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trouve un second chant, écrit quelque temps après; mais il est bien inférieur au premier. Edwin, en errant dans le désert, entend un jour une voix grave qui s'élève du fond d'une vallée : c'est celle d'un vieux solitaire qui, après avoir connu les illusions du monde, s'est enseveli dans cette retraite, pour y recueillir son âme et chanter les merveilles du Créateur. Cet hermite instruit le jeune minstrel et lui révèle le secret de son propre génie. On voit combien cette idée étoit heureuse; mais l'exécution n'a pas répondu au premier dessein de l'auteur : le solitaire parle trop long-temps, et dit des choses trop communes sur les grandeurs et les misères de la vie. Toutefois on trouve encore dans ce second chant quelques passages qui rappellent le charme et le talent du premier. Les dernières strophes en sont consacrées au souvenir d'un ami que le poëte venoit de perdre. Il paroît que Beattie étoit destiné à verser souvent des pleurs. La mort de son fils unique l'a profondément affecté, et l'a enlevé totalement aux Muses. Il vit encore sur les rochers de Morven ; mais ces rochers n'inspirent plus ses chants : comme Ossian qui a perdu son Oscar, il a suspendu sa harpe aux branches d'un chêne. On dit que son fils annonçoit un grand talent pour la

poésie; peut-être étoit-il ce jeune minstrel qu'un père sensible avoit peint, et dont il ne voit plus les pas sur le sommet de la montagne 1.

1 Voyez la note A à la fin du volume.

ALEX. MACKENZIE.

Fuillet 1801.

L faut peut-être chercher dans l'inconstance et les dégoûts du cœur humain,

le motif de l'intérêt général qu'inspire la lecture des Voyages. Fatigués de la société où nous vivons, et des chagrins qui nous environnent, nous aimons à nous égarer en pensée dans

des

pays lointains et chez des peuples inconnus. Si les hommes que l'on nous peint sont plus heureux que nous, leur bonheur nous délasse; s'ils sont plus infortunés, leurs maux nous consolent.

Mais l'intérêt attaché au récit des voyages diminue chaque jour, à mesure que le nombre des voyageurs augmente; l'esprit philosophique a fait cesser les merveilles du désert :

Les bois désenchantés ont perdu leurs miracles! 1

Quand les premiers François qui descendirent sur les rivages du Canada, parlent de lacs semblables à des mers, de cataractes qui tombent du ciel, de forêts dont on ne peut sonder la profondeur, l'esprit est bien plus fortement ému, que lorsqu'un marchand anglois, ou un savant moderne, vous apprend qu'il a pénétré jusqu'à l'Océan Pacifique, et que la chute de Niagara n'a que cent quarante-quatre pieds de hau

teur.

Ce que nous gagnons en connoissance, nous le perdons en sentiment. Les vérités géométriques ont tué certaines vérités de l'imagination bien plus importantes à la morale qu'on ne pense. Quels étoient les premiers voyageurs dans la belle antiquité? C'étoient les législateurs, les poëtes et les héros; c'étoient Jacob, Lycurgue, Pythagore, Homère, Hercule, Alexandre: dies peregrinationis! Alors tout étoit prodige,

1 Fontanes.

2 Genèse.

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