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» pas parfaitement égal, foit que l'on marche en » terrein uni, que l'on monte ou que l'on def» cende;

"3°. D'avoir l'attention de maintenir la colonne » dans la ligne la plus droite que l'on peut, parce » que toute colonne qui ferpente, s'alonge;

כל

4°. D'obferver que les mouvemens de con» verfion que les finuofités des chemins obligent » de faire, s'exécutent fans perdre de diftance;

» 5o. Lorsqu'une colonne d'armée marche par » peloton, qu'il faut dédoubler fon front, les » Pruffiens font préalablement former la colonne » de manoeuvre, & le dédoublement s'exécute » avec le plus grand ordre. On doit obferver que » la colonne de manoeuvre ne diffère de la co»lonne de route qu'en ce que, dans la colonne » de route, le foldat marche à rangs ouverts & • portant le fufil à volonté ; au lieu que, dans la » colonne de manoeuvre, la troupe marche du » même pied, à rangs ferrés & portant l'arme à » l'épaule ;

כל

6°. Lorsqu'il faut réduire le front à fix hom» meş, la colonne n'occupe encore, de tête à » queue, qu'autant de terrein qu'elle en occupoit » en bataille, parce qu'entre chaque fection il refte l'espace néceffaire pour faire marcher deux » rangs avec facilité ;

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7°. L'on a foin que les diftances foient toujours fcrupuleufement obfervées entre chaque fubdivifion; que le foldat ne fe détourne pas » pour éviter la boue ou les flaques d'eau qui ne "font pas profondes, & que la colonne ne foit pas embarraffée ni coupée par des chevaux. L'on fait marcher le canon & les caiffons fur » deux & trois de front lorfque le terrein le » permet;

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S. III.

Des marches.

Les marches peuvent être confidérées comme divifées en marches de détachement & en marches d'armée : les officiers fubalternes dirigent les premières, & les généraux les fecondes.

Quoique les marches qu'un officier fubalterne eft dans le cas d'exécuter, aient beaucoup de chofes communes avec celles que les généraux dirigent, elles ont cependant plufieurs principes qui leur font particuliers: nous allons nous en occuper, monsieur Keralio ayant développé l'art de la marche des ar mées dans le mot MARCHE, de ce Dictionnaire, dont ce volume eft le fupplément.

S. IV.

Des marches dirigées par les officiers particuliers.

Un détachement qui va exécuter une marche, doit être divifé en trois parties: en avant-garde, en corps de bataille & en arrière-garde.

Quand on eft affuré de fes derrières, l'avant-garde doit être plus forte que l'arrière -garde; quand on craint pour fes derrières, c'eft l'arrière-garde qui doit être la plus forte; l'avant & l'arrière-garde ne doivent confumer enfemble qu'environ le tiers du détachement.

Dans la plaine, l'avant & l'arrière-garde doivent être fournies par la cavalerie; dans les pays cou verts & montueux, par l'infanterie; dans les pays coupés, par l'infanterie & la cavalerie réunies au défaut de cavalerie on choifit, pour l'avant & l'arrière garde, les hommes les plus vigoureux & les plus leftes.

L'avant-garde doit être divifée en deux parties, en corps d'avant-garde & en découvreurs. (Voyez, relativement à la conduite des découvreurs, l'article confacré à ce mot.)

Le commandement de l'avant-garde d'un déta chement en marche fera donné à un officier ou à un fous-officier intelligent, ferme & prudent; cet officier fe conformera aux principes établis dans le mot AVANT-GARDE de ce Supplément.

8°. Lorfque des chemins exceffivement étroits (tels font ceux que l'on trouve dans les mon»tagnes) obligent à monter trois de front, fi le paffage eft court la colonne marche par le flanc à » files ferrées, l'arme à l'épaule & le pas cadencé ; » 9°. Si l'on eft obligé de filer par deux ou par un, ce qu'on ne fait que dans la plus grande » néceffité, on défile avec le plus grand ordre, » la troupe fe reforme à mesure qu'elle arrive au» delà du défilé; la tête de la colonne fe porte en » avant l'efpace néceffaire, & attend que la queue »fe foit reformée au-delà du défilé, pour fe remet»tre en marche; mais, dans aucun cas, on ne fait » accélérer ni doubler le pas à la première fubdivifion de la colonne. L'expérience a appris aux » Pruffiens, qu'une colonne d'armée, compofée d'infanterie, ne pouvoit pas parcourir, dans un beau terrein, plus de dix-neuf cents à deux » mille toifes à l'heure, en faifant le pas de vingt-que le détachement va exécuter; le chef de l'a » huit à trente pouces, & de foixante-quinze à » quatre-vingt-cinq au plus à la minute. »»

Voilà, nous le répétons & nous le dirons fans ceffe, voilà un exercice vraiment militaire.

Un détachement qui eft précédé par des décou vreurs adroits & par une avant-garde intelligente, qui eft fuivi par une arrière-garde prudente & par des découvreurs vigilans, n'a certainement pas à craindre d'être furpris; s'il eft fage, il mar chera cependant toujours avec prefqu'autant de précaution que s'il étoit ifolé.

Avant de fortir du camp, le commandant en chef du détachement nommera un officier pour commander fous fes ordres & le remplacer en cas d'accident: cet officier aura le fecret de l'opération

vant-garde & ce commandant en second doivent feuls en être inftruits.

On ne doit rien négliger pour que les foldats du détachement ne puiffent deviner quel eft le but de

la marche ; ainfi les déferteurs font moins utiles à l'ennemi, & les prifonniers qu'il fait, ne peuvent lui donner des nouvelles intéressantes.

Quelque peu nombreux que foit le corps de bataille d'un détachement, il fera toujours divifé en quatre parties; chacune aura fon chef particulier; ainfi les ordres généraux feront mieux exécutés, & fi l'on eft dans le cas de tirer fur l'ennemi, le détachement ne fera jamais dépourvu de tout fon feu en même tems.

Le commandant en chef du détachement fe procurera, avant de fortir du camp, un plan exact de tout le pays qu'il devra parcourir, & il prendra auprès des guides & des gens qui connoîtront la route qu'il devra tenir, toutes les informations qui pourront lui être utiles: le détail de ces informations eft configné dans le mot RECONNOISSANCE. Sur le plan qu'on aura communiqué au commandant du détachement, & fur les rapports qu'on lui aura fairs, il formera aifément l'ordre général de fa marche.

Avant de fortir du camp, le chef de l'entreprife tiendra avec fon lieutenant & le commandant de l'avant-garde, une espèce de confeil, dans lequel il confiera à ces deux officiers tout le plan de l'opération; il leur donnera alors les ordres qu'ils doivent fuivre pendant la marche : il affemblera enfuite tous les officiers & les fous - officiers qui auront des commandemens particuliers, & il leur donnera les inftructions générales qui pourront leur être néceffaires; mais il obfervera de ne point découvrir le fecret de l'opération : ces inftructions pourront, fuivant les circonftances, porter fur les objets fuivans.

Quelque circonftance favorable qui fe préfente pour acquérir de la gloire, les commandans des différentes parties du détachement fe contenteront d'exécuter les ordres qui leur feront donnés; le chef de l'entreprise gravera cette maxime encore plus avant dans fon efprit, qu'aucun de fes fubordonnés. Le commandant en chef recommandera à ses officiers, de maintenir leurs troupes dans le plus grand ordre & dans le plus grand filence : une troupe qui marche en défordre, eft battue fi l'ennemi paroît à l'improvifte; & celle qui, dans les occafions indifférentes, n'obferve point un filence profond, l'observe encore moins dans les occaLions importantes; auffi ne peut-elle pas exécuter les ordres qu'on lui donne, ou parce qu'elle ne les entend pas, ou parce qu'elle les entend mal.

On empêchera les foldats de la même divifion de confondre leurs rangs, leurs files, & à plus forte raison, de fe mêler avec ceux des autres divifions: on ne leur permettra jamais, ni de porter les armes en bandoulière ni d'envelopper la bat

terie de leur fufil avec des chiffons.

On ne permettra à aucun foldat de fortir de fon rang, fans être accompagné par un fous - officier ; cette permiffion ne fera même donnée que rarement: pour y suppléer on fera faire, d'heure en

heure, au plus tard, une halte de quelques mi

nutes.

Afin que les foldats ne foient pas obligés de quitter leurs rangs pour aller chercher des vivres, le commandant en chef les obligera de porter dans leur fac ceux qui leur feront néceffaires. Quand le commandant du détachement croira devoir débarraffer fa troupe du poids de fes provifions de bouche, il les fera mettre fur des chariots; il y fera placer encore tout ce qui pourra être néceffaire pour la fubfiftance de fes officiers & de fes fous-officiers.

Quand on devra faire une halte un peu longue pour faire manger ou repofer les foldats, on choifira un endroit fort par la nature & couvert par quelqu'abri naturel; on poftera des fentinelles fur toutes les avenues, fur des arbres & fur des hauteurs; on placera la moitié du détachement en bataille, vis-à-vis le chemin que l'ennemi doit naturellement fuivre ; l'avant-garde & les découvreurs resteront à leur distance ordinaire : les foldats qui feront en liberté, ne pourront jamais dépaffer les fentinelles; leurs armes feront placées de manière à ce qu'ils puiffent les reprendre fans confufion.

Quoiqu'une halte ne doive durer qu'un inftant, on ne mettra jamais en meme tems en liberté plus de la moitié de la troupe : dans ces petites haltes, les foldats ne s'éloigneront jamais à plus de vingt pas du corps du détachement.

Les officiers qui feront à cheval, s'arrêteront de tems en tems pour voir filer leur troupe; ils feront ferrer les files & les rangs qui feront trop ouverts: ils remédieront à toutes les petites négligences que les fous-officiers ou les foldats fe feroient permifes. On a dit en morale, ce font les petites précautions qui préparent les grands fuccès, & les petites négligences qui caufent les grandes défaites.

Quoique vous fachiez que l'ennemi est éloigné, vous ne marcherez pas avec moins de précautions que s'il étoit proche : votre adverfaire peut, par une marche fecrète ou forcée, s'être rapproché de l'endroit où vous devez paffer; vous marcherez avec plus de précautions encore pendant l'été, que dans toute autre faifon : les moiffons dont la campagne eft couverte, l'épaiffeur des haies, le fourré des bois, facilitent les embuscades.

Pour rendre un peu de force & de courage à des troupes fatiguées, on fera refter derrière le détachement quelques foldats leftes & robuftes, auxquels on ordonnera enfuite d'aller reprendre avec légéreté le rang qu'ils occupoient à la tête de la colonne : l'exemple de ces hommes piquera l'amour-propre du refte de la troupe, &, comme perfonne ne l'ignore, l'amour-propre eft l'aiguillon le plus puiffant qu'on puiffe employer avec les foldats: l'exemple de leurs officiers feroit peut-être un encouragement plus actif, & dont il feroi avantageux de faire ufage avec eux. Le commandant en chef qui voudra donc engager les foldats Ccccc 2

à fupporter avec conftance les fatigues d'une marche longue & pénible, mettra pied à terre & marchera à leur tête; fi fon âge, fa fanté & le befoin de conferver fes forces ne lui permettent pas cet exercice violent, il engagera quelqu'un de fes fubordonnés à le remplacer dans cette fonction importante. C'eft ainfi que, dans le service pruffien, un officier marche toujours à pied à la tête de chaque bataillon.

L'officier qui mènera la tête de la colonne, marchera un pas de route égal, ni trop long ni trop précipité; ainfi on ne fatiguera pas les foldats & on n'aura jamais de traîneurs.

Deux pas de distance fuffifent entre chaque rang, & deux pieds trois pouces fuffifent pour chaque homme dans fon rang; ainfi huit hommes pafferont avec facilité dans un chemin qui aura dix-huit pieds de larg ur.

Si l'on préfume que l'ennemi fe présentera vers la tête de la colonne, les troupes d'élite en auront la tête, & dans le cas contraire elles marcheront à Ja queue. Quand les troupes d'élite ont la tête de la colonne, après elles marchent quelques pionniers, qui font deftinés à raccommoder les chemins, à combler avec des fafcines les trous & les ravins, à applanir les bords des foffés trop relevés, & à conftruire des petits ponts avec des échelles, des planches, &c. Quand les troupes d'élite rencontrent quelqu'obftacle phyfique, elles laitlent paffer les pionniers qui font chargés de les leur aplanir: les foldats qui portent les échelles & les outils, viennent après les pionniers; c'eft principalement fur eux que l'on règle la rapidité de la marche.

On ne néglige jamais de tirer parti des appuis naturels que l'on rencontre dans la campagne; ces appuis font les bois, les montagnes, les marais & les rivières : les meilleurs de tous ces appuis font les rivières larges & profondes; elles mettent à l'abri des coups des ennemis, & on en jouit plus long-tems que des bois & des marais.

Avant de partir du camp on doit prévenir les foldats de tout ce qui peut arriver pendant la marche: cet avertiffement empêche qu'ils ne foient furpris ou effrayés par l'apparition de l'ennemi ou rebutés par les obftacles qu'ils rencontrent.

rés & étroits: on tournera les défilés, à moins que l'on ne fe foit bien assuré des hauteurs & qu'on ne gagne beaucoup de tems en paffant dans les gorges.

Quand vous aurez le choix entre deux chemins, dont l'un fera large, plein, fec & découvert, tandis que l'autre fera étroit, boueux, raboteux & couvert, vous donnerez la préférence au premier, quoiqu'il foit le plus long, à moins que vous n'ayez un grand intérêt à cacher votre marche, ou que vous foyez affuré de rencontrer l'ennemi fur le chemin le plus beau.

Quand vous voudrez cacher votre marche, vous ne voyagerez que pendant la nuit, vous pafferez le jour dans un pofte où vous ne pourrez pas être facilement découvert, parce que vous y ferez embufqué, & où vous ne pourrez pas être aisement battu, parce qu'il fera fort par fa nature; vous éviterez les endroits habités; vous fuivrez les bois & les vallées, vous ferez arrêter avec foin tout s les perfonnes qui vous auront découvert, & qui pourroient aller avertir l'ennemi.

Pour donner le change à votre adversaire & à fes efpions, vous pourrez prendre un chemin toutà-fait oppofé à celui que vous auriez dû tenir naturellement pour aller exécuter l'opération dont vous êtes chargé : quand vous aurez marché pendant quelque tems fur cette route & lorsqu'un bois ou une montagne pourra couvrir votre mouvement, vous gagnerez au travers des champs le chemin que vous deviez fuivre: à ce ftratagéme, qui pour être fimple & très-connu n'en fera quelquefois pas moins heureux, vous joindrez quelques-uns de ceux dont nous allons donner une idée.

Pour faire croire à l'ennemi que vous êtes plus fort que vous ne l'êtes réellement, vous marcherez moins ferré qu'à l'ordinaire ; pour lui perfuader que vous êtes plus foible, vous marcherez avec de trèspetites diftances: on peut employer les inftrumens militaires pour fortifier le premier de ces deux ftratagêmes on peut encore fe fervir des inftrumens militaires pour faire croire à l'ennemique l'on tient un chemin oppofé à celui que l'on fait; pour cela, on en envoie quelques-uns du côté où l'on veut attirer fon adverfaire: on leur ordonne de battre ou de fonner, & l'on marche foi-même à la fourdine du côté oppofé.

On doit calculer la durée de la marche, non-feulement fur l'éloignement de l'endroit où l'on va, Pendant les marches de nuit, on doit redoubler de mais encore fur les qualités du chemin que l'on foins & d'attention: alors, comme le dit Xénophon, doit parcourir, fur la faifon dans laquelle on mar-les yeux doivent être remplacés par les oreilles. che, & fur les obftacles qu'on prévoit de la part de l'ennemi.

Si l'on doit marcher pendant l'été, & fi l'on eft le maître de fixer l'heure de fon départ, on se met en marche de très - grand matin, afin d'éviter la chaleur du jour : dans toutes les faisons il eft avantageux d'arriver de bonne heure au poste que l'on veut occuper, tant pour avoir le tems de le reconnoître, de le fortifier & d'en parcourir les environs, que pour se pourvoir d'eau, de bois, &c. On évitera, autant qu'on le pourra, les lieux fer

Quand on aura deux marches à faire, on ne paffera la nuit dans un village que lorsqu'on aura le tems d'en fermer les avenues, d'en barrer les rues, & qu'on fera affuré de la fidélité des habitans. Dans toute autre circonftance on couchera au biyouac, ayant l'attention de choisir un endroit naturellement fort, & de le fortifier encore par des abatis, des chevaux de frife, &c.

Un détachement qui marche fur un trop grand front, gagne peu de terrein, flotte fans ceffe, & eft obligé de manoeuvrer à chaque inftant pour fe

conformer à la largeur des chemins qu'il doit fuivre. Une colonne trop profonde a ordinairement beaucoup de traîneurs : la plus petite halte que fait un homme de la tête, occafionne un retard vivement fenfible dans la queue : il faut donc prendre un jufte milieu entre ces deux extrêmes. Comme un officier particulier ne peut cependant pas ouvrir lui-même ces marches, & comme le général n'en fait pas ouvrir pour un petit détachement, les cfficiers particuliers fuivront donc prefque toujours les chemins déjà faits, & ils ne donneront à leur colonne qu'un front proportionné à la largeur de ces chemins.

Un détachement marchera, autant qu'il le pourra, fur un nombre de files dont il foit poffible de prendre exactement la moitié: tels font deux, quatre, huit, feize, trente-deux, &c. Le nombre huit eft celui qui nous paroît le plus convenable à un détachement conduit par un officier particulier; huit files n'occupent en effet que dix-huit pieds de front, & dix-huit pieds font la largeur ordinaire des chemins très-étroits: on dédouble les divifions, ce qui n'alonge pas la colonne ; & quand ils font très-ouverts, on peut aifément fe mettre fur un front double, &c. Tout détachement fera donc divifé en deux fections, autant qu'on le pourra, de vingt-quatre hommes chacune, chaque fection fubdivifée en deux pelotons. Quand un détachement fera compofé de plufieurs fections, on formera autant de colonnes différentes qu'on aura de divifions, de quatre fections chacune.

Quand on mènera avec foi des bêtes de fomme ou des chariots chargés d'outils, de provifions de guerre ou de bouche pour l'ufage du détachement, ils marcheront vers la queue des colonnes, quand l'ennemi fera en avant; vers la tête, quand il sera en arrière; sur le flanc droit, quand il menacera le flanc gauche; fur le flanc gauche, quand il menacera le flanc droit; & dans le milieu des colonnes ou des pelotons, quand il aura l'air de vouloir faire une attaque environnante.

On confiera les bagages à une fection dont la force fera proportionnée à celle du détachement: cette petite troupe fera commandée par un officier ou par un fous-officier, qui fe conduira d'après les principes développés au mot CONVOI. Quand des chariots porteront des bagages, on pourra s'en fervir pour former une espèce de retranchement en avant du front qui fera attaqué: on placera quelques foldats fur ces chariots par leur feu, ils éloigneront l'infanterie de l'ennemi, & leur cavalerie ne pourra rien contre l'obstacle phyfique que les chariots préfenteront; les munitions de guerre, qui peuvent s'enflammer aifément, feront confervées dans l'intérieur du parc formé avec les chariots. (V. le mot CONVOI.)

Après que le commandant du détachement aura donné les ordres que nous venons de rapporter, & qu'il aura divifé fon détachement, il

fe mettra en marche. Prodiguons fous fes pas les différens obftacles qui peuvent s'y rencontrer, & effayons de lui fournir les moyens de les vaincre.

Auflitôt que le commandant-en chef fera averti par fon avant-garde, qu'on apperçoit dans le lointain un corps de troupes, il fera mettre fon détachement dans le plus grand ordre; il marchera à petits pas, & il obfervera fi les environs de l'endroit où il fe trouve, ne lui offrent pas quelque pofition avantageufe, tant contre de la cavalerie que contre de l'infanterie.

Aufitôt que l'avant-garde avertira le corps de bataille que l'ennemi approche, le commandant en chef prendra fon partí d'après les circonstances du rapport qu'on lui aura fait, d'après les ordres qu'il aura reçus & la pofition dans laquelle il fe

trouvera.

Si le détachment eft rencontré par un petit corps de cavalerie peu redoutable pour lui, il continuera fa marche, après s'être fait joindre cependant par fes découvreurs, fon avant-garde & fon arrière-garde. Il détachera en même tems, fur les flincs de fa troupe, quelques foldats leftes & adroits; ils feront chargés d'éloigner par leur feu les cavaliers qui feroient tentés de s'approcher de trop près ces tirailleurs, qui feront fournis par les découvreurs, par l'avant-garde & par l'arrière-garde, marcheront & feront feu à volonté ils fe retireront vers le détachement fi la cavalerie ennemie a l'air de vouloir les charger.

Dès l'inftant où le commandant du détachement reconnoîtra, aux manoeuvres des ennemis, qu'ils ont l'intention de s'abandonner fur lui, il fera faire halte à fa troupe ; il recommandera à fes officiers & à fes fous-officiers de raffurer leurs foldats, & de bien leur perfuader que la cavalerie n'est dangereuse que pour ceux qui la craignent. Il fe formera alors de la manière qu'il croira la plus avantageufe.

Dans toutes les circonstances, on tirera de manière à ne point fe dégarnir en même tems de. tout fon feu. Les foldats ne tireront que lorfque la cavalerie fera à trente pas: on leur recommandera de vifer au poitrail des chevaux, & de ne pas chercher à recharger après avoir fait feu, mais de préfenter la baionète fans fe troubler.

Après que la cavalerie aura été repouffée, ou après qu'elle fe fera retirée, le détachement fera partir les découvreurs des flancs & du front de la marche; l'avant-garde les fuivra bientôt; & quand le chef de la troupe fera averti que l'ennemi eft éloigné, le corps de bataille le remettra en marche : les découvreurs de l'arrière-garde & l'arrière-garde elle-même partiront quand le gros de la troupe aura gagné le terrein qui doit les féparer de ces deux divifions.

Si le détachement eft fur le point d'être attaqué par un parti de cavalerie très-considérable, & s'il voit qu'il lui eft absolument impoffible de réfifter l'officier qui le commandera, après s'être fait

ou trois attaques vives, il voit qu'il ne peut réuffir à faire une trouée, il fe retiiera vers l'endroit d'où il fera parti, à moins qu'il ne trouve quelque pofition favorable qui le mette en fûreté, trop s'éloigner de fon objet.

Quand un parti, mêlé de cavalerie & d'infanterie, & qui fera beaucoup plus fort que le détachement, fe préfentera à lui, celui-ci, fans chercher à livrer un combat, dont l'iffue même la plus heureufe lui feroit funefte, parce qu'elle le mettroit dans l'impoffibilité d'exécuter l'opération dont on l'auroit chargé, fe retirera de bonne heure dans un endroit fort par fa nature.

joindre par fes découvreurs, par fon avant-garde, fon attention iur fon arrière-garde. Si, après deux &fon arrière-garde, fe jettera à droite & à gauche du chemin, dans un endroit très-favorable à l'infanterie & inacceffible à la cavalerie. Tel feroit un champ féparé du chemin par un foffé dont les bords feroient très-relevés, comme on en voit dans quelques départemens de la France, dans le Calvados, la Seine-Inférieure, &c. Par exemple, il paffera encore, s'il le peut, un ravin large & profond, dont les talus feront trèsrapides; il s'enfermera dans un jardin enclos de murs; il fe mettra derrière une forte haie; il fe retirera dans un bois, une vigne, une maison une églife, un cimetière, un hameau, un village, &c. Auffitôt qu'il aura gagné une de ces retraites, il la fortifiera par un des moyens donnés au mot MAISON, Supplément; il gardera alors fon pofte, & le défendra. Dès I inftant où il fe verra ainfi preffé, il détachera quelques hommes adroits & intelligens, qui iront faire connoître au commandant de l'armée ou du corps le plus voifin, la pofition fâcheufe dans laquelle le detachement fe trouve.

Auflitôt que la cavalerie fe retirera, le commandant du détachement fera fortir les plus adroits de fes découvreurs d'avant-garde; ils fuivront l'ennemi avec la précaution & l'adreffe que nous avons exigées. Auffitôt que le détachement n'aura plus rien à craindre, parce que la cavalerie fe fera retirée au loin, les découvreurs en avertiront le commandant du détachement : celui-ci fera fortir fon avant-garde, & puis fe remettra en marche.

Quand le commandant du détachement ne trouvera aucun endroit favorable pour s'y retirer, & quand il verra que la cavalerie eft déterminée à ne pas l'abandonner, il fera fa retraite vers l'endroit d'où il fera parti, & il emploiera les moyens dont on a parlé au mot RETRAITE.

Un détachement chargé d'une opération particulière doit, comme nous l'avons dit, ne s'occuper que du moyen de l'exécuter avec promptitude: quoiqu'il rencontre un parti ennemi beaucoup moins confidérable que lui, il se gardera de chercher à le combattre. Ce parti peut avoir été envoyé pour amufer le détachement & pour retarder fa marche. Le détachement continuera donc à s'avancer vers le lieu qui lui aura été indiqué, ayant le foin de marcher avec beaucoup d'ordre, & de détacher de tems en tems quelques tirailleurs très-leftes pour éloigner ceux des ennemis qui pourroient venir le troubler.

Sí un parti ennemi, à peu près égal au détachement, fe préfente fur la route que celui-ci doit tenir & veut l'empêcher de paffer, il faut bien que la force en décide. Le commandant du détachement formera alors fes troupes en colonne ferrée, fera mettre la baïonète au bout du canon & donnera tête baiffée au milieu des ennemis. S'il parvient à les mettre en défordre, il continuera La route avec promptitude, & il portera toute

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S'il ne trouve aucun endroit qui puiffe lui fervir de fort, ce qui eft prefqu'impoffible, il enverra une partie de fa troupe efcarmoucher avec l'ennemi. Pendant ce petit combat, les travailleurs, mafqués par quelques foldats, pourront, ou construire un abatis, ou couper le chemin par un foffé large & profond, dont les terres formeront une espèce de parapet: cet ouvrage, défendu par de braves gens, peut tenir long

tems.

Si tous ces moyens font impraticables, le commandant fera fa retraite.

Quand le détachement rencontrera un défilé, il s'affurera, avant d'y entrer, que l'avant-garde s'eft emparée de l'entrée, de la fortie & des hauteurs malgré ces précautions, il paffera le défilé avec viteffe. Les troupes qui fortiront, fe mettront en bataille, faifant face en dehors; l'arrièregarde prendra la place de l'avant-garde, & la confervera jufqu'à ce que le corps du détachement ait rétabli la diftance qui doit exister toujours entre ces deux divifions.

Le paffage d'un ravin, d'un gué, d'un pont, s'exécutera comme nous venons de le dire en parlant d'un défilé ; il en fera de même d'un paffage de rivière dans des bateaux.

Quant aux villages, on les tournera comme nous l'avons dit en parlant des découvreurs & de l'avant-garde.

L'arrière-garde aura du canon toutes les fois qu'on le pourra.

Tel eft le résultat des principes que les auteurs militaires ont donnés fur la manière dont un offcier particulier doit fe conduire quand il est chargé de diriger une marche en avant; quant aux marches rétrogrades, cela regarde les retraites.

S. V.

Des marches dans l'intérieur de la république.

Nos troupes voyagent dans l'intérieur de la république, comme elles voyageoient il y a près de deux cents ans. Prefqu'aucune des perfonnes qui approchent les miniftres & qui jouiffent de leur con fiance, ne font vivement intéreffées à ce qu'on faffe des changemens à nos routes militaires, à

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