le village d'Ickford, où il vécut dans la plus profonde retraite. En 1687, Jacques II le rétablit dans sa chaire; mais il en fut de nouveau privé par la révolution qui, l'année suivante, chassa les Stuarts. On a de lui: The Roman Empress, comédie; Londres, 1670, in-4°; - Some Observation on the Life of cardinal Pole; ibid., 1686, in-8°; Various latin and english Poems; 1690. P. L-Y.

Athena Oxonienses, t. II. — Biographia Dramatica. JOZÉ DE SANTA-THERESA (Le père João), historien portugais, né en 1658, mort après 1733. Bien qu'il ait écrit en italien, il était né à Lisbonne; il s'appelait dans le siècle João de Noronha-Freire. Il voulait se marier avec une de ses cousines, et il était allé à Rome pour solliciter les dispenses nécessaires, lorsque, obéissant à une vocation bien différente, il entra dans un ordre régulier. Il fit imprimer à Rome un livre dont la publication exigea des frais considéra

bles, surtout si l'on prend en considération les gravures nombreuses dont elle est ornée : Istoria delle Guerre del Regno del Brasile, accadute tra corone di Portogallo e la Republica di Olanda; Roma, 1698, 2 vol. in-fol. Ce grand ouvrage, où les noms sont fort altérés, est encore répandu en Italie, et se trouve assez difficilement en France. F. D.

Pinto de Souza, Bibliotheca historia de Portugal.

:

JOZÉ (Antonio ), auteur dramatique portugais, né au commencement du dix-huitième siècle, brûlé vif, en 1745. Il acquit une grande réputation, autant par sa fécondité que par sa verve comique. Il ne faut chercher aucune règle sans ses pièces, mais elles sont d'une rare originalité le dialogue en est vif, piquant, rempli d'observations fines et plaisantes. On lui a pourtant reproché souvent de la trivialité dans le style et une grande négligence dans la marche de ses intrigues. Jozé avait pour protecteur le comte d'Eryceyra, qui le soutint longtemps de son crédit et de sa fortune. Mais ce seigneur étant mort, Jozé tomba sans défense sous la haine de quelques hauts personnages qu'il avait blessés dans ses plaisanteries. Dénoncé au saint-office comme coupable de judaïsme, il ne sortit des prisons de l'inquisition que pour monter sur le bûcher. Parmi les nombreuses pièces de Jozé nous ne citerons que: Don Quixote, Esope, Les Enchantements de Médée.

E. D-s.

Ferdinand Denis, Theatre portugais; dans la Collection choisie des Auteurs étrangers.

JUAN D'AUTRICHE (Don), célèbre général espagnol, fils naturel de Charles-Quint, né à Ratisbonne, le 24 février 1545, mort dans son camp retranché de Namur, le 1er octobre 1578. Sa mère, nommée Barbe Blomberg, appartenait à une bonne famille de Ratisbonne. CharlesQuint prit un tendre intérêt à cet enfant de sa vieillesse. Il le fit élever en secret et avec le plus grand soin par Louis de Quexada, gentilhomme espagnol, qui lui était dévoué, et dont il connaissait la discrétion. Aussi la naissance de Juan resta-t-elle ignorée de tout le monde, et luimême grandit sans connaître le sang qui coulait dans ses veines. Avant de mourir, Charles-Quint apprit à Philippe II qu'il avait un frère, lui ordonna de le traiter comme tel, et par une sollicitude paternelle, à laquelle la politique n'était peut-être pas tout à fait étrangère, il recommanda de le faire entrer dans l'Église et de ne lui conférer que des dignités spirituelles. Deux ans après la mort de l'empereur, Philippe tira Juan de la retraite où il vivait, lui révéla sa naissance, et le fit élever selon son rang avec don Carlos et Alexandre Farnèse. Le jeune homme, qui se distinguait par sa beauté et son aptitude aux exercices du corps, montra bientôt la plus vive répugnance pour la carrière ecclésiastique et un penchant décidé pour celle des armes. Philippe II, touché, malgré son caractère

dur et méfiant, des heureuses dispositions de son frère naturel, ne voulut pas les étouffer sous le froc d'un moine, et, après de longues hésitations, il permit à don Juan de suivre son goût pour la vie militaire. La fidélité et le dévouement de don Juan envers le roi à l'occasion des démêlés de Philippe II avec son fils don Carlos fut une des causes de la condescendance de Philippe pour don Juan. Il l'envoya en 1570 à Grenade, où les Maures s'étaient révoltés, et où don Juan, malgré son extrême jeunesse, montra une énergie et des talents militaires dignes d'un plus vaste théâtre. Ce théâtre ne lui manqua pas. L'année suivante il fut nommé généralissime de la ligue nouvelle formée contre les Turcs, et reçut le commandement des flottes combinées d'Espagne, de Rome et de Venise. Ce fut à la tête de cette armée navale qu'il remporta, en 1571, la fameuse victoire de Lépante. Sous les ordres immédiats de ce général de vingt-six ans se trouvaient les hommes les plus illustres de l'Italie, Antonio Colonna, Barberigo, Sébastien Veniero, André Doria, etc. Avec les 250 vaisseaux qui lui obéissaient, don Juan vint se placer en face de la flotte ottomane, bien plus nombreuse encore, stationnée à l'entrée du golfe de Patras et commandée par Mouezzin-Zadé-Ali, capitan-pacha. Les vaisseaux tures se rangèrent en bataille le long de la côte de Morée, et l'action s'engagea bientôt, terrible et sanglante. La victoire fut longtemps disputée; on se battit avec acharnement à l'abordage, corps à corps. Enfin, la mort du capitan-pacha et la prise du vaisseau amiral assurèrent le triomphe des chrétiens. La flotte turque fut en tièrement détruite, à l'exception de quarante galères sentement, qui parvinrent à échapper au désastre. Les alliés perdirent quinze galères et huit mille hommes. Trente mille Turcs furent tués dans l'action et quinze mille esclaves chrétiens délivrés après la victoire. Pour les puissances chrétiennes, les résultats matériels de cette journée furent peu de chose; mais l'effet moral de la victoire fut prodigieux. Toute la chrétienté et surtout 'Italie la célébra avec un enthousiasme et une pompe sans exemple. Brillante revanche de Nicopolis, la journée de Lépante détruisit le prestige qui entourait le nom des Turcs et l'espèce de fascination dont leurs succès dévastateurs avaient frappé le monde chrétien. Aussi la chrétienté fut-elle unanime dans les louanges qu'elle accorda au jeune don Juan : Fuit homo missus a Deo cui nomen erat Joannes, s'écria-t-on de toutes parts, en lui appliquant un verset de l'Évangile.

Don Juan savoura avec délices les éloges qu'on lui prodiguait, et son ambition grandit avec sa gloire; arrivé si haut à cet âge, il lui sembla possible de s'élever encore davantage. Son but était de conquérir un royaume qui fût à lui, et de se rendre indépendant, sans toutefois se révolter contre son frère. Ce noble cœur se sentait mal à l'aise au milieu des intrigues cau

teleuses de la politique espagnole; mais ce n'était qu'à force de services rendus à l'Espagne et à la chrétienté qu'il voulait mériter et obtenir une couronne. Chargé par son frère de conquérir Tunis, don Juan se rendit maître de cette ville et des ports environnants. L'idée de fonder sur les ruines de Carthage un royaume nouveau, qui pût servir de boulevard à la chrétienté, sourit à son imagination chevaleresque. A sa prière le pape demanda au roi d'Espagne la permission de proclamer don Juan roi de Tunis; mais le naturel ombrageux de Philippe l'emporta cette fois sur son affection pour son frère: il refusa, et peu de temps après Tunis retomba au pouvoir des Turcs. Cette déception fut cruelle pour don Juan, mais ne le découragea point. Son idée fixe, on peut le dire, était de combattre les infidèles, et il fit tout ce qu'il put pour déterminer le conseil d'État d'Espagne à entreprendre une expédition vigoureuse contre les Turcs et à les chasser pour toujours de l'Europe. Ses efforts furent vains. Une des principales tendances de la politique européenne, dit Ranke, a toujours été de sauver les Turcs. » Le conseil ne fit à ses propositions que des réponses évasives. Don Juan vit bientôt qu'il fallait renoncer à ce rêve de sa jeunesse, et le héros de Lépante, sous peine de rester dans l'inaction, dut tourner ses armes contre des chrétiens.

Les Pays-Bas venaient de commencer la lutte héroïque qui les affranchit du joug espagnol. Ni les cruautés et les talents militaires d'un duc d'Albe, ni les artifices et les feintes douceurs d'un Requesens, n'avaient pu réduire les provinces confédérées sous l'autorité de Philippe II, qu'elles ne reconnaissaient plus que pour la forme. Don Juan fut envoyé dans les Pays-Bas pour les pacifier et les faire rentrer dans la foi catholique. En combattant l'hérésie, il lui semblait défendre encore la cause de la chrétienté. Les Belges accueillirent d'abord favorablement le fils de l'empereur dont ils vénéraient la mémoire. Il entra à Luxembourg le 4 novembre 1576, le jour même du pillage d'Anvers par les troupes royales, dont il blåma ouvertement les affreux excès. Cependant il ne put faire son entrée à Bruxelles comme gouverneur qu'après avoir renvoyé du pays les troupes espagnoles, odieuses aux habitants. Ce fut à Bruxelles qu'il publia l'Édit perpétuel, ou traité de paix avec les provinces, que les États de Hollande et de Zélande, fidèles à la cause de Guillaume de Nassau, refusèrent seuls d'accepter. Mais la tâche que don Juan avait entreprise était au-dessus des forces humaines. Il ne pouvait y avoir ni paix ni trêve entre l'inquisition de Philippe II et les Pays-Pas. En vain don Juan s'empara (par une ruse peu honorable, il faut le dire) des forteresses de Namur et de Charleroi; en vain il remporta sur les rebelles la victoire de Gemblours (31 décembre 1577): sa position devint de plus en plus critique, et il ne put se soutenir

en Belgique que grâce aux dissensions des provinces entre elles et aux complications amenées par les prétentions de l'archiduc Matthias. Il était d'ailleurs fort mal secondé par Philippe II, dont la défiance à son égard ne faisait que croître. Cette défiance n'était peut-être pas sans fondement. Don Juan, toujours avide de gloire, avait jeté les yeux sur une autre contrée. Le sort de cette belle reine d'Écosse captive, que ses préjugés catholiques lui montraient reine légitime d'Angleterre, excitait au plus haut degré sa sympathie il conçut le projet de la délivrer et de partager le trône avec elle. Le pape se montra favorable à ce plan. Philippe, d'après les conseils de son ministre Perez, ne s'y opposa pas ouvertement, mais il sut en empêcher l'exécution par des voies détournées. Bientôt don Juan tomba dans une maladie de langueur étrange, qui le conduisit rapidement au tombeau. Sa peau était roussie comme si elle avait subi l'action du feu. On croit généralement qu'il mourut empoisonné. Son corps fut transporté en Espagne et inhumé à l'Escurial.

Don Juan a été l'un des capitaines les plus distingués de son temps. Il était franc, humain, généreux. Son ambition fut exagérée peut-être, mais dirigée sans cesse vers un but louable. Il disait souvent qu'il se tuerait s'il voyait quelqu'un aimer la gloire plus que lui. Don Juan se distinguait par sa beauté physique, par l'élégance de sa toilette et de ses manières.

" Il avait bien aussy, dit Brantôme, bonne et belle grâce parmy les dames, desquelles il estoit fort doucement regardé et bien venu. >> [M. DE SCHOENEFELD, dans l'Enc. des G. du M.]

Laurent van der Hammen, Vie de don Juan (en espagnol); Madrid, 1627, in-40.- Brantome, Vies des Grands Capitaines (étrangers). Bruslé de Montpleinchamp, Vie de don Juan d'Autriche; Amsterdam, 1690, in-12. - Alexis Dumesnil, Vie de don Juan d'Autriche, Paris, 1827, in-8°. — Ranke, Fürsten und Fælker von SüdEuropa im XVI und XV11 Jahrhundert. Reiffenberg, dans le Dict. de la Conversation. Sismondi, Hist. des Français, tome XIX, p. 18, 19, 20, 116, 488-496. JUAN D'AUTRICHE (Don), général espagnol, fils de Philippe IV, roi d'Espagne, et d'une actrice nommée Maria Calderonna, né en 1629, mort en 1679. Remarquable par de brillantes facultés intellectuelles, il fut appelé, en 1647, à prendre le commandement en chef de l'armée espagnole en Italie, et fit rentrer dans le devoir les Napolitains révoltés. De 1652 à 1654, il eut à résister aux Français, qui faisaient de nombreuses irruptions sur le territoire soumis à l'Espagne, et en 1656 il fut chargé de la direction de la guerre soutenue contre eux par les Espagnols dans les Pays-Bas. Heureux d'abord, il vit la fortune abandonner ses drapeaux lorsque Turenne eut été envoyé contre lui, et, le 14 juin 1658, il perdit la bataille des Dunes. Une autre campagne, commencée avec bonheur en Portugal, se termina également, en 1660, par une défaite. Les intrigues du confesseur de la reine eurent pour résultat de le faire exiler à Consuegra; mais ce

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JUAN Y SANTACILIA (D. Jorge), plus connu sous le nom de don Jorge Juan, mathématicien espagnol, né en 1712, à Orihuela (royaume de Valence), mort à Cadix, le 21 juin 1774. Après avoir fait ses premières études dans sa ville natale, il entra, en 1727, dans les gardes marines, et perfectionna son éducation à Carthagène, dans l'école de son corps. Les mathématiques et l'astronomie furent les principaux objets de son application, et il développa dans ces sciences une telle sagacité que professeurs et élèves le surnommèrent Euclide. Il avait à peine vingt-trois ans lorsqu'on lui confia le commandement d'une polacre (1), sur laquelle il osa passer en Amérique. Sur ce frêle bâtiment il visita une longue étendue de littoral, et fit de précieuses observations astronomiques. A son retour, il fut reçu membre de l'Académie royale de Madrid. En 1734, par lettres patentes des 14 et 20 août, le roi d'Espagne Philippe V l'adjoignit à don Antonio de Ulloa, qui lui-même accompagnait l'expédition scientifique composée des académiciens français La Condamine et Bouguer. Leurmission était de déterminer la figure et la grandeur de la Terre Ils choisirent le pays de Quito, situé sous la ligne équinoxiale, pour le théâtre de leurs observations. Ils débarquèrent en 1736, et commencèrent à mesurer les degrés terrestres près de l'équateur. Ce fut à don Jorge Juan que l'on dut de pouvoir calculer la hauteur des montagnes an moyen du baromètre. L'opération terminée, on érigea deux pyramides dans la plaine aux deux extrémités de la base du Yaruqui « pour transmettre, dit don Ulloa, un ouvrage digne d'immortalité ». Le nom de don Jorge Juan y figure avec les qualifications de « chevalier de l'ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem et vice-amiral des armées navales de Sa Majesté Catholique (2) ». En 1753 le commandement des gardes marines et l'inspection générale des chantiers de construction furent confiés à don Juan. Ceux de Carthagène et de Cadix lui durent leur conservation sous Ferdinand VI et leur développement sous Charles III. La marine espagnole était tombée au dernier rang; elle fut l'objet de tous ses soins; il s'appliqua à la relever: tous les bâtiments qu'il fit lancer étaient remarquables par leur solidité et leur vitesse. Don Jorge Juan mourut comblé d'honneurs et membre de la Société Royale de Londres, de l'Académie de Berlin, correspondant de celle de Paris et de presque

(1) Petit bâtiment à une seule voile latine en usage dans la Méditerranée.

(2) On trouvera plus amplement les détails de cette expédition aux articles LA CONDAMINE et ULLOA.

toutes les sociétés savantes. Parmi les nombreux écrits laissés par don Jorge Juan, on cite surtout: Relacion historica del Viage a la America meridional, y Observaciones astronomicas y physicas en los reynos del Perú, etc.; Madrid, 1748, 5 vol. in-4°. Le dernier volume contient les observations astronomiques pour la mesure des degrés sous l'équateur. Cet ouvrage a été traduit en français par Mauvillon; Amsterdam (Paris), 1752, 2 vol. in-4°, fig., sous le titre de Voyage dans l'Amérique méridionale, et réimprimé à Madrid, 1773, avec la Vie de don Jorge Juan;

-

Dissertation historique et géographique' sur le Méridien de démarcation entre les domaines d'Espagne et de Portugal (avec don Antonio d'Ulloa); Madrid, 1749; trad, en français, Paris, 1776, in-12, avec cartes; - Abrégé de l'Art de la Navigation, à l'usage des officiers de marine; Madrid, 1757; Examen maritimo teorico-practico, ou traité de Mécanique appliquée à la construction des vaisseaux; Madrid, 1661 et 1771, 2 vol. in-4°; 1793, en 4 vol., très-augmentés par don Gabriele Ciscar; trad. en anglais, puis en français par L'Évêque, avec notes et additions, Nantes, 1783, 2 vol. in-4°. Alfred DE LACAZE.

De La Condamine, Journal du Voyage fait par ordre du roi à l'équateur, etc.; Paris, 1751, 2 vol. in-4°. — Don Antonio de Ulloa, Noticias Americanas, etc.; Madrid, 1792, in-4o. — Lalande, Bibliographie astronomique, p. 433.

JUAREZ, famille de peintres espagnols. Voy. SUAREZ.

JUARROS (D. Domingos), historien gua. témalien, né au dix-huitième siècle, mort après 1818. Il avait fait des études sérieuses, et il embrassa l'état ecclésiastique; avant lui, on ne possédait aucun renseignement sur cette Amérique centrale, si riche en monuments, dont l'âge et l'origine ne sont pas encore déterminés. Juarros n'avait pu malheureusement se procurer les livres traditionnels que M. l'abbé Brasseur de Bourbourg a fait connaître à l'Europe. Son ouvrage, peu répandu en France, porte le titre suivant : Compendio de la Historia de la Ciudad de Guatemala, que comprehende los preliminares de la dicha historia; Guatimala, 1809-1818, 2 vol. in-8°, en six parties. Ce livre, auquel la critique fait parfois défaut, a été traduit en anglais par M. Bailly, lieutenant de marine, Londres 1825. M. Squier, le meilleur juge en ces sortes de matières, fait remarquer avec raison que Juarros néglige des faits importants pour s'attacher à des récits traditionnels de peu de valeur sur l'histoire naturelle du pays; c'est lui cependant qui a appelé le premier l'attention sur les ruines de Copan. F. D.

Documents particuliers. JUBA ('lóbα;), roi de Numidie, fils d'Hiempsal, mort en 42 avant J.-C. On sait peu de choses sur lui pendant la vie de son père, qui avait été rétabli sur le trône par Pompée; mais dès l'année

63 il est mentionné dans un discours de Cicéron. L'année suivante il se rendit à Rome, pour défendre la cause de son père et la sienne contre un certain Numide nommé Masintha, et il eut à ce sujet une violente altercation avec César, alors préteur. A la mort de Hiempsal, il lui succéda. Son pouvoir s'étendait sur toute la Numidie et sur les tribus gétuliennes de l'intérieur. Lucain, avec son exagération ordinaire, le représente comme régnant sur toute l'Afrique depuis le temple d'Ammon jusqu'aux colonnes d'Hercule. Il prit parti pour Pompée contre César, dans la guerre civile, tant par reconnaissance de ce que Pompée avait augmenté les États de son père, que par haine contre Curion, lieutenant de César en Afrique, qui, étant tribun, avait proposé au peuple romain une loi pour confisquer le royaume de Juba. Curion trouva en lui un ennemi trèsredoutable. Juba vint en 49 avec de grandes forces au secours d'Utique, où commandait Varus, mais dont les habitants étaient favorables à César. Curion s'étant avancé avec trop de confiance, fut battu complétement, et se fit tuer dans la mêlée. Juba se montra fort cruel envers les prisonniers. Le petit nombre d'hommes qui échappèrent à cette déroute furent rembarqués pour la Sicile. Quelques années après, César en personne ayant passé en Afrique, Juba marcha contre lui; mais il fut obligé de retourner sur ses pas pour défendre les frontières de son royaume, contre un ancien ami de Catilina qui commandait une troupe d'aventuriers, et que, sans doute, César avait poussé à cette agression. Quoi qu'il en soit, César put attendre des renforts et consolider sa position en Afrique. Cependant Juba revint au secours de Scipion avec des troupes considérables; mais après plusieurs combats, où l'avantage fut disputé vivement avec des résultats divers, une bataille décisive fut livrée près de Thapsus. Scipion et Juba furent vaincus. Le roi de Numidie s'enfuit alors,et parvint, en se cachant, à regagner Zama, où il avait réuni tout ce qu'il avait de plus précieux; mais les habitants lui en refusèrent l'entrée, sachant bien qu'il les ferait tous périr jusqu'au dernier plutôt que de rendre la place à César. Ni menaces ni prières n'ayant pu ébranler les citoyens de Zama, Juba se retira dans sa maison de campagne avec quelques cavaliers, parmi lesquels était Petreius, lieutenant de Pompée; là, ces deux chefs résolurent de se combattre pour se tuer mutuellement, et Juba, après avoir abattu Petreius, se fit achever par un esclave.

Dans les différents récits qui nous sont parvenus sur la vie de Juba, il n'est rien qui nous donne une haute idée de son talent et de son caractère, rien qui le place au-dessus des barbares ordinaires; mais il ne faut pas oublier que ces récits viennent de ses ennemis. Si le parti de Pompée avait triomphé, les historiens romains nous donneraient sans doute une plus haute idée du roi de Numidie. [DE GOLBERY,

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