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par avant avoient esté mandés. Entre lesquels y vindrent, de ceulx de la cité de Tournay, jusques au nombre de six vins combatans ou au desus, en très bon convenant, gens d'eslite et très bien habilliés, dont la plus grand partie estoient arbalestriers. Et les conduisoient trois notables hommes d'ycelle cité, dont le premier estoit nommé Symon de Saint-Jenois, l'autre Robert le Louchier, et le tiers Jehan de Courcielles. Si furent reçus du Roy très joieusement. Et aussy y vinrent ceulz de la cité de Paris, en moult grand quantité et en très bel estat, et avec ce d'aultres bonnes villes. Et si comme ils venoient, estoient receus et logés par les gens du Roy, comme il appertenoit. En oultre, Loys de Luxembourg, conte de Saint Pol et de Ligney, qui par avant avoit fait son amas de gens d'armes en ses seignouries, y arriva, environ huit jours après le Saint Jehan, à tout six cens combatans ou environ, très bien en point; et faisoit moult chault. Si mist ses gens en bataille assés près du logis du Roy. Lequel, avec aulcuns de ses princes et capitaines, les ala veoir bien à loisir, et toutes ses gens. En fu moult joieux de sa venue; si le festoia et mercia moult grandement de ce qu'il l'estoit venu servir à si belle compaignie. Avec lequel conte de Saint-Pol estoit le seigneur de Vervins, messire Colard de Mailly, Loys d'Enghien, messire Ferri de Mailly, Jehan de Hanghiers, messire Daviot de Poix, Jacotin de Béthune et ses frères, George de Croix, et pluiseurs autres gentils hommes. Si furent ce jour une grand partie moult travilliés de la chaleur dessusdicte, et tant que à la cause d'ycelle chaleur morut ung gentil homme, nommé Robert de Fransomme. Et quand le Roy les eut veus, comme dict

est, s'en alèrent logier au plus près de là, et brief ensievant se logier avec les aultres audit siège. Et aussi y vint le conte de Vaudémont, acompaignié de cent à six vins combatans. De laquelle venue le Roy fut très content et joyeux. Et pour vray, à ceste assemblée furent moult de grans ou service du dessusdit roy de France. C'est assavoir, son fils le Daulfin, le conte de Richemont, connestable de France, et les deux mareschaulx dessus nommés, et l'admiral, messire Charles d'Angou, les contes d'Eu et de La Marche, de SaintPol, de Vaudémont, de Labreth, de Tancarville, de Joingny, le visdame de Chartres, le seigneur de Chastillon, le seigneur de Mareul en Brie, le seigneur de Bueil, La Hire, Pothon de Sainte-Treille, le seigneur de Ham, messire Heinselin de La Tour, le seigneur de Moy, Glaudu de Auges, Renauld de Longueval, le seigneur de Moyencourt, le seigneur de La Suze, messire Theolde de Walperghe, Anthoine de Chabennes, Charles de Flavi, messire Gilles de Saint-Simon, Hue de Mailly, Olivier de Coitivy, le seigneur de Pennesach, Blanchefort, Floquet, Brousacq, Joachim Rohault, Pierre Renauld, le seigneur de Graville, maistre Jehan de Gapondes, Joffroi La Hire, le bastard de Harcourt, et moult d'aultres notables gens de grande auctorité. Et tant que, seloncq l'estimacion de ceulx en ce congnoissans, le Roy povoit bien avoir en tout de dix à douze mil combatans, et fleur de gens de guerre. Lesquelz, chascun endroit soy, estoient moult désirans de conquerre la ville de Pontoise.

Durant lequel temps, le duc d'Yorch, le seigneur de Thalebot et aulcuns aultres chiefs de la partie des Anglois qui se tenoient à Rouen, commencèrent à viser

et ymaginer comment ils pourroient mieulx souscourir à leurs gens qui estoient dedens ycelle ville de Pontoise. Et en fin se conclurent que pour la première fois, le seigneur de Thalebot le yroit ravitailler pour adviser la manière et conduicte des François. Si se mist sus ledit Thalebot, à tout quatre mil combatans ou environ, tant de pied comme de cheval, à tout chars, charettes et bestail. Et ala par aulcuns jours, tant qu'il vint logier jusques à une ville nommée Cheverin', assés près dudit lieu de Pontoise, et là jut deux nuis. Et entretant, bouta des vivres dedens ladicte ville, sans avoir aulcun empeschement et destourbier. Car le Roy et ceulx de son conseil estoient délibérés de non combatre yceulx Anglois, si non que ils les trouvassent grandement à leur advantaige. Après lequel ravitaillement, messire Jehan de Thalebot s'en retourna à Mante, et se logèrent ses gens en ung village au dehors de la ville, et de là s'en retournèrent en Normendie. Et entretant, les engiens du roy de France qui estoient assis contre ladicte ville de Pontoise, tant en la grande bastille de Saint-Martin comme ailleurs, gettoient continuelment contre les tours et murailles d'ycelles, et les dérompoient en pluiseurs lieux. Mais les dessusdiz assiégés les refaisoient nuit et

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jour, de queues et de bois, au mieulx qu'ilz po

voient. Et avec ce faisoient aulcunes fois des saillies contre lesdiz François. Aux quelles, tant d'une partie comme de l'autre, en y avoit très souvent de mors et de bléciés et de navrés. Durant lequel temps, le

1. Chauvry, arr. de Pontoise (Seine-et-Oise).

2. De Queues, c'est-à-dire de tonneaux remplis de terre.

Roy et ceulx de sa partie encloyrent ycelle ville par siége, tout à l'environ. Mais bonnement ne povoient encore veoir qu'il se peuyst faire sans trop grand péril, parce que lesdiz siéges ne povoient aler au secours l'un de l'autre, se besoing en eust esté. Et si sentoient que les Anglois dessusdiz estoient bien puissans, et assés prestz pour venir brief ensievant eulx combatre pour lever le siège. Et pour ces causes delayèrent, lesdiz François, de environner ycelle ville. Et fut ordonné qu'on feroit encore une grande bastille en la forest de Compiengne, pour amener par eaue, et ycelle asseoir sur aulcuns des costés où on verroit qu'il seroit plus expédient. A laquelle, pour le faire expédier, fut commis Guillaume de Flavi. Et certain temps après, ledit messire Jehan de Thalebot retourna pour la seconde fois et ravitailla arrière de chief ladicte ville et lesdiz asségiés, de foison de vivres et d'aulcuns engiens et habillemens de guerre. Et à chescune fois y laissoit une partie de ses gens, et remenoit avec luy ceulx qui estoient navrés ou malades. Et comme par avant, après ledit ravitaillement s'en retourna sans avoir aulcun empeschement. Toutefois, le Roy véant les manières que tenoient sesdiz adversaires, ayant considéracion que celui siège porroit estre long par le moyen des vivres qu'on amenoit en ladicte ville de Pontoise de jour en jour, en estoit moult mérancolieux et desplaisant. Nientmains il, de sa personne, faisoit très grand diligence de faire fortifier ses bastilles, comme de les pourveoir de vivres et aultres besongnes nécessaires pour eulx deffendre, se ainsy advenoit qu'on les assaillist.

CHAPITRE CCLXII.

Comment le duc d'Yorch, souverain gouverneur de Normendie pour le roy d'Angleterre, vint vers la ville de Pontoise pour cuidier lever le siège du roy de France.

Ou temps dessusdit, le duc d'Yorch, qui estoit chief pour la guerre et lieutenant général pour le roy Henri d'Angleterre quand ès marches de France et de Normendie, avoit assemblé de six à sept mil combatans. Entre lesquelz estoient, les seigneurs d'Escalles et de Thaleboth, messire Richard d'Oudeville, qui avoit espousé la duchesse de Bethfort, seur à Loys de Luxembourg, conte de Saint-Pol, et aulcuns autres capitaines de Rouen, dont plus avant ne suis informé des noms. Et avoient avec eulx très grand nombre de chars, charettes et chevaulx chargiés de vivres et artilleries; et si avoit grand bestail. Si se mirent en chemin en moult belle ordonnance, entour le mi-jullet, et de Rouen, par aulcunes journées, vinrent devers Pontoise, ledit duc d'Yorch et ses gens. Et faisoit l'avant garde, à tout trois mil combatans, messire Jehan de Thalebot. Si se loga ledit duc à Cenery', à demie lieue près de ladicte ville de Pontoise. Et l'avant garde se loga à une ville nommée Hetonville. Ouquel logis ils furent par trois jours et ravitaillèrent ladicte ville très habondamment de pluiseurs manières de vivres. Et adonc firent sçavoir au Roy qu'ilz estoient venus pour le combatre et toute sa puissance, se il se vouloit mettre aux champs

1. Cenery, sans doute Ennery, à 3 kilom. de Pontoise. 2. Hetonville, sans doute Hérouville, à 6 kilom. de Pontoise.

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