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Soissons Roger Chippe, poursuivi pour un assassinat dont les juges ordinaires l'avaient absous dix ans auparavant, le procès de Gilles Hachard et du comte de Saint-Pol prouvent que les réformateurs savaient au besoin, infliger des peines plus sévères et ne se laissaient point toujours retenir par le respect de la chose jugée. Robert de Corbie avait, sans doute, bien gagné les cent trois livres parisis de gages qu'il toucha, comme réformateur, au bout de quatre mois d'exercice, le 5 juillet 1357'.

Cependant à l'opposition du Roi succédait la résistance des provinces. Les demandes d'argent que renouvelaient sans cesse les généraux sur le fait des subsides ne contribuaient pas moins que l'appareil formidable déployé par les généraux réformateurs à présenter le nouveau gouvernement sous un aspect peu aimable. Le rendement de l'impôt était loin de répondre aux espérances premières. Vers la fin de juil. let, suivant Pierre d'Orgemont, réformateurs généraux, élus sur le fait du subside, nouveaux membres du Grand Conseil, toutes ces créatures des États « commencièrent à decliner, et leur puissance à apeticier L'archevêque de Reims, qui jusque là s'était montré des

magnis laboribus, penuriis ac sumptibus et expensis, detineri, et omnia bona sua ad manum nostram poni fecerunt........... » (Arch. nat., Transcrits, X 2a 6, fol. 322 vet 385 v.)

1. Arch. nat., JJ 86, no 483. L'arrêt des réformateurs fut cassé par le Dauphin, au mois de septembre 1358 (Ordonnances, t. III, p. LXXII).

2. Un accord était intervenu, dont les réformateurs députés dans le bailliage d'Amiens ne voulurent tenir aucun compte (Arch. nat., Transcrits, X 2a 6, fol. 386 v°).

3. Bibl. nat., Quittances, ms. français 26002, n° 732.

4. MURATORI, Rerum italicarum scriptores, t. XIV, col. 436. — Cf. J. QUICHERAT, Plutarque français, t. I, p. 326.

plus ardents, crut utile de se rallier au parti du lieutenant général '.

Ces divers indices de l'insuccès du gouvernement révolutionnaire firent sortir le duc de Normandie de sa torpeur. Il jugea venu le moment d'agir et se porta sur le terrain de la lutte avec une énergie que des documents nouveaux contribueront à mettre en lumière. Vers le milieu du mois d'août, il s'attaqua, non pas au Grand Conseil, mais à une sorte de gouvernement irrégulier établi en place de Grève qui, par son influence sur la bourgeoisie et par la menace de l'émeute, avait, dès les premiers jours, pesé sur les résolutions du Conseil. Il signifia aux meneurs Étienne Marcel, Charles Toussac et Jean de l'Isle « que il vouloit des or en avant gouverner et ne vouloit plus avoir curateurs; et leur deffendit qu'il ne se meslassent plus du gouvernement du royaume, que il avoient entrepris par telle manière que on obeissoit plus à eux que à monseigneur le Duc. » Le membre le plus influent du Conseil, Robert le Coq, reconnut à ce langage qu'il allait perdre ses principaux alliés; il regagna son évêché : « Car il veoit bien, ajoutent les Grandes Chroniques, que il avoit tout honny. >>

Le duc de Normandie, de son côté, n'avait pas moins hâte de quitter Paris, où le terrain tremblait sous ses pas. Dès qu'il le put, il entreprit des chevauchées par la province et, à défaut de moyens plus sûrs, recourut à la persuasion pour obtenir de ses bonnes

1. Grandes Chroniques, t. VI, p. 59 et 60. — Chroniques de J. Froissart, édit. S. Luce, t. V, P. 95.

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villes des hommes d'armes et des subsides. S'il n'osa rappeler encore les vingt-deux officiers révoqués à la demande des États généraux', il eut soin de leur faire parvenir des marques de son bon vouloir. Dès le 1er juillet, il avait renvoyé au Parlement un procès intenté par-devant les réformateurs à son « amé M Regnauld d'Acy, avocat au Parlement ». La lettre suivante, datée de Rouen, le 26 août 1357, prouvait encore mieux à Robert de Lorris que son maître ne l'abandonnait pas.

« Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et à venir que, comme nostre amé et feal chevalier et conseillier, messire Robert de Lorris, sire d'Ermenonville, depuis la prise de nostre dit segneur, ait esté continuelment à nostre Conseil et en noz besoignes, et l'aions envoie à Bourdeaux et en Angleterre aus traictiés qui ont esté entre nostre dit segneur et ses ennemis, et de nouvel li aions expressement commandé qu'il soit et demeure à noz Conseilz et ès besoignes de nostre dit segneur et de nous pour les queles choses il, doubtant que, si comme autresfoiz fu parlé contre lui ès assemblées qui ont esté à Paris depuis la prise de nostre dit segneur, que encorez aucuns ses hayneux et malveillanz ne vousissent requerre ou pourchassier aucunes choses ou temps avenir contre sa personne, ou en desheritement de lui, de sa femme ou de ses enfanz, et pour ce nous a supplié que, comme ce qu'il a fait depuis, tant à aler et demourer ès dis traictiez comme à nostre Conseil, ce ait esté de nostre especial commandement, et non pas à sa requeste, ainçois, se il nous cust pleu, feust volentiers demouré en sa maison et entendu en ses besoignes, et aussi que pour autres causes il n'ait plusieurs hayneux et malveillans, que nous vousissienz pourvcoir à la scurté de sa

1. « Et furent presque tous ceux qui avoient esté mis hors de leurs offices remis en leur estas, excepté les nommés vint deux, jasoit ce que aucuns d'iceux n'en laissassent onques leur estas. » (Grandes Chroniques, t. VI, p. 60.)

tant

personne et des biens de lui, de sa femme et de ses enfanz. Si avons eu sur ce avis et deliberacion, et consideré plusieurs scurtez, saufs conduis et autres graces qu'il a de nostre dit segneur et de nous, dont nous sommes recors, et ne les voulons pas estre declarez en ces lettres, et pour cause li avons respondu, de nostre propre bouche, que nous ne commandrons ne soufferrons qu'il soit pris, arrestez ou emprisonnez, ne son corps, le quel nous avons autres foiz pris et mis, prenons encores et mettons de nouvel ou sauf conduit de nostre dit segneur et de à li valoir et s'en aidier en tous cas, nous, comme il vivra, ne abandonnerons, ne la main de nostre dit segneur ne la nostre ne mettrons, ne soufferons estre mises ès maisons, terres et autres biens de lui, de sa dicte femme, de Jehan, leur filz, ne de leurs autres enfanz et heritiers, ne ne soufferrons que arrest ou empeschement y soit mis par voie de justice ne de fait, li vivant ne apres sa mort, à la requeste de quelcomquels (sic) personnes, ne pour quelcomquels causes que ce soit. Ainçois le garderons et deffendrons en touz lieux de toutez forces, prises, arrestz et empeschemens, tant par voie de justice comme de fait, dont l'en le voudroit suivir ou approchier criminelment ou civilement, tant pour cause de la restitucion de cinquante mille chaeres d'or que nostre dit segneur a faite audit messire Robert à cause de sa femme, heritière de feu Pierre des Essars, les queles chaeres nostre tres chier segneur et ayeul, le roy Philippe, que Dieux absoille, voulu avoir pour certaine composition dudit feu Pierre des Essars, comme pour quelconquels autre cause que ce soit, de tout le temps passé jusques au jour de la date de ces lettres. Et, [pour] oster de toutes doubtes li, sa femme et ses enfanz, tout le droit que nostre dit segneur ou nous avons, povons et devons et pourrons avoir és biens de lui, de sa femme et enfanz pour causc des dictes cinquante mille chaerez, se l'en vouloit ou povoit dire que la dicte restitucion n'eust pas esté deuement faicte ct qu'il fust tenus de les rendre, si comme conseillé et requis nous fu par aucuns en aucunes des dictes assemblées, nous avons donné, quitté et remis, donnons, quittons et remettons perpetuelment audit messire Robert, à sadicte femme et à leurs dis

hoirs et lamaison et toute la terre d'Ermenonville, le chastel et toute la terre de Beaurain en Artoys, avecques toutes leurs appartenances, que le dit messire Robert donna et promist à donner en mariage audit Jehan de Lorris, son fils ainsné, et depuis l'en a mis en foy et hommage, retenu à la vie de lui et de sa dicte femme l'ussuffruist seulement en ladicte maison et terre d'Ermenonville, et le chastel et toute la terre de Montespillouer, que le dit messire Robert a baillies et assignez à sa dicte femme en douaire, et la maison et toute la terre de Ponthermier, avecques toutes leurs appartenances, qu'il a bailliez et assignez en heritage perpetuel à sa dicte femme, pour recompensacion de terre que elle apporta avecques lui en mariage qu'il a alienée, nous avons franchis, delivrés et deschergiés à tous jours de toutes cherges et ypotheques, actions et obligacions quelcomquels que nostre dit segneur ou nous y pourrions ou devrions avoir à cause des dictes mille chaerez, et tous les autres biens meubles et non meubles desdis messire Robert et sa femme, dudit Jehan, leur filz, et de leurs autres enfanz et heritiers et de chascun de euls presens et avenir, et de toutez autres debtes, chargez et obligacions quelcomquels en quoy il, pour leur propre fait ou le fait de leurs devanciers dont il ont cause, povoient estre tenus à nostre dit segneur et à nous... Et ces choses et chascune d'icelles, que nous avons ditez, promises et ottroiées de nostre propre bouche, à la seurté de la personne dudit messire Robert et des dis biens et terres de lui, de sa dicte femme et de leurs dis cnfanz, de nostre pure et franche liberalité et pour certaines et justes causes qui à ce nous ont esmeu, promettons loyalment, en bonne foy et sur nostre honneur, tenir, garder et acomplir, et que contre n'yrons, ne aler ne venir ferons ne soufferrons, à requeste de quelcomquels personnes ne pour quelcomquels causes que ce soit; ainçois, se aucuns se vouloient efforcier de faire le contraire, l'empescherons et y resisterons de nostre povoir et les en punirons; et ne souffer rons que jamais les graces, dons, quittances, pardons, remissions, saufs conduiz et seurtez faites, donnez et ottroiez audit messire Robert, à sa dicte femme, audit Jehan ou à leurs

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