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› Parisiens, sauvez encore une fois la chose publique; encore une fois donnez l'exemple. Levez-vous, armez-vous, marchez, et ces bandes d'esclaves reculeront encore devant vous. Il faut un dernier effort; il faut porter un coup terrible, un dernier coup; il faut que cette campagne décide du sort du monde; il faut épouvanter, exterminer les rois. Hommes du 14 juillet, du 5 octobre, hommes du 10 août, réveillez-vous!

› Vos frères, vos enfans, poursuivis par l'ennemi, enveloppés, peut-être, vous appellent; vos frères, vos enfans massacrés au 10 août, dans les plaines de la Champagne, sous les décombres de Lille embrasée; vos frères tués à Jemmappes.... Levez-vous; il faut les venger.

› Que toutes les armes soient portées dans les sections; que tous les citoyens s'y rendent ; que l'on y jure de sauver la patrie; qu'on la sauve! Malheur à celui qui hésiterait; que dès demain des milliers d'hommes sortent de Paris; c'est aujourd'hui le combat à mort entre les hommes et les rois, entre l'esclavage et la liberté. PACHE, maire. »

Le maire demande que l'on expose au haut de la Maison commune le drapeau qui annonce que la patrie est en danger, et que le drapeau noir soit placé au haut de l'église métropolitaine.

Le conseil-général adopte ces mesures.

Le conseil arrête que ceux de ses membres nommés à cet effet se retireront aussitôt, un dans chaque section, pour y faire lecture de la proclamation qui vient d'être arrêtée, et que demain cette même proclamation se fera dans la ville et carrefours de Paris.

Les administrateurs de police annoncent au conseil que tout est tranquille dans Paris.

Une députation de la section des Lombards vient exposer que cette section a remarqué dans la proclamation qui lui a été lue une exagération dans l'exposé des faits qui pourrait alarmer les citoyens. La députation conclut à ce que cette proclamation ne soit pas lue demain dans les rues de Paris.

Le maire et le procureur de la Commune, en rétablissant les

expressions de la proclamation, que les commissaires avaient eux-mêmes un peu dénaturées, ont calmé les inquiétudes de la section à cet égard.

La section des Sans-Culottes demande que les barrières soient fermées sur-le-champ, afin que les lâches qui veulent se soustraire au recrutement ne puissent pas s'évader.

Le maire opposé à cette demande l'existence de la loi.

La section de la Butte-des-Moulins a arrêté qu'elle ne délivrerait aucun passe-port avant que le recrutement ne soit totalement effectué.

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Le Patriote français, n. MCCCV, fait les réflexions suivantes : Paris, du vendredi 8 mars. Est-ce par terreur panique, est-ce par une intention perfide, que les malveillans se plaisent á exagérer les mauvaises nouvelles? On a répandu ce soir avec affectation, dans les groupes, dans les sections, que Liége et Bruxelles étaient pris, que l'ennemi marchait vers la France, que Dumourier était perdu... et ces nouvelles étaient suivies d'exhortations à se défaire des traîtres, à couper des têtes, etc.

› Les bons citoyens ne sauraient trop être en garde contre ces horribles insinuations. À portée de savoir la vérité, nous pouvons attester, d'après les hommes instruits des faits, que si Liége est évacué, Liége n'est pas pris (du moins on n'en sait rien); que si l'ennemi peut marcher sur Liége, il peut aussi, par cette marche, s'exposer à être baitu, et qu'ainsi l'on peut encore espérer pour cette ville. Nous pouvons attester, d'après des gens de l'art, qu'il est impossible à l'ennemi de s'enfoncer dans la Belgique. Nous pouvons attester enfin que l'ennemi n'est pas aussi nombreux qu'on dit, qu'il est inférieur à notre armée, que Dumourier n'est point coupé et continue son expédition pour la Hollande.

› Non, ce n'est point par la terreur qu'il faut exciter le recrutement, mais par la haine des tyrans, par la nécessité de les écraser dans une campagne. La terreur! ne déshonore-t-elle

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pas les hommes libres? et sous ce point de vue ne doit-on pas voir avec indignation la municipalité ordonner la clôture des spectacles pour ce soir? Est-ce donc une retraite qui doit vous consterner?... C'est un acte de démence, si toutes ces comédies de terreur ne cachent point un projet atroce. Au surplus, la visite des députés dans les sections a produit le meilleur effet.

CONVENTION NATIONALE.

SÉANCE DU 9 MARS.

[Le président. Je préviens l'assemblée que j'ai reçu des lettres de plusieurs sections qui demandent à communiquer à la Coffvention des observations importantes.

Lacroix. Je demande qu'on renvoie toutes les députations à une séance du soir, et qu'on entende de suite le rapport du eð mité de défense générale.

Pétion. Je demande, au contraire, que les sections de Páris puissent être entendues. Sans doute elles vous rendront compte de la situation où se trouve Paris en ce moment. La Convention doit être encore instruite de la situation où elle est elle-même ; elle doit savoir si elle est libre ou non. (On murmure.) Je suis étonné qu'il puisse y avoir une seule réclamation contre une proposition indispensable pour la dignité de la Convention et son autorité. (Nouveaux murmures. On demande l'ordre du jour.) Il est impossible de refuser la parole sur une question de prioritė. Mais où en sommes-nous donc réduits?....

Garreau. On en est réduit à ne pouvoir plus opprimer les

autres.

Barbaroux demande la parole pour appuyer la motion de Pé

tion.

On insiste sur l'ordre du jour.

Il s'élève une vive agitation.

Le président se couvre.

Plusieurs membres qui entouraient la tribune rentrent en séance. Le calme se rétablit.

Le président, découvert. Jamais la chose publique ne fut plus en péril. (Un grand nombre de membres de tous les côtés : Oui, oui, cela est vrai.) Il n'est que trop évident qu'on empêche la Convention de délibérer en ne lui permettant pas d'établir une question de priorité. Je préviens encore la Convention que le maire de Paris est à la barre, et qu'il me fait dire qu'il a des faits essentiels à communiquer à l'assemblée.

La Convention décrète l'admission de la municipalité.
Elle est introduite à la barre.

Le maire de Paris. Hier, à la réception du décret de la Convention nationale, j'ai convoqué le conseil général de la Commune et les commissaires des quarante-huit sections. Les rapports de ces commissaires sont très-favorables; les sections paraissent animées du plus grand zèle. Le conseil général a rédigé une adresse dont le procureur de la Commune va vous donner lecture.

Chaumet lit l'adresse suivante :

⚫ Citoyens législateurs, la République peut compter sur une armée invincible. Les sections se sont levées encore une fois; plusieurs veulent partir tout entières; chacune dispute à qui fera le plus de sacrifices. Il n'y a plus de passion que celle de l'amour de la patrie; l'enthousiasme est tel, que vous serez peut-être obligés de l'arrêter. Pour nous, que nos fonctions obligent de rester dans la cité, nous allons pourvoir aux besoins des mères, des femmes, des enfans; vous nous seconderez dans ces honorables soins. Nous n'avons pas oublié le principal soutien de la République, les mœurs.

› Le conseil général a invité tous les jeunes gens de ses bureaux à partir; ils sont tous enrôlés, ils partent. (On applaudit. ) Il a été arrêté qu'ils seraient remplacés par des citoyens pères de famille, et qu'à l'avenir nul célibataire ne serait reçu dans les bureaux de la Commune. (Nouveaux applaudissemens.) Nous demandons à la Convention nationale que les bourses qui existent encore dans les colléges soient spécialement destinées aux enfans de ceux qui partent pour les frontières. (On applaudit.) La

classe pauvre a fait constamment des sacrifices; tout jusqu'à son sang a été prodigué pour la liberté. Il est temps que le riche égoïste partage les charges que le pauvre seul a supportées. Nous demandons qu'il soit imposé sur cette classe d'hommes une taxe de guerre. (On applaudit.)

› Tels sont les vœux de nos concitoyens; nous vous les présentons, et nous vous assurons, en leur nom et au nom de ceux qui restent, un attachement inviolable à la Convention; tandis que les uns iront faire triompher la République au dehors, les autres feront respecter les lois au dedans. Nous étions chargés de demander un tribunal révolutionnaire sans appel; nous apprenons que le principe est décrété, nous en restons là. La section du Luxembourg, outre une moisson nombreuse de guerriers, vient d'envoyer au conseil de la Commune une compagnie surérogatoire de canonniers qui laissent leurs fusils à ceux de leurs frères qui partent aussi. Ces citoyens ont été vivement applaudis. Un d'eux s'est levé et nous a dit un mot que nous vous devons, que nous devons à la République entière: Attendez, nous a-t-il dit, notre retour pour nous applaudir. (Il s'élève de nomBreux applaudissemens.) Ces braves volontaires ne demandent que l'honneur de défiler devant la Convention. >

La compagnie des canonniers de la section du Luxembourg traverse la salle.

Audouin, orateur de cette compagnie. Soixante canonniers de la section du Luxembourg viennent se présenter devant vous avant de voler aux frontières. Trois cents autres volontaires sont prêts à partir dès qu'ils auront des habits. Voilà ces sections, contre lesquelles on a vomi des calomnies répétées sur tous les points de la République. Eh bien! c'est la première, c'est la seule réponse que nous ferons à nos ennemis. Songez, citoyens, qu'en partant nous nous reposons sur vous du soin de pourvoir aux besoins de nos femmes, de nos enfans, de nos vieillards; nous jurons de faire triompher la liberté, l'égalité et la République une et indivisible. (Les membres de l'assemblée se joignent par acclamation à ce serment.)

T. XXV.

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