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caricatural. Les auteurs de ce barbouillage sont le dessinateur Enguidanos et le graveur Navia.

En 1826 un portrait, dessiné par Bordes, lithographié par Engelmann, est placé entre les pp. 74 et 75 du tome premier de l'Espagne Poélique de Maury. Une note de la p. 42 dit bien : « L'original du portrait de Mendoza fait partie de la galerie du duc de l'Infantado », mais on devine aisément que c'est d'après la gravure de Carmona qu'a été faite cette lithographie. La tête est tournée vers la droite au lieu d'être tournée vers la gauche comme dans le Parnaso.

On trouve encore le portrait de Carmona en tête des éditions de la Guerra de Granada publiées en 1830 à Valence, en 1840 à Paris 3, et en 1842 à Barcelone. Nous laissons naturellement de côté les reproductions plus ou moins grossières placées dans les livres de vulgarisation.

Ni Sedano ni aucun des éditeurs que nous venons de citer ne semblent avoir su quel était l'auteur du portrait de Mendoza publié par eux.

Le 19 avril 1841, Valentin Carderera lut à l'Académie de l'Histoire un Ensayo histórico sobre los retratos de hombres célebres desde el siglo XIII hasta el XVIII dans lequel il cite un portrait de Mendoza dù au Titien. Depuis 1550 on en connaissait l'existence par Vasari 6; on savait aussi par le même biographe la date où il fut peint et une particularité qui n'est pas sans importance: « L'anno 1541 fece il ritratto di don Diego di Mendozza, allora ambasciadore di Carlo quinto

1. Espagne Poétique. Choix de poésies castillanes depuis Charles-Quint jusqu'à nos jours, mises en vers français ... par Don Juan Maria Maury. Paris, 18261827, 2 vol. in-8.

2. Valencia, Librería de Mallén y Berard. Imprimée par Benito Monfort. 3. In Tesoro de historiadores españoles. Paris: Baudry (Colección de los mejores autores españoles, XVIII). Il existe des tirages postérieurs, notamment en 1844 et en 1861.

4. Barcelona: Imprenta de Juan Oliveres (Tesoro de autores ilustres, IV). 5. Cet Ensayo est demeuré manuscrit pendant cinquante-huit ans. Ce n'est que dans le premier semestre de 1899 qu'il a été publié dans le Boletin de la Real Academia de la Historia (t. XXXIV, pp. 201-257).

6. Le vite de più eccellenti pittori, scultori e architetti, di Giorgio Vasari. La première édition est de 1550.

a Vinezia, tutto intero e in piedi ; che fu bellissima figura: e da questa cominciò Tiziano quello che è poi venuto in uso, cioè fare alcuni ritratti interi '. » Carderera parle de ce portrait comme se trouvant au palais du duc de l'Infantado: « El salón llamado de Linajes del palacio del Duque del Infantado en Guadalajara, excede à todo cuanto la imaginación más fecunda y. lozana puede crear de mágico, rico y ostentoso...' En otra habitación de este palacio curiosisimo y romancesco se conserva la serie de retratos de los Mendozas, casi todos de cuerpo entero, y figura entre ellos el famoso y ya citado D. Diego Hurtado. » (p. 232.)

Et maintenant, je voudrais poser quelques questions.

Le personnage dont les traits sont reproduits par la gravure de 1776 est-il Diego Hurtado de Mendoza, l'ambassadeur de CharlesQuint? L'artiste qui dessina au palais des ducs de l'Infantado le médaillon publié par Sedano dans son Parnaso español ne se méprit-il pas? Il y avait eu dans la famille plus d'un Diego Hurtado de Mendoza: n'y avait-il pas alors, au palais de Guadalajara, les portraits de plusieurs personnages ayant porté ce trom? Ou, s'il n'y en avait qu'un, ce portrait-là était-il celui de l'ambassadeur? Sedano ignore que le portrait de Mendoza était dù au Titien; mais il dit que l'original du portrait de son Parnaso était un portrait en pied, ce qui est assurément un argument d'un grand poids en faveur de l'identification.

En Espagne, c'est Carderera qui a mentionné le premier l'existence à Guadalajara d'un portrait de Mendoza par le Titien, dans un rapport lu en 1841, mais qui n'a été publié qu'en 1899. Carderera savait-il simplement par la lecture de Vasari que le Titien avait peint le portrait de l'ambassadeur, et, connaissant l'existence à Guadalajara du portrait d'un Diego Hurtado de Mendoza, avait-il reconnu dans ce portrait l'œuvre du grand peintre ? Avait-il puisé ses renseignements à une autre source?

Hors d'Espagne, aucun de ceux qui ont écrit sur la vie ou les œuvres du Titien ne connait la gravure du Parnaso español. On a prononcé d'ailleurs d'une manière dubitative le nom de Mendoza

1. Edition Felice Le Monnier. Firenze, 1846-1870. Tome XIII, p. 33.

à propos de deux oeuvres du Titien, mais, à ce qu'il semble, sans la moindre raison.

Le portrait que peignit le Titien fut-il apporté en Espagne par Mendoza quand il quitta l'Italie ? C'est vraisemblable. Est-ce à Guadalajara qu'il fut déposé, soit à cette époque, soit à la mort du modèle? On aimerait à en être certain.

Si le portrait du Parnaso español est celui de Mendoza l'ambassadeur, est-ce celui de Mendoza par le Titien ou celui de Mendoza par un autre artiste?

Il semble bien que nous n'ayons actuellement pour résoudre ce problème que la gravure de 1776, car le portrait en pied dont elle reproduit la tête et une partie du buste a disparu. Du moins ne sais-je pas où il est.

Si le portrait se trouvait parmi ceux qui furent vendus en 1896, lors de la dispersion des tableaux d'Osuna, il ne figurait pas au catalogue sous le nom de Diego Hurtado de Mendoza. Cinquante ans auparavant, en 1846, un inventaire mentionnait l'existence d'un portrait d'un Iñigo et d'un autre portrait d'un Diego Hurtado de Mendoza: or en 1896 le catalogue de vente mentionne deux portraits d'un Iñigo, mais pas le moindre Diego. Ces deux Iñigo portent au catalogue les numéros 145 et 151. Malgré l'amabilité parfaite des acquéreurs de ces deux tableaux, je n'ai pas retrouvé dans leurs collections l'original du portrait gravé par Carmona en 1776.

Je dois dire aussi et c'est peut-être là que se trouve la clef de la question que les biens de la maison de l'Infantado ayant fait l'objet d'un partage, postérieurement à 1841, entre le duc d'Osuna et le duc de Pastrana, ce que l'on ne trouve pas chez l'un doit être cherché chez l'autre. Ce sont les pères jésuites qui ont hérité de la duchesse de Pastrana. S'ils possèdent le portrait qui fait l'objet de cette notice, ils rendraient un grand service en en publiant ou en en laissant publier une reproduction phototypique. Et si après examen l'on s'accorde à l'attribuer au Titien, il faudra, raisonnablement, conclure que c'est bien le portrait de Mendoza.

R. FOULCHE-DELBOSC.

Lettre du comte G. Ph. Creutz à Marmontel sur l'Espagne (1765).

M'étant occupé ces derniers mois de choses d'Espagne et de Portugal, j'ai eu l'idée de rechercher ce qui a été publié en Suède sur les deux pays ibériques. J'en ai dressé une liste que je compte publier dans une autre occasion. Il y a dans cette liste un document écrit en français et qui me paraît avoir quelque intérêt pour les hispanisants. C'est une lettre adressée par le conte Gustave Philippe Creutz, ministre de Suède à Madrid, à son ami Marmontel.

L'original de cette lettre est probablement perdu. Mais il en existe une copie faite par un savant suédois, Nils Dahlberg (mort en 1820), et conservée actuellement dans la bibliothèque de l'Université de Lund. Elle a fait partie autrefois de la bibliothèque du comte Jacob Gustave De la Gardie, qui sc délassait de la politique et de ses hautes fonctions en faisant de la littérature et en fondant, dans son château de Loberod, de riches collections de livres et de manuscrits. Après sa mort, survenue en 1842, la plus grande partie de ses manuscrits fut donnée à l'Université de Lund, où ils forment les Archives De la Gardie.

Avant sa mort le comte De la Gardie avait fait publier, par le chanoine P. Wieselgren, ce qu'il y avait de plus intéressant dans ses manuscrits. Cette publication, faite dans les années 1831-1844 et comptant vingt volumes, contient aussi, dans le XIIIe volume, la lettre de Creutz. Cependant elle avait déjà été imprimée en 1786, dans Historisches Portefeuille (Berlin et Vienne); mais l'une et l'autre de ces publications étant difficilement accessibles ou presque introuvables, une réimpression n'est certainement pas superflue.

L'auteur de la lettre, le comte Gustave Philippe Creutz, est une figure considérable de l'histoire de Suède de la seconde moitié du xvIe siècle. Il est en même temps un de nos premiers hommes politiques et un de nos meilleurs poètes. Nommé ministre auprès de la Cour de Madrid en 1763, il garde ce poste jusqu'à 1766. Il est alors transporté à Paris, d'où il est rappelé à Stockholm en 1783 pour être revêtu de la charge de « président de la chancellerie », c'est-à-dire de chef du ministère. Il mourut en 1785, à l'âge de 54 ans.

Comme poète il est connu surtout pour son idylle Atis et Camilla, considérée par les contemporains comme un chef-d'œuvre, et pour sa nouvelle amoureuse Daphné.

En se rendant en Espagne Creutz s'arrêta à Paris, où il fut introduit dans les cercles politiques et littéraires, fréquenta les salons aristocratiques et se lia d'amitié avec plusieurs hommes illustres, notamment avec Marmontel. Celui-ci conçut pour le gentilhomme suédois la plus vive admiration, et il parle souvent de lui dans des termes on ne peut plus élogieux. Il écrit par exemple dans ses Mémoires, livre VI: « Mais l'un des hommes, qui m'a le plus chéri, et

que j'ai le plus tendrement aimé, a été le comte de Creutz..... C'étoit à lui que la nature avoit donné, par excellence, la sensibilité, la chaleur, la délicatesse du sens moral et de celui du goût, l'amour du beau dans tous les genres, et la passion du génie comme celle de la vertu : c'étoit à lui qu'elle avoit accordé le don d'exprimer et de peindre en traits de feu tout ce qui avoit frappé son imagination, ou vivement saisi son âme : jamais homme n'est né poëte si celui-là ne l'étoit pas. Jeune encore, et l'esprit orné d'une instruction prodigieuse, parlant le français comme nous, et presque toutes les langues de l'Europe comme la sienne, sans compter les langues savantes, versé dans tous les genres de littérature ancienne et moderne, parlant de chimie en chimiste, d'histoire naturelle en disciple de Linnéus, et singulièrement de la Suède et de l'Espagne en curieux observateur des propriétés de ces climats et de leurs productions diverses, il étoit pour nous une source d instructions embellies par la plus brillante élocution. »

Marmontel parle encore de Creutz dans ses Mémoires, livre X, et il lui consacre toute l'introduction de son conte Les solitaires de Murcie, qui, parait-il, lui a été inspiré tout entier par Creutz. On apprend dans cette introduction que Marmontel a reçu de Creutz plusieurs lettres sur l'Espagne, et l'on sait qu'il donnait parfois lecture de lettres de son ami suédois, dans les séances de l'Académie française. Ces lettres existent-elles encore?

Un autre ami et admirateur de Creutz fut Voltaire. Il parle plusieurs fois de lui dans sa correspondance; ainsi par exemple dans une lettre à Mme Geoffrin, du 21 mai 1764: « M. le comte de Creutz, Madame, était bien digne de vous connaitre; il mérite tout ce que vous m'avez fait l'honneur de me dire de lui. S'il y avait un empereur Julien au monde, c'était chez lui qu'il devrait aller en ambassade, et non chez des gens qui font des auto-da-fé, et qui baisent la manche des moines. Il faut que la tête ait tourné au sénat de Suède, pour ne pas laisser un tel homme en France. Il y aurait fait du bien, et il est impossible d'en faire en Espagne.

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Et à Marmontel sous la même date: « Mon cher confrère, je n'ai eu chez moi M. le comte de Creutz qu un jour. J'aurais voulu passer ma vie avec lui. Nous envoyons rarement de pareils ministres dans les cours étrangères. »

Enfin à Damilaville dans une lettre du 23 mai 1764: « Je viens de passer une journée entière avec le comte de Creutz, ambassadeur de Suède à Madrid. Plût à Dieu qu'il le fut en France ! C'est un des plus dignes frères que nous

avons. »

Dans les Archives De la Gardie il y a d'autres documents sur l'Espagne. Ce sont quelques pages du Journal écrit par le comte De la Gardie lui-même et remplissant vingt volumes manuscrits. Ces pages traitant de l'Espagne datent du temps ou De la Gardie était ministre de Suède à Madrid, c'est-à-dire de 1814-15. Il est vrai qu'il avait été nommé à ce poste déjà en 1813, et qu'il

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