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NOTES.

NOTE PREMIÈRE.

Sur la Guerre de l'Inde.

NOUS ous nous sommes prescrits de ne point enfler les volumes de ces essais historiques en y insérant les nombreuses pièces officielles que les gouvernemens ont publiées à diverses époques, à moins que ces documens ne fussent indispensables pour faire connaître à nos lecteurs, en leur évitant de fastidieuses recherches, les changemens opérés par de grandes transactions entre les puissances belligérantes, ou les causes immédiates des événemens dont nous avons à rendre compte. Le rapport du lord Mornington à la Compagnie des Indes entre dans cette dernière catégorie : le gouverneur-général des établissemens anglais y exposa les motifs qui le déterminèrent à l'attaque qu'il dirigea contre Tippoo-Saïb, et dont le résultat fut, ainsi que nous l'avons fait connaître, la distraction de la puissance, et la mort de ce vaillant prince indien. Nos lecteurs porteront un jugement impartial sur cette espèce de manifeste, qui servit à justifier aux

yeux des nations européennes la guerre qui rendit les Anglais maîtres du royaume de Mysore.

Extrait d'une lettre du lord Mornington à la cour des Directeurs de la Compagnie des Indes.

Du fort Saint-Georges, le 29 mars 1799.

« On eut connaissance, pour la première fois, » le 5 juin 1798, à Calcutta, d'une proclamation du » général de l'Isle-de-France, datée du mois de février » de la même année. Cette proclamation fait con>> naître qu'une ambassade, envoyée par Tippoo» Sultan, est arrivée à l'Isle-de-France; qu'elle était >> chargée de remettre des lettres de ce prince, adres»sées non-seulement au gouverneur de cette île, mais » encore au Directoire exécutif de France; que ces >> lettres contiennent la proposition de conclure une » alliance défensive et offensive avec la France; de >> payer et d'entretenir toutes les troupes que la France » pourra fournir au Sultan, et de commencer contre » les Anglais dans l'Inde, une guerre active pour » laquelle le Sultan déclare avoir fait ses préparatifs, » et qu'il attend avec impatience le moment où le » secours de la France lui donnera la possibilité de » satisfaire son désir ardent de chasser les Anglais de >> l'Inde. La proclamation finit par offrir des encoura» gemens à tous les Français qui voudront entrer au

» service de Tippoo-Sultan, selon les conditions qui >> seront réglées avec ses ambassadeurs alors à l'Isle» de-France. Quoique d'abord je fusse porté à douter » de la vérité de cette extraordinaire proclamation, » je jugeai convenable d'en envoyer une copie » le 9 juin, au général Harris, (alors gouver>> neur du fort Saint-Georges, et commandant en >> chef de la côte de Coromandel), en lui faisant sen» tir que si on apprenait qu'elle fût authentique, elle >> serait cause d'un démêlé sérieux avec Tippoo>> Sultan, et en lui enjoignant de s'occuper sans délai » des moyens d'assembler une armée sur la côte de » Coromandel, si la nécessité forçait malheureuse»ment à de tels préparatifs. Le 18 juin 1798, je reçus >> une lettre du 28 mars, du lord Macartney, qui » m'envoyait une copie authentique de la proclama>>tion; en même temps arrivèrent, à Calcutta, plu>> sieurs personnes qui s'étaient trouvées à l'Isle-de» France lors de sa publication. Depuis leur témoi» gnage, je fus en état d'obtenir une connaissance » exacte et authentique de toutes les circonstances >> importantes qui ont accompagné la publication de » cette proclamation à l'Isle-de-France; j'en fis part >sur-le-champ à votre comité secret, et j'ai aujour » d'hui l'honneur de les faire connaître à votre hono>>rable cour.

» Tippoo-Sultan a envoyé deux ambassadeurs,

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» qui se sont embarqués à Mangalore pour l'Isle-de>> France, et sont arrivés, vers la fin de janvier 1798, » à la ville de Port-Nord-Ouest, dans cette île. Ils » ont été publiquement reçus par le gouvernement >> français, traités avec égards et distinction, et en>> tretenus aux frais du trésor public pendant la durée » de leur séjour dans l'île. Avant l'arrivée de ces > ambassadeurs on n'y pensait ni on n'y disait que les >> Français dussent fournir des secours à Tippoo, et » qu'il y eût quelque apparence de guerre entre ce » Prince et la Compagnie; mais deux jours après » l'arrivée des ambassadeurs, la proclamation dont >> il est question fut publiée et affichée dans toute la >> ville du Port-Nord-Ouest. Les ambassadeurs, loin » de réclamer contre ce qu'elle contient, tinrent pu» bliquement, et sans dissimulation, le même langage » à l'égard de la guerre offensive que devait commencer >> Tippoo contre les possessions anglaises dans l'Inde; >> et même ils permirent que cette proclamation fùt >> distribuée par leurs agens dans le lieu de leur domi>> cile. Ils étaient présens lorsque le gouvernement >> français commença à agir selon les termes de la >> proclamation, et ils aidèrent à l'exécution des pro>> messes qu'elle contient, en faisant, au nom de » Tippoo, des offres à tous ceux qui voudraient » s'engager à son service; ils proposèrent une le» vée d'hommes plus considérable que cela n'était

» possible, et affirmèrent que leurs pouvoirs étaient >> illimités, relativement au nombre de troupes » qu'ils pourraient rassembler au nom de Tippoo>> Sultan. Suivant la teneur du dernier paragraphe » de la proclamation, ils stipulèrent plusieurs in»gagemens au nom du Sultan, avec différens Fran» çais, entre autres avec M. Dubue, qui promit d'en» trer au service de leur Souverain, pour faire ja >> guerre qui devait commencer immédiatement contre » les Anglais, dans l'Inde. Il se présenta alors une » occasion favorable de s'éclaircir parfaitement si les » démarches des ambassadeurs du Sultan à l'Isle-de>> France étaient conformes aux instructions de leur >> Prince; car quoiqu'il fût plus que vraisemblable » qu'ils n'auraient pas osé transgresser les limites de >> leurs pouvoirs dans une matière si importante que >> la conclusion d'un traité d'alliance offensif avec les » Français contre la Compagnie des Indes anglaises, >> il restait cependant encore à savoir si Tippoo>> Sultan voudrait avouer des procédés qui ne pouvaient >> manquer de l'exposer au juste ressentiment de votre » gouvernement. Cette question fut immédiatement ré>> solue, puisque le Sultan permit, sans hésiter, aux » troupes françaises, de débarquer publiquement à » Mangalore; et que, loin de manifester la moindre >> apparence de mécontentement de la conduite de ses » ambassadeurs, il les reçut, ainsi que les officiers,

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