Imágenes de página
PDF
ePub

nure par la bouche dudit bastard, le Roy les fist mercyer de leur bonne obéissance, et puis leur fist remoustrer pluiseurs choses touchant l'emprise que il avoit faicte en ce voiage, tendans ad fin que aucuns du pais de Flandres ne feissent aide ne secours de gens, d'argent, ne aultrement au duc de Bourgongne leur seigneur, actendu que le Roy estoit souverain, etc., et moult d'autres choses toutes tendans à ladicte fin. Sur lesquelles choses ils tindrent III jours conseil, et durant lesdis III jours ledit Gille de Braech bastard, se embla et absenta pluiseurs foix de ses compaignons, tant de jour comme de nuit et plus de nuit que de jour, et s'en alloit parlementer audit duc de Bar secrètement sans le sceu d'iceulx ses compaignons, que on povoit dire ses maistres en tant qu'il estoit leur serviteur retenu à gaiges. Lesquelx le amoient moult pour ce que il avoit si notablement parlé à leur gré en la présence du Roy et de son consseil, et n'avoient nulle doubtance sur son fait. Et quand ils eubrent pris conclusion avoec le conseil du Roy, ilz prirent congié et s'en retournèrent en Flandres. Et à leur département leur furent donnez et délivrés pluiseurs beaulx dons de vaisselle d'argent, laquelle ilz partirent en la cité de Cambray, et en rapporta chascun sa part en sa maison. Et retournèrent ceulx de Gand audit lieu de Gand par un samedy, et au lundy ensuivant fu mise la journée pour faire leur relacion devant la loy, bourgeoisie et communaulté de ladicte ville. Mais ledit lundy, à heure de six heures du matin, au moix de juillet, ledit Gilles de Braecht, qui estoit un homme fort rigoreux et contre commune gent, et moult hays audit pays de Flandres, fut agaitiés de III compaignons dont les deux estoient frères et estoient en la francise de la bourgeoisie dudit lieu. Et fut l'aghait mis entre la maison dudit Gilles et le maison des échevins de Gand, bien près dudit lieu. Et là où ledit Gilles venoit pour faire ladicte relacion, il fu assaillis et occis desditz compaignons, et luy coppèrent la gorge pour mieulx estre assurez de sa mort. Et si avoit ledit Gilles à celle heure avoec lui III varlès, mais il n'en y eubt que l'un qui se meist à deffense.

Ainsi perdy Gille de Braecht la vie, et tant l'intencion que par il avoit, fust maise ou bonne, demoura en cel estat et ne polt plus avant sortit effect. Mais de sa mort fu le peuple de Gand moult esmeu, et laissa chascuns sa besongne à faire pour aller à l'ostel desdis eschevins, tous armés au couvert, car ilz cuidoient certaine

ment que le duc de Bourgongne euist ce fait commandé à faire pour ce que ilz savoient bien que ledit Gilles n'estoit point en sa grace. Et firent bien en haste partir messagiers et chevauceurs à piet et à cheval pour poursieurvir et faire prendre lesdiz facteurs. Lesquelz facteurs furent recongneuz par ung desdis chevauceurs qui les perchut en un batiel où ilz se faisoient mener du grand pont à Saint-Bavon, et fist ledit chevauceur assambler le baillieu et les sergens dudit Saint-Bavon et fist prendre les troix compaignons dessusdis, et les fist mener à Gand prisonniers. Mais avant que ilz venissent en ladicte prison, une grant partie du commun de Gant se assambla entour eulx afin qu'ilz ne fussent rescoux. Car toute leur affection estoit de savoir la vérité dudit fait. Et quand ceulx furent en ladicte prison, ilz furent moult cruellement géhinez affin de savoir qui ce fait leur avoit fait faire. Mais ilz jurèrent et affermèrent, et en ce point demourèrent jusques à la mort, que ce estoit leur proppre fait et que d'eux meismement ilz le avoient ainsi empris sans conseil ne commandement de nulle personne, pour ce que il avoit les deux frères fais poures par sa force et par son malice et encores les manechoit il à tuer de jour en jour, pour laquelle chose ilz se estoient hastés de le adevanchier. Et sur ce point rechurent la mort et furent décolez sur le pont où on coppe les testes des bourgois, et puis furent mis en terre sainte aux Augustins dudit lieu de Gand. Et toutesfois furent ceulx de Flandres, par le rapport qui leur fu fait par leurs dits députés des requestes qui leur avoient esté faictes de par le Roy, tout d'acord que de acomplir icelles et de non aidier le duc de Bourgongne à garder son pais d'Artoix. Comme ilz ne firent, gentil ne autre.

Au département que le Roy fist de Péronne, il fist arriver son oost devant la ville de Balpaumes en Artoix, laquelle ville luy fu incontinent rendue par traictié, et empli le chastel. Car ce n'étoient point places tenables contre telle puissance. Et puis prinst le Roy son chemin pour aller mectre siège devant Arras.

Au temps que le duc de Bourgongne fu adverti que le Roy estoit conseilliés de ses ennemis de emprendre et faire le voiage dessusdit, il manda hastivement et très-espécialment les barons, chevaliers et escuiers de ses pais de Bourgongne venir pardevers luy à toute puissance pour lui aidier à résister contre l'emprise desdis ses ennemis, lesquelx avoient intencion de amener avoec eulx le roy de France et le duc de Guyenne, son fils. Pour laquelle chose

la plus grant partie de la gentilesce de Bourgongne se mist sus en armes, et partirent desdits pais pour venir en Artoix. Et quant ceulx qui avoient le Roy en gouvernement sçeurent la venure desdits Bourguignons, ilz envoient deux héraulx et rois-d'armes devers eulx, et leur firent faire deffense de par le Roy qu'ilz ne alassent plus avant au mandement dudit de Bourgongne et que ilz s'en retournassent en leur pais sur peine de encourir en l'indignacion du Roy et de estre réputez pour ses anemis. Lesquelx Bourguignons respondirent ausdis héraulx que ilz avoient intencion de parfaire leur voiage et de accomplir le commandement de leur naturel seigneur avoec lequel ilz volloient mourir et vivre. Et à tout celle response s'en retournèrent lesdis héraulx, et firent leur relacion de ladicte response à ceulx qui les avoient envoiiez. Lesquelx firent incontinent partir une grande compaignie de gens d'armes pour aller courir-sus ausdis Bourguignons. Et les costoyèrent bien chincq journées, que oncques ne les osèrent assaillir. Car ilz chevauçoient en belle ordonnance de bataille. Et arrivèrent à l'entrée du pais de Hainau, là où les gens d'armes commis d'eulx poursuir frappèrent en la queue. Mais ilz n'y concquestèrent gaires, car ilz n'y osèrent arrester et s'en retournèrent ainsi que ilz estoient venus. Et les Bourguignons arrivèrent à Granmont, et passèrent par dehors Audenarde et puis arrivèrent à Lille. En laquelle ville ilz trouvèrent le duc de Bourgongne, qui les reçut moult joyeusement et les ordonna à aller en pluiseurs villes et forteresses en ses pais de Flandres et d'Artoix, comme Arras, Hesdin, Lens, Douay et Lille et autres faisans frontière, contre ceulx qui amenoient le Roy contre luy.

Le jour de la Magdelaine, arriva le roy de France et mist siège devant la ville d'Arras et ossy devant la cité. Esquelles ville et cité estoient de par le duc de Bourgongne pluiseurs chevaliers et escuiers, tant du pais de Bourgongne comme de Piccardie. C'est assavoir messire Jehan de Luxembourg, qui avoit esté nez en Ytalie, le seigneur de Noielle, en son tamps appellé le Blancq Chevalier, les seigneurs de Montagu, de' Ront et de Champdivers, le gouverneur d'Arras et pluiseurs autres, lesquelz furent nombrez à Ve hommes d'armes, sans ceulx de la ville. Lesquelx firent moult de belles saillies sur l'oost du Roy en pluiseurs lieux et presque tous les jours, que pau en faillirent, et tousjours rentrèrent deudens la ville à leur honneur, et secoururent et mirent nouvelle gar

nison de gens et de vivres au chastel de Bellemotte, assés près dudit lieu d'Arras. Et lequel siège durant, lequel y fu continuellement par l'espace de sept sepmaines ou environ, sans ce que ceulx de dehors y meisfessent de riens, se ne fu de leurs canons dont ilz perchèrent les murs, tours et portes d'icelle ville et de ladicte cité en pluiseurs lieux. Mais oncques ne firent semblant d'y livrer assault.

Ce siège durant, se mirent à traictier et à aller devers le Roy, le duc de Brabant et la contesse de Hainau, frère et seur du duc de Bourgongne. Et s'en retourna le roy en France et toute son oost sans plus riens faire et sans entrer en ladicte ville d'Arras, de laquelle on ne leur fist oncques ouverture. Mais on le fist à Bourges, et y entrèrent plusieurs seigneurs de par le Roy, combien que le Roy ne le duc de Bourgongne n'y entrèrent point. Et fu rendue la ville de Bappaumes en l'obéissance dudit de Bourgogne, comme son héritage.

Après le département du roy de France, alla le duc de Bourgongne à Cambray et là fist appointier son carroy et toutes ses besoignes pour aller en Bourgoigne avec les barons et gentilz hommes dudict pays. Et laissa Philippe, son filz, et dame Michiele de France, espeuse de sondit filz, au pais de Flandres. Et au département dudit de Bourgongne, iceluy duc estoit très mal contend des quattre membres dudit pais de Flandres pour ce que ilz avoient esté contre sa volenté audit lieu de Péronne, et avoec ce ne lui avoient vollu faire ne donner quelque aide ne conffort contre ses anemis, et se savoient bien comment le Roy estoit par iceulx menez et conduis du tout à leur volenté. Pourquoy ils devoient croire que ce n'estoit point le fait dudit Roy, mais estoit le fait et emprise de sesdis ennemis. Et ne tint pas à eulx que ledit duc de Bourgongne ne fust deshonnorés et destruis. Et ainsi s'en alla iceluy duc en Bourgongne, et y séjourna plus d'un an.

En cel an meismes fu mis le concille à Constance, en Allemaigne, de pluiseurs cardinaulx, patriarces, archevesques et évesques et autres prélatz et ambaxadeurs de pluiseurs roix et princes chrestiens. Et estoit lors très grant division en l'Eglise par Pierre de Lune, nommé pappe Bénédic, qui se disoit vray pappe, et ne voloit céder non obstant que sustraction lui estoit faicte par pluiseurs causes de la plus grand partie de chrestienté, et n'avoit mais obéissance qu'en Espaigne et en Arragon. Auquel royaume d'Ar

ragon il se tenoit en une forte ville sur la mer. Et aussi en cel an avoit esté prins et menez en prison en la duchié de Baivière, le cardinal de Bouloigne, nommé le pappe Jehan. Et le prinst le roy des Rommains, empereur d'Alemaigne, pour pluiseurs creismes et articles que on lui mettoit sus. Et pour mectre l'Église en bonne paix et vraie union, fist tant ledit roy des Rommains que le concille se tint continuellement par l'espace de deux ans, ainchois que ceulx desdis roiaumes d'Espaingne et d'Arragon y venissent. Lesquelx y vinrent en l'an mil IIII et XVI, au mois d'aoust, à très belle et noble compaignie de prélatz et de chevallerie. Et tant que après leur venure on procéda à vraie éleccion de pappe. Et enfin fut esleu, confremé et pontiffié le cardinal de la Tombe, de la nacion de Ronime, en l'an mil IIII XVII, et fu nommés pappe Martin.

EN L'AN MIL IIII XV.

En la saison d'aoust, se mist en mer le nouvel roy Henry, filz de Henry, roy d'Engleterre, avecq luy les ducqs de Clarence et de Bethefort, ses frères; le duc de Iorcq, les contes d'Arrondel, de Werwic, de Kint, et Dontiton, le seigneur de Ros et le seigneur d'Escaillon et son frère, et pluiseurs autres. Et arriva à Harfleu, où il mist siège et y fu environ IX sepmaines, et puis lui fu rendue par traictié, par le seigneur de Gaucourt, qui en estoit cappitaine tenant le party d'Orléans.

En ce tamps, se mirent sus les princes et seigneurs de France à toute puissance pour aller contre lesdis Engloix. Et quant le roy d'Engleterre seult que ilz estoient assamblez, il party de Harfleu et y laissa le duc de Bethfort, et il s'en volt retourner à toutes ses gens par le pais d'Artoix à Calaix. Mais les princes et seigneurs de France le poursievirent jusques audit pais d'Artoix, et tant que il ne polt eschapper sans eulx livrer bataille, non obstant que il avoit jà passé les rivières d'Oise, d'Autye et de Somme. Et furent ractains et enclos emprès Aisincourt et de Rouseauville. Dont iceulx Engloix furent moult dolans, car contre eulx estoit toute la fleur de la chevallerie du royaume de France, et estoient Françoix mieulx de quatre contre ung.

De l'armée de France estoit à ce jour le chief et souverain, le

« AnteriorContinuar »