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lance, les mêmes pouvoirs; et leurs bureaux, sur une moindre échelle, étaient presque absolument les mêmes.

Les principaux employés d'un préfet du pré

toire étaient :

1° Princeps ou primiscrinius officii. Il faisait citer devant le tribunal du préfet ceux qui y avaient affaire : il rédigeait et dictait les jugemens; c'était sur son ordre qu'on arrêtait les prévenus. Son principal soin était la perception des impôts. Il jouissait de plusieurs priviléges.

2° Cornicularius. Il publiait les ordonnances, les édits et les jugemens du gouverneur. Sa charge était fort ancienne, les tribuns du peuple avaient un cornicularius (Va

ler. Max., 1. VI, C. 11). Son nom venait de ce qu'il avait pour signe de distinction une corne, dont il se servait peut-être, soit pour les publications, soit pour imposer silence à l'audience. Le præco, ou hérault, lui obéissait. Il ne restait qu'un an en place, et avait lui-même un bureau nombreux. C'était une espèce de greffier en chef.

3o Adjutor. Aide ou suppléant qui paraît avoir été attaché aux différens emplois ; sa charge était ici de faire arrêter les coupables, de présider à la torture, etc. Il avait aussi son bureau.

4° Commentariensis. Directeur des prisons, plus considéré que nos geoliers, mais ayant les mêmes fonctions; il avait la police des prisons, conduisait les prisonniers devant le tribunal, leur fournissait des alimens quand ils étaient pauvres, leur faisait donner la question, etc. 5° Actuarii vel ab actis. Ils écrivaient les contrats des 2. HIST. MOD., 1828.

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citoyens et tous les actes destinés à faire foi en justice, les testamens, les donations, etc. De là sont venus les notaires. Comme les actuarii attachés au préfet du prétoire ou au président ne pouvaient être partout, les duumvirs, et autres magistrats municipaux, eurent le droit de recevoir et de rédiger ces actes.

6 Numerarii. Ils étaient chargés de la comptabilité. Les simples gouverneurs en avaient deux, dits tabularii; les préfets du prétoire en avaient quatre: 1° Numerarius bonorum; il tenait les comptes des biens dévolus au fisc, dont les revenus devaient aller au comes rerum privatarum; 2° Numerarius tributorum; chargé des comptes des revenus publics qui allaient à l'œrarium et au comte des largesses sacrées; 3° Numerarius auri; il recevait l'or qu'on retirait des provinces, faisait changer en or les monnaies d'argent et tenait les comptes des revenus des mines d'or; 4° Numerarius operum publicorum; il tenait les comptes de tous les travaux publics, ports, murs, aqueducs, thermes, et travaux auxquels était destiné le tiers des revenus des cités, et des contributions foncières levées au besoin. Ces numerarii avaient sous leurs ordres un grand nombre d'employés.

7° Sub adjuva. Sous-aide de l'adjutor.

8° Curator epistolarum. C'était le secrétaire chargé de la correspondance: il avait beaucoup de şubordonnés, appelés epistolares.

9° Regerendarius. Rapporteur chargé de transmettre au préfet les requêtes des administrés et de rédiger ses réponses.

10° Exceptores. Ils écrivaient toutes les pièces relatives aux jugemens des préfets; ils les lisaient devant son tribunal: ils

étaient sous la direction d'un primicerius. On pourrait les comparer à des sous-greffiers et à des expéditionnaires.

11o Singularii, vel singulares, ducenarii, centenarii, etc. Chefs d'une espèce de gendarmerie attachée au service des gouverneurs de province. Les singulares les accompagnaient comme une garde militaire, faisaient exécuter leurs ordres dans la province, arrêtaient les coupables et les conduisaient en prison. Ils levaient les impôts, ainsi que les ducenarii, ( chefs de deux cents hommes ou cohortales), les centenarii, les sexagenarii, etc.

12° Primipilus. Chef de ces cohortales, chargé de distribuer les vivres aux soldats, au nom du préfet du prétoire il inspectait ces vivres.

:

Il est clair que les employés les plus considérables sont seuls indiqués ici, et qu'ils en avaient sous leurs ordres beaucoup d'autres. On comptait, dans les bureaux du préfet du prétoire d'Afrique, 398 employés, et 600 dans ceux du comte d'Orient. Indépendamment même du nombre, vous voyez, par la nature de leurs fonctions, que les attributions des les attributions des gouverneurs de province embrassaient toutes choses, et que société tout entière avait affaire à eux.

la

Permettez-moi d'arrêter un moment votre attention sur le traitement qu'ils recevaient; on en peut tirer, sur l'état social à cette époque, quelques inductions assez curieuses.

Sous Alexandre Sévère, d'après un passage de

son biographe Lampride', les gouverneurs de province recevaient vingt livres d'argent et cent pièces d'or1; six cruches (phialas) de vin, deux mulets et deux chevaux; deux habits de parade (vestes forenses), un habit simple (vestes domesticas), une baignoire, un cuisinier, un muletier, et enfin ( je vous demande pardon de cê détail, mais il est trop caractéristique pour que je l'omette), quand ils n'étaient pas mariés, une concubine; quod sine his esse non possent, dit le texte. Quand ils sortaient de charge, ils étaient toujours obligés de rendre les mulets, les chevaux, le muletier et le cuisinier. Si l'empereur était content de leur administration, ils gardaient le reste; sinon ils étaient obligés de le rendre au quadruple. Sous Constantin, le traitement en denrées subsistait encore, en partie du moins; on voit les gouverneurs de deux grandes provinces, de l'Asiana et du Pont, recevoir de l'huile pour quatre lampes. Ce fut seulement sous Théodose II, précisément dans la première moitié du Ve siècle, qu'on cessa de rien donner en nature aux gouverneurs. Encore les employés de leurs bureaux, dont je viens de vous présenter

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le tableau, reçurent-ils jusqu'à Justinien, dans l'empire d'Orient, une portion de leur traitement en denrées. J'insiste sur cette circonstance, parce qu'elle donne une idée du peu d'activité des relations commerciales, et de l'imperfection de la circulation dans l'empire.

Les faits sont clairs, Messieurs, la nature de ce gouvernement est évidente; nulle indépendance pour les fonctionnaires; ils sont subordonnés l'un à l'autre, jusqu'à l'empereur qui dispose et décide pleinement de leur sort. Nul recours pour les sujets contre les fonctionnaires, sinon à leurs supérieurs. Vous ne rencontrez nulle part de pouvoirs coordonnés, égaux, destinés à se contrôler, à se limiter l'un l'autre. Tout procède du haut en bas ou du bas en haut, selon une hiérarchie unique et rigoureuse. C'est le despotisme administratif pur et simple.

N'en concluez pas cependant que ce système de gouvernement, ce mécanisme administratif eût été institué dans le seul intérêt du pouvoir absolu, et n'eût jamais cherché ni produit d'autre effet que de le servir. Il faut, pour l'apprécier avec équité, se faire une juste idée de l'état des provinces, et spécialement des Gaules, au moment où la république fut remplacée par l'empire. Deux pouvoirs y régnaient; celui du

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