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ne suppose généralement. Tous ceux qui, dans une traversée, ont vu des poissons volans, ont été à même de juger que ce poisson ne peut changer, ni ne change jamais sa direction; son mouvement est un sant plutôt qu'un vol. L'inspection anatomique confirme ce jugement.

M. Bory traite non-seulement de toutes les parties de l'histoire naturelle, mais il apprend que M. Bernier l'éveilla un matin, à trois heures, pour faire des observations sur la distance d'Aldebaran à la lune (t. 1, p. 15). Les compagnons de voyage et les amis de M. Bory, m'ont assuré qu'il n'était pas assez versé dans la science des nombres pour faire le calcul des longitudes. Quant aux observations il n'y était point assez habitué pour qu'on pût compter sur quelque exactitude de sa part. Enfin, c'est M. Bailly qui a eu la complaisance de lui donner une idée du calcul des longitudes, de lui nommer et de lui étiqueter les divers échantillons de minéralogie dont il fait tant sonner les

noms.

Quant aux poissons et aux mollusques, M. Bory n'est pas plus exact quand il dit : J'ai fait un genre nouveau de, etc. J'ai nommé, etc. (t. I, p. 93).

Dans tout cet ouvrage, la vérité est sacrifiée à la démangeaison d'écrire. Ici, c'est la petite-vérole apportée par un vaisseau de Nantes quinze ans avant l'arrivée de M. Bory (t. 1, p. 157). Tout le monde sait que M. Degrandpré a apporté ce fléau avec une traite en 1792, c'està-dire, neuf ans et non pas quinze avant l'arrivée de l'écrivain. Ailleurs, c'est la révolution de l'Isle-de-France qui a été désastreuse (t. 1, p. 101). Que dira-t-il de celle de la France, de celle de Saint-Domingue ? Les paisibles habitans de Mauris ont été assez heureux pour ne voir tomber la tête d'aucun de leurs concitoyens.

Les fruits du jacquier (artocarpus integerrima, L.) pèsent, dit M. Bory, quatre-vingt à cent livres, et pour rassurer Mathieu Garro, il ajoute que le pédicule est d'une solidité proportionnée au poids des fruits (t. 1, p. 219). Les jacs pèsent au plus trente à quarante livres. Leur pédicule est de la plus grande élasticité, et mérite pour cette raison d'être observé.

l'es

Les trois arbres à pin qui sont dans une enceinte particulière dans le jardin des Pamplemousses, ne sont pas poir de la colonie (t. 1, p. 217), comme le dit le voyageur, cet arbre et le rima sont depuis long-tems très-multipliés dans l'île, on en trouve presque dans tous les vergers.

La plus grande partie des bœufs sont de race madécasse, c'est le zébu de Linné. Il est de taille très-commune. M. Bory nous dit qu'ils sont d'une taille gigantesque (t. 3, p. 198). Leurs cornes seulement sont extraordinairement grandes. Les moulins pour faire l'huile de cocos sont, continue-t-il, semblables à ceux dont on se sert en Bretagne et en Normandie pour faire le cidre ( t. 3, p. 247 ). Je suis forcé de vous dire, M. Bory, qué vous n'avez vu ni les uns ni les autres. Les moulins à huile de cocos sont composés d'un gros mortier en bois fixé fortement en terre, dans lequel on fait mouvoir circulairement par des ânes l'extrémité inférieure d'un lévier qui est incliné de quarante à cinquante degrès.

On lit dans un des articles sur l'île de la Réunion, què le sable de la route près Saint-Leu était si brûlant que në pouvant plus marcher sans s'exposer à se cuire les pieds, les noirs voyageaient dans l'eau de la mer. ( t. 3, p. 215). M. le savant voyageur, vous eussiez dù nous dire à quel degré s'élevait le thermomètre en le recouvrant de ce sable; la chaleur de l'atmosphère ne passe guères 26 et 28 degrés. Comment le sable pouvait-il brûler au point de cuire les pieds de vos noirs?

M. Bory a été reçu chez tous les habitans de la Réunion avec beaucoup de soins et d'égards, il l'avoue lui-même. Pourquoi dit-il : c'est à Saint-Leu que sont les plus grandes fortunes, on ne sera plus étonné si c'est aussi à Saint-Leu que toutes les portes sont fermées aux voyageurs et aux malheureux (t.3, p. 216). Tout le monde sait que l'hospitalité est exercée avec le plus grand plaisir et la plus vive cordialité dans toutes les colonies. Les habitans de Saint-Leu se font un devoir de la pratiquer. M. Bory y a été reçu avec tous les égards et tous les empressemens de l'amitié par pourquoi les apostropher si

gratuitement!

Les créoles de la Réunion, continue le voyageur, achètent une esclave dont ils font leur femme, et dont ils ont des enfans noirs, mais libres comme eux. Pas plus de connaissances des usages et des lois civiles que de l'histoire naturelle dans toutes les colonies françaises l'enfant de la femme esclave suit la condition de sa mère.

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La philanthropie est une vertu dont on ne doit point faire parade. Pourquoi M. Bory s'empresse-t-il de nous citer qu'il a voulu faire monter à cheval son noir, qui a répondu que cela n'était pas permis (t. 1, p. 177 ). Il n'est

pas défendu aux noirs de monter à cheval. En France, un voyageur va-t-il à pied pour céder son cheval à son domestique?

Le voyageur est quelquefois en contradiction avec luimême il sait, il dit que M. Berth est allé au volcan, il connait que MM. Crémon, Commerson, Saint-Lubin, Jossigny et Lilet Geoffroy y sont allés ensemble; et cependant il avance que son désir redoubla dès qu'on l'eut assuré que personne n'avait réussi dans ce qu'il projetait (t. 2, p. 182 ).

En parlant de construire un port à Saint-Paul, il juge que la dépense est peu de chose parce qu'on peut employer des noirs qui ne coûtent que l'achat et qu'on nourrit avec six sous. Il n'est point de pays où la main-d'œuvre soit aussi chère qu'aux colonies. Cela est si connu que je n'entrerai dans aucun détail (t. 3, p. 230).

Celui qui ne sait pas que les Seychelles sont des montagnes entourées à leurs pieds de bancs de sable et de corail, la plupart stériles, qu'elles ne valent point la peine d'être fortifiées, les croirait très-importantes quand il lit dans le voyage dont nous parlons, qu'il sera toujours aisé à une puissance forte de sa marine d'établir des croisières autour des Scychelles et de les prendre par famine (t 3, p. 248). Une embarcation de cinq tonneaux armée de quelques fusils serait plus que suffisante pour s'emparer de toutes ces îles.

Les assertions de M. Bory vont toujours en croissant, et s'il parle de la population des îles de France et de la Réunion, il assure qu'elle n'est pas bien connue. En 1765, l'Isle-de-France comptait 300 blancs, 500 noirs libres, 15000 esclaves. En 1763, la Réunion avait 4000 blancs, 15000 esclaves; le nombre en est toujours le même, tandis que celle de Maurice doit avoir diminué (t. 3, p. 270). M. Bory peut avoir été induit en erreur sur la population des deux îles, mais d'où conclut-il que celle de Maurice doit avoir diminué : il eût dû citer les raisons qui le font ainsi prononcer. Il était facile de consulter les recensemens qui se font chaque année, et d'après lesquels j'assure que la population de l'Isle-de-France comprend aujourd'hui plus de 7000 blancs, presque autant de gens de couleur libres, et que le nombre des esclaves s'y élève à plus de 70,000. Celle de la Réunion s'est accrue également.

M. Bory n'avait dans son voyage à l'île de la Réunion qu'un graphamètre. Ses compagnons de voyage m'ont dit

qu'il ne s'en était jamais servi. Comment a-t-il fait pour mesurer ces masses énormes de laves jetées par diverses éruptions, sur la solidité desquelles il s'exprime si hardiment. Ses idées sur le volcan sont tout-à-fait dignes d'un roman : il n'y a pas un noir, pas un habitant qui ait jamais soupçonné que ce pût être une des bouches de l'enfer.

Quand M. Bory dit qu'on ne trouverait pas dans toute. la Réunion un seul cheval hongre (t. 3, p. 200), j'aime autant entendre dire que toutes les femmes de Blois sont rousses et acariâtres.

Le soin que M. Bory a eu de donner à beaucoup d'endroits les noms des savans les plus respectables lui méri terait des remercîmens, si son amour-propre ne lui avait fait placer son nom à côté de ceux des Commersons, des Faujas, des Haüis, des Dolomieus. Ce ne sont point les Créoles qui ont nommé la grotte Bory, le cratère Bory, c'est M. Bory lui-même.

L'atlas qui est joint à cet ouvrage est composé de diverses vues de l'île de la Réunion, que l'auteur avoue devoir à MM. Patu de Rosemond et du Petit-Thouars, mais il ne nomme point MM. Milbert, Cap Martin et Selhausen. La carte de la Réunion, la plus belle de cette collection, a été gravée sur le dessin fait par M. Selhausen lui-même. M. Bory ne peut pas se flatter d'avoir des connaissances en géographie: en arrivant à Ténériffe, il lui arriva une scène durant laquelle on s'aperçut qu'il n'avait nulle idée des latitudes décroissantes.

Le port des arbres n'est rendu dans aucun des paysages de ce recueil; le bambou sur-tout n'offre point ces tiges élancées dont le sommet se balance mollement dans les airs, lors même qu'il n'est agité que par le plus léger zéphyr.

Cet ouvrage est plein de détails puérils et même ridicules. Les soldats de Sainte-Hélène ont un uniforme rouge et des boutonnières brodées, ils lui portaient les armes, etc. (t. 3, p. 301). Les officiers lui témoignèrent une grande affection, et furent étonnés de lui trouver une figure humaine sous l'habit national (t. 3, p. 312). Le voyageur rend à chaque instant compte de sa santé et des moindres particularités de sa vie (t. 1, p. 7). Il a eu de grands événemens; toutes ses pensées, toutes ses études ont été dirigées vers l'état militaire, etc. (t. 3, p. 190); alors M. Bory devrait savoir obéir, l'obéissance est le premier devoir du militaire, c'est aussi le premier qu'il enfreint;

sous prétexte de maladie, il reste à l'Isle-de-France; et il est si loin d'être malade que la veille du départ des cor-' vettes il va aux plaines Withems, et il dit dans son voyage: Avant le jour, j'étais aux racines de la montagne du corps de garde, je l'escaladai avec un jeune habitant, nous distinguâmes le Géographe et le Naturaliste, etc. ( t. I, p 195). Pourquoi crie-t-il dans un autre passage contre les naturalistes sédentaires qui s'approprient les travaux des ramasseurs (t. 2, p. 107); il a fait le sédentaire pendant le voyage des corvettes à la Nouvelle-Hollande. Toutes ses études ont été dirigées vers le militaire, et il n'a pas appris à braver, à supporter les fatigues.

Aux erreurs en tout genre dont cet ouvrage est rempli, il faut ajouter qu'il fourmille de fautes contre la langue, et qu'il est plein de jeannotismes. Les rejections d'un cratère ; une dépression dans la troncature (t. 1, p. 153). Des charrois pluviaux (t. 1, p. 368). Officier de génie, pour du génie (t. 3, p. 224). Le Gentil traînait par le bras Casimir grelottant et tout roidi, qui le suivait de profil (t. 3, p. 93). Je plaçai dans une petite malle de fer-blanc dont je me faisais suivre pour avoir à tout événement du linge de corps sec, etc. (t. 1, p. 293) En parlant de la bibliothèque des corvettes, il dit qu'elle était une dérision (t. 1, p. 9). La manière de voyager des marsouins est singulièrement décrite. Quand ils sont en troupe, l'un est toujours plus avancé et les autres nagent plus bas et plus en arrière à mesure qu'ils sont plus éloignés du plus haut (t. 1, p. 89).

Le Moniteur du 3 nivose an XIII, et le Journal des Débats du 14 brumaire font de ce voyage un éloge pompeux. Quand les rédacteurs ont promis d'insérer ces analyses, ils ont été surpris, j'en suis persuadé. S'il en était autrement, ce serait le cas de dire avec Alceste:

« Tout est d'un grand mérite également doué,
» Ce n'est plus un honneur que de se voir loué

» D'éloges on regorge, à la tête on les jette,

Et mon valet de chambre est mis dans la Gazette. >>

Si j'en crois les lettres initiales L. D. qui sont à la fin de cet article dans le Moniteur, il a été écrit par M. Léon Dufour. A la fin de sa préface, M. Bory remercie ce jeune naturaliste des soins qu'il a bien voulu donner à la rédaction de son voyage. Une correspodance de M. Bory que j'ai parcourue me force à penser, par les fautes et l'incorrection

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