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8°. Le fecond fous-directeur du premier directeur de la guerre, les officiers généraux, les infpecteurs aux revues, les commiffaires des guerres, les récompenfes & penfions militaires follicitées, la revifion des jugemens militaires.

9°. Le premier chef de bureau du fecond fousdirecteur du premier directeur de la guerre, la gendarmerie, les mouvemens & les déferteurs.

10°. Le fecond chef de bureau du fecond fous

directeur, &c. les officiers de fanté, les vétérans, es invalides, pensions & récompenfes follicitées.

11°. Le troisième chef de bureau du fecond ous-directeur, &c. les prifonniers de guerre, eur échange, leurs déferteurs, les écoles miliaires & celles vétérinaires.

12°. Le fecond directeur de la guerre (le maériel), le rapport au miniftre de toutes les paries de fa direction & la fignature de tout ce qui ura été apostillé par le miniftre, & où sa fignaure ne fera pas nécessaire.

13° Le premier fous- directeur du fecond diecteur de la guerre, le contrôle-général des troues, les revues & les confeils d'administration.

14. Le premier chef de bureau du premier ous-directeur du fecond directeur de la guerre, a folde, les maffes, la comptabilité des corps. 15°. Le fecond chef de bureau du premier fousirecteur, &c. l'artillerie, fes équipages, fes cheaux, les ponts de guerre, les arfenaux, les armes e toute nature les poudres & falpêtres, & les ortifications.

16°. Le troisième chef de bureau du premier ous-directeur, &c. les hôpitaux, leur ameulement, approvifionnemens, équipages des amulances en campagne.

17°. Le fecond fous directeur du fecond diecteur de la guerre, les fubfiftances, l'habilement & les approvifionnemens de tous genres.

18°. Le premier chef de bureau du fecond fouslirecteur du fecond directeur de la guerre, l'habillement, grand & petit équipemens & cafernenent, bois & lumières, approvifionnemens des places, campemens, &c.

19°. Le fecond chef de bureau du fecond fousdirecteur, &c. pain, viandes, légumes, fourrages, paille de couchage, &c.

20°. Le troifième chef de bureau du fecond Tous-directeur, &c. tranfports & convois militaires, remontes, enharnachement, panfement, ferrage, &c. étapes, &c.

21°. Le troifième directeur de la guerre (les fonds), travail avec le miniftre pour fa partie, le détail de tous les fonds du département, &c.

22°. Le premier chef de bureau du troisième directeur de la guerre, dépenfes courantes & extraordinaires.

23°. Le fecond chef de bureau du troifième directeur de la guerre, les indemnités, le compte général du département, l'arriéré, &c.

24°. Le troifième chef de bureau du troifième directeur de la guerre, la liquidation.

D'après tous ces développemens & ces détails, il y auroit vingt grands bureaux pour toutes les parties de la guerre; mais les trois chefs de bureaux qui fe trouveroient fous chacun des quatre fous-directeurs des deux premiers directeurs de la guerre, & les trois qui fe trouveroient fous le troisième directeur, pourroient avoir des fouschefs fi la fous divifion & le nombre des affaires

l'exigeoient, néanmoins en fuppofant même un plus grand nombre de commis que l'on ne croit néceffaire d'en employer dans chaque partie: on croit pouvoir affurer qu'il feroit trop nombreux d'avoir :

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265 perfonnes, qui, à 3000 f'. l'une dans l'autre, exigeroient une fomme de 800,000 f.; nous la fuppofons d'un million, afin de former une caiffe de gratifications, penfions ou fecours pour les employés infirmes, malheureux ou ayant fait des travaux extraordinaires; & dans le moment où nous écrivons, cette partie coûte environ deux millions, & elle emploie près de fix cents perfonnes.

Nous ne nous étendrons pas davantage sur ce qui regarde le ministère de la guerre : nous avons cru en dire beaucoup & même fuffifamment, en défignant quels devoient étre les coopérateurs du miniftre, foit comme confeillers, foit comme directeurs de la guerre, & ceux de ces derniers, comme fous-directeurs, premiers chefs de bureaux, fous chefs, commis, furnuméraires, &c.; enfin, en divifant & fous-divifant tous les objets qui regardent le ministère, & en défignant de quelle manière ils doivent être répartis.

MODESTIE. On a mis la modeftie au nombre des vertus morales; mais fi elle doit être admirée quelque part, c'eft fans doute dans un général ou un officier particulier qui vient de fe couvrir de gloire par une grande victoire ou par quelqu'action d'éclat. Nous allons nous aider de l'hiftoire, pour mettre fous les yeux de nos lecteurs des exemples de la modeftie de quelques grands capitaines anciens & modernes : ce iera fans doute un moyen puiffant pour faire fentir l'importance de cette vertu, furtout dans l'état militaire, où la modeftie eft d'autant mieux placée, que la gloire que l'on y acquiert, eft due au concours d'une multitude infinie de caufes; les circonftances, les en

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nemis, des hazards heureux, le fecours d'une grande multitude d'individus, le talent de faifir à propos l'occafion qui fe préfente; celui quelquefois de la faire naître, &c.

Ariftide & Miltiade ayant été nommés par les Athéniens, pour conminder alternativement, Ariftide, reconnoiffant le mérite fupérieur de fon collégue, quoiqu'il en eût beaucoup lui-même, lui ceda fon droit au commandement; exemple de modeftie bien rare, & qui eut les fuites les plus heureuses.

Le conful Gelius, fous lequel fervoit Caton d'Utique, lui offrant des récompenfes militaires, il les refufa, jugeant qu'elles ne lui étoient pas encore dues.

Après la bataille de Pydme, Paul Emile, voyant Perlée humblement à fes pieds, le confola de fa difgrace, & adreffant la parole aux Romains qui l'environnoient, il leur dit : Vous voyez devant vos yeux un exemple frappant de l'inconftance des chofes humaines; convient-il, après cela, quand nous jouiffons de la profpérité, de traiter qui que ce foit avec hauteur & avec dureté, puifque nous ignorons le fort qui nous attend à la fin du jour? Celui-là feul fe a véritablement homme, dont le cœur ne s'enflammera point dans la bonne fortune ni ne s'abattra dans la mauvaise.

Germanicus, après avoir remporté une célèbre victoire, fit élever fur le champ de bataille un trophée avec cette infcription: L'armée de Tibère-Céfar, après avoir dompté les peuples qui font entre le Rhin & l'Elbe, confacre ce monument à Mars, à Jupiter, à Augufte.

Agrippa, après les plus grands fuccès, refusa Jes honneurs du triomphe.

On n'entendit jamais Agricola, dit Tacite, faire trophée de fes exploits ni fe les approprier; il difoit au contraire qu'ils étoient l'ouvrage du géneral; ainfi, joignant la modeftie aux fervices, il échappoit à l'envie & n'en partageoit pas moins la gloire.

de Troye, fon orgueil, s'il régnoit en vous, dátruiroit tout.

Le chevalier eft raviffeur du bien d'autrui, qui les vaillances d'autrui tait; & celui eft réputé vanteur, qui révèle les fiennes.

Après la mort de Duguefclin, Charles V flottoit pour remettre l'épée de connétable, entre Olivier de Cliffon, le maréchal de Sancerre & le feigneur de Couci. Celui-ci s'en excufa, & dit que mefire Olivier de Cliffon étoit plus fuffifant que nul pour en être revêtu: une égale modeftie empêcha Sancerre & Cliffon d'accepter cette épée, qu'ils ne croyoient plus invincible, portée par un autre que par Duguefclin.

Lorfque Charles VII offrit l'épée de connétable au duc de Richemont, celui-ci s'immortalifa par un refus généreux. La France, dit-il, a encore des héros, & je ne fuis qu'un foldat le roi fut oblige d'ufer d'autorité pour vaincre cette modeftie.

Après la bataille des Dunes, le maréchal de Turenne écrivit fimplement à fa femme: Les ennemis font venus à nous; ils ont été battus: Dieu en foit loué ; j'ai un peu fatigué toute la journée; je vous donne le bonioir & je vais me coucher.

Pendant le fiége de Turin par Lafeuillade, Louis XIV, voyant qu'il n'avançoit point, con fulta Vauban, qui offrit d'aller conduire les tra vaux. Mais, monfieur le maréchal, fongez-vous que cet emploi eft au deffous de votre dignité! Sire, ma dignité eft de fervir l'état; je laifferai le bâton de maréchal à la porte, & j'aiderai peutêtre le duc de Lafeuillade à prendre la ville.

Après la bataille de Stafarde, M. de Catinat, dans la relation qu'il envoya, oublia entiérement la part qu'il avoit eue à la victoire. Quand cette relation fut publique, on fe demandoit, en la lifant, fi M. de Catinat étoit à la bataille.

M. le prince, en venant prendre le commandement de l'armée de M. de Turenre, qui venoit d'être tué à la bataille de Salsbach, dit ces paroles pleines de modeftre, qui faifoient fi bien l'e

je converfer un quart-d'heure avec fon ombre!

M. le duc d'Orléans, écrivant au roi après la bataille d'Almanza, s'exprima ainfi : « Je ne puis >> m'empêcher de dire à fa majefté, que fi la gloire "de M. de Berwick eft grande, fa modeftie ne » l'eft pas moins, ni fa politeffe pour moi, qui

Une des vertus que l'on recommandoit le plus aux anciens chevaliers, étoit la modeftie. Les pré.loge du maréchal & celui du prince: Que ne puisceptes de la chevalerie leur apprenoient qu'un extérieur fimple & modefte eft le plus propre à rehauffer l'éclat de la victoire. Un chevalier, n'en doutez pas, doit férir haut & parler bas, lui avoitelle appris dans la fimplicité de fon langage. Souvent elle lui avoit donné cet avis, que l'on ne peut trop répéter à la jeuneffe guerrière : Soyez toujours le dernier à parler dans les affemblées des gens plus âgés que vous, & le premier à frapper dans les combats; enfin, vous ne pouvez trop vanter les autres & trop peu parler de vous

mê ne.

Si l'écuyer a vaine gloire de ce qu'il fait, dit un ancien auteur français, il n'eft pas digne d'être chevalier; car vaine gloire eft un vice qui détruit & anéantit les mérites & les guerdons ou bénéfices de la chevalerie; comme le preux Hector,

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l'engageoit quafi à vouloir s'excusfer fur ce que » les ennemis l'avoient attaqué, d'avoir remporté » fans moi une victoire auffi complète & auffi fignalée que celle-ci. »

Après une grande victoire remportée par le marquis de Montcalm en Amérique, le vainqueur eut la modeftie de mettre dans la relation, qu'il n'avoit eu que le mérite d'être le général de troupes très-valeureufes.

MŒURS. On a diftingué, ce femble, dans la

première Encyclopédie, avec beaucoup de fagacité, les manières & les mœurs. Les moeurs, y dit-on, font l'intérieur de l'homme : les manières en font l'extérieur. Les manières doivent donc être un des objets de l'éducation, & peuvent être établies même par des lois, auffi fouvent pour le moins que par des exemples. Etablir les manières par les lois, ce n'eft que donner un culte à la vertu.

Les Français, dit M. Duclos, font ce qu'ils étoient du tems des croifades: une nation vive, gaie, généreufe, bonne, fière, présomptueufe, inconftante, avantageufe; elle change de modes & non pas de moeurs. Les manières ont fait autrefois pour ainfi dire partie de fes lois. Le code de la chevalerie, les ufages des anciens preux, les règles de l'ancienne courtoifie, ont eu pour objet les manières; elles font encore en France, plus que dans tout le refte de l'Europe, un des objets de cette feconde éducation qu'on reçoit en entrant dans le monde, & qui trop fouvent s'accorde très-peu avec la première.

Un des effets principaux des manières, c'est de gêner en nous les premiers mouvemens: elles otent l'effor & l'énergie à la Nature; mais auffi, en nous donnant le tems de la réflexion, elles nous empêchent de facrifier la vertu à un plaifir préfent, c'eft-à-dire, le bonheur de la vie à l'intérêt d'un moment on doit donc apprendre à contraindre fouvent la Nature. Il est bien rare que celui qui, pour de légers intérêts, fe met au deffus des manières, pour un grand intérêt ne fe mette au deffus des mœurs.

&

Les manières, comme corporelles, & parlant aux fens & à l'imagination, font fenfibles, voilà pourquoi elles furvivent aux mœurs; ainfi voit-on, chez tous les peuples, fubfifter d'anciens d'ufages, quoique les motifs qui les ont établis, ne fubfiftent plus.

Nous regarderons donc comme mœurs d'une nation, fes coutumes & fes ufages, qui influent fur la manière de penfer, de fentir & d'agir, ou qui en dépendent, & fous ce point de vue les mœurs tiendront prefqu'entiérement aux manières.

Ainfi, pour revenir au fujet qui nous occupe, fans nous arrêter à prouver une vérité reconnue de tout le monde, que les mœurs font peut être plus néceffaires à la claffe des citoyens foldats, qu'à toutes les autres, nous nous bornerons à faire fentir combien il feroit effentiel de s'occuper, dans les nouvelles lois fur la difcipline militaire, à créer des habitudes heureufes par des manières qui conduisent pour ainfi dire malgré eux les défenfeurs de la patrie à avoir des mœurs on y réuffiroit peut-être avec d'autant plus de facilité, qu'en appelant indiftinct ment les citoyens de toutes les claffes à porter les armes, en les tenant très-peu de tems réunis fous les drapeaux en tems de paix, en leur permettant de fe marier, d'après l'avantage dont ils jouiroient d'être raf

femblés feulement quelques décades chaque année, afin de s'exercer; en foumettant les officiers, les fous-officiers & les foldats qui rettefroient au corps, à affifter régulièrement aux inftructions morales qu'on devroit leur donner, & à profiter des leçons de théorie & de pratique fur l'art de la guerre, dont on feroit le principal objet de leur occupation journalière, on réuffiroit d'abord à éloigner de l'oifiveté, mère de tous les vices, les hommes voués à la défenfe de la patrie, obligés de paffer une partie de leur vie fous les drapeaux ; on les habitueroit enfuite plus facilement à des manières qui, en les rendant plus. refpectables aux autres, leur donneroient d'eux un fentiment qu'ils feroient bien aifes de conferver. Quant aux foldats réunis quelques décades. chaque année, comme chaque jour ils feroient exercés à tous les détails de la petite, de la grande tactique & de la ftratégie, forcés d'être entiérement livrés aux manières militaires, ils n'auroient certainement ni le tems ni l'envie de fe livrer à aucune action contraire aux bonnes mœurs, & en rentrant dans leur famille ils n'auroient qu'à y jouir du plaifir de revoir ou de ferrer dans leurs bras, ou des parens chéris, ou une maîtreffe adorée, ou une femme & des enfans bien tendrement aimés.

Il faut donc en convenir fans ceffe: plus on fai de recherches fur les moyens de perfectionnemens, foit moraux, foit phyfiques, de l'art militaire & de fes agens, & plus on eft forcé de fe convaincre que tout doit dépendre d'une nouvelle conftitution militaire, dans laquelle on ramènera avec foin le défenfeur de la patrie à tous les devoirs & à tous les droits du citoyen; car ifoler, comme on l'a fait jufqu'à préfent, l'homme de guerre de la fociété, c'eft travailler à n'avoir pour défendre la patrie, ni véritables foldats, ni patriotes, ni citoyens.

MONTAGNES (GUERRE DANS LES MONTAGNES). La guerre de montagne eft très-difficile, & fort dangereufe quand elle est mal conduite; elle offre, à chaque pas, des variétés de terrein & des obftacles qui fourniffent une infinité de reffources; mais pour les mettre à profit, l'expérience feule ne fuffit pas; il faut encore les qualités les plus extraordinaires, comme un grand fens, un génie rufé & entreprenant, une théorie profonde & une parfaite connoiffance du pays. La guerre des montagnes eft avantageuse à une petite armée bien difciplinée, contre une plus nombreuse, qui devient quelquefois embarraffante, & perd prefque toute fa fupériorité visà-vis de l'autre, furtout lorfqu'il y a peu de pa

fages à garder.

La moindre démarche inconfidérée vis-à-vis d'un ennemi actif, intelligent, & qui connoît bien tous les débouchés, vous jette dans des

embarras fans nombre, & peut vous faire effuyer les plus grandes pertes.

Un général médiocre peut conduire une offenfive; mais pour la défenfive, il faut les plus grands talens, une prévoyance fans bornes & un efprit extraordinairement jufte, & même avec ces qua

La cavalerie n'eft pas d'un grand ufage dans les montagnes, excepté dans les vallées qui s'élargiffent à leurs embouchures & qui donnent danslités (à moins qu'il n'y ait qu'un paffage à gar\ les plaines.

Toutes les opérations de guerre dans les montagnes font en général fort difficiles, & on eft expofé à y faire les plus grandes fautes fi l'on n'a une connoiffance parfaite du pays: il feroit important de le reconnoître foi-même ; mais lorfque cela eft impoffible, il faut le faire reconnoître par d'autres, & rechercher tous les renfeignemens qu'on peut fe procurer: joignez aux cartes & aux mémoires les plus détaillés, le rapport des habitans du pays, furtout des chaffeurs & des bergers, qui les connoiffent ordinairement mieux que les autres, & qu'il fera facile de vous attacher en les récompenfant.

On diftingue trois fortes de vallées. On nomme fimplement vallées, celles qui fervent de lit à des torrens, & qui ont des côtés, des iffues libres; détroits, celles où les torrens prennent leur fource; & gorges, celles qui sont refferrées entre deux montagnes, fans renfermer de plaines ni de

torrens.

Les cols font des paffages très-étroits.

der) il eft impoffible d'échapper aux marches & aux manoeuvres d'un ennemi vigilant qui vous tient divifé & fans ceffe en échec dans tous vos poftes, & qui finira par en tourner quelques-uns & pénétrer dans le pays que vous couvrez ; ce qui eft d'autant plus à craindre, qu'il n'y a point de montagnes, quelqu'impraticables qu'elles pa roiffent, qui n'aient des revers, & fi un homme peut y paffer, dix mille y pafferont le meilleur moyen eft de tourner la défensive en offenfive des que l'occafion s'en préfente: un général qui a la confiance du gouvernement, doit avoir la permiflion d'agir, à cet égard, d'après les circons

tances.

S. Ier.

Marches dans les montagnes.

Si vous avez à traverser un pays de montagnes fans traité qui vous en affure le paffage, le secret, le bon ordre & la diligence font les feuls moyens d'empêcher les habitans de s'affembler affez en foree pour vous le difputer.

Ayez de bons guides, renvoyez-les fatisfaits, pour engager ceux qui leur fuccèdent, à être fidèles.

Ayez une avant-garde confidérable, composée de troupes légères à cheval & à pied, & de plufieurs compagnies de grenadiers: partagez-la en trois corps, qui fe tiendront un peu éloignés les uns des autres, & de manière qu'ils fe communiquent par leurs détachemens refpectifs. Le plus avancé de ces corps occupera les paffages importans où il attendra l'armée; s'il a une ou deux marches en avant, & qu'il ait rencontré des dé

Un général habile, chargé de faire une guerre de montagne, doit fentir que le fuccès dépendra de la foupleffe de fes mouvemens & des rapports immédiats qu'ils auront avec la nature du pays : c'eft pourquoi il ne doit régler l'état de la guerre que d'après les connoiffances qu'il a pu acquérir fur cet objet & fur le caractère du général ennemi; il ne doit jamais perdre de vue Les lieux & les poftes, puifque ce n'eft que d'après leurs avantages ou leurs inconvéniens qu'il doit former fes deffeins & calculer fes reffources dans telles ou telles circonftances; il doit pouffer auffi loin que poffible, & même jufqu'à la certitude, fes fpéculations, afin que la pratique n'ap-troits, pas ou torrens difficiles à paffer, il aura porte aucun changement quand il s'agira d'exécuter; il faut prévoir les événemens futurs & connoître la portée des mouvemens, au point de pouvoir diftinguer ceux que l'ennemi confidérera com. me des piéges, de ceux dont il fera la dupe.

Il faut cependant convenir que la guerre de montagne donne un avantage que ne procurent point les autres guerres; c'eft de pouvoir être affuré des lieux où l'ennemi campera, de la nature de ceux qu'il traverfera dans fa marche; ce qui met à même de juger à peu près de l'objet d'une démarche quelconque: il faut donc combiner tous fes deffeins de manière que leur exécution en indique d'autres oppofés, en totalité ou en partie, à ceux que l'on médite réelle

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dû y laiffer un détachement pour prévenir ou chaffer les pay fans ou les troupes qui voudroient le garder, ou s'y retrancher avec des abat's ou autrement. En un mot, établissez-vous partout où vous mettrez le pied, & affurez-vous des paffages importans, aufli loin qu'il vous fera pol fible.

Réglez toujours l'ordre de marche du gros de l'armée, de manière à pouvoir lui faire prendre fucceffivement la difpofition la plus relative aux lieux qu'elle parcourt, & que les différentes armes fe prêtent un appui réciproque : un des meilleurs moyens d'y parvenir eft de faire marcher les bataillons & les efcadrons alternativement, & d'augmenter le front quand le terrein le permettra. Réuniflez les équipages de chaque corps quand le pays s'ouvrira, rempliffez-le autant que vous le pourrez; faites marcher l'infanterie des deux côtés sur la croupe des montagnes, fi elles font

acceffibles; les colonnes d'infanterie s'approche-
ront du sommet autant que poffible; ayez une
rrière-garde compofée de la tête de vos troupes;
enfin, réglez vos précautions felon vos craintes,
e pays & les circonstances. Pour marcher fûre-plateaux que forment les montagnes.
ment dans les montagnes il faut être affuré, auffi
oin qu'on le pourra, du pays dont on eft envi-

près, la cavalerie qui charge en montant, a tou-
jours l'avantage fur celle qui defcend.

Il eft par conféquent plus avantageux pour la
cavalerie, d'attendre l'ennemi sur la crête ou les

onné.

§. II.

Des actions dans les montagnes.

Les actions dans les montagnes font ordinaiement meurtrières, peu décifives & rarement enérales; elles ne confiftent guère que dans de etits combats, fur lefquels on ne peut donner ucuns préceptes particuliers: tout y dépend du errein & des circonftances. L'ennemi peut, quand le juge à propos, choifir un terrein refferre, & endre par-là votre fupériorité inutile; car il est npoffible de lui oppofer un front plus étendu ue celui qu'il vous préfente: on doit obferver ue l'on ne doit attaquer l'ennemi de front que uand il n'y a point d'autre parti à prendre: il ut donc toujours faire en forte de le tourner, ais furtout quand on eft obligé de le combattre ans une fituation de difficile accès. Il faut auffi viter les attaques de bas en haut, qui paffent our défavantageufes; enfin, pour avoir la fupéorité fur l'ennemi, il faut toujours occuper les auteurs qui le dominent, ou qui le voient de reers ou en flanc: les reffources font infinies pour armée vaincue, & fa retraite eft affurée fi, ce qui oit toujours être, elle a fait occuper par des pofs les hauteurs fituées fur les derrières & à l'enée des vallées. Quand même l'ennemi s'empareit de ces poftes, la crainte de tomber dans des nbufcades l'empêcheroit de pourfuivre bien loin vaincu; s'il le faifoit, les détours dans des cheins étroits & bordés de précipices pourroient ientôt faire changer la chance, en fuppofant que vaincu en fût profiter.

Lorsqu'on veut combattre dans une plaine refrrée, il ne faut pas fe former fur beaucoup de gnes, mais fur deux feulement & une réferve. On eut donner à chacune de ces deux lignes, beauoup de profondeur : à l'inftant du choc de la pretere avec celle de l'ennemi, la feconde doit pafer par les intervalles, & tâcher d'aller attaquer <renverser la feconde de l'ennemi : fi cela réuffit, omme cela eft poffible, les autres lignes de l'enemi feront bientôt renversées.

L'avantage d'attendre un ennemi fur une hautur, n'en eft un que pour l'infanterie, qui, dès qu'elle eft à portée de celle de l'ennemi, peut ondre fur elle avec une force de choc que la pente favorife, en raifon de fa roideur. A l'égard de la cavalerie, c'est tout le contraire, les chevaux ayant plus de force en montant qu'en defcendant. On a remarqué que, à nombre égal ou à peu

Il faut ranger l'infanterie fur les hauteurs, avec des diftances entre les bataillons, affez grandes pour qu'on puiffe y faire paffer un ou deux efcadrons, qui fondront fur l'ennemi dès qu'il fera arrivé sur le plateau, & à cinquante ou foixante pas de l'infanterie.

S. III.

Des retranchemens dans les montagnes.

Une armée retranchée fur une hauteur a moins d'avantage qu'on ne le croit, fur celle qui l'attaque. Beaucoup de militaires ont pensé & pensent encore le contraire : ils allèguent qu'en allant attaquer l'ennemi ainfi pofté & retranché, on eft vu par lui de la tête aux pieds. Cette raifon n'eft pas jufte, car les foldats enfermés derrière des retranchemens élevés, font obligés, pour viser en bas, de s'élever beaucoup au deffus du parapet; ce qui les découvre la plupart n'ofant pas le faire, tirent très-vîte fans vifer, & les coups portent ordinairement ou trop haut ou trop bas; ce qui rend le feu peu redoutable. La feule occafion qui peut le favorifer, c'eft lorfque la pente de la hauteur fur laquelle les retranchemens font contruits, eft affez rapide pour qu'il foit poffible aux derniers rangs de tirer par-deffus les premiers.

S. IV.

De l'attaque des retranchemens dans les montagnes.

On attaque ordinairement une armée retranchée en plaine auffitót qu'on arrive en préfence; mais fi elle eft fur des montagnes de difficile accès, hériffées de rochers & coupées de ravins, il faut n'agir qu'avec les plus grandes précautions.

Avant de vous déterminer à l'attaque, faites reconnoître la nature du terrein que vous devez parcourir pour aller à l'ennemi, les hauteurs qui le dominent, la fituation de fes retranchemens & leur force. Comme une reconnoiffance de cette nature n'eft pas aifée à bien faire, il faut que ceux qu'on en charge, aient une expérience confommée et le coup-d'oeil de la plus grande jufteffe. Comme il peut être très-difficile, même de nuit, d'approcher des poftes de l'ennemi fans courir les rifques de fe faire prendre ou tuer, envoyez-en plufieurs & comparez leurs rapports: joignez-y celui des déferteurs & des prifonniers, dont vous ferez un auffi grand nombre qu'il vous fera poffible.

C'est d'après toutes les connoiffances que vous aurez acquifes relativement à votre projet, que

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