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toutes nos efpèces font médiocres, & la France | climat où l'on veut en tirer de la progéniture; n'a de germe parfait pour aucun genre.

A ces confidérations qui regardent le commerce, il s'en joint d'autres plus effentielles encore; ce font les inconvéniens qu'entraîne en tems de guerre une cavalerie mal montée, une artillerie & des vivres mal attelés, & des équipages compofes de mauvais chevaux.

Et fi l'on étoit privé des reffources de l'Allemagne, & fi l'on étoit réduit à entretenir la cavalerie française avec les feules productions des haras français, à peine, après deux campagnes reiteroit-il quelque germe de chevaux propres à faire des remontes.

mais je n'aurai certainement pas la préfomption de mettre ici mes idées à la place de celles de gens bien plus éclairés & bien plus inftruits que moi, & que je crois très-intér ffant de lire & de confulter, pour porter à leur plus g ande perfection des établiffemens auffi neceffaires.

Il a paru furtout trois ouvrages précieux fur les haras. Le premier, un Traité des haras, traduit de l'allemand, de M. Hortman, dans lequel, au milieu d'excellens & d'utiles détails, nous avons cru ne rien trouver de neuf. Le fecond, un Nouveau Régime fur les haras ou Expofé des moyens propres, &c. 1787, par M. Efprit - Paul de la Cependant, à en croire des perfonnes très-inf-Font Pouloti, ouvrage qui mérite des éloges, truites dans la partie dont nous nous occupons, avec & dans lequel on peut puifer de très - bonnes des foins affi lus & une bonne méthode, la France chofes, mais dont la partie fyftématique nous a peut fe procurer chez elle, non-feulement tous les paru bien moins précieuse & bien moins avanchevaux néceffaires à fes befoins, mais encore en tageufe que celle contenue dans le troisième ou faire une branche avantageufe de commerce. vrage intitulé Traité de l'éducation du cheval en Europe, avec un plan d'exécution pour la France, par M. Prefeau de Dampierre, &c. Ici l'auteur remonte à la fource, & il ne trouve dans l'Univers qu'une feule espèce pure; c'eft le cheval arabe : tous les autres font détériorés par la température, le climat, la nourriture ou les hommes: d'où il conclut que les meilleurs chevaux feront toujours ceux qui auront reçu une plus grande quantité de fang arabe: donc il faut d'abord pou voir le procurer des chevaux de cette espèce précieufe, & l'auteur en donne les moyens ; mais il faut les perpétuer, & c'est encore un avantage qu'efpère procurer M. Dampierre, en formant un premier haras dans les départemens méridionaux & dans les lieux où le climat le plus chaud, le fol & les pâturages les plus fecs doivent le mieux convenir à un animal tiré de l'Arabie; & enfuite en multipliant ces établissemens & en les plaçant dans l'étendue de la république, de cinq en cinq degrés d'éloignement, & en ligne à peu

Il y a en France des chevaux, des climats, des pâturages de toutes les espèces, & propres à faire naître les individus de tous les genres: il ne s'agit donc que de perfectionner les espèces dont nous jouiffons. Pour y parvenir, 1o. il faut travailler à l'amélioration de toutes les efpeces à la fois & de chacune d'elles féparément; 2°. les fixer fur le fol & les pâturages qui font les plus propres à chacune en particulier.

Pour remplir ces objets importans, il faut des haras dans chaque département (1), & pour veiller fur ces haras & en avoir foin, il ne peut être que très-avantageux de choifir parmi les officiers & les foldats de nos troupes à cheval, comme nous l'avons déjà dit. Cependant il ne doit pas fuffire d'avoir prouvé qu'il faut des haras & à qui il faut les confier, il eft encore bien plus effentiel de fixer la manière dont doivent être compofés ces haras, & celle dont on doit fe conduire pour y avoir des étalons de la meilleure race, & les plus appropriés au fol & auprès droite, en allant du midi au nord. Le che

val arabe, fouche de tous les autres étalons dars les premiers haras; les races provenantes de cette fouche, fervant d'étalon dans les feconds haras, & ainfi fucceffivement jufqu'au dernier, n'entendant autre chofe par croiffement de races, que le renouvellement du premier germe ou germe primitif.

(1) Dans la Pruffe orientale, le roi a établi un haras. Trekehuen en eft le chef-lieu, & ce haras, qui eft une chofe unique en ce genre, n'eft pas feulement beau, mais il eft infiniment utile, parce qu'il vend un grand nombre de chevaux à l'étranger. Mais il faut des jumens, & pour s'en proUn écuyer attaché à la cour de France, qui étoit curer il faut former fes races poulinières dans allé plufieurs fois y acheter des chevaux, difoit fou-les pays même où l'on veut élever des chevaux, vent que s'il en exiftoit d'auffi bons en Angleterre, il ne feroit pas allé les chercher au fond du nord à fi grands frais. On peut donc avoir des haras: on peut donc, par leur moyen, avoir d'excellens chevaux; mais il faut fe garder de n'en avoir qu'un & de les réunir, foit parce qu'en répandant les haras ils fe trouvent mieux placés pour le fol relatif à chaque efpèce, foit parce que les avantages attachés à chaque haras fe répandent d'autant plus, que l'on multiplie ces établiflemens.

parce qu'à bonté égale, ces jumens font fupérieures à celles des pays étrangers: il faut avoit foin feulement d'éviter la confanguinité, & de mener l'étalon dans un pays plus chaud que celui où il eft né, & la jument dans un pays plus froid. Un établiffement de haras ne peut jamais réuffir fans être pourvu de poulinières de races créées & perfectionnées par les ufages du pays, & dans le pays même où elles font deftinées à produire. Dans l'accouplement, il faut affortir les figures,

les qualités & les propriétés. Cette formation de poulinière eft poffible avec les jumers qu'il ya dans la république, & ces races une fois formées, ne doivent jamais être perdues. Enfin, le cheval étant l'animal qui reçoit le plus de l'édu cation, les races dégénèrent ou fe perfectionnent, felon qu'elles font plus ou moins foignées. Cependant ces haras dont nous venons de par. ler, ne doivent être regardés que comme la fouche de plufieurs autres, établis chacun à la même hauteur & à des éloignemens convenus de chaque haras fouche; ce qui doit former une éducation fecondaire, aidée encore d'une éducation auxilaire pour tous les chevaux qui ne feroient pas de la taille qui appartient à leur climat. Enfin, pour faciliter toutes ces opérations & étendre les avantages du projet qu'il propose, l'auteur demande qu'une loi attachát une certaine quantité de jumens à une certaine quantité de mefures de trres, en y joignant des encouragemens, &c. Mais c'eft dans l'ouvrage qu'il faut lire, relire & méditer, où l'on pourra bien mieux s'inftruire de la manière de monter cette immenfe machine, d'en affurer la néceflité & d'en tirer de très-grands avantages.

Puiffent ces vérités importantes & infiniment utiles tomber fous les yeux d'un homme affez patriote & affez puiffant pour les faire profpérer!

HARDIESSE. Loke la définit une puiffance de faire ce qu'on veut devant les autres, fans craindre ni fe décontenancer.

Le mot de hardieffe, dans notre langue, défigne communément une refolution courageufe par laquelle l'homme méprife les dangers & entreprend les chofes extraordinaires.

On femble pouvoir affigner cinq fortes de hardiefe, qui ont une fauffe reffemblance avec la vraie & la légi ime. 1°. La hardieffe militaire; elle n'a fouvent d'autre appui que l'exemple & la coutume: 20. celle des ivrognes; elle eft l'effet de la fumée du vin: 3°. celle des enfans; elle provient de l'ignorance: 4°. celle de tous ceux qui fe laiffent aller à des paflions tumultueufes; elle eft due au défordre que ces paffions caufent dans leur ame: 5o. enfin, la hardieffe que les philofophes mo aux nomment civile, qui reconnoit pour mobile la crainte de la honte; elle étoit celle d'Hector quand il n'ofa rentrer avec les autres troupes dans lion, de peur que Polidamas ne lui reprochât le mépris du confeil qu'il lui avoit donné.

Il eft rare de voir dans le monde une hardieffe affez pure pour ne pouvoir pas être rapportée à l'une des cinq dont on vient de parler, qui n'ont que l'apparence trompeufe des qualités qu'elles repréfentent.

Mais quand la hardieffe eft le fruit du jugement, qu'elle émane d'un grand motif, qu'elle meture les forces, ne tente point l'impoffible, & pourfuit enfuite, avec une fermeté héroïque,

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« Cette forte de hardieffe, dit Montaigne, » fe présente auffi magnifiquement en pourpoint qu'en armes, en un cabinet qu'en un champ » le bras pendant que le bras levé. Scipion » nous en fournit un exemple remarquable forf» qu'il forma le projet d'attirer Siphax dans les » intérêts des Romains. Pénétré des avantages qu'en recevroit la république, il quitte fon » a mée, paffe en Afrique fur un petit vaisseau, » vient fe commettre à la puiffance d'un roi barbare, à une foi inconnue, fous la feule fûreté » de la grandeur de fon courage, de fa haute efpérance, furtout du fervice qu'il rendoit à » fa patrie; cette noble & généreufe hardieffe » ne peut le trouver naïve & bien entière que » dans ceux qui font animés par des vues femblables, & à qui la crainte des fupplices & de » la mort ne peut donner aucun effroi. »

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La hardieffè, dans ce fens, eft donc plus que le courage; elle eft l'affurance de fes propres forces, de fes connoiffances & du fuccès; ainfi cette qualité peut être précieuse pour le général, les officiers & le foldat. Très-fouvent à la guerre la hardieffe doit être préférée aux froids & fages calculs de la raison. L'histoire militaire eft remplie de faits qui viennent à l'appui de cette espèce de paradoxe.Curtius fe jette dans un goufre en per fuadant à fes concitoyens qu'à ce facrifice hardi tient la ceffation des calamités publiques. Bayard a la hardieffe de s'oppofer feul fur un pont à toute une armée, dans le deffein d'affurer la retraite de fes troupes. Condé jette fon bâton de commandement au milieu des bataillons efpagnols, & s'y précipite enfuite lui-même pour engager les folda's à le fuivre. Buonaparte, arrivé devant le pont de Lodi, trouve B aulieu paffé au-delà de l'Adda avec plus de trente bouches à feu pour en défendre le paffage; mais rien ne peut arrêter la hardieffe du jeune vainqueur; il forme une colonne de l'élite de fes troupes; il paffe le pont, & cette hardieffe lui affure la poffeffion de l'Italie jufqu'à Mautoue.

HARNOIS fe dit ordinairement de tout l'équipage d'un cheval de felle. Si l'on confulte les anciens fur la manière de harnacher leu s chevaux, on les voit, dans les momens les plus brillans de leurs conquêtes & de leurs victoires, combattre, ou fur des chevaux nus, ou tur des chevaux n'ayant que de fimples couvertures. Ce n'eft que vers la fin du quatorzième siècle qu'ils commencèrent à faire ufage de la felle, & les Romains ne fe fervirent des étriers que fous le Bas-Empire; mais ces deux époques font celles du luxe, de la moleffe & du dépériflement de la difcipline & de la force des armées romaines. Bientôt après l'empire féodal

vit fes chevaliers & fes hommes d'armes couverts de fer eux & leur monture, obligés d'être placés fur leurs chevaux, de manière à y être pour ainfi dire comme cramponés, d'où les felles dans lefquelles le cavalier étoit emboîté, les étriers & tous les moyens de réfifter au choc de la lance, & de n'être pas renverfés de cheval; ce qui changeoit alors entièrement la manière de combattre. Auffi la cavalerie de ces tems de barbarie & d'ignorance étoit-elle montée fur d'énormes chevaux, dont on fe ferviroit à peine actuellement pour les équipages d'où s'enfuivoit une pefanteur, une immobilité & une manière de combattre entiére ment oppofée à celle qui doit être adoptée pour la cavalerie, furtout depuis la découverte & l'ufage de la poudre à canon. Auffi, revenue aux meilleurs principes de l'art militaire, la cavalerie ne fait plus parmi nous qu'environ un feptième de nos armées; & deftinée à en protéger les flancs, on l'emploie, au moyen des mouvemens les plus rapides, ou à tourner l'ennemi pour décider fa défaite, ou à tomber fur lui quand il eft ébranle, pour la rendre plus compiète. Elle fert encore à escorter des convois, proteger des fourages ou affurer la tranquillité des armées, devenues fi étendues depuis l'adoption de l'ordre mince, & fi pefantes par rapport à leurs canons, leurs attirails & leurs équipages. Les chevaux triplant les dépenfes de cette arme, foit par leur achat, foit pour leur nourriture, on ne fauroit trop s'appliquer à les conferver le plus long-tems poffible, fains, forts & vigoureux, afin d'en tirer le plus grand parti dans toutes les circonftances. Pour remplir cet objet, il faut veiller attentivement à ne les charger d'aucun poids inutile, & prendre toutes les précautions pour leur éviter toute efpèce de gêne, de meurtriffures ou de bleffures. C'eft à quoi veilloient fpécialement les anciens. & font infiniment attentifs les deux peuples qui de nos jours font le plus grand ufage & tirent le plus grand parti du cheval, les Arabes & les Tartares. Quand on réfléchit qu'à la guerre, pendant cinq, fix ou fept mois de campagne, les chevaux, dans nos armées modernes, furtout ceux des troupes légères, font prefque continuellement harnaches; qu'en marche ils font obligés de porter le cavalier, fes armes, fon équipage, fouvent du fourage, des uftenfiles de cuifine & des effets de campement, on fentira plus aifément combien il eft important que les harnois des chevaux de la cavalerie foient très-légers, portent fur très-peu de parties du cheval, & que ces parties foient peu fufceptibles d'être offenfées par le frottement indifpenfable des harnois lorfque le cavalier eft monté, & que le cheval marche au pas, au trot ou au galop.

Depuis environ trente ans que l'on s'occupe davantage en France du militaire, on a cherché, furtout dans les derniers rems, à perfectionner les harnois des chevaux de cavalerie, & on a donné aux chevaux des troupes légères le harnois

choifi depuis long-terns pour ceux des huffards, d'après celui dont font ufage les Hongrois. On n'y apperçoit que le feul inconvénient des bleffures que peut faire la couverture fi elle est mal pliée, & c'eft à quoi on peut être expofé dans toutes les occafions où le foldat eft preffé de feller promp tement fon cheval pour le monter, ou lorsque le foldat, encore novice, n'a pas acquis affez d'utage fur la manière de feller promptement & exactement fon cheval. On pourroit peut-être auffi trouver que ce harnois exige un peu de tems pour s'en fervir, d'autant que la couverture que l'on met fous la felle, fervant à couvrir le cavalier, il eft obligé de s'en paffer toutes les fois que fon cheval doit refter felé, ou de mettre un certain tems pour la plier & la placer lorsqu'il s'en eft fervi. Ce feroit donc un avantage fi l'on pouvoit éviter ces inconvéniens. Quant aux harnois des chevaux de la cavalerie pefante, ils ont encore les inconvéniens d'être trop lourds, d'occuper une trop grande place fur le corps du cheval, d'être très-fufceptible de le bleffer, &c. Il feroit donc important de fixer un prix pour la perfonne qui rempliroit le mieux les conditions que l'on propoferoit pour trouver le meilleur harnois propre aux chevaux de la cavalerie pefante & légère. On jugeroit de la bonté de ce harnois d'après des expériences faites par des cavaliers, des fous-officiers & des officiers ; mais il ne feroit peut-être pas inutile, pour donner de plus grandes facilités aux perfonnes qui voudroient concourir à ce prix, d'avoir des modèles des harnois dont fe fervoient les anciens, ainsi que de ceux en ufage actuellement chez les Tartares & les Arabes, &c.: on les rendroit publics par le moyen de la gravure.

HAUTAIN, fuperlatif de haut & d'altier, eft toujours pris en mauvaise part; c'eft l'orgueil qui s'annonce par un extérieur arrogant, c'eft le plus sûr moyen de fe faire hair, & le défaut dont doit le plus foigneufement fe corriger tout homme chargé de commander les autres. On peut être haut dans l'occafion avec bienféance: un général, un commandant de place, &c. peut & doit rejeter avec une hauteur héroïque des propofitions humiliantes, mais non pas avec des airs hautains, un ton hautain, des paroles hautaines.

L'ame haute eft l'ame grande, dit Voltaire; la hautaine eft fuperbe: on peut avoir le cœur haut avec beaucoup de modeltie. On n'a point l'humeur hautaine fans un peu d'infolence. Il feroit auffi aifé qu'ennuyeux de déclamer fur ces matières: il doit fuffire de les livrer aux réflexions des homines capables de fe corriger, & qui mettent leur amour-propre à fe perfectionner.

HAUTBOIS, inftrument à vent & à touche, dont le fon eft fort clair, mais peu propre aux mufiques militaires, parce qu'il ne le fait pas

entendre de loin, & qu'il demande beaucoup de, de Naples, qui commandoit ce détachement, ayant talent pour être fupportable.

HAUTEUR, MORALE. Si hautain eft pris en mal, hauteur eft tantôt une bonne, tantôt une mauvaile qualité, felon la place qu'on tient l'occafion où l'on fe trouve, & ceux avec qui l'on traite. Le plus bel exemple d'une hauteur noble & bien placée eft celui de Popilius, qui trace un cercle autour d'un roi de Syrie, & lui dit : « Vous ne fortirez pas de ce cercle fans fatisfaire à la république ou fans attirer fa vengeance.» Un particulier qui en agiroit ainfi, feroit un imprudent. Popilius, qui repréfentoit Rome, mettoit toute la grandeur de Rome dans fon procédé, & pouvoit être un homme modefte.

Il y a, dit Voltaire, des hauteurs généreuses, x ce font les plus eftimables: le duc d'Orléans, egent du royaume, preffé par M. Sum, envoyé te Pologne, de ne point recevoir le roi Stanislas, ui répondit: «Dites à votre maître que la France toujours été l'afyle des rois.»

La hauteur avec laquelle Louis XIV traita fes nnemis, eft d'un autre genre.

La hauteur de Paufanias vis-à-vis de tous les énéraux qui étoient fous fes ordres, occafionna a défection d'une partie des confédérés.

Ce fut par hauteur que les maréchaux de Belleonds, de Créqui & d'Humières fe retirèrent pour le point fervir fous M. de Turenne, que le roi voit fait maréchal général,

L'humeur hautaine & violente, les propos ourageans du comte de Lalli, ind fpotèrent tellenent tous les efprits, qu'ils occafionnèrent la erte, pour les Français, de leurs poffeflions dans es Indes orientales.

En confuitant & en approfondiffant le cœur umain, on pourra en dire beaucoup plus fur Bet article.

HAUTEURS, TERREIN. Les habitans du mont lemus fourniffent une excellente manière de déendre une hauteur. Alexandre-le-Grand ayant marché contr'eux pour les forcer, ils tranfporèrent une partie de leurs chariots au haut des ochers, & placèrent l'autre partie à la tête de chaque paffage, en forme de haie, les timous ournés en dedans, avec le deffein de les pouffer ur les Macédoniens lorfque ceux-ci voudroient ivancer vers les rochers; mais Alexandre, qui avoit étudié fous les plus grands maîtres l'art d'attaquer & de défendre un pofte, ordonna à les foldats d'ouvrir leurs rangs au moment où ils verroient defcendre les chariots.

Quelque inacceffibles que paroiffent les hauteurs, ne vous en rapportez pas entiérement à la Nature & à leur efcarpement pour les garder. Dans la campagne de 1537, les Impériaux s'étoient emparés, avec dix mille hommes, du Pas-de-Suze, fi facile à garder, fi difficile à forcer; mais Céfar,

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oublié de s'emparer des hauteurs qui dominoient les retranchemens, Montmorenci fit grimper une partie de fon infanterie fur ces hauteurs, & fit faire un feu fi terrible, que les Impériaux abandonnèrent avec précipitation un paffage fi important.

Ne vous hazardez jamais dans des gorges fans auparavant vous être rendus maîtres des hauteurs.

Maître d'une hauteur, l'ennemi marche-t-il à vous pour l'attaquer, au lieu de l'attendre, marchez à lui; l'avantage que donne la defcente pour rendre le choc plus violent, rend la réuflite fûre.

La bataille de la Marfaille fut perdue par le duc de Savoye, contre le maréchal de Catinat, parce que le prince n'avoit pas bien reconnu le champ de bataille fur lequel il devoit combattre, & qu'il ne s'étoit pas emparé des hauteurs qui étoient à fa gauche.

Evitez de faire aucun retranchement trop voifin d'une hauteur ou d'une éminence.

N'oubliez jamais d'occuper les hauteurs auxquelles les ailes de votre armée pourroient être appuyées.

Ariorbafane, général de Darius, s'empare des défilés du Pas-de-Suze, & en faisant rouler des rochers du haut des montagnes où il étoit pofté, il empêche Alexandre de paffer ce defilé & l'oblige à faire fonner la retraite ; mais il n'avait pas eu la précaution de s'emparer de quelques hauteurs qui dominoient l'endroit où il étoit posté: Alexandre en eft inftruit par un déferteur grec; il profite de cette faute; il s'empare de ces hauteurs & oblige les Peries, en abandonnant leur pofition, à laiffer libre le paffage du Pas-de-Suze.

Le duc d'Elbeuf éprouva, en 1691, combien il eft dangereux de ne pas s'emparer des hauteurs quand on eft en marche ; les Barbets l'attaquèrent dans des défilés, près de Pignerol, lui tuerent beaucoup de monde & lui firent beaucoup de prisonniers.

Il n'eft pas moins effentiel de faire garder les défilés & les hauteurs par lefquels vous pouvez craindre d'être obligés de faire votre retraite. Sous le règne de Charles-le-Bel, en 1324, foixante mille Navarrois pénétrèrent dans la province de Guipufcoa; is s'emparèrent de plufieurs villes, fe chargèrent d'un butin immenfe; mais pour revenir dans leur patrie il falloit traverser des gorges trèsétroites, dominées par des hauteurs; ils les avoient négligées: huit cents Bafques s'en étoient emparés; quand les Navarrois voulurent tenter de repaffer, ils furent accablés de traits & de pierres, & perdirent trente mille hommes.

HAUTEUR, TROUPES (nombre de foldats qui composent une file); telle eft la définition à laquelle on s'eft borne fur ce mot dans la partie militaire de l'Encyclopédie méthodique. A l'égard de celle de Paris, le mot hauteur renvoie à celui file, dans lequel on fe contente de dire quelque chofe des files chez les Grecs & les Romains, ainfi que de

leur manière de les doubler & de les dédoubler; il renvoie auffi au mot évolution, dans lequel cependant il n'eft nullement queftion de la hauteur d'une file, c'est-à-dire, du nombre d'hommes dont il eft plus avantageux de compofer une file. Tel étoit néanmoins, à ce qu'il nous paroit, l'objet dont il étoit intéreffant de s'occuper, objet fur lequel il y a eu d'affez vifs débats depuis le chevalier Folard, qui, malgré la découverte de la poudre, vouloit nous ramener à nous armer de piques, & à adopter une ordonnance profonde, jusqu'à M. Menil Durand, dont le fyftème des pléfions fut difcuté théoriquement & pratiquement au camp de Vauflieux, formé exprès pour y juger des avantages & des défavantages de l'ordonnance mince, ainfi que de celle profonde; mais cet important problême n'ayant pas été réfolu d'une manière tellement démontrée, que l'une & l'autre ordonnance naît des partifans, nous croyons qu'il eft important de s'en occuper en

core.

Le peuple, qui fentit le premier combien la réunion des combattans en un feul corps devoit augmenter leurs forces, & qui fut mettre à profit une pareille découverte, dut fubjuguer tous ceux qui, animés d'une aveugle fureur, ne favoient que courir fus à leurs ennemis, fans ordre & fans action réunis de forces. On ignore quel fut ce peuple qu'on pourroit regarder comme l'inventeur de la tactique; mais on fait que dans l'antiquité, les Grecs & les Romains furpafferent tous les autres peuples par leur fcience à réunir en corps leurs combattans, & à les foumettre à une ordonnance qui mérite d'être connue, examinée et méditée.

Les Grecs, s'étant convaincus qu'un corps de mille combattans réunis & formés avec ordre repoufleroit fans peine une troupe défunie qui l'attaqueroit à la débandade, en conclurent qu'il ne s'agiffoit que de faire une ordonnance capable de rompre l'ordre des ennemis qui marcheroient à eux, parce qu'une fois rompus & n'agiffant plus enfemble, ces ennemis feroient facilement détruits par ceux que l'on détacheroit à leur pourfuite, & au foutien defquels continueroient de marcher les corps réunis jufqu'à l'entière deftruction ou difperfion des ennemis.

Sur ces principes, ils portèrent leurs files à feize ou à huit hommes, armèrent leurs combattans de longues piques, et formèrent leurs phalanges. Voyez PHALANGE.)

Mais cette infanterie, dont l'armure & l'ordonnance ne fervoient qu'à percer, ouvrir ou rompre l'ennemi, auroit avantageufement engagé le combat fans pouvoir jamais s'affurer la victoire ni la rendre complète fi elle avoit été feule; auffi l'avoit op accompagnée de pelteftes, espèce de fantaffins plus légèrement armés, dont l'emploi étoit de pourfuivre & de tuer l'ennemi quand il avoit été rompu. Quant aux gens de trait, on s'en

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fervoit pour les efcarmouches, pour battre l'eftrade, pour poursuivre l'ennemi rompu, l'empê cher de fe rallier, &c.

Tel étoit pour le combat le fyftème militaire des Grecs.

Les Romains, n'ayant aucune communication avec les Grecs, créèrent de leur côté une ordonnance entiérement différente; ils portèrent leurs files à dix & à fix hommes, armèrent leurs combattans avec une épée courte à deux tranchans, & partagèrent leur infanterie en légions. (Voyez LEGION.)

Mais chez les Grecs les hommes, dans les rangs & dans la file, n'occupoient que trois pieds en tout fens, tandis que chez les Romains ils en occupoient fix. D'où venoit cette énorme difference? De la manière dont les deux peuples s'étoient armés; en effet, avec des piques de dixhuit pieds, dont trois pieds portoient en arrière du corps, pour fervir de contre-poids, les piques du cinquième rang dépaffoient de trois pieds le premier rang; dans la charge, ces cinq rangs tenoient les piques baffes, & tout le front étoit hérifié d'une forêt d'armes pointues; les autres rangs n'étoient que pour foutenir, ce qui exigeoit qu'ils fuffent ferrés; ils auroient donc pu fe paffer de piques; mais ils avoient à s'en fervir, foit lorfqu'ils remplaçoient ceux qui tomboient dans les premiers rangs, foit lorfqu'on fe voyoit obligé inopinément de faire front des deux côtés.

Chez les Romains, au contraire, le foldat devant jeter fon javelot ou pilum de toute la force en s'avançant fur l'ennemi, puis tirer l'épée & agir avec cette arme, il étoit néceffaire qu'il eût un efpace confidérable exigé par l'efcrime. Il lui falloit donc une liberté entière de mouvement du corps & des deux bras, parce que celui du bouclier devant pouvoir fe tourner de tous côtés & en tout fens pour parer les coups de l'adver faire, comme celui de l'épée pour lui en porter, trois pieds d'efpace de chaque côté pour chaque foldat étoient juftement fuffifans pour remplir cet objet; l'action de l'épée demandoit aufli que l'on put fe replier en arrière, & même faire un pas dans ce fens; ce qui rendoit l'espace de fix pieds entre les rangs, auffi néceffaire qu'entre les files. Cependant ces raifons excellen:es pour prouver la néceffité de placer le foldat dans un efpace de fix pieds en tout fens, ne prouvent nullement l'avantage de dix hommes les uns derrière les autres, & prouveroient au contraire qu'il auroit été plus avantageux de former un grand frost en ayant des files peu profondes, & de mettre, par ce moyen, beaucoup plus de foldats en état d'agir avec leur épée. Mais l'effet du choc n'est pas le feul avantage de l'ordonnance profone: un des principaux, c'eft de faire avancer les premiers rangs, prefque malgré cux, contre l'ennemi, & chez les anciens, ces premiers rangs étoient tellement expofés au danger, que l'on

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