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vous y trouverez tous les devoirs auxquels doivent joindre encore la frifure à la Titus, n'étoit-ce fe foumettre tous les frères d'armes.

FRISURE. Manière d'accommoder les cheveux. On a voulu foumettre à la mode, la frifure des foldats françois comme celle du refte de la nation. Ainfi nous avons vu les foldats françois porter une boucle, formée par un morceau de arte, fur laquelle les cheveux des faces étoient rrêtés avec du plomb; & une treffe relevée vec un peigne ; la boucle & la treffe étoient naftiquées avec de la colle. La perte des cheeux, une dépenfe confidérable & des fluxions ar les yeux, firent fupprimer cette frifure; elle It remplacée par une petite boucle fans colle fans carte, & par une petite bourfe à cheeux, vulgairement nommée crapaud, la cherté I crapaud & les dégradations qu'il faifoit éprouver l'habit, le firent réformer. On adopta alors catogan, les faces furent étagées à l'avantrde & le toupet taillé en vergette. Au catogan ai arrachoit les cheveux & qui pouvoit occainner des incommodités, fuccéda une queue dix pouces, le toupet toujours en vergette, les faces étagées à l'avant-garde, ne couvrant e le cartilage de l'oreille. Au commencement la guerre de la liberté, plufieurs patriotes ant adopté les cheveux ronds, on vit bientôt tte méthode fi commode fe répandre dans les mées. Sous le régime de la terreur, elle étoit, ur ainfi dire un de attributs du patriotifme parent, & la majorité des citoyens avoient cheveux ronds, la moustache, le fabre & abit bleu. A l'inftar des Romains qui quittoient laticlave & prenoient le fagum dans les momens à la république étoit en danger, tous les citoyens ançois avoient vêtu l'habit militaire. Après le thermidor, ce fut prefqu'un crime de porter es cheveux ronds, les jeunes gens fe coeffèrent la victime, des cheveux treffés & relevés avec n peigne, des faces en oreilles de chien,, & efprit de parti s'empara de cette mode avec quelle on vouloit rappeler le coftume des vicimes traînées à la guillottine. Tout citoyen en heveux ronds fut traité de jacobin, & dans les épartemens furtout où la réaction fut la plus n vigueur, ce fut un figne de profcription, la queue reparut alors. Mais à l'époque où les réaceurs fe crurent les plus forts, où les émigrés rentrèrent avec impunité, efcortés par les prêtres éfractaires, on vit fe former, furtout à Paris, la fecte des incroyables & des têtes ou des coeffures à la Titus. Tous les jeunes gens eurent les cheveux coupés à l'Etrufque, ou cachés fous une perruque à cheveux écourtés, la moitié de la figure dans une cravate énorme, le corps dans un fac appellé habit quarré, & le bout du pied dans un foulier très-découvert & trèspointu. A la tenue, aux propos, à la conduite,

pas mettre le comble au ridicule ou à la pitié. Quoi qu'il en foit de ces inconféquences, auxquelles les hommes raifonnables doivent être accoutumés de la part de la jeuneffe françoife, dans la tête de laquelle réfide imminemment le caractère de légéreté, reproché mal à-propos à la nation entière, obfervons que la coeffure en cheveux ronds a été adoptée de préférence par les patriotes, les terroriftes de Robespierre, appelés fans-culotte, & les terroristes de Louis XVIII, appelés incroyables; réacteurs, compagnons de Jéfus, du foleil, &c. Cette coëffure étoit celle des anciens peuples les plus connus, les Grecs, les Romains, &c. ; celle des modernes jufqu'à Louis XIV; elle eft celle des citoyens de la campagne, des artians, des manoeuvriers; elle convient à merveille par fa fimplicité à la propreté & à la fanté; elle fait très-bien avec les cafques, même avec le chapeau à trois cornes; Charles XII étoit en cheveux ronds; avec cette coëffure le foldat peut très-habituellement fe laver la tête, & il n'a aucun embarras pour fe coëffer. Il feroit inutile de s'étendre davantage fur un objet qu'on a cru effentiel de traiter, mais dont il doit être fuffifant d'avoir indiqué les avantages.

FRIVOLITÉ. Les hommes font frivoles quand ils s'occupent férieufement des objets frivoles ou quand ils traitent légèrement les objets férieux. On eft frivole parce qu'on n'a pas affez d'étendue & de jufteffe dans l'efprit pour mesurer le prix des chofes, du tems & de fon existence. On eft frivole par vanité, lorfqu'on veut plaire dans le monde où on eft emporté par l'exemple & par l'ufage; lorfqu'on adopte par foibleffe les goûts & les idées du grand nombre; lorfqu'en imitant & en répétant on croit fentir & penfer. On eft frivole lorfqu'on eft fans paffions & fans vertus. Alors pour fe délivrer de l'ennui de chaque jour, on fe livre chaque jour à quelqu'amufement qui ceffe bientôt d'en être un : on fe recherche fur les fantaifies, on eft avide de nouveaux objets, autour defquels l'efprit vole fans méditer, fans éclairer; le cœur refte vide au milieu des fpectacles, de la philofophie, des maîtreffes, des affaires, des beaux-arts, des magots, des foupers, des amufemens, des faux devoirs, des differtations, des bons mots, & prefque toujours de belles actions.

Si la frivolité pouvoit exifter long-tems avec de vrais talens & l'amour des vertus, elle détuiroit l'un & l'autre; l'homme honnête & fenfé fe trouveroit précipité dans l'ineptie & dans la dépravation.

Que de réflexions devroient faire naître le à l'immoralité fi révoltante de nos incroyables, peu de mots que l'on vient de lire fur la fri

volité! A quels dangers doit être expofé l'homme frivole, avec que! mépris il doit être regardé par l'homme fenfé; quelle confiance accorder à 'homme frivole! Quel efpoir fe permettre fur fon compte! talens, vertus, tout est mis à l'écart par l'homme frivole, chez une nation furtout où la légereté tient au caractère, & où jufqu'à préfent on a été fi indulgent envers les jeunes gens fur leur frivolité! Oh! vous, jeunes François, deftinés à foutenir la gloire de vos immortels concitoyens, lorfque vous ferez appelés à prendre les armes pour combattre les ennemis de la patrie, craignez de ne vous y être pas pris affez

tems pour étouffer ce penchant fi dangereux à la frivolité. Appliquez vous de bonneheure à l'étude & à l'accompliffement de vos devoirs comme homme & comme citoyen; mettez tous vos foirs à vous faire une feconde nature par l'habitude conftante au travail, & à tout ce qui peut étouffer les germes de la frivolité.

FROID. Savoir fe préferver du froid eft un objet dont en général, on ne s'eft ferieufement occupé en France pour aucune claffe de citoyens. Nous devons nous borner à celle des militaires.

Vêtus trop chaudement en été, nos foldats ne peuvent fe garantir, ni du froid, ni de l'humidité, ni de la pluie en hiver, Leurs habits trop courts & trop étroits ne font que des vêtemens de parade, leurs culottes trop ferrées, furtout aux articulations, les gênent ou les bleffent ; leurs guêtres & leurs fouliers les fatiguent, & ne les garantiffent ni de la pouffière, ni de la boue, ni du froid, ni de l'humidité.

Un gilet à manches d'un drap léger, une vefte courte croifée, une redingotte, des culottes à haute ceinture defcendant jufqu'au talon; un chauffon de cuir & par deffus une bottine, venant jufqu'au deffus des chevilles du pied; doubles femelles fortes, garnies en entier de cloux rivés entre deux cuirs; on pourroit pour l'été donner deux grandes culottes & deux gilets en toi'e écrue Rien ne feroit plus effentiel fans doute que de pouvoir endurcir le foldat, & diminuer fes befoins & fes dangers; mais rien ne feroit plus dangereux en même tems que de ne pas prendre toutes les précautions qui peuvent aider à conferver fa force & fa fanté. Les foldats françois ne font nés ni dans les déferts, ni au milieu des glaces de la Sybérie: accoutumés à un climat tempéré, le grand froid leur eft infupportable; il faut donc les en garantir, ainfi que de l'humidité qui pourroit nuire à leur fanté ou la détruire.

FRONDE. On lit dans Montagne des réflexions fur des armes à feu, qui peut-être ne fembleront

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pas déplacées ici.« Les batailles des anciens, dit-il, fe voient bien mieux conteftées. Ce ne font à cette heure que déroutes. Et chofe que nous af pelons à la fociété d'un fi grand hafard, doit être en notre puissance le plus qu'il fe peut : il eft bien plus apparent de s'aflurer d'une épée que nous tenons au poing, que du boulet qui efchappe de notre piftolet, en laquelle il y a plufieurs pièces, la poudre, la pierre, le rouet, defquelles la moindre qui vienne à faillir vous fera faillit votre fortune. On affure peu furement le coup que l'air vous conduit.

Et quo ferre velint permittere vulnera ventis,
Enfis habet vires & gens quacumque virorum eft
Bella gerit gladiis.

LUCAIN; livre VIII, v. 384, &c.

"Mais quant à cette arme-là fauf l'étonnement des oreilles; à quoi déformais chacun eft apprivoifé, je crois que c'est une arme de fort peu d'effet, & efpère que nous en quitterons un jour l'ufage. »

« Les anciens avoient plufieurs moyens à quoi l'ufage les dreffoit, & qui nous femblent incroyables par expérience par où ils fuppléoient aux défauts de notre poudre & de nos boulets, ils dardoient leurs piles de telle roideu:, que souvent ils en enfiloient deux boucliers & deux hommes armés & les coufoyent. Les coups de leurs frondes n'étoient pas moins certains & lointains. »

« Les Gaulois nos coufins en Afie, hзiffoient ces armes traîtreffes & volantes: duits à combattre main à main avec plus de courage. Les grandes bleffures ne les touchent point tant, lorfque la plaie eft plus large que profonde, ils croyent combattre encore d'une manière plus honorable; mais fi ils fe fentent frappés de la pointe d'une flêche ou d'un boulet, qui ne leur faffe qu'une petite bleffure en apparence; alors ils fe couchent par terre transportés de rage & de honte, de ce que fi peu de chofe leur donne la mort. Tite-Live, livre 38, chap. 21."

Au moment où Montagne paroiffoit faire aufli peu de cas des armes à feu, elles étoient à peine connues, d'une conftiuction très imparfaite, trèspefantes, très difficiles à manier; les prejuges de la chevalerie fubfiftoient encore; la gendar merie étoit encore en réputation. François I. avoit mis à honneur d'être reçu chevalier, & rien ne pouvoit rendre plus fuperflue cette bravoure fi renommée, & ces hauts-faits d'armes tant vartés, qu'une découverte où l'homme le plus foible & nême le plus láche, pouvoit arec une arme, qui lui permettoit de le tenir très

éloigné,

éloigné, donner la mort fans courir de grands dangers; mais depuis que les armes à feu ont été autant perfectionnées, depuis l'inftant où elles font devenues les feules en ufage, le péril ell égal de part & d'autre, & il faut avoir beaucoup de fermeté & de courage pour refter exposés aux coups de canons. La maniere même de fe fervir de ces derniers, en les faifant traîner & tirer jufqu'au milieu des rangs ennemis, a rendu cette arme tellement meurtrière & deftructive, furtout lorfque l'infanterie fe décide à attaquer avec la bayonnette, la troupe ébranlée & ravagée par l'artillerie, qu'il faut efpérer que de tels moyens de deftruction feront toujours craindre davantage de fe faire la guerre. Qui le croiroit cependant, un officier françois, recommandible par fes connoiffances, le chevalier Folard, a voulu foutenir les avantages des armes & de la baftilique des anciens; mais on croiroit faire trop peu de cas des connoiffances des militaires qui liront cet article, fi l'on s'attachoit prouver les erreurs du chevalier Folard fur tet objet comme fur quelques autres. Nous nous Contenterons de dire que nous devons à cet fficier eftimable des difcuffions & des recherches rès-utiles, qui ont fervi à exciter l'émulation. le quelques militaires, & à augmenter les lumières ur cet art, devenu fi néceffaire & fi deftructeur.

FRONT DE BANDIERE. C'est à proprement arler le front du camp ou l'espace qui eft deftiné la tête du camp, à recevoir en bataille les roupes qui occupentle camp; ainfi, grace à notre nanière de nous mettre en bataille fur trois de auteur, & à l'efpace qu'on laiffe entre chaque ataillon pour la place & la manoeuvre de fes anons; les fronts de bandière de nos camps bnt d'une étendue immenfe, & exigent pour leur areté une grande quantité de gardes; & fi ce ont des camps de pofition, il faut pour leurs léfenfes multiplier les redoutes & les redans. ous quelque point de vue que l'on puiffe enviager d'auffi grands inconvéniens, il doit paroître ffentiel d'y remédier, pour atteindre ce but. Ne faudroit-il pas enfin décider la préférence en aveur de l'ordre à quatre de profondeur comme rimitif, c'est-à-dire comme devant indiquer 'étendue du front du bataillon? Les doublemens i huit ou feize devant fe faire par division ou fection, en laiffant vides entr'elles les efpaces Occupés précédemment par les compagnies ou divifions, un doublement plus confidérable ne pouvant plus être que celui du bataillon entier. Dans ce nouvel ordre de chofes, en fuppofant les bataillons de huit compagnies de fusiliers, quelque nombre qu'on adopte enfuite de com pagnies de chaffeurs & de grenadiers, elles n'entreroient jamais dans l'ordre de bataille du bataillon, étant deftinées à la guerre, les chaffeurs à marcher à l'avant-garde, les grenadiers à la Art Milit. Suppl. Tome IV.

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réferve. D'après ces idées & celle de ne plus donner aux bataillons des pièces de bataille, il femble très-impoffible de racourcir confidérablement le front de bandière d'un camp, c'eftà-dire à-peu-près de la moitié. Encore faudroit-il diftinguer deux chefes, le terrein fur lequel on doit camper, & fi le camp eft de paffage ou de pofition. Si le camp n'eft que de paffage peut-être faudroit-il camper en profondeur c'eft-à-dire de manière que chaque bataillon pût fe mettre en colonne dans chaque rue de fon camp. Si le camp eft de pofition, il eft alors effentiel de le fortifier avec des redoutes à flêche, des redans, &c., & il faut étendre le front de bandière en raison des défenses à faire par l'artillerie, la moufquetterie ou la maffe des troupes. Les militaires inftruits par l'étude ou par l'expérience, fentiront facilement l'avantage de réferrer l'étendue d'un camp, d'où doit s'enfuivre la plus grande facilité pour le défendre & mille autres avantages incalculables. Dans la guerre de la liberté, les François ont négligé en général, les fourrages & les campemens, deux parties effentielles de la guerre, qui exigent des précautions très-multipliées & des connoiffances trèsétendues; mais il n'en rete pas moins important d'en recommander la connoiffance, & de proposer tous les moyens de les mettre à-exécution de la manière la plus avantageufe & la plus favante.

FRUGALITÉ. La frugalité a triomphé partout du luxe militaire & s'eft emparée de fes trophées. La vertu de la frugalité va beaucoup plus loin que la fobriété; elle porte auffi fur les mœurs dont elle est le plus ferme appui. Les Lacédémoniens en faifoient profefiion expreffe, les Curius, les Fabricius, les Camilles, ne méritèrent pas moins de louanges à cet égard que par leurs grandes & belles victoires. Phocion s'acquit le titre d'homme de bien par la frugalité de fa vie conduite qui lui procura les moyens de foulager l'indigence de fes compatriotes, & de doter des filles vertueufes que leur pauvreté empêchoit de s'établir.

Quand on n'eft touché comme dans nos mœurs actuelles que de l'éclat de la magnificence, on eft peu difpofé à louer la vie frugale des grands hommes, qui paffoient de la charrue au commandement des armées, & peut-être commençons-nous à les dédaigner dans notre imagination. La raifon néanmoi s ne voudroit pas que nous en jugeaffions de la forte; & puifqu'il ne feroit pas à-propos d'attribuer à la libéralité les excès des prodigues, il ne faut pas non plus attribuer à la frugalité, la honte & les baffeffès de l'envie.

Rendons plus de juftice aux tems des beaux jours de la république romaine. Les grands hommes

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qui s'y firent remarquer par leur frugalité, fachant fe borner à l'héritage de leurs ancêtres, ne furent point tentés de changer l'ufage groffier de ce qu'ils poffedoient pour embraffer le fuperfiu; nourris felon les règles de l'auftère frugalité, ils furent les reffources de leur patrie dans les guerres périlleufes qu'elle eut à foutenir.

A da, reine de Carie, ayant envoyé à Alexandrele Grand, des mets délicatement préparés, & lui ayant offert fes officiers pour le fervice de fa table, ce prince les congédia. Léonidas mon gouverneur, leur dit-il, m'a pourvu de cuifiniers affez habiles; beaucoup marcher dès le lever du foleil me prépare un excellent diner; & diner fobrement m'apprête un fouper non moins exquis.

Pour fentir le prix de la frugalité, il faut en jouir ce ne feroit point ceux qui font corrompus par les délices, dit l'auteur de l'Erit des lois, qui aimeront la vie frugale; & fi cela avoit été commun, Alcibiade n'auroit pas fait l'admiration de l'univers. Ce ne feroit pas non plus ceux qui envient ou qui admirent le luxe des autres qui vanteront la frugalité; des gens qui n'ont devant les yeux que des hommes riches ou des hommes auffi miférables qu'ils le font, déteftent leur mifère fans aimer & fans connoître ce qui fait le terme de la mifère.

L'amour de la frugalité eft excité par la frugalité, & c'eft alors qu'on en fent les précieux avantages; & l'amour de la frugalité bornant le defir à l'attention que demande le néceffaire pour foi, réserve le fuperflu pour le foulagement de fes frères ou le bien de fa patrie.

C'est avec la frugalité qu'on parvient a diminuer les bagages d'une armée, à empêcher les maladies, à s'oppofer aux dépenfes fuperflues, à s'affurer les moyens de faire des marches rapides & de grands mouvemens, &c. Mais cette frugalité il ne faut pas fe borner à la prêcher aux foldats; depuis le général jufqu'au dernier officier tous doivent en donner l'exemple.

FUYARDS. Une terreur panique s'étant emparée de l'armée de Cecina, pendant la nuit qui fuivit la première journée des Long-Ponts, tous les foldats prirent la fuite & gagnoient la porte du camp oppofé à l'ennemi, quand Cecina ne pouvant les retenir, ni par prières, ni par menaces, fe coucha au travers de la porte; l'horreur de fouler aux pieds leur général fut une barrière pour eux.

Le grand Condé au combat de la porte SaintAntoine, voyant que fes troupes commençoient à fuir, fe met à leur tête, ralentit peu-à-peu fa marche, fait rentrer fes troupes en ordre; il

fait enfuite une converfion vers l'ennemi; fes troupes le fuivent & il eft victorieux.

L'historien Velli parle des fuyards à l'inftar de l'homme taillable, volonté, abonné, queftable, corveable, main-mortable, termes aufli barbares que la chofe qu'ils fignifioient, fi méprifables enfin qu'on ne croyoit pas pouvoir réduire à un état plus humiliant, le lâche qui oubliant fa patrie fuyoit honteufement devant l'ennemi. Cette manière de punir les fuyards, pourroit pour le bien du fervice & la gloire de l'Etat, faire le fujet d'une loi bâfée fur cette idée & rendue analogue à notre conftitution actuelle.

FUITE. La fuite peut être vraie ou fimulée; vraie, elle peut entraîner les plus grands maux ; fimulee, elle peut être le ftratagême le plus heu reux pour s'affurer la victoire. Ecoutons Mcntagne, toujours fi bon à confulter. Plufieurs nations très-belliqueufes, dit cet excellent obfervateur, fe fervoient en leur fait-d'armes de la fuite pour avantage principal, & montroienr le dos à l'ennemi plus dangereufement que vifage. Les Turcs en retiennent quelque chofe, & Socrate & Platon fe mocquent de laches qui avoient défini la fortitude; fe tenir forme en fou rang contre les enn. mis. Quoi fit, il feroit-ce donc lacheté de les battre en leur faifant place, & lui allègue Homère qui loue en neus la fcience de fuir; & parce que lâches fe ravifant advoue cet ufage aux Scythes: il lui allègue encore l'exemple des gens de pied Lacédémoniens

nation fur toutes duites à combattre de pied ferme ) qui en la journée de Platée, ne pouvant ouvrir la phalange perfienne s'advifèrent de s'ef carter & tourner le dos pour par l'opinion de leur fuite, faire rompre & diffoudre cette maffe en les pourfuivant, par où ils se donnèrent la victoire. A ces réflexions, on peut en ajouter d'autres avec quelques exemples. La ffer pénétrer Laffer l'ennemi dans le pays, afin qu'il s'affoibliffe par des garnifons. Se retirer devant lui pour pouvoir l'attirer dans des embufcades; le harceler fans ceffe, font trois manières de foutenir avantageufement la guerre défenfive.

Dans un combat contre les habitans de Masage, qui fortirent de leur ville pour combattre Alexandre qui vouloit les affiéger, ce prince rangea fon infanterie à un mille de diftance de fa cavalerie, & il donna ordre à celle-ci de s'avancer contre les barbares, & enfuite de fe retirer en feignant l'épouvante. Les Indiens croyant que c'étoit un effet de leur valeur, fuivirent les Macédoniens comme fi ils avoient gagné la bataille; mais quant ils furent arrivés à l'endroit où Alexandre avoit pofté fa phalange, la cavalerie & les archers fondirent far leurs flancs, tandis que le roi les chargeoit de front.

A la bataille de Celano, entre Charles d'Anjou & Conradin, Erard de Valeri, après avoir communiqué fon deffein au roi, fe détache, fuivi d'un corps de cavalerie comme pour faire le coup de lance; puis feignant d'être épouvanté, il prend la fuite du côté qui lui paroît le plus fûr; l'ennemi trompé par ce ftratagême, quitte fes rangs pour le pourfuivre ; alors Charles attaque le corps en front, tandis qu'Erard tournant br.de l'attaque en flanc; les ennemis font défaits, & donnent une preuve du danger de rompre fes rangs en pour

fuivant l'ennemi.

FUREUR. Divinité allégorique; les poëtes la reprefentent la tête teinte de fang, le vifage déchiré de mille plaies & couvert d'un cafque tout fanelant; ce dieu, ajoutent-ils, eft enchaîné pendant la paix, les mains liées derrière le dos, afis fur un amas d'armes, frémiffant de rage, & pendant la guerre ravageant tout, après avoir rompu fes chaînes.

Voici la defcription qu'en fait Pétrone, dans fon poëme de la guerre civile entre César & Pompée.

Abruptis ceu liber habenis

Sanguinem late tollit caput oraque mille,
Valneris confoffa cruenda caffide velat,
Haret Mavortius lava de tribus ambo,
Innumerabilibus telis gravis; atque flagranti
Supite dextra minax, terris incendia portat.

La fureur qui eft le degré extrême des paffions violentes, a été appliquée avec jufteffe à tous les maux de la guerre chez le poëte, chez l'artifte, cette paffion n'eft quede l'enthoufiafme; chez le guerrier, c'est une véritable frénéfie; tous les devoirs de l'humanité font oubliés; le combat fe livre, le foldat tombe bientôt dans une efpèce d'ivreffe, & déjà il n'eft plus que le meurtrier de fes femblables. Sera ce donc toujours inutilement que la philofophie tonnera contre les fléaux deftructeurs de la guerre? le defpotifme, l'am bition, l'avarice, l'amour du brigandage, le defir de fatisfaire les paffions les plus dangereuses & les plus viles, ne cefferont-elles jamais de dominer les hommes & de les faire continuellement s'entre-détruire de leurs propres mains?

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FUSIL. Quoique l'ufage perfectionné de l'artillerie légère ait infiniment diminué celui du feu de la moufquetterie, on fe fert cependant encore beaucoup de ce dernier, & il feroit à fouhaiter de pouvoir en tirer tout le parti dont il pourroit être fufceptible; en cherchant à rendre encore meilleure la conftruction de nos armes à feu.

Nous allons parcourir fucceffivement les différens moyens de perfection, dont nous avons pu avoir la connoiffance, & d'abord ceux à employer pour les armes à feu actuellement en ufage.

1o. Dans les modèles donnés pour les armes des troupes à cheval; parmi les défauts principaux, fur cuivre. L'écrou d'une vis de fer arrache on remarque que toutes les vis font taraudées appuie le grand reffort ne peut avoir afsez de force néceffairement le filet du cuivre. Le cuivre qui pour en foutenir le mouvement.

2o. Les canons de piftolets n'ont que fept pouces; cette longueur n'eft pas proportionnée au calibre; il faut qu'ils aient au moins huit pouces, la portée y gagnera beaucoup.

3°. On eft dans le pernicieux ufage de percer les canons à l'eau avec des tournants très-rudes, ce qui eft très-nuifible, parce qu'il eft impoffible que l'ouvrier puiffe répondre de la jufteffe de la rection; le canon devient courbe comme un arc; on eft obligé de le redreffer fur une enclume coups de marteau, & néceffairement il fe forme par cette opération des inégalités dans le canon.

à

Pour pouvoir compter fur la direction & la folidité des canons, il faut néceffairement réformer l'ufage de les forer à l'eau; & la meule dont on fe fert aigrit le fer et le rend fec; il n'eft pas poffible de rendre les canons d'une épaiffeur égale, à caufe de la rapidité avec laquelle cette meule enlève le fer; elle prend toujours plus d'un côté que de l'autre.

On fait que la poudre fait effort fur tous les points pour fe dilater; fi elle trouve une partie plus foible, la force s'y porte néceffairement, & très fouvent le canon médiocrement chargé crève, ou bien il eft fous peu hors d'état de fervir.

On dira peut être que tous les canons font éprouvés avant de les livrer; mais ceux qui ont vu la manière dont fe font les épreuves dans les arfenaux, les trouvent abfolument inutiles.

On éprouve les canons n'étant que dégroffis, & il faut les limer & finir après cette épreuve. On peut aisément, juger que fi on ôte du fer au canon après l'épreuve, il n'a plus la même force. On donne pour raifon de vouloir ménager les culafies; mais en y mettant du bon fer, elles ne cafferoient dans aucun cas.

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