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position qu'elle rencontra dans le Tribunat, fut le dernier effort des partisans du Gouvernement républicain. Malgré la défaveur d'une cause qui semblait être celle des factions qui troublaient l'État, ils défendirent avec une courageuse éloquence les vrais principes sur les tribunaux d'exception; ils dé plorèrent vainement ce fâcheux échec à l'institution des jurés, cette omission des formes protectrices des accusés, et ce retour à celles de l'ancienne procédure prevôtale. Les mots de salut public, d'empire des circonstances, ces mots magiques et les plus terribles du vocabulaire de la révolution, tranchèrent la question. Il fallait se briser sur l'un ou sur l'autre écueil, ou violer la garantie de la liberté civile, ou refuser au Gouvernement les moyens de repression sans lesquels il ne pouvait, disait-il, assurer l'ordre intérieur, ni par conséquent la durée des institutions qu'on invoquait.

L'issue de cette lutte ne fut pas un instant douteuse. L'organisation des tribunaux spéciaux mit dans les mains du premier Consul

l'arme la plus redoutable et la plus sûre pour maintenir l'exercice du pouvoir dictatorial et absolu, comme aussi la plus inutile et la plus dangereuse pour un Gouvernement constitutionnel.

Bonaparte ne supporta qu'impatiemment ce premier éclat d'un parti d'opposition dans le Tribunat; quelques ménagemens qu'eussent gardés les orateurs qui se firent le plus remarquer dans cette discussion, il en fut vivement blessé. Il les considéra et les fit signaler comme des factieux qui cherchaient à capter la faveur populaire, et dont les déclamations métaphysiques ne tendaient qu'à entraver la marche des affaires. Il résolut, dès ce moment, de détruire le Tribunat, dont il reprochait la création à l'idéologie de l'abbé Syeyes, et ne tarda pas à faire disparaître cette dernière ombre du Gouvernement représentatif.

Nos lecteurs n'auront pas manqué d'observer cette double faveur de la fortune qui, le même jour, à la même heure, dérobait la tête du premier Consul au coup-mortel,

et, par la signature de l'armistice de Steyer, le faisait arbitre de la paix du continent.

L'Autriche attendait avec impatience l'époque prochaine où, dégagée de ses obligations envers l'Angleterre, elle pourrait conclure avec la France une paix séparée, seul moyen de salut après de si grands revers: elle n'avait consenti à rengager la que relle, que dans l'espoir d'obtenir de meilleures conditions; la lutte était devenue trop inégale, et plus inégale encore était la valeur des sacrifices mutuels entre les alliés : l'Angleterre y versait son or facilement acquis; l'Autriche, le plus pur sang de ses sujets.

Dans cette perplexité, le comte de Cobentzl, prolongeant son séjour à Lunéville, épiait l'instant où, prompt à s'affranchir des subtilités diplomatiqués, il lui serait permis d'aborder franchement la grande ques tion de la paix. La première nouvelle de la victoire de Hohenlinden détermina sa nouvelle attitude; il déclara, par une note en date du 31 décembre, « qu'il était autorisé >> par S. M. l'Empereur à donner à ses pour

» voirs l'interprétation que leur avait don» née le plénipotentiaire français, et à trai» ter sans le concours des Anglais ».

Dans le message par lequel le gouvernement français annonçait en même temps au Corps-législatif cette note officielle, et les succès des armées qui l'avaient provoquée, les conditions de la paix étaient irrévocablement tracées dans les termes suivans:

<< La rive gauche du Rhin serà la limite » de la République française: elle ne pré>> tend rien sur la rive droite. L'intérêt de >> l'Europe ne veut pas que l'Empereur passe » l'Adige. L'indépendance des républiques >> helvétique et batave sera assurée et recon>> nue. Nos victoires n'ajoutent rien aux pré>> tentions du peuple français. L'Autriche ne >> doit pas attendre de ses défaites, ce qu'elle » n'aurait pas obtenu par des victoires >>.

Le plénipotentiaire autrichien ne devait donc plus s'attacher qu'à renouer de tardives négociations sur le pied du traité de CampoFormio; mais comment espérer que le vainqueur se contentât des anciennes conces

sions? Les prétentions du premier Consul ne pouvaient manquer de s'élever en raison de ses nouveaux avantages: même après l'armistice de Steyer, les progrès des Français dans la Haute-Italie donnaient à l'Au-. triche des inquiétudes aussi sérieuses, que celles que l'activité et les négociations de M. l'archiduc Charles avaient un moment suspendues sur le Danube. Le comte de Bellegarde, bientôt rejeté au-delà de la Piave, ne pouvait se maintenir dans l'état de Venise qu'à la faveur d'un armistice. Le conseil aulique le pressait de le conclure, afin de pouvoir donner au plénipotentiaire une base fixe; on lui recommandait surtout de conserver la place de Mantoue. Il y était parvenu le général Brune, par l'armistice conclu à Trévise le 26 janvier 1801 (22 jours après celui de Steyer), s'était contenté de maintenir le blocus de Mantoue, et de régler le mode d'après lequel il serait permis aux Autrichiens d'approvisionner les habitans et la garnison. Le premier Consul s'irrita d'une modération qui laissait au pou

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