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taines, qui tout leur temps avoient servi le duc Jean, son père, c'est à savoir messire Jean de Luxembourg, les seigneurs de l'Ile-Adam et de Chastellus, tous deux maréchaux de France; messire Robinet de Mailly, grand panetier de France; le Veau de Bar, bailli d'Auxois ; le vidame d'Amiens, Antoine, seigneur de Croy; messire Philippe de Fosseux et Jean son frère, le seigneur de Longueval, Hector et Philippe de Saveuse, le seigneur de Humières, qui conduisoit les gens du seigneur d'Antoing; le seigneur de Humbercourt, messire Mauroy de Saint-Léger, le seigneur de Stenhuse de Flandre, le sire de Commines, le sire de Hallewyn le bâtard de Harcourt, atout (avec) les gens de messire Jacques de Harcourt son oncle, et moult d'autres chevaliers et écuyers du pays dudit duc. Et étoient adonc de son plus privé conseil; et ses féables gouverneurs, messire Athis de Brimeu, chevalier, et le seigneur de Roubaix, avec l'évêque de Tournai, son chancelier.

Lequel duc, après qu'il eut fait faire grands préparations pour assaillir iceux assiégés, en conclusion, au bout de quinze jours ou environ, après ledit siége mis, fut traité fait entre les parties, par condition que lesdits assiégés s'en iroient saufs leurs corps et leurs biens, en rendant la ville en la main dudit duc, pource que c'étoit sa première armée, réservés aucuns qui étoient des villes de l'obéissance du roi, lesquels demeurèrent prisonniers.

Après lequel traité, se départirent les dessusdits sous le sauf-conduit dudit duc de Bourgogne, nonobstant lequel, à leur partement, en y eut plusieurs détroussés; dont ledit duc et son conseil furent très mal contents, et firent restituer ce qu'il en vint à leur connoissance. Si s'en allèrent ces Dauphinois à Soissons, qui tenoit leur parti.

Laquelle ville de Crespy., après le département dessusdit, fut pillée et dénuée de tous biens portatifs qui y furent trouvés. Et après, à la requête de ceux de Laon, fut la fortification d'icelle ville abattue et démolie; c'est à savoir les portes et murailles pourquoi, en poursuivant de mal en pis, demeurèrent les habitants d'icelle en grand' tristesse, et non sans cause; car par avant la guerre étoit ville plantureuse et remplie de tous biens.

Si étoit en la compagnie du duc de Bourgogne, durant cette année, qui ne fait pas à oublier, ce vaillant capitaine dont en autre lieu est faite mention, nommé Tabary, atout (avec) ses brigands; lequel ne fit en conclusion que demi-voyage, et demeura en la poursuite, comme vous orrez ciaprès ensuivant.

CHAPITRE CCXXIX.

Comment ledit duc se conduisit, allant audit lieu de Troyes, et depuis qu'il y fut venu; et aussi des ambassadeurs d'Angleterre qui allèrent avec lui.

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La ville de Crespy en Laonnois rendue, comme dit est, s'en alla le duc de Bourgogne à Laon, où il fut des gouverneur et habitants de ladite ville reçu honorablement. Et de là, atout ( avec ) ses gens, qui étoient mille combattants, s'en alla, par Reims à Châlons en Champagne. Auxquelles villes lui fut fait grand honneur et réception. Et toujours étoient en sa compagnie les ambassadeurs du roi d'Angleterre. Duquel lieu de Châlons chevaucha en grand' ordonnance vers Troyes, et fit un logis assez près de Vitry, en Partois ; laquelle ville, avecque aucunes autres forteresses au pays, tenoient les Dauphinois. Et lors, messire Jean de Luxembourg, faisant l'avant garde, passa parmi la ville audit pays où il y avoit eaux et sources moult dangereuses. Si chevauchoit emprès lui messire Robinet de Mailly, chevalier, grand panetier de France, lequel, atout (avec) son cheval, se férit et effondraen une des dites sources, si avant qu'il y demeura lequel cheval n'avoit point de crins à quoi ledit chevalier se pût tenir, ni le retira point

dehors, mais mourut là très piteusement, et le cheval dessusdit se sauva. Pour la mort duquel le duc de Bourgogne et plusieurs autres seigneurs furent très courroucés. Et par espécial ses trois frères, qui étoient en ladite compagnie, en menèrent grand deuil; c'est à savoir messire Jean de Mailly, qui depuis fut évêque de Noyon, Collard et Ferry: toutefois il fut tiré hors, et enterré assez près de là.

En après, le duc de Bourgogne approchant Troyes, vinrent à l'encontre de lui en grand' noblesse plusieurs seigneurs de Bourgogne, et autres notables bourgeois, qui lui firent très grand honneur et révérence. En la compagnie desquels, et aussi des seigneurs qui étoient venus avecque lui, entra en icelle ville de Troyes, le vingt et unième jour de mars, et fut convoyé par iceux jusques à son hôtel; et partout où il passoit avoit grand' multitude de peuple, qui pour sa venue crioit : Noël ! Et tôt après alla devers le roi de France, la reine, et dame Catherine, qui le reçurent bénignement et lui montrèrent très grand signe d'amour. Et aucuns brefs jours ensuivant, furent assemblés plusieurs conseils en la présence du roi et de la reine, et dudit duc de Bourgogne, pour avoir avis sur la paix finale et alliance que vouloit avoir Henri, roi d'Angleterre, avecque le dessusdit roi de France. Pour lequel traité dessusdit confirmer, avoit envoyé ses ambassadeurs ayant de lui puissance.

Finablement, après plusieurs parlements tenus

CHRONIQUES DE MONSTRELET. T. IV.

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avecque lesdits ambassadeurs, fut conclu et accordé, en faveur du duc de Bourgogne et de ceux de son parti, que Charles, roi de France, donneroit à Henri, roi d'Angleterre, Catherine, sa fille maisnée en mariage; et avec ce le feroit vrai héritier et successeur après sa mort de tout son royaume, lui et ses hoirs, en déboutant son propre fils et héritier, Charles, duc de Touraine, dauphin; et aussi, en annulant la constitution jadis faite par les rois de France et ses pairs en grand' délibération, c'est à savoir que le noble royaume de France ne devoit succéder à femme, ni appartenir. Et mêmement, s'il advenoit que ledit roi Henri n'eût hoirs vivants du dessusdit mariage, par le moyen d'icelui traité et accord, si demeuroit-il héritier de la couronne de France, au préjudice de tous les royaux et appartenant, qui en temps à venir y pouyoient et devoient succéder de droite ligne.

Et fut tout ce dessusdit accordé par le roi Charles, lequel en long-temps par avant n'avoit été en sa vive mémoire, comme dit est dessus. Et étoit content d'accorder et traiter en tous états selon l'opinion de ceux qui étoient assistants, ou en sa présence, tant en son préjudice comme au

trement.

Lequel traité fait en la forme ci-après déclarée',

1. Ce traité est rapporté plus loin.

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