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Abstraction faite des changements de style, qu'ajoutent nos deux historiens aux documents des Ixe, xe-xie et XIIe siè cles? Des précisions, qui ont juste la valeur de pures conjectures; quelques noms propres, inconnus et suspects 2; des données chronologiques en discordance avec celles que fournissent les plus anciennes chroniques 3; des indications généalogiques, qui paraissent être autant d'erreurs ; enfin tout un stock de légendes: les unes, très brèves, relatives à la conquête de Leon par Pélage3, au tribut des cent vierges subi par Mauregato, au rôle de la reine Chimène dans la conspiration de l'infant Garcia 7; d'autres, très complaisamment rapportées, concernant l'histoire de Bernardo del Carpio, les rapports fabuleux d'Alphonse II avec Charlemagne 9, ou

1. Exemples. Lucas de Tuy, p. 73, l. 43-44 : « Perquisivit [Froila] « etiam diligenter sacros ecclesiae Christi canones »; p. 74, 1. 18: « Et quia Mauregatus erat affabilis et benignus », etc.

2. Lucas de Tuy, p. 74, l. 27, appelle Nunilo et Rodrigue de Tolède, IV, 7, Imilo la femme de Bermude; tous deux parlent d'une sœur d'Alphonse II, Chimène, mariée au comte Sanche, et mère de Bernardo del Carpio; Lucas, p. 79, 1. 21 et Rodrigue, IV, 15, disent que la femme d'Alphonse III se nommait Amulina ou Amelina et changea son nom en celui de Chimène, etc.

3. Voir le tableau comparatif dressé par M. G. Cirot, Mariana historien (Bordeaux-Paris, 1904, in-8°), p. 310, note. Corriger deux légers lapsus: Ordoño Ier monta sur le trône, d'après Lucas de Tuy, P. 77, en 848 (non pas en 850) et d'après Rodrigue, IV, 14, en 828 (non pas en 826).

4. Ainsi, le roi Bermude devient dans Lucas de Tuy, p. 73, l. 34 et 55-56 (cf. p. 74, 1. 22), le fils de Wimara, le fils adoptif de Fruela et le petit-fils d'Alphonse Ier. Comparer Rodrigue de Tolède, IV, 6 et 7. Cf. G. Cirot, dans Bulletin Hispanique XIII, p. 390, n. 7.2 et p. 393,

n. 16.2.

5. Rodrigue de Tolède, IV, 4.

6. Lucas de Tuy, p. 74, l. 19-20; Rodrigue de Tolède, IV, 7. 7. Lucas de Tuy, p. 80, 1. 20-28; Rodrigue de Tolède, IV, 19. 8. Lucas de Tuy, pp. 75-80, passim; Rodrigue de Tolède, IV, 9. 9. Lucas de Tuy, loc. cit.; Rodrigue de Tolède, IV, 10-11 (avec réplique au Pseudo-Turpin).

la bataille de Clavijo 1. Il va sans dire que, pour des raisons de méthode, ou de bon sens, rien de tout cela ne saurait être pris en considération par la critique.

1. Lucas de Tuy, p. 76, 1. 27-p. 77, 1. 19; Rodrigue de Tolède, IV, 13.

CHAPITRE III

LES SOURCES ARABES

Les sources arabes sont de deux sortes: 1o des chroniques, reposant sur la tradition orale et retraçant à grands traits l'histoire de longues périodes ; 2o des compilations, de nature complexe, où l'on trouve à la fois les traditions que rapportent les chroniques et de très importants vestiges de documents écrits. Parmi les textes de la première catégorie, le principal est l'Akhbar madjmoúa; parmi ceux de la seconde, le Bayân d'Ibn Adhari et le Kâmil d'Ibn el-Athîr l'emportent en intérêt sur tous les autres 1.

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2

La chronique que l'on appelle l'Akhbâr madjmoủa 2 se com

1. Au seuil de ce chapitre, nous devons prévenir le lecteur: 1o que, sauf avis contraire, les ouvrages arabes qui ont été traduits (notamment avec correspondance de la traduction au texte), seront cités d'après les traductions existantes; 2o que l'orthographe des noms propres est celle que M. Fagnan a adoptée dans ses traductions d'Ibn el-Athîr et d'Ibn Adhari, moins les esprits doux et les esprits rudes; 3o que malgré le secours de la belle Introduction que Dozy a placée en tête du Bayân d'Ibn Adhari, on ne pouvait qu'effleurer à cette place un sujet dont la moindre parcelle exigerait une monographie.

2. Ajbar Machmuâ (Colección de tradiciones). Crónica anónima del siglo XI, dada á luz por primera vez, traducida y anotada por

pose de morceaux de dates diverses, tel d'entre eux remontant au viie siècle, tel autre au xe, l'ensemble ayant été recueilli par un auteur anonyme du xie. En fait, ces différents morceaux se groupent de façon à former deux parties: l'une, qui va jusqu'à l'avènement d'Hichâm Ier, constitue, malgré des lacunes et des erreurs, un document de premier ordre et renferme une série de narrations assez développées, dont les plus importantes concernent l'invasion de l'Espagne, l'arrivée de Baldj dans la Péninsule, les guerres civiles qui suivirent, la venue de l'Omeyyade Abd er-Rahmân Ier, le gouvernement de Yoûsof et le règne dudit Abd er-Rahmân. L'autre partie, qui s'étend d'Hichâm Ier à Abd er-Rahmân III inclus (961), n'est qu'un banal recueil d'anecdotes et de pièces de

vers.

En cet ouvrage disparate, une certaine place a été réservée à l'histoire des rapports entre « Galiciens » et Infidèles. Sans doute, l'Akhbar madjmoua ignore comment fut conquise la << Galice» (soit tout le Nord-Ouest de la Péninsule), et cette ignorance surprend d'autant plus que, relativement à la conquête, il nous a transmis le récit le plus digne de foi ; mais il sait en revanche qu'à l'approche des envahisseurs il y eut des Wisigoths qui allèrent « en Galice » chercher un refuge et un asile. Il mentionne, d'autre part, l'insurrection de Pélage 3 ; à vrai dire, il la ramène à des proportions minimes, puisque, selon lui, Pélage n'aurait commandé qu'à un groupe de trois cents hommes, et que ce groupe, déjà fort restreint,

3

Emilio Lafuente y Alcántara. Madrid, 1867, gr. in-8°. (Colección de obras arábigas... que publica la R. Academia de la Historia, I). Pour la partie relative à la conquête de l'Espagne, consulter également la traduction de Dozy, Recherches, 3e éd., I, pp. 40-57. Sur cet ouvrage, voir Dozy, Introduction au Bayân, pp. 10-12 et la préface de Lafuente y Alcántara, pp. VI-VIII.

1. Dozy, Recherches, 3e éd., I, p. 39.

2. Ajbar Machmuâ, trad. Lafuente, pp. 27 et 30. 3. Ibid., pp. 38-39.

aurait été bientôt décimé, au sens littéral du terme. Enfin, en signalant d'abord la révolte des Berbères installés « en Galice», lesquels massacrèrent les Arabes de la région 1, puis la famine qui, ravageant la Péninsule, obligea les Berbères à fuir les territoires où ils cantonnaient 2, il complète les chroniques latines, et il aide à comprendre l'expansion soudaine du royaume des Asturies à l'époque d'Alphonse Ier. L'Akhbar madjmoûa projette donc quelque lumière sur l'époque si obscure des origines, mais il s'en tient là; et, dans la deuxième partie, c'est à peine s'il déclare qu'El-Hakam combattit les Infidèles 3, et relate une anecdote suspecte, montrant ce prince se portant au secours de Musulmans de la frontière 4.

Les indications que fournit l'Akhbâr madjmoûa sont, à notre gré, trop rapides et trop fragmentaires. Peut-être, si toutes les œuvres composées en Espagne ou sur l'Espagne aux Ixe et xe siècles nous étaient parvenues, serions-nous mieux informés, et devrions-nous préférer d'autres témoignages. Mais présentement tel n'est pas le cas, et pour les temps antérieurs à la fondation de l'émirat de Cordoue (756), en vain chercherait-on, soit dans les premiers monuments de l'historiographie hispano-arabe, soit dans les écrits des xie et XIIe siècles, des traditions plus pures ou plus instructives.

-

La plus ancienne chronique qui traite de l'établissement des Arabes dans la Péninsule, celle d'Ibn Habîb (mort en 853) contient une telle part de légendes qu'il n'y a pas lieu de s'y arrêter 5. La chronique de l'Egyptien Ibn Abd el

1. Ajbar Machmuâ, PP. 48-49.

2. Ibid., pp. 66-67.

3. Ibid., pp. 112-113 : « El emir Al-Háquem ben Hixem... humilló « á los infieles por doquiera. »

'P. 116.

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4. Ibid., La même anecdote est répétée, avec quelques variantes, par Ibn Adhari, trad. Fagnan, II, pp. 117-118; Ibn elAthîr, Annales, trad. Fagnan, pp. 174-175, etc.

5. L'ouvrage d'Ibn Habîb, ou du moins attribué à ce dernier, est sommairement décrit par A. Nicoll, Bibliothecae Bodleianae codi

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