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ont senti la nécessité de se donner à une puissance qui pût les protéger.

Mais ces colonies, bien loin d'être indépendantes, n'ont pas même été appelées à la jouissance des lois communes qui régissaient leurs métropoles. L'immensité des frais qu'exigeait leur conservation, a forcé de les soumettre à un régime fiscal qui, en ralentissant leurs progrès, a souvent diminué leur attachement pour la mère patrie, et les a quelquefois portées à se soustraire à sa domination.

Sans retracer ici l'histoire des établissemens des Européens dans les deux Indes, nous nous bornerons à fixer l'attention de nos lecteurs sur une des époques les plus remarquables du dix-huitième siècle, où l'on a vu une portion des colonies anglaises s'élever tout à coup au rang des puissances les plus respectables; révolution dont les principes et les conséquences ont puissamment influé sur les grands changemens de l'état politique de l'Europe.

L'Angleterre ne sera jamais dédommagée,

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jamais consolée de la perte de ses colonies de l'Amérique septentrionale. Quand on se rappelle l'assistance d'abord secrète, mais bientôt après ouvertement déclarée, que la France prêta aux insurgés, et la part qu'elle prit à l'affermissement dé leur indépendance, on doit peu s'étonner qu'usant de représailles le gouvernement anglais ait saisi l'occasion d'enlever à cette puissance ses plus belles. colonies: si elle eût su les conserver, en les affranchissant d'un régime prohibitif, aussi contraire à ses intérêts qu'à ceux de ses nouveaux alliés; si elle eût, dans l'esprit du siècle, modifié l'esclavage, et n'eut pas craint de s'engager dans une seconde guerre punique, devenue inévitable, on peut affirmer qu'elle eût détourné l'orage de la révolution de 1789, qui, en ruinant son commerce colonial, a détruit sa marine, et l'a fait tomber pour long-temps dans une honteuse dépendance de sa rivale.

La témérité criminelle avec laquelle la faction qui domina la seconde législature française fit déclarer la guerre d'abord à l'Au

triche, et successivement à l'Europe entière, favorisa les vues de l'Angleterre.

Les colonies françaises des Antilles furent laissées sans défense, la Martinique succomba, et Saint-Domingue fut livré aux plus sanglans désordres, excités par ceux qui avaient le plus d'intérêt à les prévenir.

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Les victoires inattendues des armées françaises ne tardèrent pas à dissoudre la première coalition; mais l'inexpérience et la violence des hommes qui avaient usurpé le pouvoir, leur fit commettre une faute irréparable; ils exigèrent que les puissances maritimes qui traitèrent les premières avec la république, prissent une part offensive dans sa querelle.

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L'Espagne et la Hollande, en déclarant la guerre à l'Angleterre, lui offrirent de toutes parts de riches possessions à envahir.

Cette faute du gouvernement français, en affaiblissant ses nouveaux alliés, acheva de détruire son commerce, et livra celui de l'Europe entière à ses ennemis. Une partie des trésors et des vaisseaux hollandais fut sé

questrée; l'important mouillage de Ceylan, le cap de Bonne-Espérance, devinrent la proie des escadres britanniques.

La prise de Malte, la conquête de l'Égypte, et sur tout l'audace et la fortune du conqué rant, firent craindre au ministère anglais qu'il ne parvint à r'ouvrir l'ancienne route du commerce de l'Inde, et ne soulevât à-lafois toutes les puissances de l'Asie, en les aidant à secouer le joug de l'Angleterre.

Une telle entreprise pouvait paraître extravagante, mais le danger même chimérique, alarmait la nation, parce qu'il menaçait de tarir la principale source de sa prospérité.

L'importance qu'on avait attachée à l'ambassade envoyée en France par Tippoo-Saïb; les projets qu'on savait avoir été concertés avec l'ancien gouvernement; la certitude que des officiers avaient été envoyés pour exercer les troupes de Tippoo à la tactique des Européens; enfin, les prétendues propositions du sultan de Mysore au gouverneur des îles de France et de Bourbon, servirent de

prétexte à cette injuste aggression. Ce fut en vain que Tippoo se hâta de désavouer ses intelligences avec les Français, protesta que ces agens supposés n'étaient que des aventuriers qu'il n'avait ni autorisés, ni excités, invoqua la foi jurée par les derniers traités, et s'abstint de donner par aucuns préparatifs le moindre ombrage à ses ambitieux voisins: sa perte était résolue depuis la paix de 1792. On avait reproché au marquis de Cornwallis d'en avoir agi avec trop de magnanimité, et de n'avoir pas abattu la seule puissance qui pût encore relever les espérances de tant de princes humiliés, de tant de peuples subjugués.

Le gouvernement anglais, malgré la sécu◄ rité que devait lui inspirer l'accroissement de sa puissance dans la presqu'île de l'Inde, et la faiblesse des moyens que les Français y pouvaient employer, saisit cette occasion d'y faire des apprêts de guerre considérables. On y mit autant d'activité, soit en Asie, soit en Europe, que si l'Égypte eût été déjà soumise et paisible, et que Bonaparte ayant

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