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L'OFFENS

'OFFENSE est toute action injuste, considérée relativement au tort qu'un autre reçoit ou dans sa personne, ou dans la considération publique, ou dans sa fortune. On offense de propos et de fait. Il est des offenses qu'on ne peut mépriser; il n'y a que celui qui les a reçues qui en puisse connoître toute la griéveté; on les repousse diversement, selon l'esprit de la nation. Les Romains, qui ne portoient point d'armes durant la paix, traduisoient l'offenseur devant les lois : nous avons des lois comme les Romains, et nous nous vengeons de l'offense comme des barbares. Il n'y a presque pas un chrétien qui puisse faire sa prière du matin sans appeler sur lui-même la colère et la vengeance de Dieu, s'il se souvient encore de l'offense qu'il a reçue. Quand il prononce ces mots : Pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés, c'est comme s'il disoit : J'ai la haine dans le fond du cœur, je brûle d'exercer mon ressentiment; Dieu, que j'ai offensé, je consens que tu en uses avec moi comme j'en userois envers mon ennemi s'il étoit en ma puissance. La philosophie s'accorde avec la religion pour inviter au pardon de l'offense. Les stoïciens, les platoniciens ne vouloient pas qu'on se vengeât. Il n'y a presque aucune proportion entre l'offense et la réparation ordonnée par les lois. Une injure et une somme d'argent ou une douleur corporelle sont deux choses hétérogènes et incommensurables. La lumière de la vérité offense singulièrement certains hommes accoutumés aux ténèbres; la leur présenter, c'est introduire un rayon de soleil dans un nid de hiboux ; il ne sert qu'à blesser leurs yeux et à exciter leurs cris. Pour vivre heureux, il faudroit n'offenser personne et ne s'offenser de rien; mais cela est bien difficile; l'un suppose trop d'attention, et l'autre trop d'insensibilité.

(ANONYME.)

OFFIC E.

OFFICE, SERVICE, BIENFAIT: Sénèque distingue assez bien

les idées accessoires attachées à cés trois termes. Nous recevons, dit-il, un bienfait de celui qui pourroit nous négliger sans en être blâmé; nous recevons de bons offices de ceux qui auroient eu tort de nous les refuser, quoique nous ne puissions pas les obliger à nous les rendre ; mais tout ce qu'on fait pour notre utilité ne sera qu'un simple service, lorsqu'on est réduit à la nécessité indispensable de s'en acquitter. On a pourtant raison de dire que l'affection avec laquelle on s'acquitte de ce qu'on doit mẻrite d'être compté pour quelque chose.

Office, pris dans son sens moral, marque un devoir, c'est-à-dire une chose que la vertu et la droite raison engagent à faire.

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La vertu, selon Chauvin, est le dessein de bien faire ce qui suit ou résulte immédiatement de ce dessein est l'obéissance à la vertu, qu'on appelle aussi devoir; ainsi l'office et le devoir sont l'objet de l'obéissance qu'on rend à la vertu.

Cicéron, dans son Traité des Offices, reprend Panatius, qui avoit écrit avant lui sur la même matière, d'avoir oublié de définir la chose sur laquelle il écrivoit : cependant il est tombé lui-même dans une semblable faute. Il s'étend beaucoup sur la division des offices ou devoirs; mais il oublie de les définir. Dans un autre de ses ouvrages, il définit le devoir une action que la raison exige.

Les Grecs, suivant la remarque de Cicéron, distinguent deux espèces de devoirs ou offices; savoir, les devoirs parfaits et les devoirs communs ou indifférens; ils les distinguent, en disant que ce qui est absolument juste est un office parfait, ou devoir absolu; au lieu que les choses qu'on ne peut faire que par une raison probable sont des devoirs communs ou indifférens.

(M. de JAUCOURT.)

QUI

UI a le caractère bienfaisant, et qu'on trouve toujours disposé à rendre de bons offices. Les hommes officieux sont chers dans la société. Le même mot se prend dans un sens un peu différent : on dit un mensonge officieux, c'est-à-dire un mensonge que l'on se permet pour éviter un plus grand mal qu'on auroit fait par une franchise déplacée.

Les officieux, à Rome, étoient des gens d'antichambre, fainéans, flatteurs, ambitieux, empoisonneurs, qui venoient, dès le matin, corrompre par des bassesses les grands dont ils obtenoient tôt ou tard quelque récompense.

(ANONYME.)

DESGUVRE

ÉSŒUVREMENT, fainéantise, ou manque d'occupation utile et honnête; car le mot oisiveté renferme ces deux idées.

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Il y a, dit la Bruyère, des créatures de Dieu, qu'on appelle des hommes, dont toute la vie est occupée, et toute l'attention est réunie à scier du marbre: c'est trèspeu de chose. Il y en a beaucoup d'autres qui s'en étonnent, mais qui sont entièrement inutiles, et qui passent les jours à ne rien faire; c'est bien moins que de scier du marbre.

Le désœuvrement dans lequel on languit est une source de désordres. L'esprit humain, étant d'une nature agissante, ne peut pas demeurer dans l'inaction; et, s'il n'est occupé de quelque chose de bon, il s'applique inévitablement au mal; car, quoiqu'il y ait des choses indifférentes, elles deviennent mauvaises lorsqu'elles occupent seules l'esprit, s'il est vrai néanmoins qu'il y ait des personnes oisives qui s'occupent davantage de choses indifférentes que de vicieuses.

On ne sauroit que blâmer ceux qui emploient tout leur temps à des choses inutiles, s'il est encore vrai que les hommes soient créés pour faire du bien; mais on voit par expérience que ceux qui ne s'appliquent à aucune occupation honnête, tombent dans le déréglement.

de man

Les hommes qui ne prennent d'autre soin que ger, sans aucun travail, les biens que la fortune leur a procurés, sont satisfaits d'eux-mêmes, quand ils ont l'art de régler leurs dépenses suivant leurs revenus; de tels hommes, dis-je, sont inutiles à la société, en ne faisant rien pour elle. La nonchalance dans laquelle ils vivent fétrécit leur esprit, les rend méprisables aux autres, et souvent leur devient funeste à eux-mêmes.

L'oisiveté est une chose contraire aux devoirs de l'homme et du citoyen, dont l'obligation générale est d'être bon à quelque chose, et, en particulier, de se rendre utile à la société dont il est membre. Rien ne peut dispenser personne de ce devoir, parce qu'il est imposé par la nature. Le silence de nos lois civiles à cet égard n'est pas plus

capable de disculper ceux qui n'embrassent aucune profession, que de justifier ceux qui recherchent ou qui exercent impunément des emplois qu'ils sont incapables de bien remplir.

Il est honteux de se reposer avant que d'avoir travaillé. Le repos est une récompense qu'il faut avoir méritée. On lit sur une cornaline représentant Hercule cette sentence grecque: La source de la gloire et du bonheur est dans le travail, vérité de tous les temps et de tous les âges. Il faut même se persuader que le travail est une des sources du plaisir, et peut-être la plus certaine. Une vie oisive doit être nécessairement une vie triste. Je demande aux gens riches et désœuvrés si leur état est heureux. L'ennui qui les consume me prouve bien le contraire.

L'oisiveté est sur-tout fatale au beau sexe. Un empereur chinois tenoit pour maxime que, s'il y avoit dans ses états une femme qui ne s'occupât point, un.homme qui ne labourât point, quelqu'un souffriroit le froid ou la faim dans l'empire. Sur ce principe, dit le père Duhalde, il fit détruire une infinité de monastères de bonzes.

Les Egyptiens, les Lacédémoniens, les Lucaniens, avoient des lois contre l'oisiveté. Là, chacun étoit tenu de déclarer au magistrat de quoi il vivoit, à quoi il s'occupoit; et ceux qui se trouvoient mentir, ou qui n'avoient aucune profession, étoient châtiés.

Les Athéniens entrèrent encore dans de plus grands détails pour prévenir l'oisiveté. Ne devant pas obliger tous les citoyens à s'occuper de choses semblables, à cause de l'inégalité de leurs biens, ils leur firent embrasser des professions conformes à l'état et aux facultés de chacun. Pour cet effet, ils ordonnèrent aux plus pauvres de la république de se tourner du côté de l'agriculture et du négoce; car, n'ignorant pas que l'oisiveté est la mère de la pauvreté, et que la pauvreté est la mère des crimes, ils crurent prévenir ces désordres en ôtant la source du mal. Pour les riches, ils leur prescrivirent de s'attacher à l'art de monter à cheval, aux exercices, à la chasse et à la philosophie, étant persuadés que par là ils porteroient ceux-ci à tâcher d'exccller dans quelques-unes de ces

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