N'eut daigné confpirer que la mort d'un enfant ? Mais a qui prétend-on que je le facrifie ? La Grèce a-t-elle encor quelquè droit fur fa vie? Et feul de tous les Grecs ne m'eft-il pas permis, D'ordonner d'un captif que le fort m'a foumis? Oui, Seigneur, lorfqu'au pié des murs fumans de Troie, Les Vainqueurs tout fanglans partagerent leur proie, Le fort, dont les arrêts furent alors fuivis, Son fils peut me ravir le jour que je lui laiffe. tes, Un fleuve teint de fang, des compagnes defertes, Dans le fein de Priam n'a-t-on pu l'immoler? Sous tant de morts, fous Troye, il falloit l'accabler. Tout étoit jufte alors, La vieilleffe & l'enfance Envain fur leur foiblefle appuyoient leur dé fenfe. La victoire & la nuit, plus cruelles que nous, Nous excitoient au meurtre, & confondoient nos coups. Mon courroux aux Vaincus ne fut que trop fe vere. Mais que ma cruauté furvive à ma colere! Qu'ils pourfuivent ailleurs ce qui refte deTroye OREST E. Seigneur, vous favez trop, avec quel artifice Oui, les Grecs fur le fils perfécutent le pere; PYRRH U S. Non, non. J'y confens avec joie, Qu'ils cherchent dans l'Epire une feconde Troye; Qu'ils confondent leur haine, & ne diftinguent plus Le fang qui les fit vaincre, & celui des vaincus. Auffi-bien ce n'eft pas la premiere injustice, Dont la Grèce d'Achille a payé le fervice. Hector en profita, Seigneur, & quelque jour Son fils en pourroit bien profiter à fon tour. OREST E. Ainfi la Grece en vous trouve un enfant rebelle? PYRRH U S. Et je n'ai donc vaincu, que pour dépendre d'elle? Hermione, Seigneur, arrêtera vos coups: PYRRHU S. Hermione,Seigneur, peut m'être toujours chere: Je puis l'aimer, fans être efclave de fon pere: Et je faurai peut-être accorder quelque jour, Les foins de ma grandeur, & ceux de mon amour. Vous pouvez cependant voir la fille d'Hélène, Du fang qui vous unit je fai l'étroite chaîne. Après cela, Seigneur, je ne vous retiens plus, Et vous pourrez aux Grecs annoncer mon refus. SCENE III. PYRRHUS, PHOENIX, PHOENIX. Ainfi vous l'envoyez aux piés de fa Maîtreffe? PYRRHU S. On dit qu'il a longtems brûlé pour la Princeffe. PHOENIX. Mais fi ce feu, Seigneur, vient à fe rallumer : le parte. Que charmés l'un de l'autre ils retournent à Sparte. Tous nos Ports font ouverts & pour elle & pour lui. Qu'elle m'épargneroit de contrainte & d'ennui! Seigneur... PHOENIX. PYRRH U S. Une autre fois je t'ouvrirai mon ame; Andromaque paroît. SCENE IV. PYRRHUS, ANDROMAQUE, CEPHISE. PYRRH US. Mecherchiez-vous, Madame? Un espoir fi charmant me feroit-il permis? Je paffois jufqu'aux lieux où l'on garde mon fils. Ah,Madame! les Grecs,fi j'en crois leurs allarmes Vous donneront bientôt d'autres fujets de larmes. ANDRO MAQU E. Et quelle eft cette peur dont leur cœur eft frappé Seigneur? Qeulque Troyen vous eft-il échappé? PYRRHUS, Leur haine pour Hector n'eft pas encore éteinte, Ils redoutent fon fils. ANDRO MAQU E. Digne objet de leur crainte! Un enfant malheureux, qui ne fait pas encor Que Pyrrhus eft fon maître, & qu'il eft fils d'He Єtor. PYRRH US. Tel qu'il eft, tous les Grecs demandent qu'il périffe: |