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CES

OPINIATRETÉ, OBSTINATION.

Es deux mots présenteut à l'esprit un fort et déraisonnable attachement à ce qu'on a une fois conçu ou résolu d'exécuter.

L'opiniâtreté est un entêtement aveugle pour un sujet injuste ou de peu d'importance: elle part communément d'un caractère rétif, d'un esprit sot ou méchant, ou méchant et sot tout ensemble, qui croiroit sa gloire ternie s'il revenoit sur ses pas, lorsqu'on l'avertit qu'il s'égare. Ce défaut est l'effet d'une fermeté mal entendue, qui confirme un homme opiniâtre dans ses volontés, et qui, lui faisant trouver de la honte à avouer son tort, l'empêche de se rétracter.

L'obstination consiste aussi dans un trop grand attachement à son sens, sans aucune raison solide. Cependant ce défaut semble provenir plus particulièrement d'une espèce de mutinerie affectée qui rend un homme intraitable, et, fait qu'il ne veut jamais céder. L'effet particulier de l'opiniátrété et de l'obstination tend directement à ne point se rendre aux idées des autres, malgré toutes lumières contraires avec cette différence que l'opiniátre refuse ordinairement d'écouter la raison par une opposition à céder qui lui est comme naturelle et de tempérament, au lieu que l'obstiné ne s'en défend souvent que par une volonté de pur caprice et de propos délibéré.

(M. de JAUCOURT.)

Ex terme de rhétorique, l'opposition est une figure par laquelle on joint deux choses qui, en apparence, sont incompatibles; comme quand Horace parle d'une folle sagesse; qu'Anacréon dit que l'amour est une aimable folie. Cette figure, qui semble nier ce qu'elle établit, et se contredire dans ses termes, est cependant très-élégante; elle réveille plus que toute autre l'attention et l'admiration des lecteurs, et donne de la grace au discours quand elle n'est point recherchée et qu'elle est placée à propos. Voulez-vous un exemple d'une opposition brillante moins marquée dans les mots que dans la pensée, je n'en puis guère citer de plus heureuse que celle de ces beaux vers de la Henriade, chant IX :

Les amours enfantins désarmoient ce héros.
L'un tenoit sa cuirasse encor de sang trempée,
L'autre avoit détaché sa redoutable épée,
Et rioit en tenant dans ses débiles mains

Ce fer, l'appui du trône et l'effroi des humains.

Il falloit dire peut-être, l'effroi des ennemis.

(M. de JAUCOURT.)

PAR un malheur attaché à la condition humaine, les sujets sont quelquefois soumis à des souverains qui, abusant du pouvoir qui leur a été confié, leur font éprouver des rigueurs que la violence seule autorise. L'oppression est toujours le fruit d'une mauvaise administration. Lorsque le souverain est injuste, ou lorsque ses représentans se prévalent de son autorité, ils regardent les peuples comme des animaux vils, qui ne sont faits que pour ramper et pour satisfaire, aux dépens de leur sang, de leur travail et de leurs trésors, leurs projets ambitieux ou leurs caprices ridicules. En vain l'innocence gémit, en vain elle implore la protection des lois, la force triomphe et insulte à ses pleurs. Domitien disoit omnia sibi in homines licere; maxime digne d'un monstre, et qui pourtant n'a été que trop suivie par quelques souverains.

On opprime, on mérite le nom d'oppresseur, on fait gémir sous l'oppression, lorsque le poids de l'autorité pèse sur les sujets d'une manière qui les écrase et qui leur rend l'existence odieuse. On rend l'existence odieuse en envahissant la liberté, en épuisant la fortune, en gênant les opinions, etc. Un peuple peut être opprimé par son souverain; un peuple par un autre peuple. Fléchier dit qu'il y a peu de sûreté pour les oppresseurs de la liberté des peuples; mais c'est seulement dans les premiers instans de l'oppression. A la longue on perd tout sentiment, on s'abrutit, et l'on en vient jusqu'à adorer la tyrannie, et à diviniser ses actions les plus atroces. Alors il n'y a plus de ressource pour une nation que dans une grande révolution qui la régénère. Il lui faut une crise.

(ANONYME.)

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OP PRO BRE,

EST le mépris que l'on s'attire dans la société où l'on est, par une conduite irrégulière et opposée aux bonnes mœurs. Ce terme me semble du moins avoir rapport à une certaine collection d'hommes. Ceux qui se conduisent d'une manière opposée à leur état en sont l'opprobre; on est l'opprobre de l'église, de la nation, de sa famille, de la littérature, de la magistrature, de l'état militaire. Pour compléter l'acception du mot opprobre, à cette idée il faut encore en ajouter une autre; c'est l'extrême degré de la honte et du mépris encouru par un homme déshonoré par des bassesses et de viles actions. Il se dit aussi d'une injure griève. Les juifs firent souffrir à Jésus-Christ mille opprobres.

(ANONYME.)

ON

OPTIMISME.

N appelle ainsi l'opinion des philosophes qui prétendent que ce monde-ci est le meilleur que Dieu pût créer. Le père Mallebranche, et sur-tout M. Léibnitz, ont fort contribué à accréditer cette opinion. C'est principalement dans sa Théodicée que le dernier de ces philosophes a expliqué et développé son systême. On peut en voir une idée dans son éloge par M. de Fontenelle. Il prétend, par exemple, que le crime de Tarquin, qui viola Lucrèce, étoit accessoire à la beauté et à la perfection de ce monde moral, parce que ce crime a produit la liberté de Rome, et par conséquent toutes les vertus de la république romaine. Mais pourquoi les vertus de la république romaine avoientelles besoin d'être précédées et produites par un crime? Voilà ce qu'on ne nous dit pas et ce qu'on seroit bien embarrassé de nous dire. Et puis comment accorder cet optimisme avec la liberté de Dieu? Autre question non moins embarrassante. Comment tant d'hommes s'égorgent-ils dans le meilleur des mondes possibles? Et si c'est là le meilleur des mondes possibles, pourquoi Dieu l'a-t-il créé ? La réponse à toutes ces questions est en deux mots : 6 altitudo! etc. Il faut avouer que toute cette métaphysique de l'optimisme est bien

creuse.

(M. D'ALEMBERT.)

OR

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