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avait démontré qu'il ne suffisait pas de quelques victoires pour décider la question, et forcer le parti vaincu à recourir aux négociations. Des revers constans pendant trois campagnes, n'avaient pu décourager les armées autrichiennes; et les Français, qu'on ne croyait redoutables que dans les succès, avaient montré, dans leurs retraites de Souabe et d'Italie, et dans la défense opiniâtre du pays de Génes de Génes, comment ils savaient aussi supporter la mauvaise fortune. Le relâchement des liens des deux cours impériales, la séparation de leurs armées, la défection qu'elles faisaient pressentir, rétablissaient l'équilibre de forces; la lutte prolongée semblait ne pouvoir produire qu'un plus grand épuisement.

Bonaparte, qui fixait tous les regards, saisit l'avantage de cette tendance commune, et s'empressa de se rendre l'organe de l'opinion et du vœu général pour la paix. Accoutumé à se prendre dès l'abord aux dernières difficultés, il écarta les formes, négligea les convenances d'usage, et proposa directe

ment, et par une lettre publique au roi d'Angleterre, de traiter de la paix.

L'état intérieur de la France depuis le traité de Campo-Formio, les progrès de l'anarchie pendant le congrès de Rastadt, le suicide polititique des premières autorités, détruisant elles-mêmes l'illusion de leur illégale existence, l'iniquité de leur nouvelle agression, avaient servi à souhait les projets du ministère anglais, pour former une plus redoutable coalition. Tous ses efforts étaient justifiés d'avance; il avait aussi trouvé un ressort puissant dans le changement de système de la cour de Russie, et les dispositions de l'empereur Paul Ier à prendre une part active aux affaires du midi de l'Europe.

Mais les 'sentimens et les intérêts qui cimentaient l'alliance des deux cours impériales, et les avaient déterminées à entrer dans le nouveau plan de M. Pitt, et leur avaient fait accepter les subsides de l'Angleterre, avaient déjà perdu leur force; et quoique mieux servie par la fortune, cette seconde coalition fut dissoute plus ra

le

pidement que ne l'avait été la première. L'empereur Paul Ier n'avait été déterminé à prendre les armes par aucun intérêt d'agrandissement; il ne pouvait espérer un dédommagement équivalent à la perte longtemps irréparable de la meilleure partie de son armée, et aux frais immenses qu'il avait faits, et que ne couvraient point à demi les subsides de l'Angleterre. Persuadé que gouvernement républicain de la France était incompatible avec l'existence d'aucune monarchie en Europe, il croyait, comme souverain, devoir à sa sûreté, comme à celle de l'empire germanique, de faire tous ses efforts pour le détruire; ce prince avait cru que son exemple exciterait toutes les puissances méditerranées à former contre les Français une espèce de croisade; et lorsque dans les divers événemens de cette campagne très-glorieuse pour ses armes, malgré les revers qui les accablèrent, il aperçut que ces motifs de rétablissement d'ordre social de souveraineté légitime, de juste équilibre de puissance qu'on avait tant fait valoir

n'étaient que de vains prétextes, et que lui seul combattait pour le grand intérêt commun, il s'éloigna du tourbillon dans lequel il avait été entraîné. Le retour de Bonaparte, et les événemens qui le suivirent, justifièrent la prudente conduite du cabinet de Saint-Pétersbourg. L'empereur Paul était donc à cette époque, d'autant plus disposé à une pacification générale, qu'il n'avait voulu faire qu'une guerre générale.

La maison d'Autriche, que l'occupation de la Suisse avait justement alarmée, venait de s'assurer dans la Lombardieetle Piémont, une solide garantie pour les riches compensations qu'elle avait obtenues par le traité de CampoFormio, au prix de sa considération et presque de son influence dans l'empire; elle avait à la fin de cette campagne des gages suffisans pour conserver et peut-être pour étendre ses nouvelles possessions en Italie. Le sort des armes en avait décidé celles de ; l'Empereur et les talens de ses généraux avaient reçu beaucoup d'éclat par cette conquête, quoiqu'il fût juste de faire une meil

leure part de gloire à la défensive du général Moreau, et à la retraite du général Macdonald.

Cependant les avantages remportés par les armées impériales ne pouvaient être poussés plus loin sans un nouvel accroissement de forces, à moins que celles de la France ne tendissent encore plus rapidement à s'affaiblir; mais on devait au contraire présumer que la défection des Russes, ôtant aux armées impériales tout espérance d'entreprendre une agression générale, les armées françaises s'organiseraient, pour la troisième fois, sous un généralissime chef de l'état, dont le génie actif substituait un nouveau ressort à celui du fanatisme politique déjà presque usé : ainsi tout conseillait la paix à la cour de Vienne; et comme Bonaparte la proposait sur les bases du traité de Campo-Formio, on ne peut douter que la paix continentale n'eût été conclue à cette époque, si le cabinet de Londres n'avait redoublé d'efforts, prodigué les sacrifices pour l'empêcher. Depuis la ligue des deux cours impériales,

et

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