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BOSSUET composa le Discours sur l'Histoire uni

verselle pour le Dauphin, fils de Louis XIV, dont l'éducation lui avoit été confiée. Ce prince foible, inappliqué, en qui la double soumission de fils et de sujet eut le caractere d'une obéissance craintive, vécut et mourut au pied du trône, où il eût porté les qualités d'un honnête homme et non celles d'un roi. Mais si Bossuet ne put rendre son éleve digne du rang suprême, du moins ses efforts pour y réussir furent attestés par un chef-d'œuvre. Fénélon fut doublement heureux. Instituteur du duc de Bourgogne, du fils même de l'éleve de Bossuet, et chargé aussi de former en lui l'héritier du trône, il produisit aussi un ouvrage immortel, un ouvrage qui honore à jamais la France et luimême; mais il avoit travaillé bien plus efficacement encore pour sa gloire et pour le bonheur de son pays, en faisant passer toutes ses vertus dans l'ame de son disciple: la nation, qui eût été trop heureuse d'avoir ce jeune prince pour maître, répandit sur son tombeau des larmes dont Fénélon partageoit avec lui l'honneur douloureux. Le résultat des deux éducations fut différent; le caractere des deux ouvrages qu'elles firent naître ne l'est guere moins. Le génie fier de Bossuet éclate dans le Discours sur l'Histoire universelle;

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l'ame tendre de Fénélon respire dans le Télémaque.

L'aigle à l'œil perçant, au vol rapide et sublime, est l'emblême ordinaire du génie de Bossuet; mais, de tous les ouvrages de ce grand homme, le Discours sur l'Histoire universelle est peutêtre celui qui donne lieu à l'application la plus juste de cette juste comparaison. Aucun autre, en effet, n'offre un sujet si étendu; dans aucun autre, l'auteur ne s'est placé à un point de vue si élevé, n'a embrassé de ses regards un si vaste horizon, enfin n'a pénétré si avant dans la profondeur des causes divines et humaines. C'est l'univers entier, c'est la durée de tous les siecles, c'est l'ensemble de tous les événements qui ont rempli l'un et l'autre, que Bossuet va parcourir. La Religion et la Politique sont les deux grands objets de son livre, qu'il divise en trois parties : la Suite des Temps, la Suite de la Religion, et les Empires.

Dans la premiere partie, chronologiste savant et abréviateur sublime, il partage en un petit nombre d'époques les temps qui se sont écoulés depuis la naissance du monde jusqu'à l'établissement de l'empire de Charlemagne, et, dans ce tableau ainsi divisé, il place les principaux événements par lesquels furent marqués l origine, le progrès, et la chute des principaux empires.

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Dans la seconde partie, Bossuet, historien et apologiste éloquent de la religion, la prend au berceau du monde, nous la montre fondée par le Dieu même qui venoit de créer l'univers, et traversant les siecles sans être jamais interrompue ni altérée, malgré l'idolâtrie, l'impiété, la persécution, les hérésies, les défections, le faux zele, les crimes commis en son nom, enfin malgré les efforts du temps auxquels nulle institution humaine n'a pu résister. Le peuple hébreu, nommé le peuple de Dieu, avoit reçu le dépôt de cette religion, qui, perfectionnée par Jésus-Christ, devoit un jour s'étendre sur toute la terre: Bossuet, pénétrant dans les desseins de la Providence au conseil de laquelle il semble avoir assisté, nous fait voir dans les erreurs criminelles, dans les châtiments, dans la dispersion même de ce peuple, autant de marques éclatantes de sa vocation divine; de même que, dans les rois, les conquérants étrangers qui furent ses vengeurs ou plus souvent ses fléaux, il nous montre d'aveugles instruments dont Dieu s'est servi, tantôt pour le châtier, tantôt pour le préserver de sa ruine. Ainsi, selon Bossuet, la religion est la fin pour laquelle toutes choses ont été créées; et, dans l'histoire de l'u ́nivers, la nation dépositaire de cette religion forme un centre unique auquel viennent aboutir et se rattacher les révolutions de tous les empires,

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