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fut receu moult honnourablement, et ses gens se logèrent ès vilages environ. Et de là ledit conte se tira devant le chastel de Milly. Si fist logier ses gens au plus près de la porte, qui desrompirent très fort les deffences de la dessusdicte forteresce, et par espécial de la basse court qu'ilz avoient moult fort réparée de quesnes' et d'aultres groz bos. Si se commencèrent ceulx de dedens à deffendre très radement et très viguereusement, tant de canons comme d'aultres artilleries et engiens de guerre. Desquelz ilz occirent et navrèrent aulcuns des gens du conte d'Estampes. Entre lesquelz y fut mort messire Mathieu de Humières. Et avoient les gens dudit conte laissié leurs chevauls, pour la plus grande partie, en la ville de Beauvais. De laquelle, et aussy de la cité d'Amiens venoient vivres de jour en jour audit siège. Durant lequel siège, après que les engiens dessusdiz eurent moult fort adommagié les fortificacions de la basse court dessusdicte, y fut livré par lesdiz asségans ung très dur et fort assault. Auquel, tant d'un costé comme d'aultre furent faites pluiseurs vaillances et prouesces. Desquelles, entre les aultres, le seigneur de Saveuses, avec ses gens, emporta le bruit. Nientmains, ceulx de dedens se deffendirent très puissamment, et tant que lesdiz assaillans véant que bonnement ne les povoient conquerre sans avoir trop grand perte et dommage de leurs gens, se retrayrent. Et y furent mors des assaillans environ de huit à dix. Et des deffendeurs y eut aulcuns navrés. En après, yceulx deffendans, considérans qu'ilz ne se povoient longuement tenir, et

1. De chênes.

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aussy qu'ilz n'avoient point grand espérance d'avoir aulcun secours, firent traictié avec les commis dudit conte d'Estampes, moyenant et par tel sy, qu'ilz se départiroient de là en emportant trestous leurs biens avec eulx. Si rendirent la dessusdicte forteresce, dedens laquelle on bouta le feu, et le fist on du tout démolir et désoler. Et ce fait, ledit conte et ses gens s'en retournèrent, environ la sepmaine peneuse1, ès lieux dont ilz estoient venus. Et avoit ledit conte esté devant ladicte place et tenu siège environ de trois sepmaines ou plus, audit lieu de Milly.

Pour lequel voiage et déboutement des dessusdiz coureurs, tous les pays qui avoient acoustumé d'estre courus et pilliés, furent très joieux quand ilz furent adcertenez qu'on les avoit ainsy deslogiés et chaciés hors de ladicte place.

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DE L'AN MCCCCXLIII.

[Du 21 avril 1443 au 22 avril 1444.]

CHAPITRE CCLXXI.

Comment le roy de France fist grande assamblée de gens d'armes pour aler en Normendie. Et d'aulcunes courses et conquestes que le duc de Sombreset fist ou pays d'Angou et ailleurs, sur les François.

Au commencement de cest an, le roy de France fist grande assamblée de gens d'armes, sur intencion d'entrer en Normendie l'esté ensievant, et aussy pour baillier secours à ceulx de Dieppe, qui estoient fort constrains et travilliés par le moyen de la très forte bastille que tenoient les Anglois devant ycelle ville de Dieppe. Lequel secours le Roy leur envoia, c'est assavoir pour ravitaillier ladicte ville. Et y furent menés grand foison de bestail et aultres vivres, à tout grand quantité de gens d'armes, qui les boutèrent dedens à grand force. Et y eut entre les deux parties de très grosses escarmuches, auxquelles en y eut de mors et de navrés, tant d'un costé comme de l'autre.

Ouquel temps, le conte de Sombreset assambla bien jusques au nombre de six mil combatans ou environ, à tout lesquelz il entra ou pays d'Angou, où il fist de très grans dommages par feu et par espée. Après se

tira vers Bretaigne et prinst d'assault La Guierche', apertenant au duc d'Alençon, laquelle ville fut du tout pillié et robée. Et puis s'en ala logier à Poussay', et y fut bien deux mois. Si couroient de jour en jour ses gens par diverses compaignies le dessusdit pays d'Angou, de Craonnois et de Chastrangonnois. Desquelx yceulx pays firent pluiseurs destrousses par les paysans3. Et d'aultre part, le mareschal de Lohiac eut la charge avec les gens du duc d'Alençon, de par le roy de France, pour résister aux entreprinses dessusdictes. Sy conclurent d'aler férir de nuit sur les Anglois et sur leurs logis, c'est assavoir dudit conte de Sombreseth. Mais il en fut à tamps adverti. Si ala au devant d'eulx et les vint rencontrer, qu'ilz ne leur donnoient de garde. Et pource, furent yceulx François mis en desroy, et en y eut de vint à trente, que mors que prins, et les aultres se sauvèrent au mieulx qu'ilz peurent, par force de bien fuir. Et de ceulx qui furent prins, en furent le seigneur d'Ausigni, Loys de Bueil et plusieurs aultres gentilz hommes. Après lesquelles besongnes, ycelui conte de Sombreset se desloga de devant Ponsay et ala prendre le chasteau de Beaumont la Visconte". Et puis, après ce qu'il eut assises ses garnisons sur les frontières, il s'en retourna à Rouen.

1. La Guerche (Ille-et-Vilaine).

2. Poucencé (Maine-et-Loire).

3. Sic. Cette phrase n'a pas de sens. Il faut lire : « Desquelz yceulz pays firent pluiseurs destrousses sur les paysans. » Ou bien : Desquelx yceulz pays furent pluiseurs (de ces gens de guerre) destroussés par les paysans. »

4. Beaumont-le-Vicomte (Sarthe).

CHAPITRE CCLXXII.

Comment aulcuns chevaliers et gentilz hommes de la court du duc de Bourgongne entreprinrent ung fait d'armes par la manière que ci après sera déclairié.

Item, en ce meisme temps, le duc de Bourgongne estant en son pays de Bourgongne, y eut pluiseurs gentilz hommes de son hostel et pays qui, pour son plaisir et par sa licence, firent anoncier et publyer par pluiseurs marches et pays de Bourgongne, que se ilz estoient aulcuns nobles hommes qui voulsissent faire armes et acquérir honneur, ilz seroient receus par yceulx et parfurnis en certaines armes qu'ils avoient entreprinses. Desquelz gentilz hommes leurs noms seront ici après déclairiés, et aussy la manière des chapitres qui pour ceste cause furent envoyés ès pays dessusdiz, par messire Pierre de Buisemont, seigneur de Chargni, qui estoit chief de ladicte entreprinse.

CHAPITRE CCLXXIII.

Copie du mandement dessusdit et les noms de ceulx
qui debvoient faire les armes.

« En l'onneur de Nostre Seigneur et de sa très glorieuse mère, de madame Sainte Anne, et de monseigneur Saint George. Je, Pierre de Baufremont, seigneur de Chargni, de Monlyet et de Montfort, chevalier, consillier et chambellan de très hault, très puissant et très exelent prince, mon très redoubté et souverain seigneur,

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