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Pache. J'ai été instruit dans le courant de la journée qu'il se formait des rassemblemens considérables. J'ai, chaque fois, requis le commandant-général de veiller par tous les moyens au maintien de l'ordre et de la tranquillité publique. J'ai encore appris que dans les sections on délibérait sur la fermeture des barrières. Le conseil-général a pris un arrêté pour rappeler la loi, a déclaré qu'il restait en permanence; la majorité des sections a envoyé au conseil-général des députations pour l'assurer de sa soumission à la loi. On peut compter à présent sur la tranquillité de Paris.

Santerre. On répandait des propos insidieux, entre autres celui-ci : qu'on voulait un roi ; et on parlait du citoyen Égalité. Voici l'ordre que j'ai donné ce soir 10 mars. Il est encore besoin d'une forte surveillance et de plus d'exactitude que jamais. Les réserves de cent hommes par section resteront jusqu'à ce qu'elles soient remplacées; les commissaires des sections donneront au commandant-général avis des rassemblemens. J'ai donné encore ordre aux réserves d'être prêtes à marcher demain à six heures. Les barrières sont parfaitement libres. Il paraît qu'il n'y a guère que trois cents factieux qui veulent faire croire à un soulèvement pour le faire naître. J'ai envoyé dans les faubourgs : celui de Saint-Antoine ne s'occupe que de son recrutement. (On applaudit.)

Le maire, la députation du conseil-général et le commandant Santerre, invités aux honneurs de la séance, traversent la salle et se rendent à leurs fonctions.

On reprend la discussion sur l'organisation du tribunal révolutionnaire.

Duhem demande le rapport du décret qui attribue des jurés à ce tribunal.

On réclame la question préalable.

Le président la met aux voix, et prononce qu'il y a lieu à délibérer.

On demande avec chaleur l'appel nominal.

Laréveillière-Lepeaux. J'appuie l'appel nominal afin qu'on

sache dans le département de Mayenne-et-Loire que j'ai voulu que le pouvoir national fût exercé par toutes les sections de l'Empire, et non par une section particulière, et par la faction qui la tyrannise.

Vergniaud. Je demande aussi l'appel nominal, afin de faire connaître ceux qui se servent continuellement du mot de liberté pour l'anéantir.

Thuriot. Je propose un amendement qui pourra tout concilier. Je demande que les jurés délibèrent à haute voix.

On demande la question préalable sur l'amendement. Après quelques débats, la proposition de Thuriot est décrétée.]

La Convention adopte ensuite successivement, et après une légère discussion, les autres articles du projet de Lindet. — Voici la loi :

La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de législation, décrète ce qui suit:

TITRE PREMIER. De la composition et de l'organisation d'un tribunal criminel extraordinaire.

ART. 1. li sera établi à Paris un tribunal criminel extraordinaire, qui connaîtra de toute entreprise contre-pévolutionnaire, de tous attentats contre la liberté, l'égalité, l'unité et l'indivisibilité de la République, la sûreté intérieure et extérieure de l'état, et de tous les complots tendant à rétablir la royauté ou à établir toute autre autorité attentatoire à la liberté, à l'égalité et à la souveraineté du peuple, soit que les accusés soient fonctionnaires civils ou militaires, ou simples citoyens.

» 2. Le tribunal sera composé d'un juré, et de cinq juges qui dirigeront l'instruction et appliqueront la loi après la déclaration des jurés sur le fait.

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› 3. Les juges ne pourront rendre aucun jugement, s'ils ne sont au moins au nombre de trois.

4. Celui des juges qui aura été le premier élu présidera, et en cas d'absence, il sera remplacé par le plus ancien d'âge.

5. Les juges seront nommés par la Convention nationale à la pluralité relative des suffrages, qui ne pourra néanmoins être inférieure au quart des voix.

› 6. Il y aura auprès du tribunal un accusateur public et deux adjoints, ou substituts, qui seront nommés par la Convention nationale, comme les juges, et suivant le même mode.

» 7. Il sera nommé, dans la séance de demain, par la Convention nationale, douze citoyens du département de Paris et des quatre départemens qui l'environnent, qui rempliront les opérations de juré, et quatre suppléans du même département, qui remplaceront les jurés en cas d'absence, de récusation ou de maladie. Les jurés rempliront leurs fonctions jusqu'au 1er mai prochain, et il sera pourvu par la Convention nationale à leur remplacement et à la formation d'un juré pris entre les citoyens de tous les départemens.

»> 8. Les fonctions de la police de sûreté générale, attribuées aux municipalités et aux corps administratifs par le décret du 11 août dernier, s'étendront à tous les crimes et délits mentionnés dans l'article 1er de la présente loi.

9. Tous les procès-verbaux de dénonciation, d'information, d'arrestation, seront adressés en expédition par les corps administratifs à la Convention nationale, qui les renverra à une commission de ses membres chargée d'en faire l'examen, et de lui en faire le rapport.

> 10. Il sera formé une commission de six membres de la Convention nationale, qui sera chargée de l'examen de toutes les pièces, d'en faire le rapport, de rédiger et de présenter les actes d'accusation, de surveiller l'instruction qui se fera dans le tribunal extraordinaire, d'entretenir une correspondance suivie avec l'accusateur public et les juges sur toutes les affaires qui seront envoyées au tribunal, et d'en rendre compte à la Convention nationale.

> 11. Les accusés qui voudront récuser un ou plusieurs jurés seront tenus de proposer les causes de récusation par un seul et

même acte, et le tribunal en jugera la validité dans les vingtquatre heures.

› 12. Les jurés voteront et formeront leur déclaration publiquement, à haute voix, à la pluralité absolue des suffrages.

13. Les jugemens seront exécutés sans recours au tribunal de

cassation.

› 14. Les accusés en fuite qui ne se représenteront pas dans les trois mois du jugement seront traités comme émigrés et sujets aux mêmes peines, soit par rapport à leur personne, soit par rapport à leurs biens.

› 15. Les juges du tribunal éliront à la pluralité absolue des suffrages un greffier et deux huissiers. Le greffier aura deux commis qui seront reçus par les juges.

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› ART. 1. Les juges du tribunal extraordinaire prononceront les peines portées par le Code pénal et les lois postérieures contre les accusés convaincus; et lorsque les délits qui demeureront constans seront dans la classe de ceux qui doivent être punis des peines de la police correctionnelle, le tribunal prononcera ces peines sans renvoyer les accusés aux tribunaux de police.

>

› 2. Les biens de ceux qui seront condamnés à la peine de mort seront acquis à la République, et il sera pourvu à la subsistance des veuves et des enfans, s'ils n'ont pas de biens d'ailleurs.

› 3. Ceux qui, étant convaincus de crimes ou de délits qui n'auraient pas été prévus par le Code pénal et les lois postérieures, ou dont la punition ne serait pas déterminée par les lois, et dont l'incivisme et la résidence sur le territoire de la République auraient été un sujet de trouble public et d'agitation, seront condamnés à la peine de déportation.

> 4. Le conseil exécutif est chargé de pourvoir à l'emplacement du tribunal. Le traitement des juges, greffier, commis et huissiers sera le même que celui qui a été décrété pour les juges, greffier, commis et huissiers du tribunal criminel du département de Paris. ›

COMMUNE DE PARIS. SÉANCE DU 10 MARS.

Le président fait lecture d'une lettre par laquelle l'administration de police avertit que des hommes armés se portent aux barrières de la ville pour les fermer.

Plusieurs décrets du 5 septembre et autres défendent, sous peine de mort, de fermer les barrières sans que la Convention nationale en ait été prévenue. En conséquence le conseil arrête que, jusqu'à ce que la Convention, officiellement avertie, ait déclaré ses intentions sur la fermeture des barrières, elies continueront de rester librement ouvertes. Le commandant général est chargé de donner les ordres nécessaires et de faire toutes les dispositions convenables pour maintenir la liberté du passage aux barrières. Cet arrêté est aussitôt envoyé à la Convention nationale, aux quarante-huit sections et à l'état-major, tenu de l'inscrire dans l'ordre.

Un commissaire du comité de la section du Finistère déclare que, dans la nuit du samedi au dimanche, quatre particuliers, se disant de la société des Jacobins, se sont rendus au comité de cette section, à l'effet de demander que l'on sonnât le tocsin, qu'on tirât le canon d'alarme, etc.; ils ont ajouté que plusieurs sections adhéraient à l'arrêté dont ils étaient porteurs. On a examiné ces prétendues adhésions, qui ne portaient aucun timbre des sections. (On s'écrie de toutes parts: Ceux qui n'ont pas arrêté ces scélérats sont plus coupables qu'eux (1).)

Jacques Roux. Ces quatre désorganisateurs se sont présentés à la section des Gravilliers à quatre heures du matin; ils y ont fait les mêmes propositions: je demande qu'on arrête les agita

teurs. >

Hébert. Il faut mander celui qui représente ici le commandant-général ; il est instant d'arrêter le peuple que l'on égare. » Favanne. Des hommes en uniforme, le sabre nu, le pistolet à la main, parcourent les rues. Je suis instruit que des malveil

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(1) C'est de Varlet et de sa bande que ce membre veut parler. (Note des aut.)

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