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› La citoyenne Montboissier.

› Était-elle émigrée?

› R. Je ne le crois pas.

› L'accusateur public donne lecture d'une lettre timbrée Calais, adressée par Mauny à Beaulieu; elle est datée du 29 septembre, sans indication d'année ni de lieu, il lui demande des nouvelles de France, et lui rend compte de l'hospitalité que l'on accorde aux François; il dit que la jactance est hors de saison, etc.

› Le président à Beaulieu. D'après cette lettre, croyez-vous que Mauny ait été à Londres?

› R. Je le croyais, mais il vient de me désabuser lorsqu'il a dit qu'il n'avait feint de faire ce voyage que pour se soustraire aux poursuites de ses créanciers.

A qui avez-vous adressé la réponse?

› R. Chez un marchand, à Dieppe.

› Comment, vous avez reçu une lettre de Calais, et vous faites réponse à Dieppe?

› R. Qui.

> Il est prouvé au procès qu'à l'époque du mois d'août dernier, vous, Mauny, vous étiez porteur de six mille louis d'or.

. Cela m'avait été confié, et je remboursais à mesure en papier. L'or était alors au pair avec les assignats.

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Expliquez-vous d'une manière plus positive, et tàchez de rendre sensible votre répouse.

› R. L'argent était déposé chez des notaires dont les noms ne me reviennent pas; ils me donnaient des assignats en échange; j'achetais alors de l'or, et je le négociais; cela me produisit quel que avantage dans les premiers temps.

› Le président à Beaulieu. Mauny ne faisait-il pas en mème temps d'autres objets de spéculation, comme par exemple, sur du sucre, fer et acier?

› R. Pardonnez-moi,

› Quels sont les noms des notaires chez qui ont été déposés les six mille louis?

› R. Gabiou et Collin.

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» Le président à Mauny. Qu'entendez-vous par ces mots de votre lettre Les bons ouvrages français se vendent bien ici › en feuilles ?>

› R. C'étaient des ouvrages de littérature.

› Qu'entendez-vous par ces mots : « Le thé est ici contrebande, > il ne l'est pas à la Meilleraie. >

» R. C'était pour perpétuer l'illusion à mes créanciers.

› Lorsque vous écriviez à Beaulieu, quel intérêt aviez-vous à timbrer vos lettres de Calais et Dunkerque ?

R. C'est que Beaulieu était lui-même un de mes créanciers.

› Mais vous ne pouviez guère faire illusion à Beaulieu, puisqu'il avait six mille louis à vous. Quelle somme deviez-vous à son cousin Pierre Beaulieu?

› R. Vingt-cinq mille livres, pour du fer.

› Mais il avait une caution.

» R. Les six mille louis n'étaient plus en entier ; j'avais reçu 144,000 liv. en papier sur cette somme.

› Représentation faite aux accusés des pièces cotées 34 et 35 saisies sur eux, ils les reconnaissent.

› Le président à Beaulieu. Que sont devenus ces six mille louis? › Quatre mille louis ont été délivrés, et les deux mille autres sont restés à Chartres, chez le cousin de lui, accusé, pour nantissement de ce que Mauny lui doit.

› Comment se fait-il que votre cousin garde deux mille louis, pour vingt-quatre ou vingt-cinq mille livres qui lui sont dues?

› Mauny observe qu'il ne lui devait que cette somme à l'époque du mois de septembre, mais que depuis il a contracté avec lui de nouvelles dettes.

› Pourriez-vous produire quelques preuves des poursuites que vous ont faites vos créanciers?

› R. Oui, mais c'est de petites sommes.

› Combien deviez-vous en tout?

» R. Deux cent mille livres.

⚫ Comment se fait-il que vos créanciers, qui n'avaient obtenu

contre vous aucune sentence consulaire, vous obligeassent à vous cacher?

› R. C'était pour obtenir un délai de trois mois pour les paiemens que je devais leur faire.

› Mais vous étiez mal caché à la Meilleraie.

› L'accusateur public donne lecture d'un état qui constate que Beaulieu a délivré à Mauny, le 27 août, 1400 louis en or.

› Mauny, interpellé sur ce fait, répond : je les ai fait vendre à la bourse.

› Quel est l'agent de change que vous avez chargé de cette opération?

› R. Je les ai fait vendre sur la place par un ami.

. L'accusateur public donne lecture d'un état qui constate qu'au mois de décembre les 1400 louis étaient réduits à moitié. › R. Cela prouve la nécessité où j'étais de satisfaire mes créanciers.

Lecture est faite d'un troisième état de 3000 louis déposés chez Colin, notaire; cet état, signé Beaulieu, parle de fonds convertis en livres sterling.

› Le président à Beaulieu. Quel intérêt aviez-vous à faire pour Mauny ce commerce de louis?

, R. Aucun, que d'obliger un ami.

› Avez-vous fait des envois de numéraire en pays étrangers? R. J'ai envoyé 3000 liv. en assignats au citoyen Mazubat, à Liége; le second en février 1795, à l'adresse de M. Altona, banquier à Hambourg, de 24,000.

• Quelle était la destination de ces fonds?

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› R. Je réponds que les 3000 liv. envoyées par moi à Liége étaient destinées à un jeune Russe, nommé Orlof; l'argent envoyé par moi à Hambourg était destiné à Lamontagne-SaintCharles, prêtre déporté.

› Vous avez donné à connaître qu'il y a eu un troisième envoi. › R. Oui, 2400 liv. à Londres au même sieur Orlof. › Vous êtes-vous aperçu que c'était un nom supposé?

» R. J'ai su depuis que c'était Olivier Fontaine, beau-frère de Mauny.

› Le président à Mauny: Pourquoi faisiez-vous cet envoi d'argent à Olivier Fontaine?

› R. C'était une dette contractée avec mon beau-frère, bien avant que le loi eût défendu d'exporter du numéraire de France en pays étrangers; il avait payé cette somme pour moi, à l'occasion de plantes, graines et arbustes exportés de l'Amérique septentrionale en Angleterre ; je les avais achetés parce que ma passion favorite est l'agriculture.

› Le président à Beaulieu: Connaissez-vous le vrai nom du prêtre pour lequel vous avez fait l'envoi des 2,400 livres à Hambourg?

› R. Je l'ignore.

› L'accusateur public donne lecture d'une minute, écrite par Beaulieu et avouée par lui, qui atteste que le prêtre se nomme la Montagne.

Une autre minute est le brouillon d'une lettre écrite par le même au sieur Lavallette-d'Altona, banquier à Hambourg, par laquelle il le prévient que pour éviter l'erreur qui pourrait arriver, il croit devoir l'avertir que la Montagne et Saint-Charles, est le même individu.

› L'accusateur public observe à Beaulieu, qu'au moyen de ce qui est dit dans cette lettre, il ne pouvait ignorer que l'individu qu'il appelle la Montagne-Saint-Charles, était le frère de Mauny.

» R. Je le crois.

Mauny demande que l'on interpelle Beaulieu de déclarer comment il sait que la Montagne est son frère.

L'interpellation faite, Beaulieu répond: Je le sais par l'humeur que Mauny a témoignée lorsque je lui ai déclaré que je regardais la Montagne-Saint-Charles comme un nom supposé.

› L'accusé Mauny soutient que la Montagne-Saint-Charles est un prêtre, qui, après avoir refusé de prêter le serment ordonné

par la loi, a été déporté, et auquel lui accusé fait une pension de 1,200 liv.

› Pourquoi envoyez-vous de préférence, à un prêtre réfractaire, de l'argent, au préjudice de vos créanciers?

› R. Parce qu'il est lui-même un de mes créanciers.

› L'accusateur public donne lecture d'une pièce qui établit que le particulier à qui l'on écrit, a été engagé par Beaulieu à prendre le nom de la Montagne-Saint-Charles, et de se dire négociant.

› Le président, à Mauny: Quel était le fonds qui constitue les 1,200 liv. que vous faites de pension à la Montagne-SaintCharles?

› R. 12,000 liv. qu'il m'a prêtées en rente viagère.

› Chez quel notaire cette pièce a-t-elle été passée ?

› R. Elle l'a été sous seing privé, entre lui et moi, et il en est porteur.

. Le président à Beaulieu : Avez-vous connaissance que Mauny ait des frères?

, R. Oui, je lui en connais deux.

› Mauny, que sont devenus vos frères?

› Ils sont émigrés, mais depuis la guerre je n'ai point de correspondance avec eux.

› Beaulieu, connaissez-vous l'âge et la taille d'Olivier-Fontaine?

› Non.

Je vous observe que parmi les pièces qui se sont trouvées chez vous, il y en a une qui porte le signalement d'Orlof.

› Mauny, vous avez dit que vous aviez fait venir des arbres et graines de l'Amérique septentrionale, que sont-ils devenus?

R. Ils sont chez moi à Châteaudun, où j'ai la plus belle pépi nière; il serait même aisé de vérifier que je vends des arbres chaque année.

› L'accusateur public donne lecture d'une lettre écrite à Beaulieu par la fille de Mauny, sous la dictée de son père, en date du 9 novembre 1792, dans laquelle il lui ordonne de faire passer

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