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mée; non par l'estime que nous en faisons, mais parce que nous avons été obligez d'en entreprendre la critique, à cause de l'autorité qu'elle s'est acquise, par l'usage que quelques modernes, entr'autres le celebre Baluze et la Faille, annaliste de Toulouse, en ont fait le premier en a rapporté divers fragmens, tant dans ses notes sur les Capitulaires, que sur les vies des papes d'Avignon, et il s'est appuyé sur son témoignage. L'autre a traduit en François la plus grande partie de cette chronique, et l'a inserée dans son ouvrage, en sorte qu'il en fait un des principaux ornemens, et qu'il convient en avoir tiré la plupart des faits qui se lisent dans la premiere partie de ses Annales. Mais ces Auteurs ne l'ont pas examinée de près, et ils ont ajoûté foi trop légèrement à Bardin, qui a inventé, ou tiré de son chef, la plupart des choses qu'il rapporte, comme on l'a fait voir en divers endroits1 de ce volume. Ainsi on ne peut faire aucun fonds sur cette chronique, où il n'y a que quelques actes, qui y ont été transcrits qui soient à l'abri de tout reproche. On peut appuyer ce jugement sur les réflexions suivantes :

» 1o. On ne connoît aucun ancien manuscrit de la chronique de Bardin, et tous ceux qui nous restent n'ont pas cent ans. Tels sont, entr'autres, ceux de M. le Mazuyer, procureur general au parlement de Toulouse, et de M. du Cange, qui nous les ont cedés, et celui de la bibliothèque Colbert, aujourd'hui de la bibliothèque du Roi, cotté no. 1531. La Faille convient lui-même que l'original de cette chronique s'est perdu; « à moins, ajoûte-t-il qu'on ne le trouve dans la bibliotheque de M. Seguier; car il me semble avoir oui dire à feu » M. de Masnau, conseiller au parlement de Toulouse, homme éga» lement sçavant et curieux, que c'étoit à ce chancelier qu'il en fit » présent, après en avoir retenu une copie : c'est de cette copie-là » qu'ont été extraites toutes celles que j'apprens être entre les mains » de quelques particuliers, et celle-là même qui est dans la grande » et riche bibliothèque de M. Colbert. Je me suis servi de la copie de » M. de Masnau comme la plus exacte de toutes, pour avoir été cor

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1 V. Sup. NOTE Xxx. p. 594, 393, 396, 597, 598 et 399.

2 Préf. de ses Annales.

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rigée par lui-même, des fautes que le copiste y avoit faites c'est » M. de Senaux, conseiller au parlement de Toulouse, qui a eu la » bonté de me la communiquer; ainsi on peut y ajoûter la mème foi » qu'à l'original, etc. » Tout cela a un air de mystere qui n'annonce rien de favorable à la chronique de Bardin. En effet, nous pouvons attester qu'on ne trouve ni l'original ni la copie de cette chronique parmi les manuscrits de feu M. le chancelier Seguier, dont nous sommes en possession à l'abbaye de S. Germain des Prez, et qui nous ont été leguez par feu M. le duc de Coaslin évêque de Metz. L'original n'y étoit pas non plus en 1686, dans le tems que la Faille écrivoit la préface de ses Annales; car cette chronique n'est pas marquée dans le Catalogue des manuscrits de la bibliotheque de défunt monseigneur le chancelier Seguier, imprimé cette année à Paris chez le Cointe.

» 2°. Nicolas Bertrandi ni Catel n'ont eu aucune connoissance de la chronique de Bardin. Si dans le tems que ce dernier historien écrivoit ses Mémoires de Languedoc, et son Histoire des comtes de Toulouse, l'original de cette chronique eût existé entre les mains d'un conseiller au parlement de Toulouse, son confrere, est-il vraisemblable qu'il eût échappé à ses laborieuses recherches, et que Catel l'eût négligé pour illustrer l'histoire de sa patrie ?

» 5°. La Faille convient que la chronique de Bardin est écrite en un latin assez simple, mais beaucoup plus pur que le latin ordinaire des écrivains de ce tems-là.

» 4°. Si Bardin eût écrit au milieu du xv. siécle, comme on le suppose, aurait-il ignoré le vrai nom du comte d'Armagnac, qui mourut de ses blessures, en Italie, devant Alexandrie de la Paille, et l'époque de sa mort? car il assure que François de Goyrans chevalier Toulousain, son cousin, mourut avec ce comte, qu'il appelle Jacques : mais il n'y a eu aucun comte d'Armagnac de ce nom : et celui qui fut tué devant Alexandrie en 1591. et non en 1585. comme le dit Bardin, se nommoit Jean.

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1 Préf. ibid.

2 Preuves, p. 589.

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» Nous croyons pouvoir conclure de ces observations, que la chronique de Bardin est l'ouvrage de quelque imposteur, qui, ou l'aura fabriquée entierement, ou du moins qui l'aura extrêmement interpolée. Nous convenons cependant qu'il y avoit un Guillaume Bardin-conseiller-clerc au parlement de Toulouse en 1444. il en est fait mention dans les registres du même parlement de cette année. Ainsi la Faille se trompe, lorsqu'il avance dans la préface du premier volume de ses Annales de Toulouse, que Pierre Bardin, pere de Guillaume, fut fait conseiller au parlement de Toulouse, lorsque ce parlement fut rétabli par le roi Charles VII. en 1444. Nous trouvons d'ailleurs, « que Guillaume Bardin, docteur en l'un et l'autre droit » dans l'université de Toulouse, fut admis à professer le droit dans » celle d'Orleans en 1442. » et Guillaume de Montjoye évêque de Beziers, dans son testament du 30. de Mars de l'an 1451. (1452.) nomme parmi ses executeurs testamentaires, Guillaume Bardin, professeur en l'un et l'autre droit, conseiller du roi dans la cour du parlement de Toulouse. Nous trouvons encore un Guillaume Bardin qui est le second des conseillers-clercs au parlement de Toulouse, dans le département des gages de cette cour, arrêté le 10. de Janvier de l'an 1492. (1495.) Si c'est le même que celui dont nous venons de parler, il sera parvenu à un âge extrêmement avancé.

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» Nous mettons à la tête de ce volume, comme nous l'avons promis, une carte de la Languedoc, divisée par sénéchaussées et par vigueries: mais le peu de grandeur de l'échelle ne nous a pas permis de la rendre aussi détaillée et aussi exacte que nous l'aurions souhaité. Nous avons encore fait graver divers monumens pour l'ornement de ce volume. Nous devons le plan et l'élevation de l'église métropolitaine de Narbonne, avec le tombeau du roi Philippe le Hardi qu'on voit dans la même église, aux soins de feu M. de BEAUVAU archevêque de cette ville, dont la mémoire nous sera toûjours précieuse, tant par les bontés et l'amitié singuliere dont il nous honoroit, que par la protection qu'il n'a cessé d'accorder à cet ouvrage, et

4 V. tom. VI. Preuves.

2 Mss. de Baluze. n. 567. Bibl. du Roy,

Baluze, Portefeuil. de Lang.

que nous retrouvons dans M. de CRILLON son illustre successeur. Nous sommes aussi redevables du plan, de l'élevation et de la coupe de la belle église cathedrale de sainte Cecile d'Albi à M. DE LA CROIX DE CASTRIES, archevêque d'Albi, prélat également cher à son peuple et à toute la province par ses excellentes qualités, mais sur-tout à son église, qu'il a ornée de l'orgue magnifique dont nous ajoûtons le dessin.

» Il est bien difficile, dans un ouvrage aussi étendu que le nôtre, qu'il ne se trouve des choses à ajoûter ou à corriger; et nous avoüerons de bonne foy les fautes qui peuvent nous être échappées. Nous discuterons alors, entr'autres, les prétenduës contradictions, que le nouvel auteur de la vie de S. Dominique croit avoir apperçues dans quelques endroits de notre troisieme volume. Nous esperons satisfaire entierement à toutes ses difficultez, quoique l'auteur d'un ouvrage périodique, intitulé Réflexions sur les ouvrages de littérature, qui ne nous est connu, que par l'estime que sa sagacité et l'équité de ses jugemens lui ont acquise dans le Public, l'ait dejà fait en partie. L'auteur de la vie de S. Dominique nous accuse en particulier, d'être toûjours décidez. Nous conviendrons aisément que nous le sommes toutes les fois que nous avons cru avoir des raisons légitimes de l'être. Mais ne pourroit-on pas lui faire un pareil reproche à plus juste titre, et lui demander s'il ne précipite jamais son jugement, et s'il ne lui arrive pas quelquefois de donner des conjectures hazardées pour des vérités certaines? Un seul exemple suffira pour le présent. Le nouvel écrivain confondant l'ordre de la Milice de J. C. avec le Tiers-ordre de S. Dominique, veut persuader que ce n'est qu'une même institution, dont on doit faire honneur à ce Saint il le décide sur quelques mots équivoques d'un bref du pape Gregoire IX. de l'an 1227. Apparemment qu'il n'aura pas voulu voir dans le troisieme voulume de l'histoire de Languedoc, les preuves bien claires de la veritable origine de cet ordre militaire. S'il en avoit

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pris la peine, il y aurait trouvé que ce ne fut pas S. Dominique,

1 Cette partie du texte de l'édition in-folio, correspond au cinquième volume de celle-ci. 2 Tom. x. p. 11. et seq.

3 Liv. 1. 1. ch. 17.

Tom. v, de cette édition.

5 Pag. 294. Preuv. 608.

qui étoit alors en Italie, mais le cardinal Conrard évêque de Porto, legat du S. Siege, qui l'institua dans le Languedoc en 1220. Il s'est encore élevé d'autres critiques contre notre troisieme volume1; mais comme leurs objections méritent plus d'attention, nous ne renvoyerons pas plus loin à les examiner.

» Les Journalistes de Trévoux après avoir gardé un profond silence sur les deux premiers volumes de cette histoire, ont jugé2 enfin à propos d'extraire quelques endroits du troisieme, sur l'affaire des Albigeois, pour les mettre en parallelle avec ce qu'a publié sur le même sujet le P. Fontenay, dans le dixieme tome de l'Histoire de l'Eglise Gallicane. Ils ont cru devoir faire ce parallelle, « à cause, disent-ils, que le P. Fontenay et nous, avons pris des routes diffé>> rentes pour parvenir à la vérité des faits, et que nous n'avons pas >> eu la même confiance aux Auteurs qui pouvoient nous servir de guides. » C'est-à-dire, à proprement parler, que c'est l'apologie du P. Fontenay qu'ils ont entreprise, parce que sa narration ne se trouve pas conforme à la nôtre. C'est donc à l'extrait du dixieme volume de l'histoire de l'Eglise Gallicane, que nous sommes redevables de l'extrait du troisieme volume de l'histoire de Languedoc.

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» Le P. Fontenay, ajoûtent-ils, sans rien dire des Auteurs qu'il a suivis, paroît s'être étudié à se conformer au gros des Ecrivains >> Ecclesiastiques et des Historiens de France; et M. l'abbé Fleuri » en avoit usé à-peu-près de même avant lui. C'est une tradition de » cinq à six cens ans, qui n'avoit encore été attaquée que par ceux qui ont vu leur cause trop unie avec celle des Albigeois, pour ne » se pas croire obligez de parler un langage tout différent; mais depuis plusieurs années quelques Catholiques même ont changé de sys» tème : à force d'entendre certains critiques, et sur-tout les Protes» tans, crier contre les croisades, tourner en ridicule la simplicité » de nos Peres, et la crédulité des Historiens contemporains de ces guerres saintes, on a appréhendé, si on parloit comme eux, d'être enveloppé dans la même censure; on a cru devoir prendre un parti » mitoyen, affecter un grand désinteressement et une exacte impar

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1 En partic, cinquième de cette édition.

2 Journal de Trév. Août 1740.

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