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de terrein, de fe ménager des débouchés avancés, & de former des rentrants qui réduifent l'ennemi à attaquer les faillants. On pourroit feulement, pour remplacer l'obftacle oppofé par la rivière, placer fur la ligne, de diftance en diftance, des redoutes qui affureroient la communication avec les forts, & qui égaliferoient les forces de l'une & de l'autre pofition.

Le tems n'eft-il pas arrivé où l'on doit rechercher avec la plus grande attention, les moyens les plus victorieux d'affurer la défense des nouvelles frontières de la république, de fes côtes & de fes colonies; afin qu'à l'ombre de fa puiffance, non-feulement les nouveaux & les anciens habitans de ce vafte empire foient garantis des dévaftations que chaque guerre ne manqueroit pas de leur occafionner; mais encore afin d'ôter aux ennemis jufqu'au moindre efpoir de pénétrer dans un pays, dont les abords feroient auffi inexpugnables. Les républicains doivent à leur patrie de concourir à fa fplendeur & à fa défense, en y facrifiant leurs biens & leurs vies; mais le gouvernement doit aux républicains la tranquilité de leurs familles & la fureté de leurs poffeffions. Une défenfive folidement établie fur toutes les nouvelles frontières, feroit le plus beau préfent que le gouvernement pourroit faire aux républicains français & le plus digne de lui. Ce feroit en même tems élever fa puiffance au plus haut point qu'elle puiffe atteindre. Ses armées, libres d'opérer partout où la fagefle de fes projets pourroit les diriger, feroient d'autant plus redoutables que même après des défaites, elles trouveroient un afyle affuré à l'abri des barrières que fa prévoyance leur auroit ménagées. L'ennemi ne pouvant les franchir, n'auroit aucuns moyens pour empêcher qu'elles ne repriffent de nouvelles forces, & ne fuffent bientôt en état de lui porter de nouveaux coups. Ce feroit comme les têtes de l'hidre. Il fau

droit que toutes les armées puffent être détruites à la fois. Heureufe fituation! quand fera-t-elle fentie? Quelqu'heureux génie convaincra fans doute bientôt le gouvernement de ces vérités importantes. C'eft le devoir de tout bon citoyen né avec quelqu'aptitude pour ces fortes de matières. L'art confervateur, ce préfent précieux de la divinité, mérite le foin de tous les hommes.

Puiffent enfin les préjugés, les efprits de corps, les paffions individuelles, les amours propres fi déplacés, fe taire devant le befoin urgent qu'a la République, de remplir le projet auffi vafte que néceffaire, de la défenfive de fes nouvelles frontières, pour ne s'occuper que du choix des moyens les moins onéreux, les plus forts, & dont la défenfe exige la moindre quantité

d'hommes !

FORTUNE. Ce mot a deux acceptions; fortune, bonheur ou malheur, bonne ou mauvaife fortune; fortune, richeffe, etc.

Les Romains dans le choix de leurs foldats faifoient attention à la fortune, ils mettoient les moins riches parmi les velites. Servius en divifant le peuple Romain en fix claffes, prit pour bafe de fa divifion la richeffe des individus. Les

citoyens plus ou moins fortunés compofèrent its premières claffes, la dernière renferma les plus pauvres & fut exempte du service militaire. Ce fyftême très-fage fut affez exactement fuivi partout où l'on fe foumit strictement au régime de la milice réelle; celle féodale vint déranger cet ordre, la milice ftipendiaire le détruifit tout-à-fait, en n'admettant en général dans les troupes que des hommes entraînés au fervice par la débauche, la pareffe ou l'indigence. On a fenti depuis long-tems l'inconvénient des foldats fans fortune, mais ce font eux qui conviennent le mieux aux defpotes, & ce ne peut être que chez un peuple libre, où l'on peut faire revivre le principe fi effentiel du fervice militaire dû par tous les citoyens.

Pour remplir cet objet important, il faut être inexorable fur la néceffité du fervice militaire & fon obligation; jamais aucune faveur, aucun privilége, aucune exemption, que celles motivées par les lois; que fervir foit un honneur, fuite de l'age, des infirmités, d'une conftruc un devoir; que ne pas fervir ne foit que la tion vicieufe, ou de l'extrême pauvreté. Quelques hommes inftruits ont defiré des garanties dans vos électeurs, dans vos légiflateurs, dans vos citoyens occupant d'autres places, & combien n'en avez-vous pas un plus grand befoin dans vos défenfeurs, dans les citoyens chargés de la police générale, & d'affurer la tranquillité publique & l'exécution des lois !

tile & méprifé; ce mépris doit être à-la-fois Que le luxe foit honteux, que l'or foit inule principe & l'effet de la modération & de l'aultérité. La vie la plus pénible ceffe de gêner les ames hautes, les grands facrifices ne font les hommes dès qu'elle eft glorieufe ; & dans pas toujours auffi cruels qu'ils le paroiffent aux ames vulgaires, un certain fentiment de fierté & d'ef time pour foi-même élève l'ame & la rend capable de tout; l'orgueil eft le premier des tyrans

ou des confolateurs.

Telle fut Lacédémone, telle fut Rome dans fon berceau: mais auffitôt que le vice & les plaifirs y eurent pénétré, tout jufqu'aux chofes qui doivent être le prix de la vertu, tout, dis-je, y fut vénal; l'or y fut donc recherché, nécef

faire, eftimé & honoré. Voilà précisément l'état où nous nous trouvons par nos connoiffances, ros goûts, nos befoins nouveaux, nos plaifirs & nos commodités recherchées. Qu'on fafle revivre ks anciennes mœurs de Sparte & de Rome, peut-être n'en ferons-nous ni plus ni moins feureux ; mais l'or fera inutile ; mais nous aurons plus d'amis de la chofe publique & de la patrie, X le devoir deviendra bientôt une habitude.

Les hommes n'ont qu'un penchant décidé, c'eft eur intérêt; s'il est attaché à la vertu, ils font ertueux fans effort; que l'objet change, le ifciple de la vertu devient l'efclave du vice, ans avoir changé de caractère.

Les mœurs d'un peuple font le principe actif e la conduite, les lois n'en font que le frein; elles-ci n'ont donc pas fur lui le même empire ue les mœurs. On fuit les moeurs de fon fiécle a obéit aux lois; c'est l'autorité qui les fait qui les abroge; les moeurs d'une nation lui nt plus facrées & plus chères que fes lois. omme elle n'en connoît pas l'auteur, elle les garde comme 1on ouvrage & les prend touurs pour la raifon.

Cependant il n'eft pas fi difficile qu'on voutoit le faire croire de changer chez certains uples les mœurs les plus dépravées & de les riger vers la vertu, pourvu que ce ne foit is un projet annoncé, & que les ordres à cet ard ne foient que dans l'exemple. Une tell volution paroîtroit le chef-d'œuvre des entrerifes; mais elle le feroit plus par fon effet que at fes difficultés. N'oublions pas que les honimes int plus conféquens dans leurs moeurs que dans urs jugemens.

Quant à la bonne ou mauvaise fortune, les anciens convaincus de bonne heure, combien es hommes font foumis individuellement à une ortune plus ou moins malheureufe, s'emprefèrent d'élever des autels à cette divinité, qui emble s'être emparée fi exclufivement du fort les humains. Les modernes eurent les mêmes dées à ce fujet, & fuivant leur religion il rulèrent de l'encens ou devant une idole ou devant le fimulacre de quelques faints. Le cardinal de Mazarin ne vouloit employer que les hommes heureux : & les moralittes, malgré leurs fages réflexions, ne purent pas ramener les hommes à fe convaincre que la bonne ou la mauvaise fortune, étoit toujours la fuite de la bonne ou de la mauvaise conduite, des calculs vrais ou faux, de l'ignorance ou de l'inftruction, etc. Ainfi à la guerre ne faut-il, jamais attribuer les fuccès ou les revers à la bonne ou mauvaise fortune, mais bien à l'habileté ou à l'impéritie du général où des officiers, à la bravoure ou à

la lâcheté des troupes, à leur bonne ou mauvaife formation, aux manoeuvres favantes ou à celles dictées par l'ignorance, etc. Virtute duce conite fortuna.

FOSSÉ. Dans un dictionnaire militaire abrégé, compofé par le général Belair, & mis à la fuite de fes élémens de fortification, cet officier parle de la poffibilité d'entourer les places avec des foffes, qui, quoique peu profonds, feroient établis de manière que la furface des eaux dont on pourroit les remplir, feroit de douze ou quinze pieds plus élevée que les fols environnans; mais il n'entre pas à ce fujet dans de plus grandes explications, & garde le plus profond filence fur les moyens de remplir ce projet, d'où s'enfuivroient de fi grands avantages.

Il pourroit être avantageux de faire des foffés dans beaucoup de circonftances à la guerre pour défendre le paffage d'un gué ou d'une rivière fortifier un camp devant une retirade, pour embarraffer les chemins qui menent à un poste, maison, ou village.

Si l'ennemi a l'imprudente hardieffe de paffer un foffé en préfence de vos troupes, faififfez le moment où une partie commence à l'avoir paffé pour tomber deffus, ainsi que fur ceux qui font encore occupés à gravir pour arriver fur le terrein.

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FOUILLER. Les rufes & les furprises faifant une partie effentielle de l'art de la guerre, on ne fauroit prendre trop de précautions pour ne pas tomber dans les pièges de l'ennemi; il faut donc fans ceffe faire reconnoître & fouiller le pays par où doit paffer votre armée, ou même un fimple détachement, les gorges, les iffues, les ravins, les bois, les villages, les chemins en avant, en arrière, fur les flancs; tous les

objets enfin qui peuvent cacher des ennemis doivent être fcrupuleufement vifités.

FOULE. Cas de foule. Sous le règne du defpotifme & des priviléges, toutes les ordonnances relatives au logement des gens de guerre & à plufieurs autres objets du fervice militaire, vouloient que dans le cas de foule, toutes les claffes de citoyens fuffent privées de la prérogative qu'elles avoient obtenue, de ne point loger des gens de guerre ; mais que falloit-il entendre par cas de foule; & quelle étoit la loi qui féparoit le cas de foule de celui qui ne l'étoit pas? voilà où les lois étoient peu fatisfaifantes quoiqu'elles n'euffent dû rien laiffer à l'arbitraire; plus on lui enlève, plus l'ordre gagne ; Depuis l'acceptation d'une conftitution bâfee fur les droits de l'homme, la liberté & la juftice, l'ordre des exemptions & des privilèges a dû changer, & l'on a dû débarraffer le plus poffible l'homme malheureux ou peu fortuné de toutes les charges de l'Etat. Ainfi aulieu, comme autrefois, de faire fupporter les charges de l'Etat, d'abord & toujours aux claffes inférieures, & d'accabler de privilèges celles fupérieures compofées d'hommes riches, nobles, eccléfiaftiques, hommes de lois, financiers, hommes en place, etc., le respect dû à l'humanité fouffrante ou indigente a interverti cet ordre injufte & barbare, & a porté les privilèges, s'il peut y en avoir dans un état libre où tous les hommes font égaux en droits, fur les citoyens fortunés & fur ceux aifés, & a renvoyé au cas de foule & d'abfolue néceffité, d'exiger des fecours de la clafle laborieufe & trop fouvent indigente.

FOUR. Dans le dictionnaire militaire au mot four, on renvoie au mot pain de munition, & le mot pain ne se trouve pas dans le dictionnaire; & dans celui munition il n'y eft nullement mention des fours. Au mot fubfiftance, l'auteur a parlé des fours à conftruire en campagne pour confectionner le pain pour le foldat; mais il n'a nullement difcuté fi on ne devroit pas préférer aux fours en máçonnerie, toujours fi difpendieux, fi difficiles, & quelquefois impoffibles à faire faute de tems ou de matériaux, les fours en forte toe, tels que ceux dont on s'eft fervi dans les armées du roi du Pruffe, ou ceux propofés dans l'excellent ouvrage fur les fubfitances de M. de Launay.

Cet objet infiniment effentiel, mérite d'être approfondi, & devroit devenir le fujet des recherches des mécaniciens, des architectes, des chimiftes, etc., tant pour les fours néceffaires à la guerre, que pour ceux dont on auroit befoin de fe fervir pendant la paix.

FOURCHE. Dans le régiment Dauphin infanterie, les fergens des grenadiers étoient armés d'une fourche, en mémoire d'une redoute enlevée par ce régiment dans les guerres d'Italie, & défendue par des foklats armés de fourches. Cette forte d'arme doit être en effet terrible pour fe défendre contre une escalade; auffi recommande-t-on d'en avoir dans les magafins,

afin de pouvoir en diftribuer aux foldats chargés de repouffer l'ennemi dans une furprise par efcalade; cette arme peut fervir non-feulement à renverser les échelles qu'on planteroit contre les retranchemens, mais encore à bleffer & à repouffer les hommes prêts à y monter deflus. On pourroit aufli s'en fervir pour fe défendre contre la cavalerie; mais il faudroit peut-être auparavant les avoir rendues utiles ou néceffaires ailleurs Voyez à ce fujet l'idée ingénieufe du général Lacuée, ( au mot colonne dans ce fupplément, paragraphe IV, contre la cavalerie ).

FOURGON. Les fourgons dont on fe fert dans les armées, font en général trop lourds, trop maffivement conftruits & d'une voie trop large, ils abîment les chemins qui font encore confervés & ne peuvent pas fe tirer de ceux déjà gâtés. Des charriots très-légers à quatre roues, couverts de toiles peintes à l'huile, & montés fur des roues hautes & point maflives, feroient infiniment préférables. On les attele roit d'un feul mulet au brancard, & on mettroit devant deux ou quatre boeufs avec des colliers, fuivant que l'exigeroient les mauvais chemins ou le poids dont feroient chargés les charriots; excepté dans les montagnes inacceffibles, les charriots légers à voie étroite paleront partout & feront d'une grande économie. Un de ces charriots attelé d'un mulet tier, portera partout de vingt à vingt-quatre quin& de deux boeufs conduits par un feul charre Laux pour lefquels, avec les fourgons actuels, il faudroit quatre chevaux, & avec les bêtes de fommes huit chevaux ou mulets & quatre char mieux confervés & foignés, l'on gagneroit retiers. Les objets tranfportés feroient beaucoup en même tems beaucoup fur la nourriture & pour l'agriculture; un mulet, des boeufs pai tront où des chevaux ne fauroient trouver de quoi vivre; les boeufs n'ont point befoin d'avoine, les mulets en mangent. moins que chevaux, & l'on n'a pas affez obfervé combien cet alimeut néceffaire aux chevaux, eft coûteux & difficile à fe procurer, pefant à tranfporter & nuifible à l'agriculture, parce que de toutes les graminées l'avoine eft celle qui effritte davantage la terre.

les

Cet objet bien plus important qu'on ne penfe mérite d'étre médité & approfondi. La partie des

tranfports des fubfiftances, des fourrages, des malades, des liquides, de l'habillement, équipement, armement, etc., eft fans contredit la plus coûteufe & la plus embarraffante dans les armées, l'artillerie elle-même, au moins celle de parc, & peut-être les caiffons de celle dite légère, pourroit aufli être traînée par des boeufs attelés avec des colliers en avant d'un mulet attelé au brancard. Aulieu d'avoir à la fuite des armées, des boeufs deftinés à la nourriture dont on ne fait aucun ufage, on les emploieroit aux charrois, en ayant le foin de les remplacer exactement à mesure qu'on en tueroit ou qu'il en mourroit; ce qui feroit très-facile à calculer. D'ailleurs en habituant le foldat à manger de tems en tems de la viande falée ou fumée, en y joignant des boiffons analogues à cette nourriture, on ne feroit pas néceffité de faire une auffi grande confommation de viande fraîche, & les foldats fe déshabitueroient enfin de fe nourrir avec de la foupe, dont la confection entraîne de fi grands inconvéniens, & dont la nourriture eft auffi peu corroborative. Il faut pour les hommes expofés à des travaux pénibles à de grandes marches, &c., des alimens qui Occupent beaucoup de place dans l'eftomac & préfentent de la réfiftance à la digeftion.

FRAIZER. Dans la fortification la fraize est une espèce de paliffade, qui aulieu d'être plantée verticalement l'eft horifontalement, il peut être avantageux de fraizer un bataillon, une colonne, &c., mais avec quoi, comment? Voyez dans ce fupplément au mot colonne, paragraphe IV la manière d'utilifer pour cet objet les mats des tentes, avec tous les détails dans lefquels eft entré le général Lacuée à qui l'on doit cette idée.

FRANÇAIS. Envain oublie-t-on les vérités les plus effentielles & les mieux démontrées ; on ne fauroit trop cependant les répéter, ne duffent-elles être utiles qu'une feule fois. Depuis l'inftant où les François entrèrent dans les Gaules en combattans & en vainqueurs, jufqu'au moment od fe continue encore la guerre de la liberté fur le continent, guerre dans laquelle ils fe font couverts d'une gloire impériffable, on a dû fe convaincre de la valeur des Français, de leur impétuofité dans l'attaque, de l'influence fur ceux des chefs qui les conduifent, de leur, refpect pour l'honneur, &c.; & mille fois cependant on a eu à reprocher aux premiers chefs ou aux fubalternes, d'avoir commis à ce fujet des fautes graves, qu'on a eu la baffeffe de reprocher injuftement aux foldats. Ecoutez T'hiftorien naif du maréchal de Boucicaut, il va nous offrir une réflexion répétée fans ceffe par toute l'Europe, & qui prouve que le caractère de la nation françoife a éprouvé bien peu de

changemens. « Nulle gens du monde oncques » ne furent trouvés plus hardis ni mieux com» battans, plus conftans, ne plus chevalereux » que les François; & peu trouve ton de ba» tailles où ils aient été vaincus que ce n'ait été par trahison ou par la faute de leurs che» vetains & par ceux qui les devoient conduire ; » & encore ofai-je plus dire d'eux que quant "il advient que ils ne s'emploient en faits de » guerre & que ils font à fejour, que ce n'eft mie leur coulpe ains eft la faute de ceux à qui il appartiendroit de les embefoigner. Si eft domaige que quant il advient que gent tout » chevalereufe n'ont chef felon leur vaillance » & hardieffe; car chofes merveilles fernient. »

כל

« Plus nous approchions du lieu de fureté (dit un autre historien ancien ) & moins mon» troient les nôtres qu'ils euffent vouloir de » combattre. Auffi dit-on que c'eft la nature » d'entre nous François : & l'ont écrit les » Italiens en leurs hiftoires, difant qu'au venir » des François ils font plus qu'hommes; mais qu'à » leur retraite ils font moins que femmes, & » je le crois du premier point; car véritable»ment ce font les plus rudes gens à rencon» trer qui foient en tout le monde; mais à la >> retraite d'une entreprise toutes gens du monde » ont moins de coeur qu'au partir de leurs » maifons. »

L'auteur des mémoires de la Trimouille fait fur le caractère des François la réflexion suivante, » Les armées furent long tems l'une près de » l'autre, (c'eft en Italie & fous François I.) » faifant toujours quelques faillies & courses ou

כל

plufieurs furent occis, encore plus de pri» fonniers qu'on rendoit l'un pour l'autre, felon « la qualité des perfonnes & tout ce contre » la nature des François, lefquels fi ils ne » donnent en colere & fureur perdent leur force', » car ils ne peuvent longuement fupporter les » ennemis de guerre fans maladie ou diminution » de hardieffe. »

I eft reconnu affez généralement que la nation françoise n'eft pas propre à ces fortes de manoeuvres, qui confiftent à fe battre de loin fans aborder l'ennemi; ceux qui la font combattre ainfi dans les actions en rafe campagne ne la connoiffent pas; fi ils font battus ils méritent de l'être.

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Les François étant de toutes les nations celle la plus faite pour les actions vives & impétueuses, c'est avec eux qu'on doit mettre en exécution cette maxime de Céfar; l'audace & la diligence étonnent fouvent plus que les préparatifs de la force.

C'eftle propre de la nation françoise d'attaquer ;

:

la valeur & le feu qui l'animent ne fe font jamais démentis fon premier choc eft terrible; il eft donc important pour le général qui la commande, de favoir faire naître des occafions conformes à fon caractère; rien n'y eft fi propre que les affaires de détail; une difpofition couverte de redoutes eft celle qui convient le mieux à l'impétuofité françoife. On y envoie toujours de nouvelles troupes pour repouffer l'ennemi s'il at aque, ou fi vous attaquez vous-même, vos troupes qui fentent leur retraite affurée, en combattent avec bien plus de valeur.

Le maréchal de Villars forma en 1706, le projet de s'emparer de l'ile du Marquifat, qui eft vis-à-vis du fort Louis, & n'en eft féparée que par un bras du Rhin. Cette entreprife où il fe préfentoit de grandes difficultés, réuflit par la fageffe du général & la valeur étonnante des troupes françoifes. Champagne & Navarre alloient entrer dans des batteaux pour paffer le bras du Rhin qui féparoit de l'ile du Marquifat; Barbery, lieutenant-colonel de Navarre, qui commandoit le premier détachement de grenadiers, ayant apperçu Pécomme, lieutenant-colonel de Champagne, qui fe cachoit pour fe jetter à l'eau, s'y jette lui-même avec tous les grenadiers de Navarre fans connoitre aucun gué; & plufieurs se seroient noyés fans des branches qui fe trouvèrent là fort heureusement. Telle est l'excellence de la nation françoife; on l'anime, on la vivifie prefque plus par des exemples, ou par des paroles flatteufes, que par des récompenfes

utiles.

Les nations qui vivent fous un climat tempéré, font plus propres pour la guerre dans les différens climats.

Une nation vive, active, violente & fougueule, comme la nation françoife, doit dans fes combats toujours chercher à aborder l'ennemi; fans cela vous coupez les bras & les jambes aux foldats.

C'eft à la charge à la bayonnette que nous devons nos victoires, c'eft ainfi que combattoient les anciens généraux. Ceux de nos jours les ont imités & fe font couverts de gloire, ainfi que tous leurs freres d'armes.

Envain a-t-on fouvent voulu dénigrer le foldat françois; la feule caufe de nos maux & de nos fautes, eft dans nos inftitutions & non dans notre caractère. Le foldat françois eft de la meilleure efpèce poffible; il eft plein de courage, de volonté, d'intelligence, naturellement porte à l'obéiffance; quand il s'écarte de ces qualités, c'eft la faute des officiers qui les excitent & les encouragent à mal faire par leurs exemples & par

leurs difcours.

La retraite tant vantée des Grecs n'approche pas de celle des François, depuis Prague jufque fur les bords du Rhin... La bataille de Marignan eft une preuve affez forte,que les François, quand ils font bien conduits, peuvent avoir ce cou rage patient qui eft quelquefois auffi néceffaire que l'ardeur impétueufe qu'on leur accorde. Lifez les détails relatifs aux différentes campagnes de la guerre de la liberté, contre le defpotiíme coalifé. Voyez à Fleurus les François repouffés depuis le matin jufqu'au foir, revenant continuellement à la charge, & remportant une victoire éclatante. Voyez-les pendant trois campagnes confécutives, paffer le Rhin fur d fférens points en préfence d'un ennemi formidable; quelle valeur pour repouffer l'ennemi jufque fur les bords du Danube; quelle patience, quel courage quand il eft obligé de fe retirer fous les ordres de Moraux! Suivez-le dans l'Italie, depuis le moment où il attaque les Autrichiens & les Piémontais à Millefimo, jusqu'à celui où il eft près d'arriver aux portes de Vienne, & vous ne pourrez ni nombrer ni comprendre fes actes de valeur & de patience; fes marches forcées pour arriver fur les points où il devoit combattre; enfin fon infatigable conftance pour feconder le génie du jeune héros qui les conduifit fi conftamment à la victoire & à l'immortalité.

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! FRATERNITÉ D'ARMES. Rien ne devroit être plus naturel & plus commun qu'une étroite amitié entre les enfans ; ayant reçu le jour d'un même père & d'une même mère, élevés enfemble, ayant les mêmes habitudes, tour devroit contribuer à les unir. Rien cependant n'eft plus rare que la véritable amitié fraternelle; des ir térêts communs à difcuter, des préférences quelquefois injuftes à fupporter de la part des parens, trop peu de raifons pour s'excufer mutuellement fes défauts, afin de vivre plus cordialement enfemble; mille caufes femblent concou.ir à éloigner les enfans les uns des autres plutôt qu'à les rapprocher. Il n'en eft pas de même de la fraternite d'armes ; c'eft l'intérêt, c'est le befoin qui la forme, c'eft la refpectable amitié qui en refferre tous les jours davantage les liens facrés. (Voyez le mot amitié dans ce fupplément, &

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