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liébraïque , et il y trouva celui d'Athalie , qu'il traita avec plus d'art encore que le premier ; mais cette Tragédie ne fut point représentée à Saint-Cyr.

A vant l'époque d'Esther , les Pensionnaires de cette maison avoient joué quelques Pieces composées exprès pour elles par Madame de Brinon, leur premiere supérieure ; mais Madame de Maintenon avoit trouvé ces Pieces si mauvaises , qu'elle n'avoit pas voulu que l'on continuât à les jouer. On y avoit substitué des chef-d'æuvres de P. Corneille et de RACINE. On y joua Cinna et Andromaque. Ces deux exe cellentes Tragédies étoient assez bien jouées par les jeures Demoiselles. Andromaque , sur-tout , le fut tellement que Madame de Maintenon crur devoir en interdire les représentations , et n'en plus permettre à l'avenir où l'amour se trouvât si bien peint, et même où il entrât pour quelque chose. Ce fut dans cette vue qu'elle s'étoit adressée à RACINE , en le priant de la sea conder par quelque nouvelle composition, faite exprès ; mais si Esther, avoit entiérement rempli , cette piense intention, on n'en trouva pas moins

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du siége. Ses Lettres écrites à Boileau, du camp devant Namur , font bien connoître qu'il ne songeoit plus qu'à être Historien. »

RACINE, de retour de l'armée, alloit souvent se délasser de ses fatigues, comme dit son fils , dans le Tibur de son cher Horace ; c'est-à-dire, à Auteuil , dans la maison de Boilcau. Il avoir eu sept enfans de son mariage, cinq filles et deux garçons, et il s'occupa du soin de pourvoir cette nombreuse famille. Une de ses filles se fit Religieuse à Port-Royal des Champs , où deux seurs de son ayeule, Marie des Moulins, qui s'y étoit retirée , avoient pris le voile, ainsi que fa sæur de son pere , qui en fut long - tems. Supérieure , et qui en devint Abbesse, sous le nom d'Agnès Sainte-Thécle Racine. Il obrint pour son fils aîné la survivance de sa Charge de Gentilhomme de la Chambre, et le produisit à la Cour, où il l'attacha , de plus, au département des Affaires étrangeres , sous le Ministere de M. de Torcy, qui le chargea de dépêches importantes pour notre Ambassadeur en Hollande, M. de Bonrepeaux, en le lui recommandant particuliéreinent. Le second fils de RACINE mé

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rita et obtint une réputation distinguée parmi les Poëres sacrés, pour son Poëme de La Grace son Poëme de La Religion, ses deux Lettres en vers sur l'Ame des Bétes , et quelques Odes et Épîtres , très estimées. Il a fourni plusieurs Dissertations savantes aux Mémoires de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, dont il a été Membre. Il a donné une Traduction du Paradis perdu , de Milton , des Réflexions sur la Poésie, des Remarques sur les Tragédies de son pere, et des Mémoires particuliers, d'où nous tirons la pluparc des faits que nous rapportons ici.

« Tandis que mon pere espéroit par ses protections qu'il avoit à la Cour y faire avancer son fils aîné, et lui abréger les premieres peines de la carriere, il étoit près de finir la sienne , dit Louis Racine, dans ces Mémoires. Il y a beaucoup d'apparence que sa trop grande sensibilité abrégea ses jours. La connoissance qu'il avoit des hommes , et le long usage de la Cour , ne lui avoient point appris à déguiser ses sentimens. Il est des hommes dont le coeur peut toujours être libre comme leur génie. Peut-être ne con

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noissoit-il pas assez la timide circonspection er la défiance ;

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».

Mais cette défiance »» Fut toujours d'un grand cæur la derniere science.

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Il étoit d'ailleurs naturellement mélancolique , et s'entretenoit plus long-tems des sujets capables de le chagriner , que des sujets propres à le réjouir. Un événement qui le frappa trop vivement, lui fit voir comme présent un malheur qui étoit fort éloigné. Les marques d'attention de la part du Roi , dont il fut honoré pendant sa derniere maladie, durent bien le convaincre qu'il avoit toujours le bonheur de plaire à ce Prince , quoiqu'il se fût persuadé que tout étoit changé pour lui. »

« Madame de Maintenon, 'qui lui accordoit une escime particuliere , ne pouvoit le voir trop souvent, et se plaisoit à l'entendre parler sur dife férentes matieres', parce qu'il étoit propre à parler de tout. Elle l'entretenoit un jour de la misere du peuple. Il lui déclara qu'elle étoit une suite des longues guerres ; mais qu'elle po:irroit

être

être soulagée par ceux qui étoient dans les premieres places, si l'on avoit soin de la leur faire connoître. Il s'anima sur cette réflexion , et, comine dans les sujets qui l'animoient il entroit dans un enthousiasme qui lui inspiroit une élo-. quence agréable , il charma Madame de Maintenon, qui lui dit que puisqu'il faisoit des observations si justes, sur le champ, il devroit les méditer encore et les lui donner par écrit , bien assuré qu'elles ne sortiroient pas de ses mains. Il accepta malheureusement la proposition , non par une complaisance de Courtisan , mais parce qu'il conçut l'espérance d'être utile au public. Il fit un Mémoire aussi solidement raisonné que bien écrit, et le remit à Madame de Maintenon. Elle le lisoit lorsque le Roi, entrant chez elle , le prit , et, après en avoir parcouru quelques lignes, lui demanda, avec vivacité , quel en étoit l'Auteur. Elle répondit qu'elle avoit promis le secret; mais elle fit une résistance inutile : le Roi expliqua sa volonté en termes si précis qu'il fallut obéir , et l'Auteur fut nommé. Le Roi , en louant son zele , parut désapprouver gu'un homme de Lettres se mêlât de choses qui

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