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En faisant fervir chaque année, un certain nombre des hommes deitinés au fervice actif, on s'affure d'avance de retrouver au befoin tous les Français de cette claffe prêts à combattre les ennemis.

Faire fervir toute la jeuneffe.

C'eft préferver la république de l'efprit de famille, de cet efprit qui habitue les pères à trop de domination, les enfans à trop de dépendance, qui difpofe à travailler pour la maifon au lieu de travailler pour la patrie; c'est les mettre en quelque forte fous la paternité publique, que de faire paffer dès l'âge de feize ans, les jeunes Français fous la difcipline mili

taire.

Le fervice commun entre tous ces jeunes & celui plus actif entre les jeunes citoyens de la feconde claffe, propageroit les principes de l'égalité, & en donneroit toutes les habitudes; ce feroit en quelque forte un complément d'éducation commune, qui à l'entrée de la vie fociale au moment où les opinions fe fixent, où le cœur s'attache, où les manières fe décident, continuant à confondre dans une vie toute femblable, les pauvres & les riches, les noms obfcurs & les noms célèbres, les plaçant für une même ligne, dans ces périls où la vie de tous tient également à fi peu de chofe, les animeroit des mêmes fentimens, leur imprimeroit les mêmes idées, les gouverneroit par les mêmes habitudes, & les confondroit par le même ton, le même langage, & les mêmes

manières.

Ce fyftême établiroit entre la population de toutes les parties de l'état des liaifons d'amitié & de tendre fraternité; peines, plaifirs, périls, fuccès, mettre tout en commun à l'âge où le coeur a le plus befoin de s'engager, & ne l'eft point encore. N'eft-ce pas le moyen infaillible d'unir les jeunes Français, & de rendre l'indivifibilité de la république, chère au cœur de tout citoyen, autant qu'elle l'eft à la raison.

Il importe peut-être à la fociété de faire naître les amitiés avant les amours; il faut avoir goûté l'amitié avant l'amour, pour la goûter encore dans l'amour même.

Enfin, le refpect pour la propriété & la liberté doit devenir un fentiment général, quand tout le monde a porté les aimes pour elles.

Troisième principe.

C'eft une vérité que nul ne peut être affranchi du fervice militaire, parce que le fervice de tous eft néceffaire à la garantie de tous l'argent ne fauroit le payer; là il y va toujours de la vie. L'égalité entre les citoyens ne peut donc s'établir que par un fervice commun ou par un fervice fucceffif.

La jeuneffe eft le tems de la vie où il en coûte le moins de donner une année au fervice militaire de la patrie; il vaut mieux s'habituer à ce devoir quand les fatigues fortifient, que quand elles épuifent, quand on peut fe ployer fans peine à la difcipline, que quand on a goûté l'indépendance; quand on a encore les habitudes de la vie commune, que quand on s'eft concentré dans celles de la vie privée quand on n'a ni femmes ni enfans, que quand il faut fe féparer de tous ces objets fi chers. Il vaut bien mieux d'ailleurs payer fa dette à la patrie en entrant qu'en fortant de la vie.

Quand les jeunes citoyens ferviront ensemble, chacun d'eux fera affuré de trouver dans fes compagnons, une affiftance égale à celle qu'il pourra leur donner.

L'égalité ne demande pas que les citoyens rempliffent tous enfemble les mêmes devoirs, mais que chacun les rempliffe à fon tour.

C'est un très-bon moyen de ployer la jeu fous fa garde, la liberté & la propriété, & d'ufer neffe au fyftême républicain, que de mettre dans cette noble fonction, ce fuperflu de vie qui la tourmente dans l'oifiveté, & la rend quelquefois dangereuse à la tranquillité publique. Si la république occupe les jeunes gens, elle les court le rifque de les avoir contre elle. aura pour elle, fi elle les laiffe défœuvrés, elle

Quand l'apreté de la vie militaire aura donné l'habitude de la frugalité à toute la génération naiffante, que des périls communs auront confondu le riche & le pauvre, le prolétaire & le ci-devant noble, que tous rapporteront dans leurs foyers, même ton, même langage, mêmes formes, une gloire pareille & les mêmes fouvenirs; en un mot, une exiftence toute nouvelle, datant pour tous de la même époque; alors, l'égalité, la fraternité, la frugalité qui paroiffent encore fi loin de nous, rentreront pour jamais dans nos villages & dans nos cités, elles feront parties de nos moeurs, & feront indef

tructibles.

Il faut donc affujettir tous les jeunes Français fans exception au fervice militaire. Chez les Athéniens, c'étoient les jeunes gens de feize à dix-. huit ans qui faifoient la garde du port du Pyrée & la police de l'Attique, fous des chefs fages

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& prudens, & c'eft de ce fervice que fortirent les héros de Platée & de Salamine.

L'expérience nous a prouvé que dans les campagnes, la préfence d'un recruteur féduifoit & entraînoit autrefois la jeuneffe, tandis qu'elle étoit épouvantée à l'afpect du tirage de la milice. Enrólé d'après fon defir, avec plufieurs de fes camarades, le jeune payfan couroit joyeusement paffer fous les drapeaux, tandis que le milicien ne quittoit le fol paternel qu'en l'arrofant de fes larmes. C'eft que le premier regardoit l'état de foldat comme glorieux, & qu'il partoit avec les camarades de fon enfance; l'autre, comme une fervitude, parce qu'il y étoit contraint par le fort, qu'il y avoit une multitude d'exemptions, & qu'il accompagnoit fes compagnons & fes amis. L'homme s'engage volontiers où l'entraine fon goût, il fe refuse à la contrainte. La formation de la garde nationale en fournit une grande preuve; l'amour de la tranquillité publique excita, non-feulement les jeunes gens à prendre les armes, mais encore le plaifir de manier un fufil & de fe donner un air militaire. Voyez dans les villes de guerre, l'enfance qui finge tout ce qui la frappe, faire fon principal amufement des évolutions militaires; le rofeau & l'ofier dans fes mains, font tour-à-tour l'épée ou le fufil, un chiffon de papier, fa cocarde, & l'école ainfi enrôlee, agit fous le commandement du plus hardi, le goût guerrier grandit avec l'enfance, & le fait fouvent foupirer après l'âge qui doit le conduire fous des drapeaux.

Une rotation régulière pour le fervice militaire, de la part de la claffe entière de la milice nationale, feroit donc le meilleur moyen de pourvoir au fervice journalier néceffaire, & d'entretenir les armées en tems de guerre; il feroit en même tenis le moins à charge aux individus, le plus économique & le plus für pour l'Etat; par-là, les travaux & les peines des devoirs militaires pour la fûreté commune, feroient également réparties dans la nation entière, parmi les hommes les plus en état de les fupporter, & pour lefquels ils feroient le moins à charge. Le tems du fervice pour chaque individu, feroit ainfi dire réduit à rien, & la connoiffance des armes, l'habitude de la difeipline circuleroient régulièrement dans toutes les parties les plus vigoureufes d'un peuple nombreux. Outre ces, fentimens, il en refulteroit un tel fentiment pour chaque individu de la fraternité avec les communes de l'empire les plus éloignées, qu'on feroit pour jamais à l'abri de toutes jaloufies particulières.,

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pour

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Après avoir fait connoiffance avec les concitoyens fur les frontières, on feroit bied plus difpofé à courir à leur défenfe.

On fait comment fe défunirent les anciens états de la Gréce, comment il perdirent de vue l'intérêt mutuel de leur défense commune, fans lequel aucun d'eux ne put conferver long-tems fa liberté. Si les citoyens euffent été accoutumés à fervir dans une armée fréquemment re nouvellée, chaque indiv du dans tous les points de la Gréce, ne fe feroit pas confidéré comme de membre d'un petit état; mais rempli du fentiment de fon véritable caractère focial, il fe feroit vu avec plus de fierté, encore membre de la commune des citoyens libres de la Grèce entière. Cette rotation du fervice militaire eût été le lien d'union le plus efficace pour garantir & conferver la communication & la liaifon des parties les plus éloignées de ces états confédérés.

a Dans un gouvernement républicain, le foldat » eft un citoyen dont l'ame, élevee, coura "geufe & défintéreffée, alène fa liberté pen

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dant un tems, pour affurer celle de fes concitoyens, & combattre les ennemis de l'Etat.

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Lorsqu'il a rempli cette tâche honorable & glorieufe, un autre la remplit à fon tour, » & tous les citoyens fervent alternativement » dans les armées, & concourent à conferver » la liberté & la fûreté publique ».... (Lettre des infpecteurs des deux confeils, aux grenadiers du corps législatif, ƒ frimaire an 6.)

S IV.

Comment faut-il former les différens corps deftinés au fervice de la force publique active.

Après avoir fuppofé cent mille hommes dans chaque département deftinés à la force publique, & les avoir divifés pour les trois claffes, vingt mille pour la première, quarante mille pour chacune des deux autres; ce qui donneroit pour chaque canton, quatre cents hommes pour la première, & huit cents pour chacune

autre.

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Suppofant enfuite la république divifée par dix départemens', pour former fix grandes divifions, ayant chacune une armée, on aura toujours quatre cents mille combattans pour la former, la recruter & même l'augmenter, parce que les jeunes gens de la première claffe de vingt-un, & en devenant sitoyen, & de la fel'age de vingt ans, en paffant dans celui de conde claffe, remplaceroient les citoyens de trente ans qui entreroient, dans la troisième claffe en dans le même nombre de combattans de la seatteignant l'âge de trepte-un ans. Ce feroit aufli conde claffe, que l'on prendroit les hommes deftinés à former pour un an les compagnics & bataillons de garnifons. Quant à ceux pour la marine & la garde des côtes, ils feront l'objet d'une difcution particulière.

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SECOND TABLE A U.

Forts, places de guerre, garnisons.

On fuppofe fur les frontières, indépendamment des places & forts néceffaires fur les côtes, ce qui fait un objet à part, cinquante places.

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A quoi il faut ajouter les jeunes citoyens pris fur les lieux ou à la proximité

des places de guerre, montant au moins à

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22950 hommes.

18000

40950 hommes.

OBSERVATIO N.

Tous les hommes compofant l'état-major des forts ou places de guerre, celui des bataillons de garnifons, les capitaines, lieutenans, adjudans, fergens, caporaux & vivandiers des compagnies, feroient choifis parmi les officiers & fous-officiers vétérans.

Les foixante & quinze fufiliers de l'intérieur dans chaque compagnie, feroient des jeunes citoyens de l'âge de vingt un ans tirés des départemens de l'intérieur. Mais comme on a pensé que ce nombre, ne fe montant qu'à dix-huit mille hommes pour les trente bataillons, ne feroit pas fuffifant; on a cru qu'il faudroit y fuppléer par un nombre égal ou même fupérieur, fi cela étoit néceffaire, de citoyens auffi de vingt-un ans, choifis parmi ceux qui fe trouveroient dans les forts ou places de guerre ou dans les communes les plus voifines, fituées fur les frontières.

Les adjoints aux caporaux feroient choifis parmi les jeunes gens.

Les canonniers néceffaires pour le fervice des canons de la place, feroient pris parmi les foldats formant les compagnies, tant ceux de l'intérieur, que ceux des localités & exercées en conféquence.

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