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thographe (de Orthographia liber) abonde en citations de mots grecs, en observations précises, en rapprochements techniques qui supposent une étude de la langue grecque poussée assez avant. Ce n'est pas lui qui l'eût proscrite, puisque tous ses efforts avaient été de faire refleurir l'enseignement théologique à Rome, à l'exemple des écoles chrétiennes de Nisibe et d'Alexandrie, puisqu'il établit la nécessité des lettres profanes pour l'interprétation des textes sacrés : « Car les saints pères, dit-il, n'ont point méprisé les sciences, et Moïse,

ferri ne insultet habere se facunda Græcia necessarium, quod vobis judicet esse subtractum.

Mot grec.- Lamparet a λáμлw nobis lamparet eloquium.

ad instar solis ejus quoque ab oriente

P. 405 vo.- Orthographos antiquos legant Velium Longum, Curtium Valerianum, Papirianum, Adamantium Martyrium, de v et b, ejusdem de primis, mediis, atque ultimis syllabis, ejusdem de b littera trifariam in unum posita, et Eutichen de aspiratione, sed et Focam de differentia generis. Quos ego quantum potui studiosa curiositate collegi.

P. 407. Quod si vobis non fuerit Græcarum litterarum nota facundia, imprimis habetis Herbarium Dioscoridis, qui herbas agrorum... Post hæc legite Hippocraten atque Galenum latina lingua conversos.

Le traité de Schematibus, indique une connaissance solide du grec.— On y trouve Prolepsis, zeugma, hypozeuxis, syllepsis, anadiplosis, anaphora, epanalepsis, epizeuxis, paronomasia, Paromoon, homoeoteleuton, homoeoptoton, polyptoton, hyrmos, polysyntheton, dialyton... Carientismos, parœmia, sarcasmos, asteismos. Dans le traité de Ortographia, on rencontre beaucoup de mots grecs: Cassiodore blâme à propos de crotalizo, qu'on écrivait crotalisso, et de malacizo, écrit malacisso, ceux qui n'écrivent pas selon l'orthographe grecque : « Sed viderint illi qui cum verbis integris Græcorum uti non erubuerunt, erubescendum crediderunt litteras græcas intermiscere. Nobis satius alieno bene uti, quam ineleganter nostra apponere. » (p. 426, vo p. 427.) Item aliud est Cilonem aliud Chilonem. Cilones vocantur homines angusti capitis et longi, et h asperationem non habet; Chilones vero, cum h asperatione scripti, a brevioribus labiis homines vocitantur, quod est a Græco vocabulo derivatum πapà tà xɛíλŋ : unde Achillem quoque ferunt esse nominatum. Ψελλιστής, ἄσωτος, βληχηθμός, μόριον, σεῦτλον, οξύταριον (sic), υδαρής, ἐλέφας, ἀναίσθητος, ἀφύης, οικογένης. Battualia, quæ vulgo battalia dicuntur... inde etiam battuatores Toùs 6agaviotas dici puto. (p. 436, v°) Virum bonum alii herobium tanquam sit pws avaбε6шwxwg. Dans le traité de Grammatica, à la Préface, il dit du mot ars: Alii dicunt a Græcis hoc tractum esse vocabulum áñò tñs άpets, id est a virtute doctrinæ. Dans le De Rhetorica, beaucoup de mots grecs, de même, dans le De Dialectica. De Arithmetica (p. 206, v.) Hunc (Nicomachum) primum Madaurensis Apuleius, deinde magnificus vir Boëtius latino sermone translatum Romanis contulit lectitandum.

le fidèle serviteur de Dieu, fut instruit de toute la sagesse des Egyptiens (1). "

Dans le traité des Sept Arts (de Septem Disciplinis), il traite successivement de la grammaire, de la rhétorique, de la dialectique, etc., et ne s'en tient pas aux ressources des livres latins. Désireux de faire participer ses compatriotes aux travaux historiques des Grecs, il fit traduire par un de ses amis, nommé Epiphane, les trois historiens grecs Socrate, Sozomène et Théodoret, recueillis en un seul corps divisé en douze livres. C'était la continuation de l'histoire de Rufin, qui avait traduit les dix livres d'Eusèbe et y en avait ajouté un onzième. C'est là ce que Cassiodore appelle lui-même l'Histoire tripartite. Depuis ce temps, les latins n'en ont plus connu d'autre (2).

On voit que les rapports n'étaient pas rompus entre l'Occident et l'Orient, et qu'il y avait encore en Italie des hommes capables de traduire le grec. Il est vrai de dire que ces hellénistes étaient presque toujours des étrangers. Témoin ce moine Denys, Scythe d'origine, qui, suivant Cassiodore, traduisait à livre ouvert, en latin, tous les livres grecs qu'on lui soumettait. De même, il traduisait en grec les livres latins, et il avait l'air de lire les traductions qu'il improvisait avec une si merveilleuse facilité (3).

Mais pourtant il fallait que la langue de l'église primi

(1) Ozanam. t. II. p. 396.

(2) Abrégé de l'Hist. eccl. p. 634.

(3) Dionysius Monachus, Scytha natione, sed moribus omnino Romanus, in utraque lingua valde doctissimus..... qui, petitus a Stephano episcopo Salonitano, ex græcis exemplaribus canones ecclesiasticos moribus suis, ut erat planus atque disertus, magnæ eloquentiæ luce composuit, quos hodie usu celeberrimo ecclesia Romana complectitur.... Alia quoque multa ex græco transtulit in latinum... Qui tanta latinitatis et græcitatis peritia fungebatur, ut quoscumque libros græcos in manibus acciperet latine sine offensione transcurreret, iterumque latinos attico sermone legeret ut crederes hoc esse conscriptum quod os ejus inoffensa velocitate fundebat.De Divinis lectionibus. p. 398.

tive commençât à n'avoir plus autant d'adeptes, puisqu'on recourait au secours des traductions. Cassiodore a donc, quoiqu'il fût lui-même très-versé dans la connaissance de la littérature hellénique, contribué à en faire déchoir l'usage. Une traduction met forcément le texte original dans l'oubli, quand la langue de ce texte est difficile et commence à perdre le caractère d'un idiome courant.

XVIII.

On peut en dire autant de Boèce, que Cramer appelle avec Cassiodore les derniers des Grecs (1).

Boèce en effet est le dernier représentant de la philosophie païenne à Rome; il est le dernier représentant du véritable hellénisme en Occident. Il n'était pas simplement frotté de grec, comme on pourrait le dire de beaucoup de ceux dont nous avons rappelé les noms, il possédait à fond la littérature hellénique: il en avait abordé toutes les sources, et M. Judicis de la Mirandole, dans sa préface à la traduction de la Consolation Philosophique de Boèce (1861), croit avoir prouvé que ce philosophe n'était pas chrétien. Il a aussi réfuté une autre erreur qui le faisait vivre dix-huit ans à Athènes dans l'intimité de Proclus (VI).Cassiodore le félicite au contraire d'avoir fréquenté les écoles athéniennes sans s'être éloigné de son pays, et d'avoir ainsi rendu romaine la philosophie de la Grèce: «Sic enim Atheniensium scholas longe positas introisti; sic palliatorum choris miscuisti togam, ut Græcorum dogmata doctrinam feceris esse romanam (*)".

(1) De Græcis Medii Ævi studiis pars I. p. 16-22. Sundiæ, 1848. (2) Variar. epist. Lib. I. ep. 42.

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Le même Cassiodore rend un éclatant témoignage à l'instruction grecque de Boèce. Il lui dit qu'il est rempli d'une ample érudition, et qu'il a puisé à la source même de la science les arts que le vulgaire pratique sans les connaître.... « Au moyen de tes traductions, on peut lire en Italie Pythagore le musicien, Ptolémée l'astronome; l'arithmétique de Nicomaque, la géométrie d'Euclide sont entendues des Ausoniens, et le théologien Platon, le logicien Aristote disputent dans la langue de Romulus. Que dis-je? Tu as rendu à la Sicile le mécanicien Archimède transformé en fils du Latium, et tous les arts et toutes les sciences que des hommes différents avaient donnés à la Grèce féconde, Rome les a reçus de toi seul, exposés dans sa langue nationale. -Translationibus enim tuis Pythagoras musicus, Ptolomæus astronomus, leguntur Itali; Nicomachus arithmeticus, geometricus Euclides audiuntur Ausoniis; Plato theologus, Aristoteles logicus Quirinali voce disceptant. Mechanicum etiam Archimedem Latialem Siculis reddidisti, et quascumque disciplinas vel artes fecunda Græcia per singulos viros edidit, te uno auctore, patrio sermone Roma suscepit (1).»

Cette ample et solide connaissance du Grec honore beaucoup Boèce et l'Italie; elle paraît plus précieuse encore quand on se souvient que Boèce a vécu à la cour du roi des Goths Théodoric; que, de toutes parts, se levait déjà la barbarie avec des noms comme ceux de Clovis, et que Cassiodore, en priant Boèce de choisir un joueur de harpe que Théodoric veut envoyer en présent au roi des Francs, dont il a épousé la sœur Audeflède, fait observer qu'il doit être le meilleur de l'époque, car il aura à opérer le miracle d'Orphée lorsqu'il apprivoisait des hordes sauvages par la douceur de ses accords. «Citha

(1) Cassiodore. Variar. Epist. lib. I. 45.

rædum, quem a nobis diximus postulatum, sapientia vestra eligat præsenti tempore meliorem, facturus aliquid Orphei quum dulci sono gentilium fera corda domuerit (1).

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Cave (2), J. Scaliger (3), Vossius (*), Pierre Bertius (5), Fabricius (6) répètent tous les éloges de Cassiodore. Depuis Varron, dit Vossius, Rome n'avait pas eu de plus grand érudit.»

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Dans le catalogue de la bibliothèque du monastère de Vivaria, dressé par Cassiodore lui-même, nous avons la liste des ouvrages que Boèce a traduits. L'abbé en recommandant à ses moines de les lire, nous en a transmis les titres; ce sont: l'Introduction de Porphyre, les Catégories, le Traité de l'Interprétation, le Commentaire sur le livre des syllogismes hypothétiques d'Aristote, les Analytiques, les Topiques du même auteur; plusieurs Dialogues de Platon, la Mécanique d'Archimède, la Géométrie d'Euclide (une partie seulement), l'Astronomie de Ptolémée, l'Arithmétique de Nicomaque, le traité de Pythagore sur la musique.... Isagogen transtulit Patricius Boetius, commentaque ejus gemina derelinquens. Categorias idem transtulit Patricius Boetius, cujus commenta tribus libris ipse quoque formavit. Περὶ Ερμηνείας supra memoratus patricius Boetius transtulit in latinum, cujus commenta ipse duplicia minutissima disputatione tractavit.... Supra memoratus Fabricius Boetius de syllogismis hypotheticis lucidissime pertractavit, etc. (7). »

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Nous ne parlons pas de ses travaux originaux qui se

(1) Ibid. lib. II. ep. 40.

(2) Hist. litt. p. 1. Soc. VI. p. 321.

(3) Hypercritique. 1. Vl. p. 825.

(4) De Poet. lat. c. 5,

(5) Præf. in libr. de consolatione philosophia.

(") Biblioth. lat. lib. III. c. 15. p. 643.

(7) Cassiodore. De Dialectica. in fine.

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