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l'effet de dresser l'inventaire des caractères, poinçons, matrices et autres objets de l'Imprimerie royale, certifions y avoir procédé suivant le détail énoncé en l'état ci-dessus, conjointement avec M. Anisson, directeur de ladite imprimerie, et avoir trouvé tous les articles composant ledit inventaire, tenus, conservés et rangés avec un ordre qui prouve la vigilance, les soins de M. Anisson, son ardeur à remplir les devoirs de sa place et l'amour qu'il a pour son art. En foi de quoi nous avons signé le présent inventaire, que nous avons clos ce jour d'huy, 23 décembre 1790. Fait à Paris, les jour et an ci-dessus.

DE GUIGNES. D'ANSSE. ANISSON.

IV.

LISTE DES DIRECTEURS

DE L'IMPRIMERIE ROYALE DU LOUVRE.

CRAMOISY (Sébastien), nommé directeur de l'Imprimerie royale du

Louvre lors de la création de cet établissement en 1640, fit donner sa survivance à son petit-fils, Sébastien Måbre (qui prit le nom de Mabre-Cramoisy), le 27 novembre 1660, et mourut le 29 janvier 1669.

MABRE-CRAMOISY (Sébastien) succéda à son grand-père en 1669, et mourut le 10 juin 1687; mais sa veuve conserva le titre jusqu'en 1691, époque à laquelle Jean Anisson, de Lyon, fut nommé. ANISSON (Jean) fut nommé directeur le 15 janvier 1691. Il était auparavant imprimeur-libraire à Lyon. Il dut sa nomination à l'impression du Glossaire de la basse grécité, de Ducange, dont il s'était chargé au refus des libraires de Paris1. Il se démit de

Jean Anisson appartenait à une célèbre famille d'imprimeurs de Lyon. Son père, Laurent, avait publié, entre autres ouvrages remarquables, la Bibliothèque des Pères, en 27 volumes in-folio. Quant à lui, il se signala particulièrement par l'impression du Glossaire de la basse grécité, de Ducange. La Bibliothèque impériale possède de lui une collection de lettres écrites à Ducange durant l'impression de son livre. Ces lettres, qui vont du 18 février 1682 au 5 juillet 1688, renferment des détails très-curieux pour l'histoire du livre de Ducange et pour celle de Ducange et d'Anisson eux-mêmes.

Voici d'abord ce qui concerne le Glossarium ad scriptores mediæ et infimæ græcitatis (2 vol. in-fol. 1688), savant livre, très-recherché et devenu peu commun, an témoignage de M. Brunet, dans son Manuel.

Les lettres d'Anisson nous apprennent que ce livre a été tiré à 1,100 exemplaires, d'un seul papier. Il ne devait primitivement former qu'un seul volume; mais les

la charge de directeur en 1707, en faveur de son beau-frère, qui suit, et mourut en 1 1721.

RIGAUD (Claude), beau-frère du précédent, fut nommé en son lieu et place par ordonnance royale du 16 février 1707. Celui-ci se démit à son tour en 1723, en faveur de son neveu, qui suit. ANISSON (Louis-Laurent), neveu du précédent, lui succéda le

nombreuses additions qu'y fit Ducange, à la sollicitation d'Anisson, forcèrent à en faire deux, et à réimprimer, en conséquence, la feuille du Glossaire proprement dit où s'opéra la coupure.

Spon père et fils surveillèrent la lecture d'une partie du livre. On voulait même d'abord ne pas envoyer d'épreuves à l'auteur, afin d'aller plus vite; mais on dut agir différemment pour éviter les incorrections.

Le privilége est du 7 septembre 1682; il n'étend les droits de l'auteur qu'à six ans. Anisson se plaint de ce que le terme soit si court; il prétend qu'on obtient facilement dix ans pour des livres de ce genre.

Le Glossaire proprement dit forme 1794 colonnes; après cela viennent les additions, dont le premier cahier (2 feuilles ou 16 colonnes) est imprimé par Anisson. Le reste de ces additions, formant 27 feuilles, sort des presses d'un des Cramoisy, celui qui demeurait rue de La Harpe (sans doute André, car les autres demeuraient rue Saint-Jacques), avec lequel on fut obligé de s'entendre, en novembre 1686, pour activer un peu l'impression. Le travail de Cramoisy commence à la colonne 17 des additions, et se distingue à la fois par l'imperfection des caractères grecs et romains, et par celle de l'impression, autrement dit du tirage. Quant au papier, c'est le même que celui employé par Anisson, ce dernier en ayant envoyé la quantité nécessaire.

Anisson, qui n'avait voulu d'abord payer que 12 ou 13 livres à Cramoisy pour chaque feuille, fut forcé de lui donner 15 livres, ce qui était exorbitant, suivant lui, et ce qui serait aujourd'hui un prix dérisoire.

A la suite des additions imprimées par Cramoisy, et qui ont une pagination particulière, viennent plusieurs autres compléments, également paginés à part, et imprimés par Anisson.

Le 30 octobre 1687, Anisson envoie à Ducange les bonnes feuilles de son livre par la voie de la diligence, qui mettait alors sept jours pour faire le trajet de Lyon à Paris.

Le 5 juillet 1688, le livre était terminé. Anisson consent à en donner trente exemplaires à l'auteur pour ses cadeaux, mais non reliés.

Ducange était alors fort incommodé d'une rétention d'urine. Anisson lui conseille de laisser là le cabinet et de prendre quelque distraction. Le conseil était bon, mais

23 juin 1723, et fut également reçu libraire le même jour. Il fit accorder sa survivance, en 1735, à son frère, qui suit; mais il conserva le titre jusqu'à sa mort, arrivée le 18 octobre 1761. Le 2 mai 1751, il fit signifier aux syndics des libraires de Paris qu'ils eussent à le rayer des rôles de cette corporation, et par conséquent à ne plus le faire contribuer avec elle. Dans cet acte, que nous avons sous les yeux, il se qualifie e qualifie Louis-Laurent Anisson, écuyer, directeur de l'Imprimerie royale, demeurant à Paris, aux galleries du Louvre, paroisse Saint-Germain-l'Auxerrois."

il arrivait trop tard. Ducange mourut le 23 octobre de cette année : le Glossaire de la basse grécité fut, à proprement parler, son dernier ouvrage.

Anisson, en se chargeant de la publication de ce livre, fit une bonne affaire, non pas peut-être pour le bénéfice que devait procurer la vente, mais bien au point de vue du relief que cela lui donna dans le monde littéraire. En effet, c'est à cela qu'il dut, peu de temps après l'impression de ce livre, sa nomination comme directeur de l'Imprimerie royale. Il ne négligea rien, du reste, pour amener ce résultat. Il sollicita de Ducange une réclame personnelle dans l'introduction du livre, et plus tard une mention élogieuse dans les comptes rendus des journalistes. Il songeait depuis longtemps à transporter son établissement à Paris, et pria Ducange de faire quelques démarches à ce sujet auprès des magistrats de la capitale. Le 1 octobre 1686, il l'engageait à solliciter ce transfèrement de résidence sous le prétexte de faire imprimer son livre sous ses yeux. Mais il avait contre lui M. de La Reynie, lieutenant général de police, qui songeait à réduire le nombre des imprimeurs de Paris au lieu de l'augmenter. Il paraît qu'en février 1687 le bruit courut à Paris qu'Anisson venait d'être nommé libraire dans cette ville; mais deux mois après il désespérait encore d'obtenir cette faveur. Pensant que Ducange voulait dédier son livre au roi (ou peut-être lui suggérant cette idée), il le pria de songer à lui dans cette circonstance pour le recommander à Sa Majesté. Mais rien n'aboutissait suivant ses désirs. Enfin, Mabre-Cramoisy, directeur de l'Imprimerie royale, étant mort le 10 juin 1688, Anisson, se mit sur les rangs pour lui succéder. Ayant échoué d'abord, et craignant de voir donner l'emploi à quelqu'un de ses concurrents, il paraît approuver provisoirement la nomination de la veuve du directeur défunt, en haine de ses confrères de Paris, qui ne le ménageaient pas. Ainsi, faisant allusion aux fautes nombreuses qui, suivant eux, déparaient le livre de Ducange, ils disaient que c'était un glossaire de grec barbare et non un glossaire de bas grec.

Toutefois, en dépit de leur opposition et de celle de M. de La Reynie, il sut si bien mener sa barque, que, malgré la mort de Ducange, son patron, il fut nommé directeur de l'Imprimerie royale le 15 janvier 1691. On lit dans la provision royale :

ANISSON (Jacques-Louis-Laurent), surnommé Duperon1, frère du précédent, ayant obtenu la survivance de ce dernier vers 1735, lui succéda, et se démit en 1760 en faveur de son fils, qui suit. Il survécut longtemps à cet acte, car nous voyons qu'en 1778 il recevait du roi une pension de 2,000 livres, comme survivancier. ANISSON (Louis-Laurent), fils du précédent, fut nommé directeur par ordonnance du 16 janvier 1760, dans laquelle il est qualifié Louis-Laurent Anisson l'aîné. Le même acte nous apprend que son père, «Jacques Anisson Duperon, n'en restera pas moins attaché au service du roi, et nous venons de voir, en effet, qu'il recevait pour cela un traitement de 2,000 livres. LouisLaurent mourut le 25 septembre 1788, rue des Orties, et fut enterré le lendemain à Saint-Germain-l'Auxerrois. Il eut pour successeur son fils, qui suit.

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ANISSON (Étienne-Alexandre-Jacques), fils du précédent, né en 1748, et qualifié seigneur de Ris, obtint la survivance de celui-ci (qu'il aidait depuis longtemps), en 1783. Il est habituellement appelé M. Jacques Anisson Duperon, ou simplement M. Duperon. Il inventa en 1783 (voy. p. 224) un système de presse dont le modèle

Avons fait choix de Jean Anisson, marchand libraire et imprimeur en notre ville de Lyon, étant suffisamment informé de ses sens, suffisance, fidélité, expérience et capacité audit art d'imprimerie, et de plusieurs beaux ouvrages qui ont été donnés au public par ses soins. Cette dernière phrase fait sans doute allusion au livre de Ducange: ce savant protégeait encore Anisson du fond de son tombeau.

Trois jours après, un ordre du roi prescrivait en outre de recevoir Jean Anisson au nombre des libraires et imprimeurs de Paris, nonobstant toutes ordonnances, statuts, arrêts et règlemens à ce contraires, auxquels Sa Majesté déroge expressément, et sans tirer à conséquence." Bien plus, le roi veut que, nonobstant la translation de domicile dudit Anisson, de la ville de Lyon en celle de Paris, il conserve les droits et jouisse des priviléges de l'échevinage de son père et de la bourgeoisie de ladite ville de Lyon."

Il était impossible d'ètre traité plus honorablement, et tout cela grâce à l'impression du livre de Ducange. J'ai donc eu raison de dire que c'était une bonne affaire, car ce fut là l'origine de cette dynastie de directeurs de l'Imprimerie royale qui s'est maintenue jusque sous la Restauration.

1 On trouve ce nom écrit dans les actes officiels de trois manières différentes : Duperon, Du Peron, Duperron.

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