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les soupçons du ministère anglais s'y attachassent de préférence. Après avoir plusieurs fois répandu et démenti les bruits de son retour à Rastadt pour l'accélération et la conclusion des négociations, on fit publier par les feuilles officielles du 12 au 13 germinal an 6

au 2 avril 1798), l'arrêté du Directoire qui ordonnait au général Bonaparte de se rendre à Brest, pour y prendre le commandement des forces de terre et de mer, dont il avait fait une première inspection. Bientôt après on annonça par la même voie qu'il partait décidément pour Rastadt: Bonaparte écrivit lui-même au comte de Cobentzel pour, l'inviter à se rendre à Rastadt, afin d'y travailler de concert avec lui à aplanir toutes les difficultés. Le courier repartit de Vienne le 10 mai avec la réponse du ministre impérial qui devait se rendre à Rastadt le 14, et Bonaparte arrivait dans ce moment même à Toulon. On crut à Vienne qu'il avait eu réellement l'intention de se rendre à Rastadt, et qu'il ne s'était décidé à partir et à poursuivre son plan qu'au dernier moment,

et par des considérations relatives à l'élat intérieur de la République et à la coalition de la majorité des membres du Directoire avec les Jacobins de l'opposition.

La flotte de Toulon réunie était composée de 15 vaisseaux de ligne, 6 frégates, 8 flûtes, quelques corvettes; et le convoi était d'environ 350 bâtimens de transport: 25,000 hommes de différentes armes et dans le meilleur état, furent embarqués avec la plus grande précipitation. L'impatience des troupes et des équipages était extrême, et les généraux contenaient avec peine le mécontentement et les murmures du soldat, lorsque la présence de Bonaparte rétablit la confiance et releva les esprits.

Ce fut une époque très-remarquable que celle où la France respirant à peine et se livrant à l'espoir de la paix, ayant à réparer tant de sacrifices, et la substance qu'elle avait dissipée dans sept campagnes, vit expor ter de son sol les ressources les plus précieuses qu'on eût pu recueillir dans les départemens méridionaux et en Italie, soit en hommes,

soit en argent, soit en munitions de toute espèce.

Le général Berthier avait fait pendant son séjour à Rome, les premiers apprêts de l'embarquement d'une division à Civita-Vec chia et dans quelques autres ports. Le général Desaix se rendit en Italie pour en prendre le commandement, et dut mettre à la voile de Civita-Vecchia en même temps qu'une autre partie du convoi, dont l'armement et l'embarquement furent dirigés par le général Murat, et qui se trouvait sous les ordres immédiats du général Baraguay d'Hilliers, partit de Gênes : la réunion dut se faire à la mer.

Il y eut beaucoup d'accord et de précision entre les divers points d'embarquement, résultats qu'on obtient difficilement dans ces sortes d'opérations; tout était prêt vers le 15 mai.

Le moment où le général Bonaparte se rendit avec l'amiral Bruix à bord du vaisseau l'Orient, de 110 canons, et y arbora le pavillon, fut aussi celui des dernières lueurs

de la paix : non, qu'il ne fût temps encore de prévenir une rupture et de profiter même de la disposition de la cour de Vienne à donner une satisfaction à la République, à cause du désordre commis par le peuple de Vienne au palais de l'ambassadeur Bernadotte; mais déjà l'Angleterre, impolitiquement exclue du congrès de Rastadt, menacée de perdre l'Irlande déjà presque entièrement soulevée, avait fait avec succès les plus grands efforts pour former, par l'entremise de la Russie, une nouvelle coalition. La négociation de M. Cobentzel, qui, vis-à-vis de Bonaparte, aurait pu, par l'explication et la sanction des articles les plus importans du traité de Campo-Formio, conduire à des résultats satisfaisans, ne fut à l'égard de l'ex-directeur François de Neufchateau que le masde l'alliance offensive et défensive entre

que

les deux empereurs.

Quelque favorables que fussent alors au nouveau plan de l'Angleterre l'opinion et les sentimens particuliers de l'empereur de Russie, il fallait cependant que sa situation

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politique vis-à-vis de l'empire ottoman lui inspirât une assez grande sécurité pour qu'il osât dégarnir ses frontières méridionales, et porter aux extrémités de l'Europe la meilleure partie de cette armée, devenue depuis trente ans si redoutable aux Turcs. Il fallait aussi rétablir la paix entre la Russie et la Perse, parce que cette guerre ne pouvait qu'entraîner à des hostilités avec les sujets du Grand-Seigneur. Cette paix fut conclue à peu près vers cette époque à Tefflis, capitale de la Géorgie persane; les conditions du traité, dont la principale fut la restitution des conquêtes faites par les armées russes à l'ouest de la mer Caspienne, prouvèrent que l'empereur de Russie voulait au prix de ces sacrifices, disposer promptement de ses armées pour servir la nouvelle coalition. On était si loin encore d'avoir rassuré les Turcs, et de les avoir disposés à cette étrange alliance, que le corps de 20,000 Russes qui fut laissé au bord du Kur, sur la limite qui sépare les empires de Perse et de Russie, donna de l'ombrage à la Porte

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