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il note le repeuplement de Zamora et d'autres villes ou territoires, opérations qu'il annonce ainsi : « ac triennio peracto, << sub era DCCCCXXXVII. » Notre auteur laisse donc subsister un vide entre les années 878 et 899; il ignore, ou feint d'ignorer tous les événements survenus dans cette période de vingt et un ans; ignorance d'autant plus surprenante que, jusqu'en 883, il pouvait continuer à piller le Chronicon Albeldense.

C) Aux passages qu'il tire du Chronicon Albeldense, Sampiro joint quelques détails nouveaux, relatifs notamment au comte des Alavais Eylo et à la bataille de Valdemora, laquelle aurait suivi celle de Polvoraria. De plus, entre les passages qu'il extrait de ladite chronique, il glisse des mentions nouvelles, lesquelles concernent le repeuplement de Sublantium et de Cea, le mariage d'Alphonse III et la révolte des frères du roi. Où Sampiro a-t-il puisé ces renseignements additionnels? On l'ignore. Ces renseignements méritent-ils qu'on en tienne compte? Ceux que nous pouvons contrôler semblent plus ou moins suspects. S'il est avéré qu'Alphonse III

1. Telle est la date que donne la rédaction du Moine de Silos, ch. 51 (éd. Santos Coco, p. 44), tandis que celle de Pélage, ch. 14, porte : « Era DCCCCXLVIII » (a. 910), et celle de la Chronique léonaise, liv. II, ch. 45 : « Era DCCCCXIX » (a. 881). Ces deux dernières dates sont à rejeter. Dans la rédaction pélagienne, après la phrase: « sed << rex per triennium illis pacem accomodans », etc. (ch. 6), sont intercalés les actes du concile d'Oviedo, lesquels finissent, au ch. 13, par ces mots : « Actum concilium XVIII. kalendas julii era DCCCCXLV » (a. 907); lorsque la narration reprend, au ch. 14, nous lisons : « Con«gregato magno exercitu, ac triennio peracto sub era DCCCCXLVIII » (a. 910). Il y a là une retouche manifeste, et sur laquelle il est inutile d'insister. Quant à la rédaction léonaise, elle combine aux ch. 43-45 la chronologie du Chron. Albeldense (ch. 62-64) avec le récit de Sampiro; mais si les dates de 877 et 878 conviennent bien, l'une à la capture d'Ibn Abd el-Azîz, l'autre à l'expédition d'El-Mondhir, c'est par inadvertance ou excès de logique que le compilateur, influencé par le ac triennio peracto, transpose ou calcule lui-même la date de 881, et l'applique au repeuplement de Zamora et autres lieux.

épousa une princesse navarraise, appelée Chimène, il est excessif de prétendre que cette princesse était apparentée à la « Gaule » tout entière 1. D'autre part, en admettant que Bermude ait effectivement pris les armes contre Alphonse 2, il est tout à fait invraisemblable que la rébellion de Bermude ait pu durer sept ans ; il est enfin très improbable que l'annaliste contemporain auquel nous devons, dans le Chronicon Albeldense, le récit des années 878-881, ait oublié de signaler la bataille de Valdemora, ou mieux qu'il ait transformé en retraite volontaire ce qui aurait été réellement un désastre 3.

Sampiro est-il mieux informé sur la fin du règne ? A partir de 899, il relate: 1o le repeuplement de Zamora, Simancas, Dueñas, de la Tierra de Campos et de Toro (899); 2o la bataille de Zamora (901); 3o la marche d'Alphonse sur Tolède et la prise de Quintialubel; 4o le soulèvement d'Adamnino ; 5o la révolte de l'infant Garcia; 6o la déposition d'Alphonse, son pèlerinage à Compostelle, sa dernière campagne contre les Arabes et sa mort à Zamora. Ici encore, on ne sait quels documents Sampiro utilise. Son témoignage est corroboré, sur un point, par d'autres sources : les textes arabes nous apprennent en effet qu'Alphonse combattit, en 901,

1. Sampiro, éd. Florez, ch. 1: «Non multo post universam Galliam << simul cum Pampilona causa cognationis secum associat, uxorem « ex illorum prosapia generis accipiens, nomine Xemena » (« Xime« nam, consubrinam Caroli regis », dit le texte silésien, ch. 49). Si l'on accepte, à défaut de la glose consubrinam Caroli regis, la locution universam Galliam, il faudrait en limiter le sens, et dire avec M. J. de Jaurgain, La Vasconie (Pau, 1898-1902, 2 vol. in-8o), I, p. 277 : « ...Sampiro a évidemment voulu parler de la Vasconie cispyrénéenne, << dont les princes le duc de Gascogne, les comtes de Comminges << et de Bigorre, le vicomte de Béarn étaient... les proches parents « de la femme d'Alphonse III et de la même race qu'elle. »>

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2. Tailhan, Bibliothèques, p. 311, n. 5, considère cette révolte comme légendaire; cf. ci-dessous, 2e Partie, ch. IV.

3. Comparer Chron. Albeldense, ch. 63 et Sampiro, éd. Florez, ch. 5.

sous les murs de Zamora 1. Mais, partout ailleurs, il nous faut ou croire Sampiro sur parole, ou révoquer en doute sa parole. Or, tout le dernier paragraphe, depuis : « Et veniens << Zemoram filium suum Garseanum comprehendit » a des allures de légende.

Une dernière remarque. Sampiro a-t-il composé lui-même le récit qui vient d'être analysé, ou l'a-t-il copié dans une chronique aujourd'hui perdue? On sait que l'œuvre du Pseudo-Alphonse avait été poursuivie jusqu'à l'époque de Garcia Ier 2: est-ce cette continuation perdue qu'aurait employée Sampiro? Il nous paraît impossible de résoudre le problème ainsi posé, d'autant que le Moine de Silos nous a conservé une suite au Pseudo-Alphonse.

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A notre point de vue spécial, ces documents se répartissent en deux classes: les uns renferment des mentions précises et datées, relatives à tels faits de l'histoire asturienne; les autres n'offrent, pour l'époque qui nous occupe, que de simples listes de rois, ou des résumés très succincts.

A) Un coup d'œil jeté sur les sources du premier groupe permet d'en opérer le classement d'une façon sommaire, mais suffisante. Les trois plus anciennes annales sont : 1o les annales portugaises dites Chronicon Laurbanense (866-1110) 3; 2o les annales castillanes dites Chronicon S. Isidori Legionensis, ou Anales Castellanos I (618-939) ; 3o les annales

1. Voir ci-dessous, 2o Partie, ch. III.

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2. Cf. le titre qui accompagnait la Chronique d'Alphonse III dans le Soriensis. Sur ce titre, voir Revue Hispanique, XLVI (1919), PP. 333334.

3. Portugaliae Monumenta Historica. Script., I, 1 (1856), p. 20. Ces annales sont du Ixe siècle ; les deux dernières mentions, relatives aux années 1064 et 1110, résultent d'additions.

4. Publiées, sous le titre de Chronicon S. Isidori Legionensis, par

navarraises que le Codex de Meyá nous a transmises (882fin du xe siècle). Ces trois annales constituent trois documents indépendants. Il n'en est pas ainsi pour les autres œuvres, d'époque plus ou moins basse, qui appartiennent au même groupe Annales Complutenses (1-1126), Annales Compostellani (1-1249), Chronicon Burgense (1-1212), Anales Toledanos I (1-1219) et Cronicon I de Cardeña (1-1327) 2: tous ces textes, castillans d'origine 3, sont unis par des liens de mutuelle dépendance . Or, à l'exception de deux passages des Annales Compostellani et d'un passage extrêmement suspect du Cronicon I de Cardeña 5, il n'est pas une note incluse

Tailhan, Anonyme de Cordoue, pp. 196-197 (cf. pl. xIx); texte plus correct dans Manuel Gómez-Moreno Martínez, [Anales Castellanos] Discursos leídos ante la Real Academia de la Historia (Madrid, 1917, in-8o, 45 pp.), pp. 23-24, sous le titre : Anales Castellanos primeros. A remarquer que ni le P. Tailhan, ni M. Gómez-Moreno ne semblent avoir connu une édition partielle due au P. P[ablo] R [odriguez], Diploma de Ramiro I (Madrid, 1804, pet. in-4o), pp. 348-349.

1. Successivement imprimées par Traggia (1805), M. Oliver y Hurtado (1866), Sanpere y Miquel (1904), la dernière édition étant celle de M. Serrano y Sanz, Noticias y documentos históricos del condado de Ribagorça (Madrid, 1912, in-8o), pp. 173-174.

2. Voir le texte de ces documents, non dans Berganza (1721) ou Ferreras (1727), mais dans Florez, Esp. Sagr., XXIII (1767), pp. 307 et suiv. (2e éd., 1799, pp. 308 et suiv.). Pour les Annales Complutenses, consulter l'édition, tout à fait nouvelle, qu'a donnée M. Gómez-Moreno, op. cit., pp. 25-28, sous le titre : Anales Castellanos segundos.

3. Les Annales, dit même M. Gómez-Moreno, p. 6, « son especialidad de Castilla ».

4. Cf. Gómez-Moreno, p. 9 : le Chronicon Burgense n'est, en grande partie, qu'un abrégé des Annales Compostellani; le Cronicon I de Cardeña dépend lui aussi des Annales Compostellani dont il est une traduction partielle; les Anales Toledanos I dépendent à leur tour des Annales Complutenses, qu'elles traduisent presque en entier. Noter, en passant, que les Annales Complutenses sont particulièrement importantes pour les xe et xie siècles, et les Annales Compostellani pour les xie, XIIe et XIIIe.

5. Notice de la destruction de Cardeña par les Arabes en 834. Voir ci-dessous, 2o Partie, ch. IV.

dans les annales précitées que l'on ne rencontre déjà, sous une forme plus correcte ou plus explicite, dans le Chronicon S. Isidori Legionensis ou Anales Castellanos I. Ces dernières annales, celles de Lorvão et de Meyá, subsidiairement celles de Compostelle, tels sont, à l'exclusion de tout autre, les documents de cette nature que nous ayons à employer.

Mais les documents ainsi sélectionnés ne nous seront pas d'un grand secours. Le nombre des événements qu'ils relatent est si restreint une quinzaine environ1 qu'il paraîtrait presque négligeable, s'il ne s'agissait pas de l'Espagne du haut moyen âge. Encore faut-il observer que ces quelques renseignements ne sont pas tous pleinement intelligibles. Ici, un accident de transcription a mutilé le texte primitif, comme il arrive pour l'unique mention que contiennent les Annales de Meyá 2. Là, le contexte est si bref, qu'il en devient presque énigmatique. A quoi répond, par exemple, cette phrase des Anales Castellanos I: « In era DCCCLII. << exierunt foras montani de Malacoria et venerunt ad Cas<«<tella » ? A quoi se rapporte cette proposition, puisée à la même source: « In era DCCCCIIII. fregit Rudericus commes << Asturias » ? Pour tirer parti de notes de ce genre, il a fallu beaucoup d'ingéniosité; mais les explications proposées que nous admettrons, faute de mieux, n'ont que la valeur d'heureuses conjectures 3.

B) Des listes ou catalogues de rois asturiens (et léonais)

1. Les Anales Castellanos primeros fournissent à peine neuf mentions; le Chronicon Laurbanense en donne quatre, les Annales de Meyá une seule. Joindre à cette maigre récolte les deux passages, déjà signalés, des Annales Compostellani.

2. « Era DCCCCXXXVIII fuit coniunctio duorum regum, id est • Adefonsus Astu... » (Serrano y Sanz, op. cit., p. 173, porte, par erreur Era DCCCCXXVIII »). De même, Anales Castellanos I, à

l'année 856 : « In era DCCCLXVIIII populavit domnus Ordonius Le<< gione et in tertio anno sic fregit...... » (Gómez-Moreno, op. cit., p. 23). 3. Voir ci-dessous, 2e Partie, ch. IV.

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