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Que, charmés l'un de l'autre, ils retournent à Sparte, Tous nos Ports font ouverts & pour elle & pour lui. Qu'elle m'épargneroit de contrainte & d'ennui!

Seigneur....

PHONI X.

PYRRH U S.

Une autre fois je t'ouvrirai mon ame;

Andromaque paroît.

SCENE IV.

ANDROMAQUE, PYRRHUS, CÉPHISE,

PHONIX.

PYRRHU S.

ME cherchiez-vous, Madame ?

Un espoir fi charmant me seroit-il permis?

ANDROMA QUE.

Je paffois jufqu'aux lieux, où l'on garde mon fils.
Puifqu'une fois le jour vous fouffrez que je voie
Le feul bien qui me refte, & d'Hector & de Troye ;
J'allois, Seigneur, pleurer un moment avec lui.
Je ne l'ai point encore embraffé d'aujourd'hui.

PYRRHU S.

Ah, Madame, les Grecs, fi j'en crois leurs allarmes Vous donneront bientôt d'autres fujets de larmes !

ANDRO MAQUE.

Et quelle eft cette peur dont leur cœur eft frappé,
Seigneur? Quelque Troyen vous est-il échappé ?

PYRRH US.

Leur haine pour He&or n'eft pas encore éteinte.

Ils redoutent fon fils.

ANDROMA QUE.

Digne objet de leur crainte !

Un enfant malheureux, qui ne fait pas encor

Que Pyrrhus eft fon maître, & qu'il eft fils d'Hector.

PYRRH US.

Telqu'il eft, tous les Grecs demandent qu'il périffe. Le fils d'Agamemnon vient hâter fon fupplice.

ANDROMA QUE.

Et vous prononcerez un arrêt fi cruel?

Eft-ce mon intérêt qui le rend criminel?

Hélas, on ne craint point qu'il venge un jour son père;
On craint qu'il n'effuyât les larmes de sa mère !
Il m'auroit tenu lieu d'un père & d'un époux ;
Mais il me faut tout perdre, & toujours par vos coups.

PYRRH US.

Madame, mes refus ont prévenu vos larmes.
Tous les Grecs m'ont déja menacé de leurs armes :
Mais, duffent-ils encore, en repaffant les eaux,
Demander votre fils avec mille vaisseaux ;
Coutât-il tout le fang qu'Hélène a fait répandre ;
Duffai-je, après dix ans, voir mon Palais en cendre,
Je ne balance point, je vole à fon fecours;

Je défendrai fa vie aux dépens de mes jours.
Mais, parmi ces périls, où je cours pour vous plaire,
Me refuferez-vous un regard moins févère?
Hai de tous les Grecs, preffé de tous côtés,
Me faudra-t-il combattre encor vos cruautés ?
Je vous offre mon bras. Puis-je espérer encore
Que vous accepterez un cœur qui vous adore?
En combattant pour vous, me fera-t-il permis
De ne vous point compter parmi mes ennemis ?
ANDROMA QUE.

Seigneur, que faites-vous ? & que dira la Grèce ?
Faut-il qu'un fi grand cœur montre tant de foiblesse,
Voulez-vous qu'un defsein si beau, fi généreux,
Paffe pour le transport d'un esprit amoureux?
Captive, toujours trifte, importune à moi-même;
Pouvez-vous fouhaiter qu'Andromaque vous aime?
Quels charmes ont pour vous des yeux infortunés,
Qu'à des pleurs éternels vous avez condamnés?
Non, non, d'un ennemi respecter la misere,
Sauver des malheureux, rendre un fils à sa mère ;
De cent peuples, pour lui, combattre la rigueur.
Sans me faire fon falut de mon cœur ;
Malgré moi, s'il le faut, lui donner un asyle:
Seigneur, voilà des foins dignes du fils d'Achille;

payer

PYRRHU S.

Hé quoi, votre courroux n'a-t-il pas eu fon cours? Peut-on hair fans ceffe? & punit-on toujours?

fait des malheureux, fans doute; & la Phrygie

Cent fois, de votre fang, a vu ma main rougie.
Mais que vos yeux
fur moi fe font bien exercés !
Qu'ils m'ont vendu bien cher les pleurs qu'ils ont verfés!
De combien de remords m'ont-ils rendu la proie?
Je fouffre tous les maux que j'ai faits devant Troye.
Vaincu, chargé de fers, de regrets consumé,
Brûlé de plus de feux que je n'en allumai,

Tant de foins, tant de pleurs, tant d'ardeurs inquiètes....
Hélas, fus-je jamais fi cruel que vous l'êtes!
Mais enfin, tour à tour, c'eft affez nous punir;
Nos ennemis communs devroient nous réunir,
Madame, dites-moi feulement que j'espère,
Je vous rends votre fils, & je lui fers de père.
Je l'inftruirai moi-même à venger les Troyens.
J'irai punir les Grecs de vos maux & des miens.
Animé d'un regard, je puis tout entreprendre.
Votre Ilion encor peut fortir de fa cendre;

Je puis, en moins de temps que les Grecs ne l'ont pris,
Dans fes murs relevés, couronner votre fils.

ANDROMA QUE.

Seigneur, tant de grandeurs ne nous touchent plus guère;
Je les lui promettois tant qu'a vécu fon père.
Non, vous n'espérez plus de nous revoir encor,
Sacrés murs, que n'a pu conferver mon Hector!
A de moindres faveurs des malheureux prétendent ;
Seigneur, c'eft un exil que mes pleurs vous demandent.
Souffrez que loin des Grecs, & même loin de vous,
J'aille cacher mon fils, & pleurer mon époux,

Votre amour contre nous allume trop de haine.
Retournez, retournez à la fille d'Hélène.

PYRRH US.

Et le puis-je, Madame? Ah, que vous me gênez!
Comment lui rendre un cœur que vous me retenez?
Je fais que de mes vœux on lui promit l'Empire.
Je fais que, pour régner, elle vint dans l'Épire.
Le fort vous y voulut l'une & l'autre amener,
Vous, pour porter des fers, elle, pour en donner.
Cependant ai-je pris quelque foin de lui plaire?
Et ne diroit-on pas, en voyant, au contraire,
Vos charmes tout puiffans, & les fiens dédaignés,
Qu'elle eft ici captive, & que vous y régnez,
Ah, qu'un seul des foupirs, que mon cœur vous envoie,
S'il s'échappoit vers elle, y porteroit de joie !

ANDROMA QUE.

Et pourquoi vos foupirs feroient-ils repouffés?
Auroit-elle oublié vos fervices paffés?

Troye, Hector, contre vous révoltent-ils fon ame?
Aux cendres d'un époux doit-elle enfin sa flamme?
Et quel époux encore! Ah, fouvenir cruel!
Sa mort feule a rendu votre père immortel.
Il doit au fang d'Hector tout l'éclat de ses armes ;
Et vous n'êtes tous deux connus que par mes larmes.
PYRRH U S.

Hé bien, Madame, hé bien, il faut vous obéir.
Il faut vous oublier, ou plutôt vous haïr.
Oui, mes vœux ont trop loin pouffé leur violence,

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