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à l'encontre. Et estoit à ce jour gardant la place seure, le conte de Hainau, à ce commis et ordonné de par le roy de France, à tout II lances, affin que se aucuns d'une partie ou d'aultre se feust avanchiés de faire aucune emprise contre ladicte paix, icellui conte fust allez alencontre, luy et ses gens, et se fust tenus de la partie aiant le droit. Et incontinent après ladicte paix jurée, se party le duc de Bourgoigne dudit lieu de Chartres, à toute sa compaignie, sans séjourner.

L'AN MIL IIII IX.

Par jugement du grant conseil du roy de France, fu Montagu, grant-maistre d'ostel d'iceluy roy, décolés et exécutés és halles de Paris, la teste mise sur le bout d'une lance esdites halles et le corps pendu par les espaulles au hault estage de Montfaucon, pour pluiseurs criesmes et malifices à lui imposés, tant de la maladie du roy, et autres. Et estoit lors prévost de Paris messire Pierre des Essars. Et estoient à ce tamps dedens Paris, le roy de Navare, les ducqs de Berry, de Bourgoigne et de Bourbon, et aultres.

De celle mort fu le duc d'Orléans moult courouchiés, et ossy furent ceulx de son aliance, et par espécial le duc de Berry. Et ne demoura mie longuement que il ne monstrassent leurs corages et que il ne comenchassent la guerre. Et lors estoient à Paris le roy de Navare et le duc de Bourgoigne, qui gouvernoient le Roy et les grandes besoignes de son royaume. Dont les autres seigneurs avoient grande envie, et firent alliance les pluiseurs contre ledit duc de Bourgoigne pour le, du tout, débouter dudit gouvernement de France.

En ces alliances qui furent faictes à Gyen-sur-Loirre, auquel lieu furent tous les princes contraires audit duc de Bourgoigne.

L'AN MIL IIII X.

Les ducqs d'Orléans et de Berry assamblèrent grans gens en leurs païs pour venir à Paris en armes et à puissance. Et le duc de Bourgoigne, quant il le seult, manda ses deux frères et pluiseurs

seigneurs et chevaliers de ses païs pour venir devers luy audit lieu de Paris, pour lui forteffier contre l'emprise d'iceulx ducqs de Berry et d'Orléans. Et si manda le duc de Lorraine, le conte de Savoie et le conte de Saint-Pol et aultres, pour avoir advis et consseil sur ladicte entreprise. Et estoit à ce tamps le roy de France logiés au Palais, avec lui le roy de Navare et le duc de Bourgoigne, le cardinal de Bar et messire Pierre de Navare. Et se si logèrent le duc de Brabant, le conte de Nevers et le conte de Saint-Pol, quant ilz furent venus. Et ossy firent pluiseurs seigneurs de leur alliance. Et mirent garnison de gens d'armes à SaintGermain-des-Prés, dont messire Rolland de Hutkerke fu cappitaine. Et adonc estoient les Brabanchons logiés à Saint-Denis.

Quant les ducqs de Berry et d'Orléans furent partis de leurs païs et que ilz eubrent leur puissance assamblée, ilz arrivèrent tout droit à Viccestre, ung bel hostel à manière de forteresse estant bien près de Paris appartenant au duc de Berry, et là se logèrent et leurs gens, à l'environ. Et y furent environ III sepmaines. Et cependant furent pluiseurs ambaxadeurs envoyez audit lieu de Vicestre de par les princes estans à Paris, et ossy dudit lieu de Wiccestre à Paris de par les princes estans audit Wicestre. Et tant que il fut en fin par eulx conclud et accordé pour oster tous débas et motifs de guerre, que chascuns des seigneurs du sang roial s'en retourneroit en son païs sans avoir quelque gouvernement en France, et ne demourroit emprez le Roy nulz d'iceulx seigneurs, fors messire Piere de Navare, lequel y fu ordonnez et commis par iceulx seigneurs d'un commun accord, avoec luy aucuns chevaliers et aultres gens de consseil, pour gouverner les besoingnes d'iceluy royaume; lesquelx furent prins et esleuz d'une partie et de l'autre. Et aussi au gouvernement du duc de Guienne, auquel fu laissié Enguerran de Bournonville et autres. Et par ainsi partirent tous lesdiz princes et seigneurs à ung jour, les ungs de Paris, les autres de Vicestre. Lesquelx de Vicestre n'entrèrent point à Paris pour celle foix, ains s'en retournèrent en Berry et à Orléans. Et le roy de Navarre s'en retourna en son païs, et pareillement firent tous les autres seigneurs. Et retourna lors ledit des Essars en Flandres et en Artoix avoec ledit duc de Bourgoigne, et fu retenus de son hostel, où il demoura bien ung an. Car il n'estoit pas en la grace desditz de Berry et d'Orléans pour ce que il avoit prins et arresté ledit de Montagu, et qu'il gouvernoit très-grande

ment, à leur samblant. Et pour ce fu osté de ladicte prevosté de Paris, et y fu mis en son lieu Le Borgne de La Heuse, et depuis messire Morelet de St-Cler, maistre d'ostel de l'ostel du Roy. Et depuis ne demoura mie longuement que ceulx de Paris n'alassent abactre l'ostel de Vicestre, affin que nulle garnison de gens d'armes n'y fust mise. Car elle leur estoit trop près voisine.

En cellan y eubt pluiseurs envyes et divisions à Paris entre ceulx qui estoient commis et ordonnés pour conseiller le Roy et gouverner le royaume de France. Et ne se povoient accorder ensamble, pour ce que les ungs estoient tenans le party de Berry et Orléans, et les autres estoient tenans le party de Bourgoigne, et voloit chascuns avoir la dominacion, et ne pot la chose longuement durer en ce point. Car ceulx qui tenoient le party de Berry et d'Orléans escripsoient devers leurs seigneurz et maistres, toute l'ordonnance et manière des gens dudit consseil tenans le party de Bourgoigne. Et firent tant que ledit d'Orléans escripsi pluiseurs lectres moult injurieuses et diffamatoires, donnans très grandes charges de deshonneur sur pluiseurs chevaliers et gens de conseil estans devers le Roy et ledit duc de Ghienne, son filz, lesquelx chevalliers et conseilliers tenoient le party du duc de Bourgoigne. Et adréchoient icelles lectres en pluiseurs lieux et à diverses personnes, comme au Roy, et à la roynne de France, laquelle se tenoit lors entre Paris et St-Denis, sur la costière de la place du Lendit, en ung hostel que on appelle Saint-Awain1 au duc de Guyenne, leur filz, à l'Université de Paris, à le chambre de Parlement et à le Chambre des comptes. Desquelles lectres les coppies furent envoiées devers le duc de Bourgoigne en son pais de Flandres, pour ce qu'elles touchoient grandement son honneur et de pluiseurs de ses gens, dont aucuns estoient en icelles nommez par noms et sournoms. Sur quoy le duc de Bourgoigne fu conseilliés de garder son honneur et de escripre devers le Roy, la Royne, duc de Guienne et tous les autres ausquelz ledit d'Orléans avoit escript. Ainsi fist le duc de Bourgoigne faire lectres, reprenans les poins escrips par ses adversaires et respondant à chascun d'iceulx en desmentent ledit duc d'Orléans de ce que il avoit dit et escript en pluiseurs lieux de ses dictes lectres maisement et faussement contre vérité, ledit de Bourgoigne soutenant les preudommes que

A C'est Saint-Ouen.

il avoit laissiés emprès le Roy bons et loiaulx serviteurs envers icelui et sa couronne, et pluiseurs autres choses, donnans grans charges de desloiaulté sur aucuns dénommés en sesdictes lectres estans devers icelui Roy de par ledit duc d'Orléans, lesquelx il disoit non estre dignes d'estre conseilliers d'iceluy Roy. Et par ces lectres et divisions recommença la guerre moult grande moiennant la rachine de rancune et de hainne qui estoit ès cuers desdiz seigneurs ainsi qu'il apparu depuis par pluiseurs foix et par grant tamps. Et toutesfois demourèrent à ceste foix ceulx du party de Bourgoigne les plus puissans devers le Roy et ledit duc de Guienne, et ossy les amoit le Roy le mieulx entour luy, en santé et en maladie, et moult souvent demandoit où estoit son cousin de Bourgoigne et le désiroit moult à veir, et toute sa vie demoura en icelle voulenté quelque chose que on lui feist depuis faire. Et estoit lors chancellier dudit duc de Guienne, messire Jehan de Nielles, seigneur d'Ollehaing.

L'AN MIL IIII XI.

Environ le moix de juing, assambla le duc d'Orléans une grant compaignie de gens d'armes, et se party de son pais en intencion de entrer à Paris et de çachier et débouter tous ceulx qui tenoient le party de Bourgoigne, et au surplus gouverner le royaume à son plaisir. Et arriva à Saint-Denis, et fist tant que la tour de Saint-Clau luy fu livrée par Collinet de Puiseux, chevalier, qui en estoit cappitaine. Lequel en fu depuis décolez et esquartelés comme traictre ès halles de Paris, et les quartiers pendus à quatre chemins hors des portes dudit lieu de Paris. Et fu lors messire Manssart du Bos commis cappitaine de Saint-Clau par ledit duc d'Orléans, et messire Cluignet de Brabant fu commis de aller à Ham en Vermendois, à grant puissance de gens, pour tenir frontière sur les marches de Picardie. Et ainsi commancha à faire forte gherre entour Paris. Mais ce non obstant il ne post tant faire que il entrast dedens ladicte ville de Paris. En laquelle estoient Enguerran de Bournonville et pluiseurs autres, avoec ledit Pierre de Navarre. Lesquelx mandèrent le conte de Nevers, qui estoit le plus prochain d'eulx, et il arriva à belle compaignie de ses gens et leur aida à

garder ladicte ville jusques à la venure du duc de Bourgoigne, son frère, lequel estoit jà mandé par trois ou quattre manières de lectres escriptes de par le Roy, qui le mandoit aller à Paris pardevers luy à toute la puissance que il porroit finer pour faire vuidier ledit duc d'Orléans et ses complices, lesquelx le Roy par sesdictes lectres réputoit pour ses anemis et adversaires, enfraudeurs de paix, lesquelx, contre sa volenté, avoient mis gens d'armes en des villes et forteresses en plusieurs lieux, dont il estoit très mal content. En commandant audit duc de Bourgoigne que sur toute la féaulté, amour et service qu'il lui devoit, il ne feist faulte de se secourir à ce besoing. Et pour tant que ledit duc d'Orléans ne polt entrer à Paris, il s'en retourna en son pais et laissa ses gens en garnison en plusieurs villes et forteresses en ce royaume, environ Paris et ès marches de Picardie. Et luy retourné à Gergeau, fist mander deffiances audit duc de Bourgoigne. Desquelles deffiances la teneur et coppie s'enssieult.

Coppie des lectres de deffiances du duc d'Orléans et de ses frères à l'encontre du duc de Bourgoigne.

Charles, duc d'Orléans et de Valoix, conte de Bloix et de Beaumont et sire de Couchy, Philippe, conte de Vertus, et Jehan, conte d'Angoulesme. A toy Jehan, qui te dis duc de Bourgoigne. Pour le très horrible murdre par toy fait en grant trayson et aghès apenset par murdre et affaitties en la personne de nostre très chier seigneur et père mons. Loys, duc d'Orléans, et frère germain de monseigneur le Roy, nostre très souverain seigneur et le tien, non obstant pluiseurs sermens et compaignies d'armes que tu avoies à lui, et pour les grans desloiaultés, traysons et deshonneurs et mauvaistés que tu as perpétrés contre nostredit seigneur le Roy et contre nous en pluiseurs manières, te faisons savoir que de ceste heure en avant nous te nuirons de toute nostre puissance par toutes les manières que nous porrons, et contre toy et ta desloiaulté et traison nous y appellons Dieu et raison en nostre aide, et de tous les preudommes du royaume. En tesmoing de vérité nous avons fait séeller ces présentes lectres du séel de moy Charles dessus nommé. Donné à Jerguau, le xvi jour de juillet, l'an de grace mil

I et XI..

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