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portion d'artillerie dans les armées françaises et de cavalerie dans les armées impériales, avaient à la vérité forcé d'agrandir le théâtre; et, comme nous avons tâché de le démontrer, avaient changé presque toutes les anciennes données, tant sur l'importance de telle ou telle partie de frontière entre l'Allemagne et les Pays-Bas, entre la France et l'Italie, que sur la nature d'opérations militaires dont ces diverses contrées étaient susceptibles : mais les combinaisons d'attaque et de défense ne s'étaient point encore, avant cette campagne, étendues au-delà des grandes limites qui séparent le théâtre de la guerre de Flandre de celui du Rhin et celui-ci de l'Italie. N'était-il pas déjà prodigieux que les espaces qui avaient suffi aux Condé, aux Eugène, aux Montecuculi, aux Turenne aux Luxembourg, pour déployer, avec de grandes forces, tant de génie et d'activité; que les places, les postes, les obstacles qui avaient arrêté ou favorisé ces grands capitaines pendant plusieurs campagnes, fussent pour ainsi dire effacés de la nouvelle topographie militaire ?

Devait-on encore s'attendre à des efforts plus grands que ceux qui avaient été nécessaires pour prendre des positions, et livrer des batailles sur la surface entière d'un pays, sans avoir égard aux terrains, aux positions intermédiaires, mais seulement à l'importance des points occupés à de grandes distances sans contiguité; et comme s'il eût été convenu de marquer seulement par l'occupation des postes principaux le tracé idéal de ces immenses lignes? Cependant, ces déploiemens, ces marches, ces manoeuvres pour chercher à s'envelopper réciproquement aux extrémités de ces lignes, n'étaient pas encore le dernier terme de la progression.

Les grandes barrières posées par la nature entre les divers pays ayant été ouvertes, comme l'avaient été les frontières formées par des lignes, des enchaînemens de postes, et par le cours des fleuves, on parvint à faire mouvoir les grandes masses, et à les porter d'une frontière à l'autre, comme on avait porté dés corps à divers points d'une frontière pour en former une seule ligne.

Le but de ces vastes opérations n'était plus seulement de s'emparer d'une position, de faire tomber une placé importante en se portant au-delà du pays qu'elle couvre, et des communications qu'elle gêne; mais bien de forcer l'ennemi à évacuer à la fois tout un pays, en se hasardant soi-même à perdre une frontière entière par une seule chance, par un seul événement de guerre.

Les armées françaises avaient pour la première fois, et avec tant de succès, mis en pratique ce genre de guerre, offensive, que les Alliés furent forcés de l'adopter à leur

tour.

Les généraux de l'un et de l'autre côté ne cherchaient donc plus qu'à déborder et écraser un des grands appuis des ailes, afin de forcer l'ennemi à une retraite absolue.

Nous ne rappelons pas seulement ici une règle commune et applicable à la guerre depuis l'attaque du moindre poste jusques à celle de la position la plus importante, la mieux flanquée; mais nous voulons faire remarquer à nos lecteurs que les batailles ran

gées les plus sanglantes, livrées ou reçues dans des positions déterminées ; ces grandes victoires, qui auraient autrefois décidé du sort de la campagne, et peut-être du sort de la guerre, n'eurent d'importance qu'autant qu'elles se trouvèrent liées à l'ensemble d'une opération générale.

L'Archiduc et le maréchal Souwarow avaient éprouvé, le premier à la reprise de Luciensteig et au passage du Rhin, le second au passage de l'Adda, que les seuls succès décisifs dans ce genre de guerre ne pouvaient être que le résultat de grands mouvemens, d'une multiplicité d'affaires de postes, combinées, liées, soutenues par des forces assez supérieures pour pénétrer et envahir tout à coup, soit la totalité, soit au moins une partie considérable du théâtre de la guerre.

Mais si ce théâtre s'était trouvé trop resserré en 1794, pour les nombreux bataillons français, il était maintenant trop vaste pour les deuxarmées alliées de Suisse et d'Italie, qui, se trouvant l'une et l'autre arrêtées par des po

sitions formidables ( celle de Masséna devant Zurich, et celle de Moreau dans les Apennins), ne pouvaient, avant l'arrivée de nouveaux renforts, pousser plus loin la guerre offensive.

En effet, le général Souwarow avait, après la bataille de Novi, une trop grande supériorité pour rester en observation et laisser aux Français tout l'avantage de leur belle défense de l'état de Génes; et cependant cette supériorité n'était pas encore suffisante pour for. cer la tête de leurs retranchemens,.ou pour détacher des corps capables de percer par les divers passages des Apennins, pour les prendre à revers, et les obliger de quitter la place et la rivière de Génes.

D'un autre côté, l'Archiduc, qui (comme nous l'avons plusieurs fois répété, parce que c'est un point capital dans la discussion des opérations générales de cette campagne), n'avait pu soutenir contre les attaques du général Lecourbe sa gauche trop affaiblie, se trouva, au moment de l'arrivée des 26,000 Russes commandés par le prince Korsakow,

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