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cités par le parti d'Ibrahim-Bey, les géné raux Vial, Damas et Dugua les avaient dis sipés; le général Márat avait attaqué et presque détruit une horde d'Arabes. Le général Desaix venait de gagner, contre MouradBey, dans le Fayum, la bataille de Sediman, dans laquelle les Français combattant corps à corps avec les Mamelucks, firent des prodiges de valeur, et où le chef de brigade Robin et l'aide-de-camp Rapp se signalèrent. Mourad-Bey avait perdu, peu de jours auparavant, un convoi considérable de barques chargées de provisions pour les Mamelucks; le général Desaix lui avait aussi enlevé 6 pièces de canon, et l'avait enfin forcé de s'éloigner des bords du Nil, dont les inondations favorisaient ses retraites par des passages connus seulement des habitans du pays, et qui masquaient ses mouvemens. Repoussé vers les montagnes et vers la lisière du désert, Mourad-Bey n'avait pu échapper à l'activité du général Desaix, qui, dans cette dernière bataille, tailla en pièces l'élite des Mamelucks, et s'ouvrit la Haute-Égypte.

Telle était, vers le 15 octobre 1798, la situation des Français en Égypte, lorsque les notables, députés par les différentes provinces, se réunirent au Caire. Cette assemblée fut présidée par le chef Abdala Kezkaoni: Monge et Berthollet remplirent les fonctions de commissaires du gouvernement français. On y délibéra avec calme d'après l'initiative des commissaires, sur l'établissement et la répartition des impôts, sur l'organisation définitive des divans, sur les lois pénales et celles sur les successions, et sur divers objets de police générale et d'administration.

Tout paraissait tranquille et soumis aux vainqueurs; les peuples s'accoutumaient peu à peu aux nouvelles formes du gouvernement, lorsqu'on aperçut, dans la capitale, des indices d'une prochaine sédition. La révolte éclata tout à coup dans différens quartiers, et dans les environs de la ville du Caire, le 21 octobre au matin. Le général Dupuis, qui y commandait, s'étant hasardé avec une faible escorte à dissiper un des attroupemens, fut assassiné, ainsi que plu

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sieurs officiers et quelques dragons. De tous côtés les insurgés coururent sur les Français isolés, et égorgèrent tous ceux qu'ils purent atteindre; la maison du commandant du génie Caffarelli fut assiégée et forcée des ingénieurs qui s'y trouvaient s'y défendirent bravement, mais furent massacrés. On battit la générale; tous les Français s'armèrent ; Bonaparte fit entrer dans la ville plusieurs bataillons, et les dirigea sur les mosquées où les Turcs s'étaient retranchés comme dans des forteresses. Ils y furent attaqués avec toute la fureur de la vengeance, et se défendirent en désespérés. Le général d'artillerie Dommartin fit jeler des obus au milieu des groupes et dans les édifices d'où partait un feu violent sur les Français : la citadelle tira sur la ville, et principalement sur la grande mosquée, où quelques bombes portèrent l'effroi et le désordre : les portes furent enfoncées, etles Français firentun horrible carnage de tout ce qui tomba sous leurs mains. Le général fit sommer ces malheureux de livrer leurs chefs; ils s'y refusèrent, conti,

nuèrent à se battre avec une aveugle furie, et furent presque tous passés au fil de l'épée.

La journée du lendemain fut encore trèssanglante, et quelques Français dispersés et surpris ayant été tués, tous les Turcs que les soldats trouvèrent armés furent immolés: on évalua la perte des Français à trois cents hommes tués ou blessés plus de cinq mille Turcs périrent dans ces deux journées, et le troisième jour l'ordre fut rétabli dans la ville du Caire.

Quelques troupes d'insurgés espérant s'échapper, sortirent armés de la ville; mais ils furent poursuivis par la cavalerie, et ceux qu'elle ne put atteindre tombèrent entre les mains des Arabes.

On remarqua la coïncidence de ces mouvemens avec l'époque où la déclaration dé guerre de la Porte fut connue en Égypte, et avec l'apparition de quelques bâtimens turcs, dont la réunion à la division de la flotte anglaise qui bloquait les ports releva le courage et les espérances des partisans de

l'ancien gouvernement; dans presque toutes les villes on aperçut des instigations à la révolte, et l'on présuma que les chefs de la religion, d'intelligence avec les Mamelucks, l'avaient fomentée : on fit de sévères recherches dans les maisons des Turcs, et on trouva plusieurs Mamelucks cachés ou travestis ils furent mis à mort.

La répression de cette émeute, qu'une fureur aveugle et téméraire avait pu seule exciter, acheva d'affermir le pouvoir de Bonaparte; il avait triomphé des Mamelucks et renversé leur gouvernement; mais en exterminant les rebelles du Caire, il détruisit leurs dernières espérances; les Musulmans furent subjugués : ils sentirent tout le poids des armes françaises, et se montrèrent depuis résignés, et même dociles. Les Grecs, qui jusque-là n'avaient pris aucune part dans la cause des Français, se rangèrent de leur côté, et attaquèrent les Turcs; l'insurrection fut pour eux une époque d'affranchissement; et si, pour ce moment, cette nation avilie par un long esclavage ne devait

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