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gination, de finesse et d'observation, joint à tant d'art et d'éloquence...

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Si la philosophie matérialiste trouva dans Rousseau un redoutable adversaire, la philosophie déiste eut en lui un auxiliaire puissant. Voltaire avait rendu l'incrédulité agréable aux esprits légers; Rousseau la rendit spécieuse aux esprits solides; il trompa le besoin religieux par un déisme affectueux et sentimental. Il dénatura la morale en subtituant des sentiments vagues à l'idée positive du devoir; il opéra dans l'éducation quelques réformes désirables, mais moins profondes qu'on ne l'a cru.. Il accrédita en politique des idées dont notre époque n'a accepté que le principe général, et qu'elle ne réalise qu'en les spiritualisant (*). »

On ne doit pas passer sous silence le professeur de Villers (1765-1815), qui, Français de naissance, et Allemand par choix, sert comme de transition morale entre deux époques littéraires séparées par les désordres de la Révolution, et se distingue des adeptes de l'idéologie condillacienne par l'étude d'une métaphysique profonde et grave. C'est à lui qu'on doit le premier exposé clair de la doctrine de Kant, écrit en français (**). « La marche de l'intelligence, dit de Villers, dans l'établissement même des grandes erreurs métaphysiques, est toujours digne d'être suivie et étudiée. Mais il semble qu'il y ait une distance infranchissable de l'esprit français à l'esprit allemand; ils sont placés sur deux sommets entre lesquels il y a un abîme. C'est sur cet abîme que j'ai entrepris de jeter un pont. L'événement nous prouvera si l'envie d'y passer prendra à un grand nombre; s'il y ment une philosophie allemande inconciliable avec une philosophie française, ainsi qu'on l'a voulu insinuer; si la philosophie et la vérité ne sont pas citoyennes du monde et n'appartiennent pas à tous les hommes. » Cet ouvrage passa inaperçu; il fut même persillé par un homme auquel la nature de son

vrai

(*) M. Aicard, dans le Million de faits. (**) Philosophie de Kant ou Principes fondamentaux de la philosophie transcendentale, par Charles de Villers; Metz, 1801, in-8°, ouvrage très-rare et très-recherché.

esprit aurait dû interdire toute intrusion dans le domaine métaphysique, Francesco Soave, auteur des Novelle morali! Mais les paroles remarquables de de Villers devaient avoir plus tard leur écho.

Remarquons, avant de quitter le dixhuitième siècle, que la philosophie à laquelle il a donné son nom, porté de glorieux fruits pour le bonheur de l'humanité. Les doctrines subversives des encyclopédistes préparèrent des disciples qui mirent en action les systèmes de leurs maîtres : les uns nièrent toute autorité générale, et tendirent au fédéralisme : ce furent les Girondins, enfants de Voltaire; d'autres comprirent la loi de compréhension du particulier dans le tout, mais aux dépens de l'action individuelle: ce furent les Montagnards, et plus particulièrement SaintJust, chez lequel on retrouve les qualités et les défauts de Rousseau. La manie de socialisme qui domine aujourd'hui tous les esprits, est un écho de la refonte générale des systèmes philosophiques, accomplie à la fin du siècle dernier, et l'on doit voir dans cette exagération l'abus d'un principe excellent, dont l'application finira par asseoir définitivement la science sociale sur des bases rationnelles.

Nous terminerons ici cette exposition de la marche des idées philosophiques en France des noms dont nous n'avons pas parlé, les uns sont trop peu importants ponr mériter une mention, les autres se rattachent à des questions encore pendantes, et sur lesquelles il serait trop difficile de porter un jugement impartial. Nous avons d'ailleurs consacré aux chefs des différentes écoles qui se sont formées parmi nous depuis le commencement de ce siècle, des articles spéciaux, où nous avons exposé leurs principes et essayé de faire sentir leur portée; nous y renvoyons le lecteur. Les trois tableaux suivants, que nous tirons d'un livre auquel nous avons déjà fait, pour cet article, de nombreux emprunts (*), représentent l'état des opinions en France, depuis 1800 jusqu'à la révolution de juillet.

(*) Le Million de faits.

ÉCOLE SENSUALISTE (*), nourrie de l'esprit du dix-huitième siècle en ce qu'il eut d'étroit et d'empoisonné. Cette école, triomphante sous le Directoire, fut encore puissante sous l'Empire, malgré le génie de l'empereur, dont elle facilita la chute par la servilité même qu'elle engendra autour de iui.

ÉCOLE THÉOLOGIQUE

ou

SPIRITUALISTE(**).
d'après l'Église,
grace au pouvoir
qui favorisa
ses tendances
ouvertement.
A partir de 1815,
cette école eut un
public fervent,
et fut puissante
jusqu'en 1830.

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Cette école n'admet aucune des notions qui se rapportent à l'âme et aux faits intimes. La matière et les choses physiques, les corps et leurs qualités, voilà tout ce qu'elle regarde. Hors de la, l'homme ne sait rien. La nature est son tout: il peut l'analyser, la scalper, la sonder, la mesurer, la peser, en calculer les lois; mais c'est tout: il ne peut pénétrer jusqu'à la force vive; l'âme lui échappe, elle est sans données qui la révèlent, elle n'est pas. Qu'est-ce que Dieu pour qui ne conçoit que de l'étendue ? Simplement de l'étendue. Mais ce Dieu une fois admis, ou bien n'est qu'un tout, qu'une vaste et pleine existence, le grand corps unique dont les prétendus individus ne sont que des membres ou des modes; et c'est là le matérialisme panthéiste: ou bien il est multiple, et se résout en une foule d'êtres qui tous existent à part; alors c'est un polytheisme intini, l'atomisme d'Epicure.

L'homme n'a que la matière pour but moral; son corps, et pour son corps chétif tout ce qui peut en intéresser le bien-être; les organes, avec les choses qui leur sont bonnes ou mauvaises, voilà ce qu'il doit considérér uniquement. Jouir, sans autres limites que celles qu'impose la conservation de soi-même; étudier, sans périlleuse ardeur, l'univers physique et ses lois, parce que la science mène à des jouissances nouvelles : voilà la vertu.

La politique de cette école, quand elle est conséquente, circonscrit également son but dans l'utilité sensible. Tout autre intérêt elle n'y croit pas. Elle aime l'ordre, parce qu'elle a horreur du péril et de la misère; mais elle l'aime quel qu'il soit, pourvu qu'il garantisse aux individus le seul droit qu'elle leur reconnaisse, celui de vivre et de jouir. Elle préfère là liberté, mais elle s'accommoderait d'un bon despotisme.

Le beau n'est rien de spirituel, de divin, d'intime; c'est la matière faisant plaisir à quelque sens, et quand il se peut à tous à la fois; l'esprit n'entre pour rien dans ces merveilles. La poésie n'est qu'une sensation exquise, une finesse dans les sens, un art de l'œil ou de l'oreille: elle chante le monde visible, les trois règnes de la nature; mais le monde invisible, elle ne le comprend

pas.

Point de départ. — La révélation et l'autorité de l'Église.

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L'homme est une intelligence servie par des organes. L'Église enseigne (et il n'y a de salut que dans la foi de l'Eglise) que le premier homme a failli, et en lui toute sa race: le péché nous vient avec la vie. C'est la destinée de l'homme de reconquérir, à force de repentir, le bien dont il est déchu par le vice de sa naissance. Au-dessus de l'homme, esprit immortel, il y a un Dieu esprit aussi, qui, l'œil sur sa creature, lui tient compte de ses œuvres, faisant justice pour toute chose. Mais l'homme étant mauvais, quelques imaginations ardentes ne prêtent guère à ce Dieu, qui est le vrai Dieu, que les attributs d'une justice rigoureuse. La vie est douloureuse, c'est une expiation. S'il est des maiheureux, pécheurs à la fois et du chef de leur père et de leur propre chef, il est des justes, qui, leur dette de souffrance une fois payée, ont en sus assez de mérites pour les offrir à Dieu en sacrifice, et racheter leurs frères. Ils le peuvent, donc ils le doivent; car la charité leur en fait une loi, et le fils de Dieu en croix leur en donne l'exemple.

L'humanité n'étant pas bonne a besoin de sévérité : si les chefs qui la gouvernent étaient doux, elle ne remplirait pas sa destinée, l'expiation. Donc peu ou point de liberté; et cette liberté n'est qu'une concession locale et passagère, jamais un droit essentiel et national. Un chef de peuples n'est pas un tuteur; c'est un correcteur chargé de mener une bande de méchants. Le prince a reçu cette mission de Dieu, mais Dieu est représenté sur la terre par le pape. Une monarchie théocratique universelle, et tous les rois des nations pour lieutenants, voilà l'idéal, dissimulé souvent par ruse et par peur, de la politique ultramontaine.

Mystique et dévote, l'âme catholique voit la beauté dans l'esprit et dans l'intimité du sentiment, et ne la trouve jamais dans la matière que sous voile et expression. Lyrique avant tout, elle rend son émotion par des accents plus que par des images, par des cris du cœur plus que par des tableaux.

() Volney, Garat, Destutt de Tracy, Cabanis, Broussais, de Gerando, la Romignière, Azais,
(*) Jos, de Maistre, St-Martin, Ballauche, de Bonald, Frayssinous, de Lamenuais, Buchez, etc..

ÉCOLE ÉCLECTIQUE

ου

SPIRITUALISTE RATIONNELLE (*).

Elle se constituait avec la restauration, dont le principe politique s'alliait au fond avec le sien. Mais longtemps faible et sans autorité, elle disposait les esprits plutôt qu'elle ne les gouvernait. Elle grandit bientôt, parla' avec beaucoup d'éclat, et vers 1828 le grand nombre était à elle. 1830 vit à la fois son triomphe dans les faits et sa chute dans l'opinion.

Point de départ.

Doctrines

métaphysiques.

morales.

en esthétique.

Tendances

en politique.

L'éclectisme prétendait apprécier à leur valeur la sensation et la révélation; il procédait de la conscience et de l'observation psychologique; il s'efforçait de déduire une théorie qui complétát ou éclaircit les deux systèmes entre lesquels il se portait médiateur. Faits des sens et de l'autorité, physique et histoire, il accueillait tout pour tout concilier.

L'éclectisme ne croyait pas que le corps fut tout l'homme; sans repousser ni admettre tous les dogmes catholiques, il aspirait à limiter la matière, mais non à l'anéantir ; il cherchait à éclaircir les mystères et à en dégager de pures vérités. Spiritualiste, mais non mystique, il adhérait sans peine à l'immortalité de l'âme; mais il cherchait à en trouver une confirmation rationnelle dans l'observation psychologique. Il adhérait également à l'idée du Dieu catholique, mais sans préter à la Providence les attributs d'une puissance de ce monde. Le dogme du péché originel ne l'effrayait même pas, mais il voulait substituer à ce mystère terrible la connaissance philosophique d'une force qui, créée, non pas coupable, mais imparfaite, aurait pour destination, non l'expiation, mais l'épreuve.

La vie n'est pas une vallée de larmes; ce n'est pas non plus un lieu de plaisance. Les maux de ce monde ne sont pas des chatiments, mais de pénibles exercices. Les créatures naissant imparfaites, mais sans vice, ne doivent être exposées qu'aux afflictions nécessaires à leur meilleure éducation; la punition serait souvent injuste; la pénitence continuelle, déraisonnable et impie; il faut savoir souffrir et vivre. La souffrance est comme le noble droit de notre nature, essentiellement perfectible; mais le bonheur de cette vie est aussi comme une sorte de devoir humain.

L'éclectisme regardait bien les sociétés humaines comme mises au monde pour le travail; par conséquent, avec les conditions du travail, le besoin, la douleur, les misères de toute espèce; mais il ne voulait pas faire du monde une sorte de bagne, et du régime social un régime pénitentiaire. Il se vantait de demander au pouvoir, au nom des peuples, non pas de la contrainte et des rigueurs, mais de la liberté et de la sympathie; et les princes et

rois, il ne les érigeait pas en exécuteurs des hautes-œuvres de l'univers, mais en instituteurs, en pères de leurs sujets; en un mot, il songeait à l'éducation, non au châtiment du genre humain. Il s'efforçait de partager curieusement les études des sensualistes sur l'industrialisme social, et leurs recherches sur l'utilité.

L'utilité n'était pas pour l'éclectisme tout le beau, ni la nature tout le divin. Il était prêt à donner pour fondement à l'art le spiritualisme, et pour objet le beau, vu dans son essence, dans l'esprit mais il avait peur du mysticisme, et voulait laisser à l'artiste l'idéal sans lui oter la raison. La poésie catholique, vraie au fond, profonde et admirablement humaine, lui semblait trop dédaigneuse de la forme, trop intérieurement lyrique, métaphy sique et obscure. Il lui eût proposé volontiers de tempérer les vues intimes par les images, la religion par les idées, les sentiments par les sensations, en des compositions plus parfaites, où l'esprit ne paraitrait jamais nu, subtil et abstrait; ni la matière morte, privée du ciel et sans âme.

(*) Royer-Collard, Maine de Biran, Bérard, Virey, V. Cousin, Jouffroy, de Rémusat, Damiron, Barthélemy St-Hilaire, Kératry, Massias, Droz, Pierre Leroux, etc.

PHYSIQUE. La physique comprenait autrefois toutes les notions que l'on possédait sur les corps de la nature; mais quand ces notions devinrent tellement multipliées qu'un seul homme ne put les embrasser toutes, les grandes divisions dans lesquelles on les classa furent désignées par des noms particuliers, et devinrent autant de sciences distinctes. L'astronomie, la mécanique, la chimie, la géologie, l'histoire naturelle, etc., cessèrent alors de faire partie de la physique proprement dite, et cette science fut bornée à l'étude des

changements d'état dont les corps sont capables sous l'influence de certains agents, tels que le calorique, l'électricité, la lumière et l'attraction.

Les anciens ne nous ont laissé que quelques principes de physique proprement dite. Roger Bacon et Vitellio, qui vivaient dans le treizième siècle, furent les premiers qui, en faisant faire quelques progrès à l'optique, ajoutèrent quelque chose à ce qu'on savait de cette science. La découverte qu'ils firent des propriétés des verres lenticulaires eut pour conséqueuce l'invention des lu

nettes, qui date du siècle suivant. Ce fut vers la même époque que la boussole (voyez ce mot), qui devait avoir une si grande influence sur la civilisation des temps modernes, fut apportée en Europe et perfectionnée.

La marche de la physique fut aussi lente que celle des autres sciences jusqu'au commencement du dix-septieme siècle. Ce fut seulement à cette époque que les phénomènes de la vision et l'arc-en-ciel que Maurolico de Messine, Porta et Antoine Domitien avaient étu diés sans beaucoup de profit dans le siècle précédent, furent, ainsi que les lois de la réfraction, expliqués par Descartes, dans sa Dioptrique. L'invention du microscope et du télescope fut la conséquence de ces premiers progrès.

La perspective, qui est aussi une branche de la physique, est une création de la fin du seizième siècle; nous devons citer, comme y ayant participé par leurs découvertes et leurs ouvrages, Jean Andouillet de Cerneau; Salomon de Caus, qui avait aussi découvert la force élastique de la vapeur et entrevu la possibilité de tirer parti de cet agent; et le peintre Jean Cousin.

La plus grande découverte en physique du dix-septième siècle est celle de la pesanteur de l'air. Elle est due aux recherches de Galilée, de Torricelli, et surtout de Pascal. On connaît la célèbre expérience par laquelle l'auteur des Provinciales anéantit le système de l'horreur du vide; ce n'est pas son seul titre comme physicien: son Traité de l'équilibre des liqueurs est le premier ouvrage méthodique et vraiment original qui ait paru sur l'hydrostatique.

La découverte de la loi qui porte le nom de Mariotte appartient aussi au dix-septième siècle; ce physicien, à qui l'on doit de curieuses expériences sur l'hydrostatique et sur la résistance des matériaux, démontra que les pressions des gaz sont inversement proportionnelles aux volumes qu'ils occupent; et cette loi, qui est applicable à tous les corps gazeux, a été vérifiée, dans ces derniers temps, pour les vapeurs.

Au commencement du dix-huitième siècle, Amontons, qui venait de faire les premières expériences que l'on ait

essayées sur le frottement (*), construisit notre premier thermomètre, que Réaumur perfectionna en 1730. La graduation de cet instrument était vaque et incertaine : Réaumur lui donna deux termes fixes; et il les détermina par la température de la glace fondante, que Newton avait trouvée invariable, et par celle de l'eau bouillante, dont Amontons avait aussi démontré l'invariabilité dans certaines circonstances.

Au commencement du dix-huitième siècle, les physiciens modifièrent leurs méthodes : ils ne prirent plus que l'expérience pour base de leurs travaux, et la science, conduite par une meilleure voie, n'en fit que de plus rapides progrès. Nous voyons en France, vers le milieu de ce siècle, le Roy et Saussure fonder l'hygrométrie, inconnue avant eux, et, quelques années plus tard, les frères Montgolfier inventer les aérostats. Ils lancèrent leur premier ballon à Annonay en 1782, et, quelque temps après, Pilatre de Rosier et Darlandes osèrent se faire enlever dans les airs par un semblable ballon; enfin, un peu plus tard, la montgolfière, après avoir servi à la guerre, transportait à une hauteur de plusieurs milliers de mètres MM. Biot et Gay-Lussac, qui allaient expérimenter dans l'espace, sur la loi de décroissement des forces magnétiques du globe à de grandes hauteurs. A la fin du dix-huitième siècle, la théorie de la résistance des fluides, dont Dubuat et Bossut avaient posé les fondements; la science de l'électricité et la théorie des frottements, entrevue par Amontons, restaient à compléter l'honneur en était réservé à Coulomb, le plus ingénieux de nos physiciens expérimentateurs, auquel la science doit en outre de nombreuses expériences sur la résistance des matériaux.

A la même époque, Lavoisier et Laplace mesuraient, à l'aide d'un calorimètre de leur invention, le calorique spécifique de tous les corps.

C'est aussi de la fin du dix-huitième siècle que date l'invention des machines à vapeur. La théorie de la chaleur, que

(*) Parent et Camus ajoutèrent depuis aux résultats obtenus par Amontons, et eréèrent la théorie des frottements.

les physiciens avaient négligée jusque là, acquit, dès lors, une haute importance, et elle a fixé toute l'attention des savants de notre époque. La loi du refroidissement des gaz était encore inconnue, malgré les nombreuses recherches qui avaient été faites sur ce sujet. Dulong la trouva avec M. Petit, tandis que Fourier, à qui la science est redevable d'une admirable Théorie analytique de tous les phénomènes de la chaleur, traitait le même sujet, que Poisson devait, quelque temps après, aborder à l'aide du calcul. Dulong fit également, sur la dilatation des corps, une longue suite d'expériences; et, avec le concours de M. Arago, il détermina la force de tension de l'air atmosphérique, jusqu'à une pression de vingt-quatre atmosphères. Lavoisier et Laplace avaient mesuré la dilatation d'un grand nombre de corps à différentes températures; mais ils n'avaient pas dépassé l'étendue de l'échelle thermométrique. M. Pouillet, complétant leurs recherches, mesura la dilatation des métaux pour les températures lesplus élevées, et parvint à apprécier avec une assez grande approximation, au moyen d'un pyromètre à air qu'il avait inventé, le degré de fusion d'un grand nombre de métaux. Quelque temps auparavant, Clément et Désormes, qui se sont beaucoup occupés de la théorie des machines à vapeur, avaient découvert quelques nouvelles propriétés de la vapeur, et ils en avaient expliqué et éclairci plusieurs qui n'étaient qu'imparfaitement connues avant eux. C'est surtout à eux que l'on doit ce qu'on sait des phénomènes de l'écoulement de la vapeur d'eau et des gaz par de petits orifices. Enfin, nous ne devons pas oublier de mentionner ici l'excellent Traité de la chaleur, de M. Péclet, le meilleur ouvrage spécial qui ait paru jusqu'à présent sur ce sujet.

La météorologie, dont les progrès devaient suivre ceux de la théorie de la chaleur, a fait de grands progrès dans ces dernières années. Le premier traité qui ait paru sur cette branche de la science est celui du P. Cotte (1779). M. de Humboldt avait, en 1813, abordé le problème de l'appréciation de la quantité de chaleur que le soleil distri

bue à la surface du globe. M. Pouillet a depuis essayé d'évaluer cette chaleur à l'aide d'un instrument qu'il a appelé pyrhéliomètre. Il a également essayé de mesurer la température zenithale. Monge avait, en 1802, publié le premier une bonne explication du mirage; M. Biot a donné, en 1809, la théorie complète de ce phénomène. Dans ces derniers temps, M. Arago a soulevé la question des étoiles filantes, que personne n'avait abordée avant lui; et il a fait, au puits artésien de Grenelle, de nombreuses expériences sur la température intérieure du globe. C'est ici le lieu de mentionner les travaux d'Ampère; M. OErsted, de Copenhague, avait découvert, en 1819, un phénomène remarquable, connu sous le nom d'électro-magnétique: c'est celui de l'action du courant voltaïque sur l'aiguille aimantée; mais il s'était contenté de le constater. Le savant français en donna l'analyse, avec une théorie qu'il soumit au calcul. Après lui, ceux de nos compatriotes qui ont traité la même question avec le plus de succès, sont : Fourier, Fresnel, Savart, et MM. Biot, Arago, Becquerel et Pouillet.

Enfin, la théorie que Newton avait donnée de la lumière, après avoir été longtemps la seule admise, a été, dans ces derniers temps, remplacée par le système des ondes lumineuses, qui satisfait mieux à l'explication de certains phénomènes. Fresnel et MM. Biot et Arago sont ceux de nos physiciens qui ont le plus contribué, par leurs travaux, à établir cette théorie sur laquelle la découverte de M. Daguerre est venue, en 1839, fixer de nouveau l'attention des savants.

PIBRAC (Gui du FAUR, seigneur de), né à Toulouse en 1529, alla étudier le droit à Padoue, sous Alciat, puis acheta une charge de conseiller au parlement de sa ville natale. Nommé, en 1562, ambassadeur de France au concile de Trente, il devint ensuite avocat général au parlement de Paris, puis conseiller d'Etat; et accompagna, en 1573, le duc d'Anjou en Pologne. A son retour, il négocia un traité de paix entre la cour et les protestants; puis le roi lui conféra une charge de président à mortier au parlement. La reine de Navarre le

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