Imágenes de página
PDF
ePub

dique par ordre de matière (1); & l'art militaire, traité avec un trop grand laconime dans la première Encyclopédie, fut destiné à l'être dans celui ci d'une manière plus étendue ; cependant on ne lui accorda que deux volumes in-4°. ; & les citoyens Keralio & (Ceffac) Lacuée, deux militaires diftingués, en fe chargeant en grande partie de cet ouvrage important, n'obtinrent qu'avec bien de la peine (après avoir commencé l'ouvrage), même en facrifiant un grand nombre de détails effentiels, d'y joindre un troifième volume: mais il étoit trop tard; & ne pouvant plus revenir fur leurs pas, ils furent obligés de fe borner à ce qu'exigèrent d'eux les circonftances & l'état des chofes & du gouvernement. Ainfi, dans la crainte d'être contraints à taire toutes les vérités, ces officiers estimables furent fouvent engagés, par la prudence, à ne lever qu'un coin du voile.

L'empreffement des foufcripteurs & le defir de l'éditeur de tenir fes engagemens, les forcèrent à facrifier fouvent la correction à la promptitude.

Ils avoient peu ou point de relations fur l'art militaire avec les nations voifines, & il auroit été trop long & trop difficile d'en établir. Infiniment riches dans leur propre langue, les François négligent trop de connoître & de fe procurer les bons ouvrages des différens favans dont s'honorent les autres nations de l'Europe.

Très-peu de militaires lifent les ouvrages didactiques, bien moins encore écrivent fur leur art, & ceux qui le font cherchent bien moins, à trouver la vérité, qu'à défendre le fyftême qu'ils ont adopté.

La verfatilité de la conftitution militaire françoife ajoutoit encore aux difficultés que les auteurs avoient à furmonter ; quelquefois elle étoit changée avant qu'on eût le temps de la décrire.

Les vrais principes étoient méconnus ou calomniés, les chefs militaires ou empêchoient la connoiffance des écrits utiles fur cet art, ou en décourageoient les auteurs par des dégoûts ou des humiliations.

Le confeil militaire avoit rendu, par fon travail, un fupplément nécessaire.

Enfin la révolution contribua auffi à rendre ce fupplément indispensable : à l'afpect de la liberté, les anciens principes fouvent fi délaftreux devoient s'évanouir, & l'on dut fe hâter de configner les nouveaux dans un ouvrage fait pour tous les temps & tous les peuples.

Telles furent les raifons qui déterminèrent à donner un fupplément à l'art militaire; mais il étoit important pour le citoyen Panckoucke de confier un pareil ouvrage à un officier dent le mérite fût déjà bien connu. Et à qui pouvoit-il mieux s'adreffer qu'au citoyen (Ceffac) Lacuée, membre de plufieurs académies,

(1) C'est le citoyen Agaffe, gendre du citoyen Panckouck, qui continue actuellement cette grande entreprise avec zèle, activité & intelligence.

auteur d'un excellent ouvrage militaire, & d'un très-grand nombre d'articles intéreffans dans les trois premiers volumes de l'art militaire dans l'Encyclopédie méthodique. Cet officier le chargea en effet du fupplément; mais des événemens infiniment trop révolutionnaires vinrent l'arrêter au milieu de fon travail, & fa nomination au premier tiers de la légiflature de l'an 4°. l'em, êcha de le reprendre dans le courant de l'an 5e. (1797, v. ft.), comme il fe l'étoit propofé. Séduit par une amitié & une fraternité d'armes de près de 27 années, le reprefentant Lacuée voulut confier la fuite de fes travaux au citoyen Servan; c'étoit une véritable perte pour le public; mais il falloit terminer cet ouvrage, & la pareffe ou l'infouciance de la grande majorité des officiers pour ce qui intéreffe leur art, rendoit prefqu'impoffible la certitude d'y réuffit. Ce fut donc pour faire connoître & utilifer les travaux du représentant Lacuée, & pour faire fentir davantage la néceffité de compofer un dictionnaire militaire plus vafte & plus complet, que j'ofai me charger de remplir une tâche trop au-deffus de mes forces, celle de terminer ce fupplément. Auffi pourra-t-on dire plus que jamais, quand il le sera, qu'il refte encore à faire un bon dictionnaire militaire. Et en effet, il y aura encore très loin de cet ouvrage à celui que l'on pourroit concevoir fur cet objet.

Un dictionnaire complet fur l'art militaire ne devroit-il pas offrir?

1o. Une notice fuccincte, mais claire, des ouvrages didactiques compofés avant le 16. fiècle, dans laquelle feroient rangés tous les ouvrages de l'antiquité & ceux de toutes les nations dont l'armement & la manière de combattre diffèrent de la nôtre.

2o. Un extrait court, mais fidele, des ouvrages militaires principaux qui ont été compofés depuis l'an 1500 jufqu'en 1730.

3o. Une analyse très-détaillée des ouvrages didactiques françois & étrangers qui ont été compofés depuis plus de 60 années.

4. L'analyse de tous les ouvrages hiftoriques militaires, hiftoire des guerres, mémoires militaires, journaux de fieges, relations de campagnes, &c.

5°. Une notice fur chacun des hommes qui ont donné des ouvrages militaires didactiques ou historiques.

6o. La vie de tous les grands capitaines anciens & modernes, & des hommes à qui nous devons quelques-uns des pas qu'ont faits vers la perfection certaines parties de l'art militaire.

7°. Le récit des batailles célèbres, des fiéges mémorables & des événemens militaires qui offrent des détails instructifs.

8°. Des détails fur les antiquités militaires, & principalement fur les antiquités françoifes.

9o. Un tableau de la conftitution, des mœurs, ufages & manières militaires chez les différens peuples modernes.

10°. Le nom de tous les grades militaires des différentes nations avec une fynonymie de ces mots, en prenant la hiérarchie militaire françoise pour type général.

11o. Une analyse raisonnée de toutes les ordonnances militaires françoises fous les divers regnes, & un tableau comparatif des loix fur le mênie objet.

12o. La manière de parvenir à la folution de tous les problêmes d'arithmérique, de géométrie & de trigonométrie qu'un militaire peut être dans le cas de réfoudre.

13o. Les procédés des différens arts qui ont une relation intime avec l'art de la guerre.

14°. Un traité de la fcience militaire.

15o. Enfin, un vocabulaire raisonné de l'art militaire, en y comprenant tous les objets que nous venons d'indiquer comme relatifs à cette partie.

Mais afin de traiter avec plus de méthode & de clarté tous les différens objets que nous venons d'indiquer, fans fe foumettre à l'ordre alphabétique qui s'oppofe a celui dans les matières, ne devroit-on pas préférer de traiter chacune d'elles en entier d'abord, pour les retrouver enfuite en détail avec le fecours du vocabulaire propofé à l'article 15e.

Ainfi, par exemple, pour ne parler que de la fcience militaire, ne pourroiton pas la confidérer fous deux rapports, la paix & la guerre.

Dans la paix, on examineroit cette fcience dans fes rapports avec la avec l'Etat.

guerre

&

Dans la guerre on verroit quel rapport cette science conserve avec l'Etat, & l'iminenfité des objets qu'elle embraffe pour faire la guerre.

Premier rapport dans la paix avec l'Etat.

De quelque manière que l'on fe batte, de quelque façon que l'on faffe la guerre, il faut des agens pour attaquer ou pour fe défendre; d'où naiffent les recherches. fur le fervice militaire, qui femble embraffer trois époques, la milice réelle, la milice féodale, la milice ftipendiaire.

Milice, définition grammaticale; explication des différentes idées que l'on peut attacher à ce mot; explications & détails fur les trois espèces de milices.

Differtation fur le befoin où l'on eft d'avoir des foldats fur pied pour la fûreté de l'Etat, vu le fyftême reçu en Europe de refter continuellement en armes pendant la paix, & les befoins & la police intérieure; d'où femblent naître les re

cherches fur

La levée des troupes..... Quel fyftême faut-il préférer pour avoir des foldatscitoyens? Quel engagement faut-il faire contracter à un homme pour qu'il foit en même-temps le défenfeur de la patrie, le cultivateur d'une propriété, un artisan ou un artiste laborieux, un homme cher à l'Etat & un citoyen voué avec plaifir à fa profeffion.

Difcuffion fur le mariage des foldats; les enfans qui en proviendroient, quel parti en tirer, ainfi que des enfans trouvés ?

Si l'Etat conferve des foldats, il faut s'occuper de leur fubfiftance.

Discussions sur la nourriture, le vêtement, le logement, la guérison, la paye, les maffes, &c.

Les foldats doivent être employés utilement pour l'Etat.

Recherches fur la manière de les employer le plus avantageufement pour l'Etat & pour eux : à la police intérieure, à la culture des terres, aux manufactures, aux arts, à la confection ou réparation des chemins, canaux, édifices publics, des défrichemens, &c.

Mais tous les individus dans la fociété doivent être foumis à une difcipline quelconque; elle eft la bâfe de la tranquillité publique, l'aiguillon qui excite aux grandes chofes, le frein qui arrête les ames peu timorées, & vis-à-vis d'un affemblage d'hommes qui ont la force en main, la difcipline eft d'autant plus néceffaire qu'elle doit contribuer à la fûreté de tous & au bonheur de chacun des individus qui y concourent.

Que peut, que doit être la difcipline la mieux ordonnée?

Second rapport dans la paix avec la guerre.

L'on voit revenir ici la difcipline & l'emploi.

Il fera aifé de fe convaincre que, fi la difcipline renferme des loix néceffaires pour le foldat comme citoyen, elle doit auffi en renfermer pour le foldat devenu un homme faifant la guerre.

A quelle difcipline doit-on foumettre le foldat pendant qu'il fait la guerre ? Quant à la manière d'employer le foldat pendant la paix pour la guerre, elle tient à la façon de les former, de les inftruire, de les exercer..

La formation doit être relative à chaque arme.

L'exercice doit embraffer ceux de la gymnaftique, ceux primitifs pour la tactique & les marches, ceux pratiques pour toutes les grandes parties de la guerre, marches, campemens, fortifications de campagne, tiéges, paffages de rivières, &c.

[blocks in formation]

Quelle que foit la forme de milice que l'on préfère, foit réelle, foit stipendiaire, il faut veiller au complément de cette milice, & à la faire recruter avec des citoyens en état de combattre ; d'où naiffent les recherches fur la manière d'entretenir au complet, pendant la guerre, les troupes dont l'Etat a befoin pour fa défenfe.

Il ne fuffit pas de completter le nombre d'hommes, il faut auffi completter celui des chevaux dont la confommation à la guerre eft énorme.

Revient encore la fubfiftance, qui embraffe des objets différens pendant la guerre, & une manière différente de les remplir.

Second rapport dans la guerre avec l'art de la

guerre.

Ici les objets deviennent immenfes.

On s'eft occupé, pendant la paix, de la formation & des exercices; refte l'application de la théorie-pratique à la réalité.

Armes, armures, reconnoiffance du terrein, ordre dans les marches, ordre primitif dans les combats, ordre de fcience, de circonftance, les cinq ordres de bataille avec exemples & plans.

Guerre offenfive, défenfive; marches favantes, campemens.

Fortifications anciennes, modernes, de ville, de campagne, de côtes; attaque, défense, &c.

Viendroient enfin des recherches fur la manière de fournir aux bâtimens de la marine militaire, des foldats d'infanterie & d'artillerie, & fur celle d'aflurer la défenfe des colonies.

Une fociété de militaires favans, protégée, encouragée, favorifée par le gouvernement, peut, feule entreprendre & finir un ouvrage auffi immense.

Le gouvernement devroit protéger cette fociété, afin qu'elle puiffe fe procurer tous les matériaux qui lui feroient néceffaires, Il devroit l'encourager, parce que les grands ouvrages militaires font ceux que le public accueille avec le plus de froideur. Il devroit la favorifer, parce que les officiers françois lifent peu & achetent moins encore les ouvrages qui traitent de l'art de la guerre.

Avec de pareils fecours on pourroit former, dans un espace de temps affez court, une bibliothèque militaire infininrent peu volumineufe, peu chère & très-utile.

« AnteriorContinuar »