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dans les bibliothèques les plus riches, auxquelles j'avais dû d'abord m'adresser, s'est rencontré dans celle de Valognes. Son savant et obligeant conservateur, M. Canivet, y a récemment découvert et a bien voulu me communiquer un exemplaire de l'édition de Lyon.

Cette édition est en effet de 1511, comme l'établissent les mots qui terminent le volume : « Impressum Lugduni anno Domini m. ccccc. xj; » mais c'est une sorte d'in-8°. et non un in-fol., comme le croyait Fabricius, qui ne le connaissait pas sans doute de visu.

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On y compte bien cinq traités, comme nous l'avions dû supposer d'après les notes que nous avions recueillies; mais ce ne sont pas tout-àfait ceux que, d'après nos autorités, nous y avions placés. - Le premier est le Communiloquium, dans lequel je vois, en tête de quelques-unes de ses divisions secunda pars principalis; tertia pars principalis, etc.; ce qui rend certaine notre dernière conjecture sur la manière dont il faut lire la rubrique du ms. de Falaise. Le second est le Compendiloquium de vitis illustrium philosophorum et dictis moralibus eorumdem ac exemplis imitabilibus. —Le troisième est le Breviloquium de philosophia sive sapientia Sanctorum (ce qui ôte une partie de sa valeur au ms. de Rouen, dans lequel maintenant nous ne pouvons plus voir que des ouvrages imprimés. Le quatrième est le Breviloquium de virtutibus antiquorum principum et philosophorum. Le cinquième enfin est le Ordinarium vite religiose sive alphabetum, avec ses trois parties: le Dietarium, le Locarium, le Itinerarium.

Ces cinq ouvrages sont tous attribués au frère « Joannes Valensis de ordine fratrum Minorum. »

Nous n'insistons pas pour le moment; nous consacrerons bientôt à Jean de Galles un second article, où nous tirerons du volume découvert par M. Canivet, du ms. de la bibliothèque de Rouen, et surtout et encore du ms. de Falaise qui n'a rien perdu à notre dernière trouvaille, des documents qu'il nous semble utile de publier.

SUR

LES BAILLIS DU COTENTIN

PAR M. L. DELISLE,

Ancien élève de l'École des Chartes, membre de la Société.

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Les baillis royaux jouent, sans contredit, l'un des plus beaux rôles dans l'histoire du gouvernement et de l'administration de la France au XIII. siècle et au commencement du XIV. Tout en effet rentrait dans leurs attributions domaine royal, finances, armée, marine, justice, tels étaient les principaux objets entre lesquels se partageait leur attention. Nous sommes portés à nous étonner de cette multiplicité et surtout de cette diversité d'occupations. Mais ce qui doit redoubler notre surprise, c'est que ces fonctionnaires, sans se contenter d'une surveillance générale, abordaient par eux-mêmes le détail des affaires. Avec cette activité physique et morale, dont le moyen âge nous offre tant d'exemples, nous les voyons à chaque instant se porter d'un point à un autre de leurs bailliages, tantôt pour affermer les domaines du roi, tantôt pour en augmenter l'importance; ici, pour rechercher et prévenir les usurpations, là, pour maintenir les droits de la couronne. Ils reçoivent l'argent du roi, ils acquittent ses charges, ils font lever les subsides qui lui ont été accordés, ils rendent leurs comptes aux gens de sa cour. La guerre est-elle déclarée, les uns prendront en personne le commandement de corps d'armées; les autres visiteront les châteaux et les mettront en état de défense; ou bien ils s'occuperont de l'approvisionnement des camps et des places; ils prépareront l'équipement des navires. Dans l'origine, les baillis reçoivent les contrats des particuliers; on les choisit pour arbitres;

ils vont successivement dans chaque ville présider les assises où se jugent les procès les plus importants. Ils maintiennent le bon ordre dans le territoire qui leur est confié, y font justice des malfaiteurs, y exercent une surveillance spéciale sur les agents du roi. Ce n'est pas tout dans notre province, deux fois chaque année, les baillis se réunissent à l'échiquier; souvent aussi ils se rendent à la cour du roi à Paris. Là, interprètes de leurs administrés, ils exposent leurs besoins et indiquent les mesures à prendre dans leur intérêt. Dans ces voyages, ils se pénètrent de plus en plus des principes que la royauté cherche à faire triompher dans chaque province. De retour dans leurs bailliages ils y publient les ordonnances arrêtées à la cour, et travaillent à faire insensiblement oublier les usages qui eussent entravé l'action du souverain ou de ses agents. Formés tous à la même école, tous animés d'un même esprit, les baillis sont fréquemment transférés d'un bailliage à un autre, rappelés à la cour du roi, envoyés en mission particulière, sans que ces changements influent en rien sur l'expédition des affaires. Cet ensemble, cette unité de vue, cette dépendance absolue du pouvoir central, assurèrent le succès de la royauté. Mais une partie du mérite revient incontestablement aux baillis. Sans leur habileté et leur dévouement, Philippe-Auguste eût-il fait sans violence accepter son gouvernement à la Normandie, veuve de ses ducs souverains et profondément blessée dans ses intérêts commerciaux? Saint Louis eût-il introduit tant de sages réformes dans l'administration et la justice? Philippe-le-Bel aurait-il si persévéramment lutté contre les usurpations de l'autorité ecclésiastique?

Habiles administrateurs, profonds jurisconsultes, fidèles serviteurs de nos plus grands rois, la plupart des premiers baillis ont des titres sérieux qui les recommandent à notre souvenir. C'est donc justice de tirer leurs noms de l'oubli. — D'un autre côté, les catalogues des principaux dignitaires civils et ecclésiastiques sont souvent de précieux instruments pour la critique historique. Chaque jour les savants consultent les volumes du Gallia christiana, de l'Art de vérifier les dates, de l'Histoire généalogique de la maison de France et des grands officiers de la couronne; sans aucun doute, ils ouvriraient souvent le livre qui contiendrait des listes exactes des grands baillis qui ont administré la France depuis le XIII. siècle.

Malheureusement ce travail n'existe pas. A l'aide des anciens rôles de la Chambre des Comptes, Brussel avait ébauché des listes auxquelles la perte à jamais déplorable de ces rôles donne un grand prix (1). Les Olim ont permis à M. Beugnot d'ajouter quelques noms importants aux catalogues dressés par Brussel (2). Ces nomenclatures, dont les éléments ne sont tirés que de deux espèces de documents sont naturellement très-incomplètes. Ce sont cependant, à notre connaissance, les seuls essais de liste générale des baillis qu'on ait jusqu'à présent donnés au public. Heureusement il existe sur ce sujet bon nombre de mémoires particuliers. Nous ne signalerons que ceux qui se rapportent aux grands baillis de la Normandie. Farin a dressé une liste des baillis de Rouen (3). L'abbé Beziers a consacré un petit volume à l'histoire des baillis de Caen (4). Ses recherches ont été complétées et rectifiées sur plusieurs points par l'abbé Delarue (5). Enfin, M. de Chantereyne avait, peu d'années avant la Révolution, rédigé une histoire des baillis du Cotentin (6).

Le mémoire que nous soumettons à la Société des Antiquaires a également pour objet les baillis du Cotentin. Nous n'avons emprunté au travail inédit de notre devancier que la nomenclature de ces magistrats depuis le XVI. siècle.

Nous nous sommes principalement efforcé de donner une liste exacte, et de publier sur les baillis du XIII. et du XIV. siècle de nombreux détails puisés à des sources authentiques. Nous nous attachons surtout à présenter des faits, à l'aide desquels le lecteur pourra se former une juste idée des fonctions du bailli. Des faits que nous aurons lieu d'exposer découlent plusieurs conséquences importantes, que, dans un travail plus général, nous mettrons dans tout leur jour. Nous commencerons

(1) Usage des fiefs, t. I, p. 486 et suiv.

(2) Olim, t. I, p. 1042.

(3) Hist. de Rouen, éd. de 1738, in 4°., 2o. partie, p. 120.

(4) Chronologie des baillis et gouverneurs de Caen; 1769, in-12.

(5) Essais historiques sur la ville de Caen, t. II, p. 256.

(6) Chronologie historique des grands baillis du Cotentin, depuis le règne de Philippe Auguste, roi de France. 1787. Une copie ms. de ce travail nous a été communiquée par M. de Gerville.

- Voy. Almanach historique, ecclésiastique et politique, du diocèse de Coutances pour l'année 1773, p. 50.

par présenter quelques éclaircissements sur le sens du mot Cotentin, et sur l'étendue et la division du bailliage de ce nom.

Dans les anciens textes, surtout antérieurement au XII. siècle, le pays désigné sous le nom de Cotentin (pagus Constantinus) semble avoir presque toujours eu les mêmes limites que le diocèse de Coutances (1).

Dans les actes des ducs de Normandie, au moins depuis le XI. siècle, le mot Cotentin a le plus souvent une autre acception. Il désigne la partie septentrionale du diocèse de Coutances, bornée à l'Ouest, au Nord et à l'Est par la mer, et au Midi par une ligne qui partant des Vés suivait probablement les cours de l'Ouve et de la Sie. En un mot, ce pays devait avoir les limites que l'archidiaconé de Cotentin (bien distinct de

(1) Au VIII®. siècle, un autre pays (pagus Coriovallensis) occupait le Nord du diocèse, d'après la chronique de Fontenelle, c. xiv. — Au S.-E. le pagus Abrincensis franchissait les limites du diocèse de Coutances, au dire de Guillaume de Jumièges, qui y place Ville-Dieu : « Terram in pago Abrincensi dedit, in qua illi servi Christi vicum quemdam, quem vocant Villam Dei,..... ædificaverunt ». Ce que le chroniqueur français traduit: « Une ville en Evrecin (sic), que on apelle Ville de Diu »>; Hist. des ducs de Normandie, éd. F. Michel, p. 70.- Enfin, de ce même côté le pagus Baiocensis empiétait sur le diocèse de Coutances. Il s'y étendait sans doute aussi loin que le fit plus tard le bailliage de Caen (Voyez plus loin), et peut-être même davantage. M. Le Prevost ( Anciennes divisions territoriales de la Normandie, p. 35) porte jusqu'à Gavrai, cette extension du pagus Baiocensis. Il s'appuie sur un diplôme de 832, par lequel Louis-le-Débonnaire confirme à l'abbaye de St.-Denys « Gabaregium in Bagasino cum omni integritate et appendiciis suis, de quibus quædam conjacent in pago Constantino ad capiendum crassum piscem » (Recueil des historiens de France, t. VI, p. 580). Sans penser que le fait puisse corroborer ou infirmer la conjecture de M. Le Prévost, nou's observerons que Henri II donna à la cathédrale de Baieux les églises de Gavrai, Mesnil Amand et Ver, qui avaient autrefois constitué une prébende ( Liber niger capit. Baioc., à la Bibl. de la cathédr. de Baieux, no. xx, f. vj ro. ). Quoi qu'il en soit, s'il était certain que Gabaregium désignât notre Gavrai, et qu'on ne pût soupçonner une erreur dans l'indication du pagus, nous serions porté à croire que le Bessin ne conserva pas long-temps une extension aussi démesurée : car d'après le dotalicium d'Adèle et la charte de fondation de l'abbaye de Fontenai, Perci faisait au XI. siècle partie du Cotentin « apud Perceum quoque in Constanciensi pago » (Gallia christ., t. XI, instr., C. 64, D).

Le soin avec lequel notre excellent maître et ami a réuni les mentions du Cotentin et de lieux appartenant à sa circonscription (p. 40), nous dispense de recommencer ici ce travail. Nous nous permettrons cependant de proposer quelques nouvelles explications pour certains textes rassemblés par le savant géographe. Le texte de la vie de saint Omer est étranger au Cotentin : Constantinensis regio et Aurea vallis y désignent le pays de Constance en Souabe, et Goldenthal. Dans la charte de Richard II, pour Marmoutier, nous croyons qu'il faut traduire Hetred villa, Quettevilla, Buistotvilla et Helvıðla, pår Helleville, Quetteville (hameau de Helleville), Biville et Héauville. — La traduction de Tedis villa et villa Teth par Théville nous semble douteuse. - Uldra désigne le Merderet. Torgisvilla est l'ancien nom de St.-Jean de la Rivière, près Barneville. — Dans le <<< dotalicium » d'Adèle, Holmus indique le Homme ou Ile Marie.

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