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servés, de ma collection; en sorte qu'il ne saurait rester le moindre doute à cet égard. Millingen, qui admettait aussi dans la numismatique italique le nom de Compulteria, sur la foi des médailles en question, se trompait cependant en observant que la situation précise de Compulteria n'était pas connue'. Le fait est que cette situation a été très-bien signalée, de nos jours, dans la région méridionale du Samnium, sur la rive droite du Volturne, à un mille environ, dans le territoire d'Alvignano, où la tradition du nom antique s'était conservée dans le nom.Coboltere, donné à cette localité dans plusieurs documents du moyen âge, et où il a été retrouvé des inscriptions latines portant le nom des habitants, Cupulterini et Cubulterini 2. Tout ce qui tient à la situation de la Compulteria samnite et à ses médailles osques est donc aujourd'hui parfaitement expliqué..

Je n'en ai été que plus surpris de voir toutes ces notions réduites au néant dans l'important ouvrage que M. de Lorichs vient de publier sur les médailles celtibériennes d'Espagne. Il faut que cet antiquaire, qui a passé plus de quarante ans de sa vie à étudier les monnaies celtibériennes d'Espagne, et qui en a formé la collection la plus nombreuse et la plus choisie qu'il y ait sans doute en Europe, ait été sous l'empire d'une illusion bien étrange, pour voir une monnaie celtibérienne dans ⚫ notre médaille osque de Compulteria, et pour en expliquer la légende, Max, de la manière que voici: KV.TTE.VT.E.D.NVM, qui signifierait: KVrator PEcuniæ VTriusque QVINTA Officina NVMorum3. M. de Lorichs, qui ne paraît connaître cette médaille que par Mionnet*, et qui ne l'a sans doute jamais vue, n'aurait qu'à y jeter les yeux pour se convaincre que, ni par le module, ni par le métal, ni par les types, qui sont campaniens, ni par la légende, qui est osque, ni par toutes les conditions de la fabrique, elle n'a absolument aucun rapport avec les médailles celtibériennes d'Espagne, qui lui sont si familières; et je

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Considérations, etc., p. 178-179: « La situation précise de Compulteria n'est pas connue, mais on croit retrouver son nom (on retrouve plus que son nom) dans celui de Cultore (lisez Coboltere), village près d'Alcignano (lisez Alvignano), « dans le diocèse de Caiazzo, l'ancienne Calatia. » 2 Dissertaz. sul sito della destratta città di Compulteria, di Pasquale de' Jorii (Napoli, 1834, in-18), p. 9-33, et p. 37-59. Recherches numismatiques concernant principalement les médailles celtibériennes, par Gustave de Lorichs, t. I (Paris, 1852, in-4°), p. 243-244. .M. de Lorichs cite la médaille d'après la Description de Mionnet, t. I, p. 115, n. 144, en disant qu'il l'attribuait aux villes de Cuma et de Liternum. Mais Mionnet ne faisait en cela, comme en tout, que suivre l'exemple d'Eckhel. L'attribution proposée en second lieu par Mionnet, à Cupelterini vel Compulteria, Supplément, t. I, p. 237-8, n° 263-267, était celle d'Avellino, Ad Ital. vet. numism. suppl. p. 7, n° 2, 4, 5.

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ne relève cette erreur singulière, sans m'y arrêter plus longtemps, que parce que j'y trouve un des traits les plus frappants de l'espèce de préoccupation que peut produire, sur les meilleurs esprits et sur les hommes les plus instruits, l'étude exclusive d'une certaine classe de monuments.

Aux médailles de Compulteria succèdent, sur la même planche, LXI, n° 13-14, celles de Maliesa, dont l'attribution reste encore incertaine. Millingen, qui fit connaître le premier une de ces médailles, où il lisait MALIEZA, en caractères, partie grecs et partie osques1, l'attribuait à une ville du Samnium, Mele ou Meles2, qu'on croit avoir été la Molise de nos jours. Plus tard, il changea d'avis, pour embrasser l'opinion de Carelli, qui avait fait déjà graver deux de ces médailles, et qui en • avait publié la description3, en exprimant l'idée que le nom Maliesa pouvait être la forme grecque, Maλbets, de l'ancien nom Maleventum, que porte la ville de Bénévent. C'est aussi l'opinion que paraît suivre M. l'abbé Cavedoni, dans la description de ces médailles; et j'ajoute qu'elle a été adoptée tout récemment par M. Mommsen. Toutefois, il est certain, d'après le rapprochement même qu'a fait en dernier lieu M. Mommsen, des diverses formes de la légende, que la vraie leçon en est encore très-douteuse, qu'on ne la peut considérer avec assez de certitude, ni comme grecque, ni comme osque, et qu'on pourrait plutôt la regarder comme latine, Maliessa pour Maλoéoσa; ce que je ne saurais accorder à ce savant. Un autre antiquaire, M. Friedländer, qui vient d'entreprendre un travail approfondi sur les médailles osques, et qui a publié la monnaie de Maliesa, d'après trois exemplaires, les mieux conservés qu'il en connût, déclare aussi que la légende est mélangée de lettres latines et grecques, et que notamment le dernier caractère est bien le sigma grec E. A mon tour, je puis certifier que, sur l'exemplaire de ma collection, qui est de la meilleure conservation et qui me vient de M. le prince de San-Giorgio Spinelli, la légende est absolument comme la donne M. Friedländer, MALIEΣ, avec le sigma grec. Quant à l'attribution, j'avoue que je reste encore dans le doute. La fabrique de ces médailles, qui sont rares, est certainement campanienne, d'accord avec les types, quoiqu'elles soient d'un plus petit module; et c'est à tort, suivant moi, que M. Friedländer les refuse à la Campanie3; M. Mommsen était d'un autre avis, et il avait certainement raison. Elles

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2 Tit. Liv. XXIV, xx, et XXVII, init. • Considérations, etc., p. 223-224. • Die unterital. Dialekte, p. 102, Die oskisch. Münzen, Taf. vIII, p. 67: Dem Münze nicht nach Campanien. - Mommsen,

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peuvent donc avoir été frappées dans quelque ville du Samnium, voisine de la Campanie, comme Mela; mais, en tout cas, je ne puis me décider à y voir les monnaies de Bénévent, dont l'émission précéda celles qui portent la légende latine BENVENTOD, et je ne saurais croire que le nom, représenté par la légende mélangée MALIEE, soit le nom grec Madóɛooa, qui aurait produit le nom latin Maleventum. Toutes ces suppositions, qui ne reposent sur aucun témoignage, me paraissent autant d'hypothèses très-hasardées et tout à fait gratuites.

Le dernier monument de cette planche, LXI, n° 15, est la célèbre médaille de Pellerin', restée longtemps unique, où cet antiquaire avait cru lire le nom de Margantia, ville du Samnium. Carelli, qui ne l'avait jamais vue, se borna à reproduire l'exemplaire de Pellerin, avec son . attribution. Mais, depuis, des doutes se sont élevés sur la manière dont la légende, conçue en caractères osques, devait se lire, de droite à gauche, et Millingen avait déjà constaté que, sur la médaille de Pellerin, les lettres que cet antiquaire avait prises pour les initiales du nom de Murgantia, étaient, au contraire, la terminaison d'un nom osque, MV, tel que Nakrinum, Kupelternum, etc.2. De nos jours enfin, il s'est rencontré un exemplaire parfaitement conservé de cette médaille, où Avellino a pu lire la légende osque, MVITNIIT, Tüatium, d'où résulte l'attribution certaine à la ville de Teate, des Marruciniens 3. Cette restitution, qui fait beaucoup d'honneur à son auteur, le grand antiquaire napolitain Avellino, a été suivie avec toute raison par M. l'abbé Cavedoni; elle a été admise en dernier lieu par M. Friedländer", et je puis dire que, sur un exemplaire très-bien conservé que je possède de cette médaille, qui est encore d'une grande rareté, la leçon VIII+ ne laisse aucun doute sur cette attribution, une des plus heureuses qui aient été acquises dans ces derniers temps à la science.

La planche suivante, LXII, renferme un assez grand nombre de médailles rares et curieuses, dont l'attribution est encore controversée. En premier lieu figure le didrachme de la ville osque de Phistlus, resté encore, jusque dans ces derniers temps, une pièce d'une assez grande

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Die unterital. Dialekte, p. 102, 1): Der Typus... weist nach Campanien. - III Supplément, pl. iv, n. 2, p. 95. 2 Considérations, etc., p. 180. —3 Bullet. archeol. Napol. t. IV, p. 25. Die oskisch. Münzen, p. 49, Taf. vi. 5 M. Friedländer n'en connaît encore que six exemplaires; j'en possède deux, sur l'un desquels la légende manque par le défaut du coin, l'autre conserve la légende entière et trèsdistincte dans tous ses éléments. La fabrique, d'accord avec les types, est certai nement campanienne, et il en résulte avec toute certitude que la médaille ne saurait être attribuée à la Teate d'Apulie.

rareté. Cette médaille est manifestement imitée d'un didrachme archaïque de Naples, qui offre absolument les mêmes types', et la fabrique en est à peu près contemporaine; c'est donc, à n'en pouvoir douter, le monument le plus ancien de la langue osque que nous ayons recueilli jusqu'ici. D'après les types et toutes les conditions de la fabrique, cette monnaie dut appartenir à une ville osque de la Canapanie, voisine de Naples; et cette ville dut être d'une assez grande importance, dès une époque ancienne, à en juger par ce didrachme même. Nous possédons, d'ailleurs, à l'appui de son existence, continuée dans les siècles suivants, d'autres monuments numismatiques, acquis récemment aussi à la science; ce sont de petites monnaies d'argent, du module de l'obole, représentées sur la planche LXII de Carelli, n° 5, 6, 7, 8, qui of frent, d'un côté une tête, ou plutôt, un masque viril, imberbe, de face, et, de l'autre, un grain d'orge entre un dauphin et une coquille, pareille à celle des médailles de Cumes. La légende osque, qui se trouve sur le revers, est IV+18, Phistlais, leçon qui se voit aussi sur une variété du didrachme, nouvellement connue 2; et, sur d'autres exemplaires de l'obole en question, une seconde légende, conçue en caractères grecs, ΦΙΣΤΕΛΙΑ, est ajoutée du côté de la tête. Il n'est pas douteux, d'après la double inscription, osque et grecque, que la population de cette ville ne fût un mélange de Grecs et d'Osques, et que son nom osque, Phistlus, ne soit fidèlement représenté par le nom grec, Phistelia. Toutes ces conditions, jointes à l'emprunt de la coquille de Gumes, tendent à faire attribuer les médailles en question à une ville de la Campanie, qui aurait eu pour habitants des Grecs et des Osques, qui aurait été voisine de Naples et de Cumes, et qui aurait été, comme ces deux villes, située au bord de la mer; mais, ni le nom osque de Phistlus, ni le nom grec de Phistelia, ne se trouve cité dans aucun historien ni géographe de l'antiquité. On avait pensé d'abord à Pæstum3; et cette attribution, suivie en dernier lieu encore par Mionnet, a été rejetée plus tard par ce numismatiste, en indiquant la Campanie comme la patrie probable de ces médailles ; ce qui est vrai. De nos jours, on a cru voir, dans le nom osque de Phistlus, le nom primitif de Puteoli, Pouzzoles, devenue depuis

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C'est ce qu'il est facile de vérifier dans le rapprochement des deux médailles du cabinet de M. le duc de Luynes, Choix de médailles grecques, pl. 1, n° 11, 12. 2 Publiée par M. Friedländer, dans les Annali de M. Fiorelli, fasc. 1, tav. 1, n. 10, et reproduite dans ses Oskisch. Münzen, Taf. v, n. 2, p. 31. 3 Mazochi, Tabul. Heracl. p. 590; Ignarra, De Palæstr. Neapol. p. 261. Eckhel avait déjà fait justice de cette opinion, Doctr. num. t. I, p. 160. Description, t. I, p. 166-7, n° 641, 642.Supplément, t. I, p. 318, no 822-825.

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colonie grecque de Gumes, sous le nom de Dicæarchia; et cette attribution, proposée par Millingen', a été soutenue tout récemment par M. Friedländer2; mais ce n'est évidemment là qu'une conjecture, qui ne repose sur aucun témoignage, et qui, depuis, a été repoussée par son auteur lui-même3. Les antiquaires napolitains ont cherché la patrie de ces médailles, tantôt dans une ville de Plistia du Samnium, tantôt, dans celle d'Histonium, du pays des Frentanes 5; mais les types, qui sont tous de Naples et de Cames, la fabrique et le métal, qui indiquent la Campanie, et la provenance constante, qui est le territoire de Naples, s'opposent formellement à de pareilles attributions. Dans cette divergence d'opinions, et dans cette absence de données certaines, je suis disposé à croire, comme le faisait en dernier lieu Millingen, qu'il exista, dans la Campanie; au voisinage de Gumes et de Naples, une ville, située comme elles au bord de la mer, peuplée de Grecs et d'Osques, et nommée Phistlus, Phistelia, dont le souvenir n'a laissé aucune trace dans l'histoire; ce qui n'a rien d'extraordinaire; car nous possédons plusieurs exemples de villes dont l'existence n'est connue que par leurs médailles, et nous allons retrouver plus d'un de ces exemples dans la Campanie même. M. l'abbé Cavedoni ne s'est pas expliqué sur cette grave question; il s'est borné à décrire les types des médailles de Phistlus et de Phistelia, gravées sur la planche de Carelli, sans se prononcer sur leur attribution; et je n'ai à relever, dans cette partie de son travail, qu'une légère inexactitude qu'il a commise, en lisant l'inscription grecque, IETYAIA; c'est IETEAIA que porte la médaille, sur tous les exemplaires qu'on en connaît, et qui sont encore très-rares, dont l'un, en ma possession, offre cette légende avec toute la netteté désirable.

Carelli avait réuni, sur la même planche LXII, n° 2, 3 et 4, à ses médailles de Phistlus et de Phistelia, une classe de petites monnaies d'argent, du même module de l'obole, qui ont pour type principal une tête jeune et imberbe, de face, avec un lion marchant à gauche, au revers, sans inscription d'aucun côté. C'était sans doute cette analogie du type de la tête qui l'avait conduit à cette disposition; et son savant éditeur, en ne

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Ancient Greek Coins, P. 7. 2 Die oskisch. Münzen, Taf. v, n° 3, 4, p. 29. 3 Considérations, etc., p. 201. — Avellino, Opuscoli, t. III, p. 86. C'est aussi l'opinion de D. Michele Santangelo, que je lui ai-entendu exprimer de vive voix. Avellino, Bullet. archeol. Napol. t. IV, p. 7. — M. Gennaro Riccio continue de placer Fistelia dans le Samnium, tout en admettant que ce pourrait être Histonium; voyez son Repertorio numismatico, p. 5. Ni l'un ni l'autre n'est possible.

Considérations, etc., p. 201. - Millingen, Ancient Greek Coins, pl. I, n. 5, et Considérations, etc., p. 201; Friedländer, Die oskisch. Münzen, Taf. v, n. 4, p.

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