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tium, les Gaulois disposèrent encore du sceptre du monde, puisqu'ils décidèrent la victoire en se rangeant sous les drapeaux d'Auguste.

C'est ainsi que le destin des royaumes paroît attaché dans chaque siècle au sol de la Gaule, comme à une terre fatale, et marquée d'un sceau mystérieux. Tous les peuples semblent avoir ouï successivement cette voix qui annonça l'arrivée de Brennus à Rome, et qui disoit à Céditius au milieu de la nuit : « Céditius, va dire aux tri>> buns que les Gaulois seront demain ici. »

Les Mémoires de Louis XIV augmenteront sa renommée : ils ne dévoilent aucune bassesse, ils ne révèlent aucun de ces honteux secrets que le cœur humain cache trop souvent dans ses abîmes. Vu de plus près et dans l'intimité de la vie, Louis XIV ne cesse point d'être Louis le Grand; on est charmé qu'un si beau buste n'ait point une téte vide, et que l'âme réponde à la noblesse des dehors. « C'est un prince, disoit Boileau, qui ne parle jamais sans avoir pensé. Il construit ad>> mirablement tout ce qu'il dit; ses moindres reparties sentent le souverain ; et quand il est >> dans son domestique, il semble recevoir la loi plutôt que de la donner. » Éloge que les Mémoires confirment de tous points. On connoît cette foule de mots où brille la magnanimité de Louis XIV. Le prince de Condé lui disoit un jour

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qu'on avoit trouvé une image d'Henri IV attachée à un poteau et traversée d'un poignard avec une inscription odieuse pour le prince régnant. « Je » m'en console, dit le monarque: on n'en a pas » fait autant contre les rois fainéants. » On prétend que dans les derniers temps de sa vie il trouva sous son couvert, en se mettant à table, un billet à peu près conçu ainsi : « Le roi est de» bout à la Place des Victoires, à cheval à la Place » Vendôme; quand sera-t-il couché à Saint-De» nis! » Louis prit le billet, et, le jetant pardessus sa tête, répondit à haute voix : «< Quand » il plaira à Dieu. » Prêt à rendre le dernier soupir, il fit appeler les seigneurs de sa cour:

Messieurs, dit-il, je vous demande pardon des » mauvais exemples que je vous ai donnės; je >> vous fais mes remercîments de l'amitié que >> vous m'avez toujours marquée. Je vous de» mande pour mon petit-fils la même fidélité.... » Je sens que je m'attendris et que je vous atten» dris aussi. Adieu, messieurs, souvenez-vous quelquefois de moi. » Il dit à son médecin qui pleuroit : «< M'avez-vous cru immortel? » Mad. de La Fayette a écrit de ce prince qu'on le trouvera sans doute << un des plus grands rois, et des plus » honnétes hommes de son royaume. » Cela n'empêche pas qu'à ses funérailles le peuple ne chantat des Te Deum, et n'insultât au cercueil :

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numquid cognoscentur mirabilia tua, et justitia tua in terrá oblivionis?

Que nous reste-t-il à ajouter à la louange d'un prince qui a civilisé l'Europe, et jeté tant d'éclat sur la France? Rien que ce passage tiré de ses Mémoires :

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Vous devez savoir, avant toutes choses, mon fils, » que nous ne saurions montrer trop de respect pour Ce» lui qui nous fait respecter de tant de milliers d'hommes. » La première partie de la politique est celle qui nous enseigne à le bien servir La soumission que nous avons » pour lui est la plus belle leçon que nous puissions don>> ner de celle qui nous est due, et nous péchons contre » la prudence, aussi-bien que contre la justice, quand >> nous manquons de vénération pour Celui dont nous ne » sommes que les Lieutenants.

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Quand nous aurons armé tous nos sujets pour la dé» fense de sa gloire, quand nous aurons relevé ses autels abattus, quand nous aurons fait connoître son nom » aux climats les plus reculés de la terre, nous n'aurons fait que l'une des parties de notre devoir, et sans doute » nous n'aurons pas fait celle qu'il désire le plus de nous » si nous ne nous sommes soumis nous-mêmes au joug » de ses commandements. Les actions de bruit et d'éclat >> ne sont pas toujours celles qui le touchent davantage, >> et ce qui se passe dans le secret de notre cœur est sou>> vent ce qu'il observe avec plus d'attention.

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>> Il est infiniment jaloux de sa gloire, mais il sait mieux que nous discerner en quoi elle consiste. Il ne nous a » peut-être fait si grands qu'afin que nos respects l'hono» rassent davantage; et si nous manquons de remplir en

>> cela ses desseins, peut-être qu'il nous laissera tomber » dans la poussière de laquelle il nous a tirés.

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» Plusieurs de mes ancêtres, qui ont voulu donner à >> leurs successeurs de pareils enseignements, ont attendu » pour cela l'extrémité de leur vie ; mais je ne suivrai pas » en ce point leur exemple. Je vous en parle dès cette » heure, mon fils, et vous en parlerai toutes les fois que j'en trouverai l'occasion. Car, outre que j'estime qu'on » ne peut de trop bonne heure imprimer dans les jeunes esprits des pensées de cette conséquence, je crois qu'il » se peut faire que ce qu'ont dit ces princes dans un état » si pressant ait quelquefois été attribué à la vue du pé»ril où ils se trouvoient; au lieu que, vous en parlant » maintenant, je suis assuré que la vigueur de mon âge, » la liberté de mon esprit, et l'état florissant de mes affaires, ne vous pourront jamais laisser pour ce discours » aucun soupçon de foiblesse ou de déguisement.

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C'étoit en 1661 que Louis XIV donnoit cette sublime leçon à son fils.

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L

Mai 1806.

A Défense du Génie du Christianisme est jusqu'à présent la seule réponse que j'aie faite à toutes les critiques dont on

a bien voulu m'honorer. J'ai le bonheur ou le malheur de rencontrer mon nom assez souvent

1 Voyez la note B à la fin du volume.

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