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veloppées de main de maître, y ajoutant celle de traduire d'Orléans devant un tribunal révolutionnaire érigé pour cet effet à Marseille. Arrivant ensuite au décret d'arrestation dont il avait été frappé, il dit : « Je ne devais qu'être gardé à vue chez moi : les secrétaires de la clique qui le rédigent insèrent que je serai conduit à l'Abbaye: vive altercation à ce sujet : la clique confirme l'insertion des secrétaires. A l'instant une expédition du décret non signé du président, ni du ministre de la justice, est remise à l'officier de garde qui me consigne aux portes; les tribunes avaient témoigné leur indignation, et la séance avait été levée avec précipitation.

» Je venais de déclarer à mes collègues que je n'irais point à l'Abbaye, où tous les montagnards s'efforçaient de m'accompagner. Je persistai. Déjà il ne restait dans la salle qu'une cinquantaine de mes collègues qui ne voulaient pas me quitter: bientôt elle se remplit d'une foule de patriotes des tribunes, qui s'opposent à ce que je sois arrêté. Ils me conduisent hors de la salle une sentinelle s'oppose à ma sortie : on va chercher l'officier de garde; il me présente une expédition, non signée, du décret des hommes d'état, et en sent la nullité. La consigne est levée ; je sors accompagné d'un nombreux cortège et je vais chercher un asile, d'où j'écris à la Convention la lettre qui suit (1).

» On dira sans doute que j'ai désobéi à la loi; je déclare que je ne reconnais pas pour loi des arrêtés pris par la faction des hommes d'état contre les patriotes de la Montagne; des arrêtés pris dans le tumulte des passions et au milieu du vacarme : les lois doivent se faire dans le silence et avec dignité. Si la nation avait sous les yeux les scènes scandaleuses de la Convention, elle en expulserait bientôt une partie de ses mandataires, comme indignes de sa confiance, comme des échappés de petites maisons, comme des traîtres. Voilà les prétendus législateurs de la France qui peuvent me faire un crime de ma résistance à l'oppression ! Le Patriote français, n° MCCCXL, fait à l'occasion de cet événement les réflexions suivantes :

(1) Voir plus bas la séance du 16 avril.

(Nole des auteurs.)

• Du samedi 13 avril. L'annonce du décret contre Marat a produit le plus grand tumulte aux Jacobins. Il ne s'agissait de rien moins que de marcher, à l'instant même, sur la Convention; mais on s'est borné à arrêter une adresse aux Parisiens, contre les traîtres qui opprimaient ainsi Marat, le président des Jacobins, le premier des patriotes. - Cependant leur conseil secret prenait d'étranges résolutions... Les malheureux ! que peuventils faire? Ils ne voient pas qu'à Paris même leur crédit leur échappe, qu'ils ne pourraient se venger que par des assassinats particuliers, et que pour cela même il ne faut pas trembler! Patriotes, s'il en reste encore quelques-uns dans cette enceinte, fuyez-la, joignez-vous à la masse des républicains, et la République triomphera de Marat et de Cobourg. ›

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Un membre propose que le conseil général déclare s'il entend refuser les passeports à tous les citoyens de 18 à 50 ans, attendu que la loi les met en état de réquisition permanente.

Le conseil passe à l'ordre du jour motivé sur ce que la loi relative aux passeports ne défend pas d'en accorder aux citoyens qui sont en état de réquisition.

Sur le réquisitoire du procureur de la Commune, le conseil a arrêté qu'il ne serait délivré aucun passeport aux ci-devant nobles, à leurs femmes, à leurs enfans, aux prêtres, non plus qu'aux étrangers, quels qu'ils soient, qui en demanderaient pour sortir du territoire de la République. Sont néanmoins exceptés de cette dernière disposition les Suédois, les Suisses et les Danois, qui ne sont pas en guerre avec la République française. Les passeports seront aussi refusés aux parens, femmes et enfans des officiersgénéraux de la République, lesquels sont désignés aux précédens arrêtés.

Une députation de la société des amis de la liberté et de l'égalité, séante aux Jacobins, donne lecture de plusieurs lettres, da

tées de Dijon. Elles annoncent une exportation considérable de farines des environs de Paris, et que quantité de voitures ont été arrêtées.

Le conseil nomme cinq de ses membres, qui formeront un comité central de correspondance, et recevront toute espèce de dénonciation relativement aux manoeuvres qui s'exercent sur les subsistances. Les commissaires sont chargés de se transporter sur-le-champ au comité des neuf et au conseil exécutif provisoire, à l'effet d'y recueillir des lumières sur cet objet.

A l'instant où cet arrêté venait d'être pris, plusieurs membres en demandent le rapport. Ils pensent que cette commission contre-balancera le comité de police, et que ces diverses commissions ne feront que s'entraver mutuellement dans leurs opérations. Le conseil maintient son arrêté.

Dans l'ordre de ce jour, le commandant général annonce que la légion, dite Rosendal, ne fera plus de service au Temple; que la garde des barrières sera retirée et les réserves réduites à vingtcinq hommes. Le citoyen Saint-Fief annonce le départ de Paris pour Rouen de cent vingt chevaux d'artillerie et de deux cent six sabres d'infanterie pour Cherbourg.

CONVENTION

Séance permanente du 3.

Du 15 à dix heures du matin.

Thuriot occupe le fauteuil.

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Le général Dampierre propose de remplir les cadres des batailions de l'armée non complets par la nouvelle levée de volontaires. Un décret approuve la conduite du général Chancel et des militaires de la garnison de Condé, qui ont rejeté avec indignation la sommation du général autrichien pour rendre la place et reconnaître la Constitution de 1791.

Pétion rend hommage au patriotisme du général Miranda, et demande la suspension du décret qui le traduit au tribunal révo lutionnaire. Sur la proposition de Bentabolle, l'assemblée rejette

cette demande.

Les commissaires à Valenciennes mandent que l'ennemi commence le siége de Condé ; ils envoient une proclamation du général autrichien, Cobourg. Robespierre s'oppose à la lecture de cet écrit.

[Robespierre. Je m'oppose à la lecture de la proclamation de Cobourg, et en général à celles d'aucunes pièces envoyées par les généraux ennemis. Voici ma raison. Quoique les propositions de transaction soient d'abord rejetées avec horreur, il est des esprits qui, à force de les entendre répéter, pourraient s'y accoutumer, et je ne serai point accusé de concevoir de vaines terreurs par tous ceux qui sauront que déjà des propositions de transaction ont été faites par des rebelles qui sauront que l'aristocratie même bourgeoise se propose d'y entendre. Il est temps d'étouffer ces idées dangereuses; car il y a en France non-seulement des aristocrates, mais de ces lâches égoïstes qui sont prêts à sacrifier la cause du peuple à leurs molles jouissances. Je demande que, pour ôter tout espoir à ces différentes sortes d'ennemis de la patrie, vous décrétiez la peine de mort contre quiconque proposerait, de quelque manière que ce fût, de transiger avec les ennemis ; mais ce n'est pas assez de la peine de mort; telle est l'importance de la mesure qu'il faut prendre à cet égard, que je demande qu'il soit mis hors de la loi.]

- Danton appuie la motion de Robespierre et propose de déclarer que la France ne se mêlera pas des affaires des autres peuples. Ces diverses propositions sont décrétées en ces termes :

La Convention nationale déclare, au nom du peuple français, qu'elle ne s'immiscera en aucune manière dans le gouvernement des autres puissances; mais elle déclare en même temps qu'elle s'ensevelira plutôt sous ses propres ruines que de souffrir qu'aucune puissance s'immisce dans le régime intérieur de la République et influence la création de la constitution qu'elle veut se donner.

› La Convention décrète la peine de mort contre quiconque proposerait de négocier ou de traiter avec des puissances enne

mies qui n'auraient pas préalablement reconnu solennellement l'indépendance de la nation française, la souveraineté, l'indivisibilité et l'unité de la République, fondée sur la liberté et l'égalité. ›

[Quelques membres demandent qu'il soit fait lecture d'une lettre de Marat.

Fonfrède. Voici la lettre; il n'y a point de date, ni de lieu, ni de jour.

A la Convention nationale de France.

Citoyens représentans, il est des faits qu'on ne peut remettre trop souvent sous les yeux du peuple. Or, il est notoire que le traître Dumourier, qui a levé l'étendard de la révolte contre la nation, et tourné contre elle ses propres forces pour lui donner un nouveau maître et anéantir la liberté, a pour complices, au sein même de la Convention, les meneurs et les suppôts de la faction des hommes d'état, qu'il appelle la saine majorité des membres de l'assemblée nationale. Effrayés de voir le traître Dumourier les déclarer ses protégés et ses complices à la face de l'univers, ils n'ont plus songé qu'à détourner l'attention publique de dessus leur propre conspiration malheureusement trop réelle pour la fixer sur une conjuration imaginaire qui aurait pour but de mettre Louis-Philippe d'Orléans sur le trône.

› Convaincu que cette fable n'a été inventée que pour donner le change au public sur les desseins criminels de Dumourier, des meneurs de la Convention et des puissances ennemies qui tendent à mettre la couronne sur la tête du fils de Louis Capet, et de constituer régent le ci-devant Monsieur, j'ai cru devoir forcer dans leurs derniers retranchemens les lâches, les hypocrites par tisans du royalisme, en proposant, jeudi dernier, comme véritable pierre de touche du royalisme des membres de la Convention, de décréter que Louis-Philippe d'Orléans serait traduit devant le tribunal révolutionnaire, et que la tête des Capets émigrés et rebelles serait mise à prix ; mes vues ont été remplies. A la vivacité avec laquelle les patriotes de la Montagne se sont

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