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L'AN MLI IIII XVII.

Party le conte de Haynau de son pais pour mener le Daulphin de Vienne devers le roy son père, et le mena jusques à Compiengne et là le laissa en la garde de ses gens; et ledit conte s'en alla à Senlis devers la royne de France et depuis à Paris, pour trouver les moyens et manière de amener ledit Daulphin audit lieu de Paris. Et en ce tamps allèrent pluiseurs chevalliers et escuiers devers icelui Daulphin audit lieu de Compiengne, faignans de lui faire révérence et honneur. Et tant y en alla et si près le approchèrent, que il moru bien hastivement, ainchois que ledit conte de Haynau retournast audit lieu de Compiengne. Et luy furent les nouvelles portées audit lieu de Paris. Dont il se party incontinent, très dolant et courouchié, et s'en retourna en son pais de Haynau, auquel il moru bien prochainement après. Et fu commune renommée que ils furent tous deux empoisonnez desdis Armignas. Et adont ne demoura au roy de France que ung seul filz qui estoit moult josnes, et fu nommés Charles, conte de Pontieu. Lequel estoit à Paris et demoura au gouvernement d'iceulx Armignas, dont moult de maulx avindrent depuis en France.

En ce tamps ce mouteplia la puissance du conte d'Armignac, et portèrent les damoiselles de Paris, en grant sollempnité, la bende aux festes et ducasses de Paris, et les faisoient traviser parmy les rues tant les faisoient longues et plentiveuses, et fist-on à ce tamps si grand feste de ladicte bende que on le donnoit à porter à pluiseurs ymages ès églises de Paris, qui estoit merveilleuse chose à veir à faire porter aux ymages représentans les sains de Paradis et au roy de France, la bende du conte d'Armignac, laquelle bende fu jadis donnée à ung sien devanchier, conte d'Armignac, par condempnacion et pugnicion du pappe, à le porter à tous jours mais, luy et ses hoirs, en signe d'amendise du fourfait que il avoit lors commis; et encores lui fist on grâce, car la condempnacion fut de porter une hart au col, laquelle fu couverte en une bende par la prière d'aucuns princes et seigneurs. Et elle fu à ce tamps si fort augmentée que on la donnoit à porter aux sains et aux saintes et au roy de France.

Après le trespas du Daulfin et du conte de Hainau, fist le duc de Bourgongne ung grant mandement de gens d'armes par tous

ses pays, à assambler au moix d'aoust entour Amiens et Corbie. Et le tamps durant que ses gens se ordonnoient et appareilloient pour le servir, ledit duc s'en alla devers le roy d'Engleterre à Calaix pour aucunes choses secrètes qui point ne vindrent à congnoissance de communes gens. Et pour la seureté de sa personne fu la manière de son allée telle, que au partir de sa ville de SaintOmer il avoit avoec luy le conte de Charoloix, son filz, et grand plenté de chevalliers et escuiers en armes, et chevaucha en belle ordonnance jusques à une yauue qui queurt entre Saint-Omer et Calaix. Et par de là ladicte yauue estoit le seigneur de Glochestre, frère au roy d'Engleterre, lequel estoit très bien accompaignié de gens d'armes et illec attendoit le duc de Bourgongne. Et au passer ladicte yauue, lesdiz ducqs de Bourgongne et de Glochestre se mirent l'un contre l'autre, le duc de Bourgongne pour aller à Calaix, et le duc de Glochestre pour aller à Saint-Omer. Et droit au my lieu de ladicte yauue firent la révérence lez ungs à l'autre, et en ce faisant se arrestèrent ung peu en ladicte yauue et puis passèrent oultres, chascuns à tout son estat tant seulement. Et s'en alla le duc de Bourgongne en la compaignie desdis Engloix audit lieu de Calaix. Et le duc de Glochestre s'en alla en la compaignie dudit conte de Charoloix audit lieu de Saint-Omer, comme ostagier pour la seureté de la personne dudit duc de Bourgongne. Et quant le consseil fu finéz à Calaix, et que iceluy duc de Bourgongne fust disposé de retourner en son pais d'Artoix, on le fist savoir au duc de Glochestre, et retournèrent ces deux princes en la manière que ilz estoient venus chascuns en son lieu.

Après le retour du duc de Bourgongne en son pais d'Artoix, icelui duc fist ung grant mandement pour haster les barons et gentilz hommes de Bourgongne, et en les actendant s'en alla à Corbie et à Amiens. Esquelles il fu grandement receuz et honnorez, et luy livrèrent iceulx de ladicte ville d'Amiens arbalestriers et paviseurs pour les mener par tout où il lui plairoit, à leurs proppres despens. Et pareillement firent ceulx des bonnes villes de Arras, Béthune, Lille et Douay et pluiseurs autres. Et actendy les Bourguignons audit lieu de Corbie, luy estant logié en l'abbéie de Saint-Pierre audit lieu.

En la fin du moix d'aoust arrivèrent à Corbie les seigneurs et barons de Bourgongne en moult noble et grande compaignie. Et incontinent après leur venure se party le duc de Bourgongne du

dit lieu de Corbie par ung dimence après disner et se loga celle nuit en plains champs emprès le chastel de Demuin à deux lieuwes près dudit Corbie. Lequel chastel de Demuin estoit nouvellement mis en l'obéissance du Roy et du duc de Bourgongne. Auquel logis arrivèrent ce jour pluiseurs estandars et cappitaines dudit de Bourgongne. Lesquelx s'en partirent à lendemain et prirent le chemin devers Beauvaix. Et furent adonc les Bourguignons commis à mener l'avant garde devers Beauvaiz. Laquelle ville et l'évesque d'icelle leur firent obéissance, et y entra le duc à toute sa puissance, et y séjourna bien huyt jours, et y fist mettre jus tous subsides, IIII", imposicions et gabelles de sel et autres marchandises. Et tantost après son département de Beauvaiz, retourna la dame du chastel de Demuin en son premier point, et mist grant garnison d'Armignas en sondit chastel. Laquelle garnison fist moult de maulx audit pais de Corbie.

En la compaignie du duc de Bourgongne estoient en ce voyage les seigneurs barons et cappitaines cy-après nommez.

Et premiers, les noms des barons et gentilz hommes des pais de Bourgogne et de Savoie :

Le mareschal de Bourgongne, seigneur de Vregy, Loys de Châlon, seigneur d'Arguel, filz au prince d'Orenge, le seigneur de Sallenoue, le seigneur de Jonvelle, frère au seigneur de La Trimouille, messire Regnier Pot, les seigneurs de Montagu, de Neufchastel, de Chasteauvillain, de Chasteauviez, de Thy, de Cottebrune, d'Ancre, de Toulongon, de Champdivers, de Chastelus et de Digonne, messire Anthoine de Thoulongon et Andrieu son frère, escuier, le Viau de Bar, Baillieu d'Aussoix, Henry de Champdivers, Gauchier de Ruppes, Andrieu de Salins, Regnault de Montcommun, Anthoine de La Marche, Anthoine de Vergy. Jacques de Courtiamble, le seigneur de Saint-Liébault, Pierre de Fontenay, seigneur de Ransse, Pierre de Digongne, Pierre de Bauffremont et Chasteluisa, chevalier, Jehan de Gingin, Jehan du Clau, Clavin du Clau, Emar de Vienne, escuiers et pluiseurs

autres.

Les noms des gentilz hommes de Picardie :

Messire Jehan de Luxembourcq, les seigneurs d'Anthoing, de Fosseux, de Longueval, de Noielle, d'Inchy, de Cohem, de l'Ille

Adan, de Humbercourt, de Picquegny, de Sorel, de Saint-Légier, de Rollecourt et de Belleferière, Athis et Daviod de Brimeu, frères, Paien de Beaufort, Guillaume de Bonnières, Hue de Lannoy et Ghilbert son frère, Maurroy de Saint-Légier, Charles de Lens, Jennet de Poix et Robinet de Mailly, chevaliers, Hector et Philippes de Saveuses, frères, Jacotin, Collinet, Jehan et Robert de Brimeu, Jehan de Fosseux, Regnault de Longheval, Jehan de Horne, Davyot de Poix, Coppin Gauvain et Maillet de La Viesville, Camuset de Ligny, Tramet de la Tramerie, Jehan d'Obigny, le bastard de Thian et Charles Labbé, escuiers, et pluiseurs aultres.

Les noms des gentilz hommes du pais de Flandres :

Le souverain bailli de Flandres, le seigneur d'Esteenhuse, les seigneurs de Le Vexte, Gruthuse, Commines et de Roubais, Robert et Victor de Flandres, frères, bastars de feu le conte Loys de Flandres, et Victor de Rabecque, chevaliers, Robert de Masmines, Henry de Dixmude, Hector de Beuroult, le bastard de Colscamp, escuiers, et autres.

Les noms d'aucuns seigneurs de l'ostel dudit duc de Bourgongne :

Le josne conte de Saint-Pol, son nepveu, filz de feu le duc de Brabant, lequel conte n'avoit que XVII aus d'éage et fu sa première armée et n'estoit que escuier, les seigneurs de Briauté et de Courcelles, ung autre chevallier d'Alemaingne et Élion, seigneur de Jacleville, chevaliers, Charlot de Dully, lorrain, Pierre Stewart, alemant, et pluiseurs autres.

Laquelle oost fu nombrée à XXXVI hommes d'armes et plus de II archiers. Et y trouva on pour ung jour II° mille personnes, et bien C et Lm chevaulx, parmy le carroy, qui estoit moult grant et tenant plus de deux grosses lieuwes loings en cheminant, lesquelx estoient chargiés de tous habillemens que oncques mais pour ung seul prince ne fu plus belle oost veue de ses subjectz.

En la ville de Beauvaix fist le duc de Bourgongne copper les hatteriaulx de III laronceaux qui estoient venus espier et empoisonner son oost et les yawes des puis. Et au partir d'icelle ville il commist l'avantgarde au seigneur de Jacleville et à Hector de Saveuses. Lesquelx prirent leur chemin à Chambely le Haubregier emprès Beaumont sur Oise, et pillèrent et fustèrent toute la ville,

et puis allèrent en l'église d'icelle et brisèrent et effondrèrent tous les escrins et coffres appartenans aux gens dudit village, et emportèrent tout ce qu'ilz trouvèrent dedens sans y riens laissier. Et puis s'en allèrent à Beaumont et livrèrent grant assault ès tours dessus le pont, par terre et par yawe, et fu ledit pont gaignié par ledit assault et ossy fu la ville. Mais les Armignas se retrairent au chastel, lequel chastel de tous costés fu assiégés, et y allèrent pluiseurs seigneurs des pais de Bourgongne, lesquelx prirent leur logis ès maisons de la ville et pendirent leurs estandars dehors. Mais pour ce ne se volrent ceulx rendre qui dedens ledit chastel s'estoient boutés. Et pour celle cause fist le duc de Bourgongne séjourner ses gens environ ladicte ville et fist asseoir ses plus gros engins et bombardes en grant nombre devant ladiete forteresse en une belle praierye sur le bort de la rivière. Et durant ledit siège, le duc de Bourgongne dessusdit se loga en ladicte ville de Chambely et son oost ès villages d'entour. Et dura cedit siège environ VIII jours, et puis se rendirent ceulx dudit chastel à la volenté dudit duc par ce que ilz ne se porrent plus tenir. Car ilz furent telement batus desdis engiens que leurs barrières et murailles furent en pluiseurs lieux domagiés et abatues. Et y furent trouvées LII personnes de gens d'armes, desquelx y en y eubt IX hommes décolez et les autres furent mis à raenchon. Et à ce siege arriva le seigneur de l'Ille-Adam en la compaignie dudit duc de Bourgongne.

Après la prise du chastel de Beaumont, se party l'ost du duc de Bourgongne en deux parties, et s'en allèrent mectre siège devant la ville de Pontoise. C'estassavoir l'oost des Bourguignons, du costé de l'abbéie de Maubuisson; et le duc de Bourgongne et son ost de Piccars et Flamens passa la rivière d'Oise audit lieu de Beaumont et mist le siège du costé devers la justice. Auquel siège mectre arrivèrent les deux oosts tout en ung tamps et à une meisme heure devant ladicte ville, et y eubt grande escarmuche de ceulx de ladicte ville au siège mectre contre ceulx de l'avant garde de l'ost dudit duc. Et fu celle escarmuche faicte à l'entrée des faubours de ladicte ville là où il y eubt pluiseurs navrés et occis d'un costé et d'aultre. Mais en fin furent les fourboux gaingniés et furent les Armignas reboutés dedans la ville. Esquelx fourbours se logèrent Piccars et Flamens jusques aux portes d'icelle. Et furent les engiens assis droit devant lesdictes portes au dessus

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