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Origène lui sont également familiers. Il a appris l'astronomie dans Pythagore, la géographie dans Strabon, il les interprète avec soin dans son livre sur la Division de la nature, et l'on y trouve de fréquents emprunts faits à la langue grecque (1). Il y a plus, le titre de ce livre rapporté au XIII° siècle par Vincent de Beauvais, dans son Miroir historial, est grec «peri fision merismu. » Ce qui rend acceptable la supposition de M. Cramer, que cet ouvrage aurait bien pu avoir été écrit primitivement en grec. Si l'auteur avait eu recours à cette langue, c'était dans la prévision des embarras que la hardiesse de sa philosophie devait lui susciter plus tard.

Quoiqu'il en soit de cette supposition, Scot était capable d'écrire en grec (3). Il en a donné des preuves qui subsistent encore dans les poésies qui nous restent de lui. Déjà Usher dans son recueil avait cité une pièce adressée à Charles-le-Chauve, où se trouvaient quelques expressions grecques, témoin ce début (3):

Hanc libam sacro græcorum nectare fartam,
Advena Joannes Spondo (*) meo Carolo.

L'auteur ne nous permet pas d'ignorer son dessein. Pour donner à son hommage plus de saveur et plus

(1) Edit. Floss. p. 49-1022. Quinque de divisione naturæ libris, et exposi tionibus super hierarchiam sæpe singula græca verba sunt immixta. Cramer, p. 31.

(2) Scotus non solum vertit Dionysii Areopagitæ hierarchiam, et quidem, ut Guilielmi Malmesburiensis utar verbis, de verbo verbum transtulit, quo fit, ut vix intelligatur Latina, quæ volubilitate magis græca quam positione construitur nostra, verum etiam adeo Græcus factus esse videtur, ut in rixis tunc inter Latinam et Græcam ecclesiam exortis, a Photii partibus staret, græcosque longe pluris quam Latinos haberet. Versioni enim Operum S. Dionysii hosce subjunxit versus:

Nobilibus quondam fueras constructa patronis,
Subdita nunc servis, heu! male, Roma, ruis.
Deseruere tui tanto te tempore reges,

Cessit et ad Græcos nomen honosque tuus.

(3) Usher. p. 40.

(4) Pour σπένδω.

Cramer, ibid. p. 30.

de prix, il veut mêler à sa composition le nectar des Grecs.

C'est la même méthode qu'on retrouve dans les pièces recueillies et publiées par le cardinal Angelo Maï au tome V, p. 426, de ses Auctores classici. Ce savant éditeur a donné douze poèmes de Jean Scot; à chaque vers à peu près, il y a un mot grec, quelquefois plusieurs vers se suivent écrits dans cette langue. C'est un jeu perpétuel. Quel que soit le sujet, Jean Scot trouve le moyen d'y introduire l'ornement qu'il suppose agréable à ses lecteurs. S'agit-il de Jésus crucifié? Scot débute ainsi :

Hellenas Troasque suos cantarat Homerus,
Romuleam prolem finxerat ipse Maro,
At nos cœligenum regis pia facta canamus
Continuo cursu, quem canit orbis ovans.
Illis illiacas flammas subitasque ruinas,
Trojarum que uayas dicere ludus erat.

Le vers trente-huitième du même morceau offre un mot grec:

oni fortis reseravit claustra profundi.

Le second poème a pour titre de Cruce et on y voit au vers douzième cette allusion à un lieu célèbre dans Athènes par l'éloquence de ses orateurs:

Te nostra dehinc justo modulamine laudat.

Et sur ce vers Angelo Maï écrit cette note: « Rursus noster utitur in Græcis versibus hoc vocabulo. »

Ιδε βαθου (sic) θανάτου τὴν τοῦ ταφθέντος ἔγερσιν

Καὶ ζῶντι Χριστῷ πνὺξ μελόδημα βία.

Au vers trente-deuxième:

Si quis auuboxxis discit amare notas,

Au quarante-troisième :

Tunc àλáλayua canit gaudens multumque triumphans.

L'éditeur ajoute encore dans une note ces exemples d'hellénisme:

et encore:

De nostro Karolo pacem qui sceptra dedisti,
Χριστὲ σῶσον Κάρολον τῷ τὴν βασιλείαν ἔδωκας,

Εἰρήνη πιστῷ δήμῳ, βασιλέϊ ή κλέος ἄκρῳ.

Cette même pièce sur la croix s'achève par ces deux

vers:

Ορθόδοξος ἄναξ, ευσεβής, κλύτος ὁπλίτης

Σώφρων χριστοφόρος, Κύριος ὁ Κάρολος.

M. Cramer qui rapporte ces vers donne à la fin du premier ἔγκλυτος ἄρχος. Le vers soixante-onzième de ce morceau offre encore un mot grec:

μén dum lætus, regi mea debita solvo.

Nous continuons à recueillir ces accidents helléniques, dans le poème III qui a pour objet de célébrer la fête de Pâques, au vers dixième:

Vestitur que suis frondibus et λαχάνοις.

Au vers quarante-quatrième :

ápuata dispersim Thetidis ima tegunt.

Au vers quarante-cinquième :

Hæc fuerunt venturi ivòźλμata Christi.

Dans cette même pièce au vers vingt-quatre, le mot ophis a sans doute été mal copié et il faudrait le rétablir ainsi avec Angelo Maï:

Quam prius incautam perdidit astus opew.

Le poème IV n'offre qu'un mot grec, il se trouve au vers vingt-sixième :

Quam Karolus reperit fortis et almus ava.

Le poème V a pour sujet la résurrection du Christ. On y remarque le vers quarante-septième:

Προσευχῆς petimus votis et corde precamur.

Le quarante-huitième et le quarante-neuvième sont complétement grecs:

Βασιλέει Καρόλῳ ἡμῶν σὺ Χριστὲ βοήθει

ὡς κληροῦσθαι χόρους δυνατὸς οὐρανίους.

Les pièces qui portent les chiffres VI et VII, consacrées à la descente du Christ aux enfers se terminent ainsi :

Στοῖχοι Ἰωάννου τῷ Κυρίῳ αὐτοῦ ἄνακτι Καρόλῳ.

Στοῖχοι τοῦ Ἰωάννου τῷ Κυρίῳ αὐτοῦ ἄνακτι Καρόλῳ.

La pièce huitième, de Verbo incarnato, est celle qui est la plus diaprée d'expressions grecques. On y trouve au premier vers οὐρανίας; au sixième γνόφος (p. δνόφος) κορυφήν; au septième, Θεσμόν ; au huitième, ταρσῶν; au dixième, Téρʊys; au onzième, Cox; le quatorzième peut bien passer pour être grec quoi qu'il soit écrit en caractères latins in genus, in species rhythmosque chronosque, toposque; au dix-huitième, Aryλn. Viennent ensuite trois vers grecs qui se suivent, vingt, vingt-et-un, vingt-deux :

Φοίβη, καὶ στίλβων, καὶ φῶς, καὶ Ἥλιος, Αρης,
Φοίτων καὶ Φαίνονος ἄκροι περὶ κλίματα πάχνη

Εξῆς τοῦ κόσμου κέντρον Θέτις ἄσχετον ἅλας.

Au vingt-troisième, évvɛáployyos; au vingt-quatrième, Tas; au vingt-septième, wh. Les trente-troisième et trente-quatrième sont grecs :

ὢν τέλος, ὢν ἀρχὴ πάντων, ὢν ὄντα τὰ εἰσίν,
ὢν ἀγαθὸς καὶ καλὸς, κάλλος, μορφῶν τε χαρακτήρ.

Au trente-sixième avows; au trente-huitième, рéуovos; au trente-neuvième, utpoty; au quarantehuitième, vouσTE λóyos te; au quarante-neuvième, σapκικά, φύσις, αὐγάς ; au soixantième, παρθένος; au soixantedeuxième, rastp; au soixante-sixième, avopx; au soixante-onzième, púa; au soixante-douzième, púots.

La pièce IX qui porte dans le titre en lettres grecques le nom de l'auteur Versus Iohannis Cholo, n'a que trois mots grecs, au vers quatrième adŋv, au vingttroisième σάρξ, au quarante-neuvième σταυρῷ.

Le poème X s'intitule Preces pro Karolo, on y lit au vers quinzième :

Vota tui τέκνου Karoli tua λείψανα sancta,

au vers dix-neuvième Harmonici Cantus Oiαowτwv. La pièce XI est celle qu'Usher a citée; au mot Onévo que nous avons déjà relevé, il faut ajouter σταθμῷ.

Le poème XII et dernier, de Magno Dyonysio Areopagita, présente au troisième vers ɛλývŋv; au quatrième σταυρῷ ; au vingt-et-unième ἀρχῶν ἀρχαγγέλων τε chorus ἀγγέλωντε, τελαυτῶν, ce dernier mot a été sans doute estropié par les copistes; au vingt-deuxième, tážis.

Ampère en parlant de cet usage d'intercaler même dans les vers latins des mots grecs, et des vers grecs entiers (1) dans une pièce latine, dit qu'il lui semble voir un débris de statue ou un tronçon de colonne antique dans un édifice de la décadence (2). Ces débris sont quelquefois mutilés et méconnaissables, chez Scot Erigène, malgré l'ignorance des copistes, les fragments

(1) Pour les mots grecs dans des vers latins, voir le Recueil des historiens français, t. VII, p. 311 et 314.

(2) Tome III, p. 217.

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