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Ce jugement ne peut avoir été fondé fur la rigueur des Placards des années 1540 & 1623; puifque ces mêmes Placards ordonnent aux Juges de fuppléer le confentement qu'un Pere refufe fans raifon il faut donc de néceffité qu'ils aient été perfuadés & convaincus, que les Parties n'étoient point fortables.

Et comme leur Sentence eft paffée en force de chofe jugée, qui ne peut être anéantie, five bene five malè judicatum fuerit, non pas même par un referit Impérial. L. 16. junctâ L. 20. de Tranfactionib. nous devons fuivant les regles tenir pour véritable & certain, que l'oppofition de l'Amman de la ville d'Anvers de Witte au mariage de fa Fille a été fondée fur des raifons juftes & légitimes; & par conféquent que ce n'eft pas fans fujet, qu'il s'eft reffenti de l'outrage qu'elle lui fit fept femaines après le jugement rendu, lorfque le mariage fut folemnifé. Auquel cas le droit même de la nature, indépendamment de tout Placard, permet à un Pere, en punition d'une défobéiffance fi formelle de chaffer cette Fille de fa maison & famille, & de l'exclure de fa fucceffion; comme il a été folidement établi par le BARON DE PUFFENDORFF liv. 6. chap. 2. §. 14.

Ce qui fait, que nous ne pouvons concevoir, avec quelle juftice on pourroit relever cette Fille des peines reprises dans les Placards des années 1540 & 1623, pour lui faire avoir fa légitime franche & libre, dans la fuppofition où elle eft que fon Pere l'en a privée par fon teftament du 17 Décembre 1716, depuis confirmé par fon décès, arrivé le 7 Août 1719: puifque ces Placards, au fait de l'exhérédation en question, & par rapport aux circonftances du cas, n'empor

tent aucune nouvelle difpofition; mais ne font que renouveller une loi naturelle, non écrite, mais gravée dans le cœur de tous les hommes; à laquelle on porteroit une atteinte trop fenfible, fi en renverfant le teftament d'un Pere, pour s'être fervi de la faculté & du pouvoir que la nature lui avoit donné, l'on ôtoit à fes autres enfans un droit acquis en vertu du même testament.

A quoi ne peut obfter, que le mariage en queftion ayant été folemnifé fous les aufpices d'un Miniftre Plénipotentiaire, le dit Lieutenant-Colonel auroit été de bonne foi dans la penfée, que cette protection renfermoit de la part du Gouvernement un fupplément du confentement paternel, qui le difpenfoit de la rigueur des Placards des années 1540 & 1623.

Car nous avons déja prouvé, que le teftament, qu'on tâche de débattre, doit fubfifter en tous fès points, abstraction faite des dits Placards; outre que le dit Lieutenant-Colonel a fu, ou dú favoir, qu'il n'étoit point dans le pouvoir d'un Miniftre Plénipotentiaire de fuppléer fans connoiffance de caufe un confentement, que le Pere avoit refufé de donner pour des raisons justifiées & trouvées bonnes en jugement, porté avec pleine connoiffance de caufe.

Cette raison eft fi preffante, qu'elle a mu le Confeil d'Etat, confulté par feu le Marquis de Prié fur la Lettre du Comte de Königsegg, de faire connoître par fa Refcription, que la juftice ne permettant point, qu'on eût des égards au caractere de ce Miniftre, ni à fa Lettre, écrite le 22 Juin 1719 en faveur du Lieutenant-Colonel Collin, il devoit être éconduit de fa demande : & comme cette Refcription, ou Confulte, eft conforme à l'avis du Confeil de Brabant, demandé

par le Confeil d'Etat avant que de faire fa Confulte, nous nous trouvons obligés de nous y conformer pareillement. N'importe que la Mere ait confenti au mariage de fa Fille; puifqu'il eft des principes, qu'un Enfant dans une affaire de cette importance fe doit plutôt tenir au jugement du Pere que de la Mere, qui eft ellemême fous la puiflance & tutele de fon Mari. Diffentit ANSELMO in fuo Tribon. Belg. cap. 54. S. 22. & 36. fed malè; & fon fentiment eft contraire à nos moeurs, comme le Confeil Privé & celui de Brabant l'ont déclaré depuis.

Il eft vrai, que le dit Lieutenant-Colonel pofe, que l'Amman de Witte, fon Beau-pere, dans fon lit mortel fe feroit réconcilié avec fa Fille, en lui donnant fa bénédiction; mais au cas qu'il puiffe prouver cette circonftance favorable, rien ne l'empêche de s'en prévaloir, pour débattre en jugement le teftament du dit Amman, fi fa Fille n'a point fa légitime franche & libre: mais il s'en prévaudroit en vain, quia benedictione paterna ceffavit indignatio, pœna exheredationis remanfit.

Cette Confulte fut dreffée au commencement du mois d'Avril 1726 par le plus jeune des deux Régens nationaux; mais il parut au plus ancien, que ce projet n'étoit point affez conforme au ftyle, dont le Confeil Suprême des Pays-Bas à Vienne eft accoutumé de fe fervir ce qui le détermina à coucher par écrit une autre Confulte, qui fut approuvée par fon Collegue; à caufe qu'elle convenoit en fubftance avec celle qu'il avoit projetée.

Le Baron de Pentenrieder ayant peu de jours après par ordres de Sa Sacrée Majefté examiné cette Confulte, & les raifons contraires du Comte

de Baillet,

de Baillet, s'eft entiérement conformé au fentiment des Régens nationaux.

cats,

Cependant le Lieutenant-Colonel, toujours attentif à fes intérêts fans fe rebuter fit en forte qu'il obtint deux avis favorables, l'un de plufieurs Docteurs en Théologie & en Droit de Louvain, & l'autre d'un grand nombre d'Avo& s'étant acquis par ce moyen, & par la faveur tant du Cardinal-Archevêque de Malines que du Comte de Königsegg, la haute protection de l'Archiducheffe-Gouvernante; cette affaire fut de nouveau mife fur le tapis au Confeil Suprême, dont deux furent de fentiment qu'il. convenoit que Sa Majefté fit examiner ces deux avis par Son Confeil Privé, ouis ceux du Confeil de Brabant, à l'effet de la confulter, fi, fuivant en tout l'équité, il y a lieu de dif penfer le dit Collin & de Witte fa Femme de la rigueur des Placards. A quoi Sa Majefté s'eft conformée par Lettres écrites à la Séréniffime Archiducheffe le 15 Janvier 1729, qui y a répondu le 6 Janvier 1730, en envoyant la Confulte du Confeil Privé, lequel, oui JeanGuillaume de Witte, Ecuyer, Frere de la Dame Collin, & vu l'avis du Confeil de Brabant rendu le 16 Juillet 1729, avec un avis féparé du Fiscal du même Confeil, a rapporté dans fa dite Confulte du 19 Décembre 1729, que le Confeil de Brabant étoit d'avis, qu'en fuivant en tout l'équité, on ne pouvoit accorder la difpenfe en queftion, & que le Fifcal avoit foutenu au contraire, qu'elle pouvoit être accordée.

Sur quoi ils furent partagés : trois Miniftres du Confeil Privé étant d'un fentiment conforme à l'avis du Confeil de Brabant, & deux d'un fentiment oppofé, & conforme à celui du Fiscal, dont Tome II.

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la conduite fut défapprouvée, & fon fentiment rejeté par Confulte du Confeil Suprême du 28 Février 1730, ponobftant la dite relation de Son Alteffe du 6 de Janvier 1730: à laquelle Sa Majefté s'eft enfin conformée par Son Décret du 23 de Février 1732, après la mort de la Dame Collin, pour s'être mariée fous les aufpices du Comte de Königsegg.

Reffort du Grand Confeil, & touchant les Terres franches enclavées en Hainaut. Voyez l'avis du Grand Confeil du 20 Mars 1715, 28 Mai 1721, & 10 Juin 1722 des Confeillers Fiscaux.

Notez que l'argument pris du chef-lieu de

Sens de Valenciennes rejaillit contre le Confeil de Hainaut, à caufe que la ville même de Valenciennes n'eft pas du reffort du dit Confeil; comme fe voit par le décrétement des Coutumes de cette ville du 19 Décembre 1619, au commencement & vers la fin, où il n'eft fait mention que du Grand Confeil, & nullement du Confeil de Hainaut: de forte qu'il ne pourroit pas même s'attribuer aucune jurifdiction fur les villages de Hainaut, allant au Chef de Sens à Valenciennes, fi l'Empereur Charles V. ne lui avoit octroyé cette grace, par chartres du 15 Décembre 1515, nommé le privilege juré, dont parlent les Annales de Hainaut par VINCHANT pag. 412. Et puifqu'il y eft énoncé en termes exprès, que l'on fuivra quant aux Terres de débat, comme Flobecque, Leffines, & autres, le train d'ancienneté, accoutumé, jufques à ce

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