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parmi les classes ouvrières. Moins bien dotées que les anglicans, leur culte est plus simple et plus modeste. Le chant des cantiques et le sermon du pasteur suffisent à ces sectes. Elles font consister dans la raison et l'esprit, la vérité de l'Evangile. Leurs temples n'exigent pas un culte extérieur et profane qui cherche à émouvoir les sens plutôt qu'à convaincre le cœur.

Le casuel du culte est peu dispendieux dans de pareilles communautés. Quatre murs, un toit et quelques bancs rustiques suffisent pour le temple et le mobilier. Le prêche et l'enseignement, voilà les préceptes de ces sectes. Elles se gouvernent elles-mêmes sans l'intervention ni le concours d'aucune autorité étrangère à leur mission. L'Église et l'école se confondent souvent chez les dissidents, c'est-à-dire que l'instituteur et le prêtre exercent leur mission dans le même temple, tout en conservant l'indépendance la plus complète dans leurs fonctions respectives.,

L'organisation de l'enseignement public, qui autrefois laissait tant à désirer à Harpenden, y a fait, dans ces dernières années, de grands et rapides progrès. Ils sont dus à l'initiative particulière tout autant qu'à l'émulation qui règne entre les différentes sectes.

Il y a six écoles à Harpenden: L'école britannique divisée en deux sections, pour les enfants et pour les jeunes gens; une école de dimanche; une école libre où les dissidents et même quelques anglicans reçoivent l'enseignement, et une école de filles.

L'enseignement religieux est donné par le pasteur dans les écoles qui dépendent du culte anglican. Mais on n'est pas unanime, même chez les anglicans, pour maintenir l'union de l'Église et de l'école. Dans un pays où les sectes sont nombreuses, cette union complique la situation, en obligeant les dissidents ou les anglicans à créer des écoles libres dont l'entretien absorbe un grand capital, lequel serait plus utilement consacré au développement général de l'instruction. Depuis quelques années, l'exemple des

Etats-Unis d'Amérique a rallié partout en Angleterre les meilleurs esprits. Ils comprennent qu'il faut laisser à l'Eglise, dans un pays libre, le soin d'enseigner la religion conformément aux vœux des parents, et à l'école la tâche de préparer l'homme à la vie civile. La majorité des Églises dissidentes se sont ralliées à ce système. Il n'y a pas de catholiques à Harpenden, mais dans la plus grande partie de l'Angleterre ils se sont, comme en Hollande, entendus pour laisser à l'Église le soin d'enseigner les préceptes de la religion. Ils pensent que la liberté, malgré ses inconvénients, est encore la meilleure garantie de leur indépendance. Les anglicans eux-mêmes apprécient déjà les avantages de cette union de tous sur les bancs de l'école. Là où elle existe, cette fusion de toutes les sectes a contribué plus que toute autre réforme au développement de l'enseignement. Elle a donné aux écoles qui l'ont adoptée de grandes forces. Unies dans un même but, elles ont pu améliorer la position des instituteurs, étendre l'enseignement gratuit à un plus grand nombre d'enfants et triompher sans trop d'obstacles de toutes les difficultés par lesquelles l'esprit de secte vient souvent mettre des entraves au progrès de l'enseignement.

L'école anglicane à Harpenden est exclusivement réservée aux enfants. On n'y donne que la première éducation et les éléments pour suivre une école supérieure qui est indépendante de l'Eglise. Le pasteur anglican préside le comité chargé de pourvoir au budget de cette école.

Le bilan présenté par le trésorier était ainsi conçu pour l'exercice de 1860 :

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Salaire de l'instituteur

Salaire de l'institutrice.

DÉPENSES.

Logements de l'instituteur et de l'institutrice.
Livres et atlas.

L. S. D.

77 10 0

40 0 0

18 14 4

3 0 7

158 14 11

Les recettes annuelles affectées exclusivement à l'école anglicane montent régulièrement à près de 4,000 francs.

Ce budget provient de différentes sources, comme le démontre le bilan de l'exercice de 1860 à 1861, présenté par le comité des écoles.

Les souscriptions volontaires et les dons particuliers fournissent à l'école anglicane de Harpenden la plus grande partie de ses ressources. Ainsi les contributions volontaires et les dons particuliers montent à 96 1. 16 s. 9 d.; le gouvernement n'intervient que par un faible subside de 7 l. 13 s. 0 d. ; le reste est fourni par les élèves, qui sont au nombre de 146. Ils payent en rétributions scolaires environ 11 sh. par an. Le gouvernement accorde encore un subside pour le mobilier des écoles, mais il n'est pas annuel et n'est pas reçu régulièrement.

Les méthodistes et les indépendants sont très-nombreux à Harpenden. Ces sectes dissidentes entretiennent une école libre, également fréquentée par quelques anglicans. Elles s'abstiennent d'intervenir dans l'enseignement religieux que les enfants vont chercher à leur église respective. Le progrès de ces écoles libres a été rapide. Partout en Angleterre, les esprits les plus divisés sur les questions politiques et sociales, apprécient grandement les avantages de l'union dans les questions qui touchent à l'enseignement public. Ils comprennent que la division entrave le progrès de l'instruction, car les paroisses n'ont pas de ressources suffisantes pour diviser leurs forces et augmenter inutilement les frais généraux de l'enseignement.

Dans les comtés agricoles où la population n'est pas agglomérée, la division religieuse est quelquefois un grand obstacle au progrès de l'enseignement. Déjà dans le Lancashire, le système de la séparation absolue de l'Église et de l'école a prévalu dans un grand nombre de communes. Les catholiques n'ont pas été les derniers à se rallier à se système. Ils ont compris comme les autres dissidents que la division était une cause de faiblesse, et que pour améliorer les écoles, tous les citoyens et toutes les opinions avaient intérêt à s'entendre et à concentrer leurs efforts afin d'assurer l'avenir des générations nouvelles.

Dans un grand nombre de comtés industriels, les anglicans ont admis ce système, mais dans les districts agricoles le clergé anglican, soucieux avant tout de son autorité et de ses priviléges, comme tous les corps qui tirent leur principale force du monopole et leur raison d'être de l'intolérance, s'est vigoureusement opposé à la prospérité de ces écoles libres. A Harpenden, la même opposition s'est manifestée, mais comme la paroisse est assez riche et suffisamment peuplée, la division fomentée par le clergé anglican n'a pas entravé la prospérité de l'école libre dont le revenu annuel s'élève à près de 2,000 francs, provenant pour la plus grande partie de dons volontaires fournis exclusivement par les habitants de la paroisse.

Le système de l'indépendance de l'Église et de l'école tend à prévaloir dans un grand nombre de districts. Lord Brougham le constatait en ces termes dans son discours d'ouverture du congrès de Dublin de l'Association nationale pour le progrès des science sociales:

« Le dernier congrès de Glasgow a fait faire un pas immense à toutes les questions qui se rattachent à l'éducation publique. Le progrès de l'enseignement primaire avait été sérieusement compromis par l'esprit qui anime les différentes sectes et les porte à user leurs forces, en s'opposant les unes aux autres, au lieu de les unir et de les grouper pour travailler ensemble au progrès général de l'instruction publique. Un grand pas a été fait au congrès

de Glasgow. Pour la première fois, les chefs de l'Église anglicane, de l'Eglise indépendante et des presbytériens se réunirent pour discuter leurs différents systèmes. Ils nommèrent un comité de membres de toutes les sectes, dans le but d'aplanir les obstacles qui s'opposent à leur union. Les deux derniers congrès ont eu l'immense avantage de réunir les professeurs laïcs et ecclésiastiques. » Les communications faites au dernier congrès de Dublin, démontrent l'importance qu'on donne à toutes les questions qui se rattachent à l'enseignement.

« Notre richesse, dit avec raison un écrivain américain, se trouve dans l'intelligence de nos populations et non dans nos mines d'or et d'argent. Nous travaillons à mettre en valeur le capital intellectuel du peuple, tout autant en généralisant l'enseignement qu'en mettant tout le monde à même de l'utiliser à ses aptitudes diverses. »

En Angleterre, on n'est pas encore arrivé à ce résultat, mais les succès obtenus en Écosse par l'entente des différentes sectes et l'exemple des États-Unis où l'esprit de secte est banni de l'enseignement nous fait croire qu'on marche vers une réforme radicale en Angleterre.

A côté de l'école britannique, il y a à Harpenden une école de dimanche gratuite et entretenue exclusivement par des dons volontaires. Le local est fourni par le comité et l'instruction donnée par le pasteur et quelques dames de la paroisse qui consacrent leurs loisirs du dimanche à l'éducation des enfants pauvres de la commune. L'hiver on donne fréquemment à dîner à plus de 200 enfants. Des dons volontaires suppléent régulièrement à ce budget de la bienfaisance.

Quand on visite ces écoles, on est étonné de la propreté et de l'ordre qui y règnent. Nulle part, les enfants ne sont élevés avec plus de soin qu'en Angleterre.

L'éducation de la famille y forme l'objet de la préoccupation des parents. La femme anglaise dans les contrées que le paupérisme n'a pas envahi, se voue au soin de la famille. Le ménage l'occupe exclusivement. Dans les cam

R. T.

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